Ta Mok

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Ta Mok
Biographie
Naissance
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Tram Kak ( en ) Voir et modifier les données sur Wikidata
Deces
Nom dans la langue maternelle
?????? Voir et modifier les données sur Wikidata
Nationalite
Allegeance
Activite
Chef militaire Voir et modifier les données sur Wikidata
Periode d'activite
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Autres informations
Parti politique
Conflit
Condamne pour
Prisoner abuse ( en ) , torture Voir et modifier les données sur Wikidata

Ta Mok , pseudonyme de Ung Chœun , dit egalement Chhit Chœun , Eang Eng ou Nguon Kang (ne en 1924 ou 1926 , selon les sources, dans la province de Takeo - decede a l’hopital de Phnom Penh le ), est un homme politique cambodgien , qui fut l’un des plus sanguinaires chefs des khmers rouges et l’un des derniers dirigeants du mouvement dirige d’une main de fer par Pol Pot .

Sa personnalite est mal connue et on ne disposa longtemps d’aucune photo de lui. On sait qu’il a perdu une jambe durant la guerre civile , au debut des annees 1980 .

Dans son temoignage Le Portail , Francois Bizot en fait le portrait d’un homme cruel et cupide [ 1 ] .

Biographie [ modifier | modifier le code ]

Issu d’une prospere famille paysanne du district de Tram Kak dans la province de Takeo [ note 1 ] , Ung Choeun, alias Ta Mok, est l’aine d’une famille de huit enfants [ 2 ] . Devenu bonze , il obtient un diplome d’enseignant de premier cycle en Pali a Phnom Penh . Ayant echoue a entrer a l’ecole superieure de Pali, il retourne a la vie laique [ 4 ] .

Dans les annees 1940 , alors que le Cambodge connait alternativement la domination coloniale francaise et japonaise, Ta Mok s’engage dans la guerilla des khmers issarak contre le colonialisme francais et est egalement actif dans la resistance anti-japonaise. En , chef du mouvement Issarak pour les districts de Tram Kak et de Kong Pisey, il est denonce pour les exactions commises a l’occasion de collectes de fonds [ 4 ] .

Cadre du Parti communiste cambodgien [ modifier | modifier le code ]

En 1950 , il rejoint le Parti communiste indochinois (PCI). Il est a cette epoque tres proche des communistes vietnamiens qui assurent la formation de leurs collegues cambodgiens. Quand le PCI se scinde en organisations nationales, il rejoint le Parti revolutionnaire du peuple khmer, ancetre du Parti communiste du Kampuchea [ 5 ] . Militant militaire et politique dans la zone du Sud-Ouest, il est nomme membre du Comite central du Parti des 1963 et devient en 1966 secretaire adjoint pour la zone sud-ouest [ 4 ] .

En 1968 , il devient secretaire du Parti pour la zone du Sud-Ouest, un poste qui lui permettra d’etre elu en tant que membre des comites permanent et militaire du Comite central. Ces fonctions lui conferent l’autorite de facto et de jure sur tous les subordonnes du Parti communiste cambodgien, en particulier ceux de la zone sud-ouest. Ta Mok exerce alors d’importantes fonctions militaires dans le mouvement khmer rouge [ 6 ] .

Cadre militaire et politique de la zone sud-ouest (le Nirdey), secretaire du parti pour la meme region, il orchestre de vastes purges et ordonne des massacres de grande ampleur dans la zone sous sa juridiction des 1973 , avant meme la prise du pouvoir par les khmers rouges. Ses hommes remplacent alors progressivement les cadres elimines pour collusion avec le Viet Nam . Les cadres du Sud-Ouest seraient alors devenus le fer de lance de la revolution [ 7 ] .

Le , lors de la prise de Oudong , ancienne capitale imperiale, par ses miliciens, renforces par ceux de Ke Pauk , la ville est systematiquement rasee et la population, forte de 20 000 habitants, est deportee. Enseignants, fonctionnaires et soldats republicains sont systematiquement assassines [ 7 ] . ≪ La prise de Oudong et ses suites anticipent ce qui se produira a Phnom Penh un an plus tard ≫, ecrit Raoul-Marc Jennar [ 8 ] .

Nomme par Pol Pot chef d’etat-major de l’armee nationale du Kampuchea democratique , nom officiel du regime khmer rouge, son parcours est desormais jalonne de nombreux carnages. Il fait, en 1975 , massacrer par ses troupes originaires du Sud-Ouest plus de 30 000 personnes dans le seul district d’Angkor Chey [ 6 ] et plus de 50 000 autres a Kompong Cham .

