La
loi sur la restauration de la fonction publique
(en
allemand
:
Gesetz zur Wiederherstellung des Berufsbeamtentums
, GWB) fut promulguee le
et permit aux dirigeants
nazis
de destituer les fonctionnaires juifs ou consideres comme politiquement hostiles. Elaboree sous la direction du ministre de l'Interieur
Wilhelm Frick
, elle fut, avec la
loi sur la reglementation de l'acces au barreau
, promulguee le meme jour, a la fois la premiere disposition legislative a portee
antisemite
et la premiere etape de la ≪ mise au pas ≫ (
Gleichschaltung
) de la societe allemande. Elle fut abrogee par la
loi
n
o
1 du Conseil de controle allie portant abrogation du droit nazi
du
.
Le chef du
parti nazi
,
Adolf Hitler
, est nomme
chancelier du Reich
par le president
Paul von Hindenburg
, le
. Des l'arrivee au pouvoir les deux seuls ministres nazis du cabinet Hitler,
Wilhelm Frick
, ministre de l'Interieur du Reich, et
Hermann Goring
, ministre sans portefeuille et ministre de l'Interieur de
Prusse
, lancent une vague de revocations dans la fonction publique : sans aucune base legale, plusieurs centaines de fonctionnaires perdent leur poste, certains pour leurs opinions liberales ou sociales-democrates, d'autres parce qu'ils sont juifs
[
1
]
,
[
N 1
]
. Cette ≪ epuration ≫ de la fonction publique est une premiere mise en œuvre du
programme en 25 points
du
, et notamment de son article 6
[
N 2
]
.
Apres les
elections du 5 mars 1933
, la violence
antisemite
se generalise : les membres de la
SA
se dechainent contre les Juifs, allant jusqu'a commettre des assassinats
[
2
]
. Ces actions antisemites culminent avec le
boycott du
1
er
avril 1933
, dans toute l'Allemagne, des commerces et entreprises juives, prone, avec l'accord de Hitler, par
Julius Streicher
et prepare des la mi-mars
[
2
]
. Dans son ensemble, le boycottage est un echec en raison de la passivite de la population allemande et de reactions de mecontentement dans une partie de celle-ci
[
3
]
.
A cote de ces mesures et actes antisemites sans cadre juridique, Hitler souhaite disposer d'une base legale pour fonder sa politique anti-juive. Le
[
N 3
]
, Frick soumet au cabinet un projet de loi sur la restauration de la fonction publique, base sur une proposition qu'il avait deja formulee au
Reichstag
en 1925 ; ce projet est approuve par Hitler le
ou le
[
4
]
. Le projet initial est remanie afin de tenir compte de certaines reticences de Hindenburg, bien que Hitler puisse legiferer sans la caution du president depuis l'approbation de la
loi des pleins pouvoirs
[
5
]
. Dans un courier du
, le president fait savoir au chancelier qu'il trouve intolerable que des fonctionnaires invalides de guerre soient contraints a la demission et estime que ceux qui se sont montres dignes de combattre et de donner leur sang pour l'Allemagne demeurent dignes de la servir
[
6
]
. Pour les fonctionnaires d'origine ≪ non aryenne ≫, la revocation est remplacee par une mise en disponibilite avec droit a une pension, et certaines exemptions sont accordees, notamment pour les anciens combattants
[
7
]
(
Frontkampferprivileg
, privilege du combattant de premiere ligne).
La loi est publiee dans l'edition du
Reichsgesetzblatt
du
. Composee de dix-huit paragraphes
[
8
]
, elle ne comporte pas le terme ≪ Juif ≫, qui n'apparait que dans le premier decret d'application du
[
N 4
]
. Cette absence n'enleve rien a la portee
antisemite
du texte qui constitue
≪ une remise en cause massive de l'egalite des droits des juifs en Allemagne depuis 1871 ≫
[
9
]
.