Le , Ta Mok devient Premier Vice-president de l’Assemblee des representants du peuple et poursuit son œuvre d’extermination [ 9 ] . Il s’acquitte avec zele des purges sanglantes qui caracteriserent le regime polpotiste durant ses annees au pouvoir. Il s’en prend particulierement aux communautes musulmanes et entreprend la purge des ≪ traitres de la region est ≫ qualifies d’≪ esprits vietnamiens dans des corps khmers ≫ [ 10 ] . Il est alors responsable de la mort de plus de 100 000 personnes et selon ses anciens compagnons, il aurait lui-meme participe directement et activement aux tueries [ 11 ] .

Marie-Alexandrine Martin estime que dans la lutte qui oppose les differents clans khmers rouge, ≪ le clan Pol Pot- Ieng Sary sort vainqueur parce qu’il dispose de Ta Mok et de son armee de jeunes tueurs disciplines (...) ≫ [ 12 ] .

Avec Nuon Chea , le ≪ numero deux ≫ du commandement militaire des khmers rouges et son commissaire politique en chef de 1970 a 1975 , Ta Mok est considere comme l’un des principaux organisateurs des massacres de masse durant la dictature de Pol Pot et ses exactions lui valent d’etre surnomme ≪ le boucher ≫. Selon ses anciens compagnons de massacres, Ta Mok est le seul haut dignitaire du regime a avoir directement participe a des exterminations.

Apres la chute des Khmers rouges [ modifier | modifier le code ]

Apres la chute du Kampuchea democratique et l’invasion-liberation vietnamienne de , Ta Mok prend le maquis avec les autres partisans de Pol Pot et devient le chef militaire supreme khmer rouge. Meme apres les accords de paix de Paris signes en 1991 , il refuse de rendre les armes [ 13 ] .

On estime alors que 3 000 a 6 000 combattants restent fideles a Pol Pot, et sont diriges par Ta Mok. Ils tiennent le secteur du Phnom Malai   (en) , ou les forces gouvernementales (pas plus que les forces vietnamiennes de 1979 a 1989), n’ont pas reussi a penetrer. Ta Mok, Nikorn et Son Sen se seraient replies a Samlaut   (en) , au nord de Pailin .

Au debut des annees 1980 , il perd une jambe, suite, suivant les sources, a un accident de tracteur ou l'explosion d'une mine [ 14 ] .

Retranche a Anlong Veng, un petit village de l’extreme nord, durant cette periode, il s’enrichit et amasse une petite fortune grace au trafic de bois avec la Thailande voisine [ 15 ] .

En 1995, quand Ta Mok a ordonne de bruler des villages, plus de 1 000 de ses combattants ont deserte. Enrichi dans les affaires en Thailande , ? il a reconnu lui-meme d’avoir mis a l’abri l’equivalent de 17 millions de dollars ? ce seigneur de la guerre, retranche au nord du pays, aurait retenu Pol Pot - affaibli par des problemes de sante - prisonnier dans son fief d’Anlong Veng.

En 1997 , les defections se multiplient dans les rangs khmers rouges. Pensant que Son Sen negociait sa reddition aux autorites de Phnom Penh, Pol Pot ordonne sa mise a mort ainsi que celle des 13 membres de sa famille, femmes et enfants compris [ 16 ] . Ayant peu avant tente de negocier une alliance avec Norodom Ranariddh [ 13 ] , Ta Mok craint d’etre la prochaine victime et decide de brusquer le cours des choses. Il fait arreter l’ex- ≪ frere numero un ≫ qui sera juge par un ≪ tribunal populaire ≫ et condamne a la prison a vie [ 17 ] .

Jusqu’en , en maitre absolu, il fait regner la terreur sur la population des derniers refuges khmers rouges et affiche sa cruaute et sa xenophobie. Parmi les regles de conduite edictees et peintes sur de grands panneaux de bois, on peut lire : ≪ Quiconque entre en contact avec les gens des zones non liberees sera tue ≫.

Au printemps 1998 , les derniers maquisards khmers rouges, commandes par Ta Mok et Khieu Samphan , sont accules a la frontiere thailandaise depuis la chute de leur bastion d’Anlong Veng (extreme-nord du Cambodge), pris par les forces armees royales khmeres (FARC) le . 1 545 combattants des ultimes unites khmeres rouges encore en action, sous les ordres de Im Heung, Chum Chhit et Chum Keo, desertent et se rallient, avec 762 familles, soit 4 109 personnes, a l’armee gouvernementale. On apprendra par la suite qu’une mutinerie au sein de l’armee khmere rouge a eclate la veille, facilitant la victoire des FARC. Il semble que des interets financiers soient a la base de ces ralliements, Ta Mok confisquant a son profit les ressources provenant du trafic du bois. La guerilla ? dont les combattants sont desormais estimes a moins de 2 000 ? est sur le point de se desintegrer, affaiblie par ces defections massives et des revers militaires.

Les dirigeants historiques des khmers rouges - Ta Mok, Nuon Chea, Khieu Samphan - sont en fuite. Ils sont contraints de se refugier dans la jungle dense des montagnes proches de la frontiere thailandaise, dites aux ≪ deux cents collines ≫. La Thailande declare refuser de leur donner asile. On estime alors qu’il ne reste plus alors qu’entre 250 et 400 combattants fideles a Ta Mok. Le , les derniers resistants khmers rouges deposent les armes apres quatre heures de negociation au temple de Preah Vihear sur les monts Dangrek . L’accord est conclu entre le sous-chef d’etat-major de l’armee gouvernementale, le general Meas Sophea   (en) , et un groupe de huit commandants khmers rouges dirige par Khem Nguon, chef d’etat-major de Ta Mok et incluant un gendre de ce dernier. Cependant ceux-ci refusent de ≪ livrer ≫ Ta Mok, Nuon Chea et Khieu Samphan qui sont toutefois laisses a eux-memes.

L’ancien chef d’etat-major de la guerilla, entoure d’une centaine de derniers fideles aux abois, sera finalement arrete par l’armee royale cambodgienne, le , en territoire thailandais, et transfere par helicoptere dans une prison militaire de Phnom Penh [ 18 ] , proche du fameux centre de detention et de torture de Tuol Sleng , ou 20 000 personnes ont ete assassinees entre 1975 et 1979. Sa capture met un terme definitif a l’histoire sanglante des khmers rouges. Son arrestation est survenue deux jours avant la publication du rapport de l’ ONU preconisant l’etablissement d’un Tribunal penal international pour juger les genocidaires survivants.

Dans l’attente d’un jugement [ modifier | modifier le code ]

Lors de son arrestation, Ta Mok est accuse de violation de la loi de 1984 , interdisant le mouvement khmer rouge. Le , le ≪ frere numero six ≫ , est accuse de genocide , en vertu d’un decret pris en 1979 , a la suite de la chute du regime khmer rouge. Le , le Premier ministre cambodgien Hun Sen annonce qu’il demandera au parlement une prolongation de la periode de detention de l’ancien chef khmer rouge, dans l’attente de l’ouverture d’un proces des auteurs du genocide. Selon l’ AFP , le Premier ministre estime que ≪ Ta Mok ne peut pas etre relache ≫ . Etant incarcere depuis 1999, il aurait du etre libere en en vertu de la legislation cambodgienne qui prevoit un elargissement a l’issue de trois ans d’incarceration sans proces. Pour eviter cette liberation, le , Ta Mok est inculpe de crimes contre l'humanite , inculpation qui prolonge le delai de detention provisoire [ 19 ] .

L’Assemblee generale des Nations unies a adopte le une resolution approuvant une proposition d’accord entre l’ONU et le Cambodge sur la poursuite des principaux responsables des crimes commis entre 1975 et 1979 (A/RES/57/228 B). L’accord prevoit la creation d’une chambre extraordinaire, integree au systeme judiciaire existant, a laquelle prendrait part des juges internationaux. L’Assemblee nationale cambodgienne ratifie ce traite le . Le , la loi d’application a ete promulguee par le Roi [ 20 ] .

Ta Mok aurait du etre le premier dignitaire khmer rouge a comparaitre en personne devant un tribunal. Dans l’attente de son proces, prevu en 2007 , l’ancien chef d’etat-major de la guerilla etait detenu dans une prison militaire de Phnom Penh. Il etait le seul personnage d’importance, avec Kang Kek Ieu ( alias Douch), directeur du camp de torture S-21 , a y etre detenu. Il etait passible de la prison a vie, la peine de mort n’existant plus dans le code penal cambodgien.

Ta Mok meurt le a l’age de 80 ans, sans avoir ete juge. Il aura droit a des funerailles grandioses dans son fief d’Anlong Veng auxquelles assisteront les membres des reseaux clientelistes qu’il avait developpes [ 21 ] .

Annexes [ modifier | modifier le code ]

Liens externes [ modifier | modifier le code ]

Notes et references [ modifier | modifier le code ]

Notes [ modifier | modifier le code ]

  1. La localite varie suivant la source. Alors que Solomon Kane le fait naitre a Prakeab [ 2 ] , Henri Locard affirme que son lieu de naissance serait Trapeang Thom Tbong [ 3 ] .