Le preambule de la loi (≪ le gouvernement a decide la presente loi ≫) et la liste des signataires, dans laquelle ne figure pas
Paul von Hindenburg
[
10
]
, demontrent que ce texte a ete promulgue sur la base de la
loi des pleins pouvoirs
qui permet au gouvernement de legiferer sans aucune procedure parlementaire et sans l'aval du president de la republique.
Le
1
er
paragraphe de la loi en precise l'objectif :
≪ [...] dans le souci de restructurer la fonction publique sur des bases nationales et de simplifier son administration, les fonctionnaires peuvent etre revoques en vertu des dispositions suivantes, quand bien meme les conditions necessaires a leur revocation definies par le droit en vigueur ne seraient pas remplies
[
11
]
. ≫
Trois categories sont explicitement visees par la possibilite d'une revocation :
- les fonctionnaires entres en service apres le
et qui ne possedent pas le diplome ou les competences requises ou usuelles (
§
2
, 1°),
- les fonctionnaires qui ne sont pas d'ascendance aryenne
[
N 5
]
, y compris les fonctionnaires honoraires (
§
3
, 1°),
- les fonctionnaires dont les activites politiques passees n'offrent pas
≪ la garantie qu'ils agiront toujours et sans reserve dans l'interet de l'Etat national ≫
(
§
4
)
[
10
]
.
Outre ces trois categories, la loi dispose en son paragraphe 6, que tout fonctionnaire peut etre mis a la retraite pour simplifier l'administration
[
8
]
.
Conformement aux souhaits de
Hindenburg
, le paragraphe 3, souvent denomme le ≪
paragraphe aryen
≫
[
9
]
, comporte en son 2° des possibilites d'exemption.
≪ Le
§
1
ne s'applique pas aux fonctionnaires en fonction au
1
er
aout 1914, a ceux qui ont combattu sur le front au cours de la
Premiere Guerre mondiale
, pour l'Allemagne ou ses allies, ou dont le pere ou un fils ont peri au cours de la guerre mondiale ≫
. Le ministre de l'Interieur du Reich peut en outre accorder d'autres exemptions, en concertation avec les ministres concernes ou les plus hautes autorites des Etats
[
10
]
.
Les paragraphes 7 a 16 organisent les conditions pratiques des revocations et mises a la retraite anticipee, en ce qui concerne les preavis, les salaires et pensions
[
8
]
.
Les dispositions de la loi violent notamment les articles de la
Constitution de Weimar
garantissant l'acces sans discrimination de tout citoyen au service public (Art. 128), la stabilite de l'emploi et l'inviolabilite des droits acquis (
Art. 129
) et la liberte politique des fonctionnaires (
Art. 130
)
[
12
]
.
Le terme ≪ non-aryen ≫ employe dans le texte de la loi est de caractere fort general et genere de nombreuses confusions qui contraignent le gouvernement, quatre jours apres la promulgation de la loi, de prendre un premier decret d'application
[
7
]
.
Le decret du
, signe par les ministres de l'Interieur
Wilhelm Frick
et des Finances
Lutz Schwerin von Krosigk
apporte une serie de precisions au texte de la loi sur la restauration de la fonction publique. En son article
1
er
, il precise que sont consideres comme inaptes et doivent etre demis de leur fonction tous les fonctionnaires affilies au
parti communiste
ou a l'une de ses organisations auxiliaires
[
13
]
.
L'article 2 du decret definit ce que recouvre le terme de ≪ non-aryen ≫ employe dans l'article 3 de la loi :
≪
§
1
Est consideree comme non-aryenne toute personne qui descend de non-aryens, en particulier de parents ou grands-parents juifs. Cette disposition s'applique meme si un seul parent ou un des grands-parents est de descendance non aryenne. Ce principe vaut particulierement si un parent ou un des grands-parents etait de confession juive.
§
2
Tout fonctionnaire qui n'etait pas nomme au
1
er
aout 1914 doit prouver qu'il est d'ascendance aryenne, qu'il a combattu sur le front ou que son pere ou son fils a ete tue au cours de la
Premiere Guerre mondiale
. Cette preuve doit etre donnee en fournissant des documents (certificat de naissance, certificat de mariage des parents, papiers militaires).
§
3
Si l'ascendance aryenne fait doute, un avis doit etre obtenu de la commission d'expertise raciale du ministere de l'Interieur
[
13
]
. ≫
Meme si nombre de commentateurs presentent ce decret comme une loi raciale, le seul critere retenu pour definir les ≪ non-aryens ≫ est la religion d'un des ascendants de l'individu concerne ; un seul des grands-parents de confession juive suffit a categoriser une personne comme ≪ non-aryenne ≫, ce qui permet d'ecarter des fonctions officielles tout individu susceptible de transmettre l'≪ influence juive ≫
[
14
]
. Cette definition maximaliste pose des problemes que les nazis tentent de resoudre en 1935 avec la definition des
Mischling
dans le cadre des
lois de Nuremberg
[
15
]
.
Enfin, le decret precise, en son article 4, les categories considerees comme non fiables politiquement. Toutes les activites ou affiliations politiques des fonctionnaires depuis le
doivent etre prises en compte et declarees aux plus hautes autorites du Reich ou des
Etats
; sont notamment consideres comme des partis politiques n'offrant pas les garanties de loyaute au sens de l'article 4 de la loi, les organisations paramilitaires
socialiste
ou
republicaine
, ainsi que la
Ligue des droits de l'homme
[
13
]
.
Decrets d'application et lois complementaires se succedent au cours des annees 1933, 1934, 1935 et 1938
[
16
]
. Le
, les mesures de la loi sur la restauration de la fonction publique sont etendues au personnel de la
Reichsbank
et de la
Reichsbahn
[
16
]
. Le
la loi est completee par l'insertion d'un
§
2a
qui dispose que :
≪ doivent etre revoques les fonctionnaires membres du
parti communiste
ou d'organisations para-communistes ou liees au Parti communistes, ou ayant eu d'une facon quelconque des activites de type communiste [... et que] seront egalement a revoquer les fonctionnaires qui auront a l'avenir des activites de type marxiste (communistes ou socialiste)
[
12
]
. ≫
Pour l'historien americain
Arno J. Mayer
, dans les milieux conservateurs allemands, nombreux sont ceux qui pensent que les Juifs sont trop nombreux et occupent des situations trop elevees dans la fonction publique et les professions liberales : les tenants de cette analyse souhaitent restreindre l'importance des Juifs dans ces deux domaines, notamment afin d'eviter de
≪ les voir maltraites aveuglement par la canaille hitlerienne ≫
[
7
]
,
[
N 6
]
. Selon le meme auteur,
≪ les conservateurs de l'entourage de
Hitler
portent incontestablement une part de responsabilite dans l'exclusion des Juifs de la fonction publique ≫
[
1
]
.
L'historien allemand
Peter Longerich
estime que la loi provoque un sentiment de soulagement dans les cercles bourgeois :
≪ la perspective d'une reglementation juridique de la question juive semblait preferable a la poursuite des violences ≫
[
17
]
. Il met egalement en evidence la diversite des reactions dans la presse. Le quotidien conservateur
Deutsche Allgemeine Zeitung
estime que la loi represente, par rapport aux agressions des emeutiers du parti,
≪ une plus grande tendance a la legalite et a l'objectivite ≫
et le quotidien regional
Schlesische Zeitung
affirme qu'elle permet de se liberer
≪ d'une culture etrangere toleree avec patience depuis un siecle ≫
; la position du journal catholique
Kolnische Zeitung
est mitigee, mariant des
≪ reflexions de principe contre des reglementations qui reposaient sur la pensee raciale et non sur l'appartenance religieuse ≫
et l'approbation de mesures qui
≪ permettraient d'etablir une relation juste [et] seraient precisement dans l'interet des Juifs, qui ne peuvent que souhaiter que se tarisse la source de l'antisemitisme ≫
; le
Frankfurter Zeitung
, en revanche, s'oppose clairement a la loi sur la restauration de la fonction publique et reproche
≪ a la doctrine raciale de mener a des situations grotesques ≫
[
17
]
. Toujours selon Longerich, la reaction de la population allemande aux premieres lois
antisemites
reste largement meconnue, faute d'informations, mais
≪ il serait [...] errone de voir dans les lois anti-juives une concretisation d'une revendication populaire ≫
[
18
]
.