References [ modifier | modifier le code ]

  1. Francois Bizot , Le Portail , Paris, Editions de la Table ronde , coll.  ≪ Vermillon ≫, , 397  p. ( ISBN   2-7028-6131-8 , presentation en ligne ) [source insuffisante]
  2. a et b Solomon Kane ( trad.  de l'anglais par Francois Gerles, pref.  David Chandler), Dictionnaire des Khmers rouges , IRASEC, , 460  p. ( ISBN   9782916063270 ) , ≪ UNG (Chœun) alias Ta Mok ≫, p.  385 .
  3. Henri Locard, Pourquoi les Khmers rouges , Paris, Editions Vendemiaire, coll.  ≪ Revolutions ≫, , 352  p. ( ISBN   9782363580528 , presentation en ligne ) , ≪ L’Angkar ≫, p.  105 .
  4. a b et c Solomon Kane ( trad.  de l'anglais par Francois Gerles, pref.  David Chandler), Dictionnaire des Khmers rouges , IRASEC, , 460  p. ( ISBN   9782916063270 ) , ≪ UNG (Chœun) alias Ta Mok ≫, p.  386 .
  5. Henri Locard, Pourquoi les Khmers rouges , Paris, Editions Vendemiaire, coll.  ≪ Revolutions ≫, , 352  p. ( ISBN   9782363580528 , presentation en ligne ) , ≪ L’Angkar ≫, p.  105-106 .
  6. a et b ≪  Ta Mok  ≫, Profile , sur TRIAL (consulte le ) .
  7. a et b Solomon Kane ( trad.  de l'anglais par Francois Gerles, pref.  David Chandler), Dictionnaire des Khmers rouges , IRASEC, , 460  p. ( ISBN   9782916063270 ) , ≪ UNG (Chœun) alias Ta Mok ≫, p.  387 .
  8. Raoul-Marc Jennar , Les cles du Cambodge , Maisonneuve et Larose , , 328  p. ( ISBN   978-2-7068-1150-0 ) [source insuffisante] .
  9. (en) ≪  CBIO Record  ≫, Biographic Database , sur Cambodian Genocide Program , Universite Yale (consulte le ) .
  10. Didier Epelbaum, Des hommes vraiment ordinaires : Les bourreaux genocidaires , Paris, Editions Stock , coll.  ≪ Essais - Documents ≫, , 304  p. ( ISBN   978-2-234-07721-8 , presentation en ligne ) , chap.  VI (≪ Des armees pas si propres - Moine et boucher ≫), p.  189-190
  11. (en) John Maloy, ≪  Grandfather Mok : Pol Potism par excellence  ≫, The Cambodia Daily ,‎
  12. Marie-Alexandrine Martin , Le mal cambodgien : histoire d’une societe traditionnelle face a ses leaders politiques, 1946-1987 , vol.  4, Hachette , coll.  ≪ Histoire des gens ≫, , 304  p. ( ISBN   978-2-01-012251-4 ) [source insuffisante] .
  13. a et b Arnaud Dubus, ≪  Phnom Penh arrete Ta Mok, le ≪boucher≫ khmer rouge : Il devrait etre le premier genocidaire cambodgien a etre juge.  ≫, Liberation ,‎ ( lire en ligne , consulte le ) .
  14. Online Encyclopedia of Mass Violence, ≪  Mok  ≫, Biographies , sur Violence de masse et Resistance - Reseau de recherche , Institut d'etudes politiques de Paris , ( ISSN   1961-9898 , consulte le )
  15. Solomon Kane ( trad.  de l'anglais par Francois Gerles, pref.  David Chandler), Dictionnaire des Khmers rouges , IRASEC, , 460  p. ( ISBN   9782916063270 ) , ≪ UNG (Chœun) alias Ta Mok ≫, p.  388 .
  16. Sylvaine Pasquier, ≪  La derniere cavale de Pol Pot. Traque par ses propres troupes, le tyran khmer rouge s’est lance dans une fuite sanglante  ≫, L'Express ,‎ .
  17. Alain Lebas et Patrick Sabatier, ≪  Etrange mise en scene pour Pol Pot. Filme, son proces doit servir les futures alliances politiques des Khmers rouges.  ≫, Liberation ,‎ ( lire en ligne , consulte le ) .
  18. Solomon Kane ( trad.  de l'anglais par Francois Gerles, pref.  David Chandler), Dictionnaire des Khmers rouges , IRASEC, , 460  p. ( ISBN   9782916063270 ) , ≪ UNG (Chœun) alias Ta Mok ≫, p.  389 .
  19. ≪  Ta Mok  ≫, Profile - procedures legales , sur TRIAL (consulte le ) .
  20. ≪  Ta Mok  ≫, Profile - points forts , sur TRIAL (consulte le ) .
  21. Henri Locard, Pourquoi les Khmers rouges , Paris, Editions Vendemiaire, coll.  ≪ Revolutions ≫, , 352  p. ( ISBN   9782363580528 , presentation en ligne ) , ≪ L’Angkar ≫, p.  106 .