Selon
Raul Hilberg
, les Juifs allemands savent qu'ils vont vivre des temps difficiles, sans imaginer que leur position pourrait devenir invivable ; ils esperent que la publication des decrets va mettre fin a l'incertitude et aux violences et definir leur statut et pensent que l'on peut
≪ vivre sous n'importe quelle loi ≫
[
19
]
. La revue
sioniste
Judische Rundschau
estime encore, le
, qu'
≪ une alliance historique seculaire [entre la communaute germanique et la communaute juive] n'est pas si simple a rompre ≫
[
19
]
.
La loi s'applique a plus de deux millions de fonctionnaires du Reich, des Etats et des municipalites
[
9
]
, meme si les Juifs sont peu nombreux au sein du service public
[
4
]
. Elle les contraint a prouver leur ascendance aryenne, mettant de ce fait en place un
≪ appareil bureaucratique racial [...] investi d'un travail d'investigations, de recherches tatillonnes - et d'exclusion ≫
[
20
]
. Dans l'immediat, presque la moitie des 5 000 fonctionnaires juifs conservent leur poste
[
21
]
. Ils doivent se demettre deux ans plus tard, en vertu du
premier decret d'application de la loi sur la citoyennete allemande
[
22
]
. Les effets de la loi varient fortement selon les administrations et les regions. Au ministere des finances, les 5 fonctionnaires communistes et les 30 fonctionnaires juifs doivent quitter leurs fonctions ; le ministere prussien de l'Interieur revoque 28 % de ses hauts fonctionnaires, alors que la haute fonction publique bavaroise reussit a limiter les pertes
[
23
]
.
≪ Au total, en acceptant le sacrifice de quelques collegues qui, de toute facon, ne leur etaient guere sympathiques, les hauts fonctionnaires avaient preserve leur position, et meme rationalise leurs services ≫
[
23
]
. Au total, la loi debouche sur la revocation ou la mise a la retraite anticipee de 1 a 2 % des fonctionnaires
[
24
]
.
La loi sur la restauration de la fonction publique et la
loi sur la reglementation de l'acces au barreau
sont suivies de nombreux autres textes visant a exclure les Juifs de la societe allemande : les medecins juifs sont exclus du systeme d'assurance maladie par un decret du
, puis les dentistes et aides dentaires, le
[
25
]
; a l'instigation de
Joseph Goebbels
et via la creation de la
Chambre de la culture du Reich
, le
, les artistes juifs sont exclus du monde culturel et ne peuvent plus se produire que dans des manifestations destinees a des publics juifs
[
26
]
; le
, ordre est donne a la presse de congedier les redacteurs en chef non-aryens
[
26
]
.
L'ostracisme a l'egard des Juifs touche egalement l'enseignement superieur et les milieux universitaires, tant en ce qui concerne les etudiants juifs, frappes par des quotas restrictifs, que dans le corps professoral. A Hambourg jusqu'en 1935, 555 enseignants sur 637 sont revoques sur la base de l'article 6 de la loi ; 468 de ces postes sont confies a de nouveaux titulaires, de sorte que la pretendue mesure d'economie est plutot un pretexte pour engager des enseignants favorables au nazisme
[
27
]
. 15 % des enseignants des universites (32 % a Berlin) et des grandes ecoles sont revoques, en grande majorite parce qu'ils sont consideres comme Juifs
[
28
]
. Dans la sphere litteraire, les ouvrages ecrits par des auteurs juifs, pacifistes ou marxistes sont interdits : ils sont brules par milliers dans les villes universitaires le
[
29
]
.
L'ensemble de ces mesures discriminatoires provoque une vague d'emigration
[
28
]
. Pour la seule annee 1933, sur une population de 525 000 personnes enregistrees comme Allemands de confession juive, 37 000 emigrent, dont 25 000 au cours des six premiers mois de l'annee
[
30
]
.
Inspiree par la loi sur la restauration de la fonction publique et par les
lois de Nuremberg
, la Roumanie, sous l'influence de
Codreanu
, prend en 1938, diverses mesures antisemites, visant essentiellement l'exercice des professions liberales ; en Hongrie, le regime de l'amiral
Horthy
edicte egalement des legislations visant a exclure les Juifs de la vie economique et sociale et de la vie publique
[
31
]
.
En France, le
regime de Vichy
promulgue, le
la
loi portant statut des Juifs
. Sans aucune pression allemande, redigee par le garde des sceaux
Raphael Alibert
et soutenue par le marechal
Petain
, la loi permet d'evincer les Juifs des services publics, des professions liberales et des emplois ayant une influence culturelle
[
32
]
.
La loi sur la restauration de la fonction publique est abrogee via
la loi
n
o
1 du Conseil de controle allie du 20 septembre 1945 portant abrogation du droit nazi
[
33
]
. En
Republique federale allemande
, l'article 123, § 1, de la
loi fondamentale
du
, place sous le titre des dispositions transitoires et finales, dispose que
≪ Le droit en vigueur anterieurement a la premiere reunion du
Bundestag
demeure en vigueur dans la mesure ou il n'est pas contraire a la loi fondamentale ≫
[
34
]
. De par cet article, la loi sur la restauration de la fonction publique, comme la
loi des pleins pouvoirs
, la
Reichstagsbrandverordnung
ou les
lois de Nuremberg
, n'est donc plus en vigueur, notamment en raison de la violation flagrante des articles 1 a 20 de la loi fondamentale, relatifs aux
libertes publiques
. En
Republique democratique allemande
, la Constitution du
abroge, via son article 144
[
35
]
, les dispositions qui lui sont contraires et a une portee semblable a celle de l'article 123, § 1, de la loi fondamentale, qui s'applique a l'
Allemagne reunifiee
depuis le
. Les dernieres condamnations fondeex sur les textes legislatifs inspires ou adoptes par les nazis sont reduites a neant par la
Gesetz zur Aufhebung nationalsozialistischer Unrechtsurteile in der Strafrechtsplege
(≪
Loi d'abrogation des peines nationales-socialistes injustes prevues dans le Code penal
≫) du
, entree en vigueur le
[
36
]
.
Pour l'historien allemand Uwe Dietrich Adam l'intitule meme du texte de la loi sur la restauration de la fonction publique est une
≪ inversion cynique de la realite ≫
: elle constitue le point de depart evident d'une solide strategie qui respecte les formes du droit et qui vise a l'eviction de la minorite juive
[
37
]
.
Saul Friedlander
souligne l'importance du texte dans la politique antisemite nazie :
≪ Jusque-la, les nazis avaient dechaine une propagande anti-juive d'une extreme violence, boycotte ou tue des juifs des lors qu'ils etaient identifies comme tels, mais jamais encore la privation officielle de leurs droits, fondee sur une definition d'exclusion, n'avait ete instauree. Cette definition - independamment des precisions apportees par la suite - constitua le principe fondamental et necessaire a toutes les persecutions futures
[
9
]
. ≫
Pour l'historien britannique
Richard J. Evans
, la loi sur la restauration de la fonction publique est un des decrets les plus fondamentaux du nouveau regime, dont l'intitule flatte l'esprit corporatiste des fonctionnaires conservateurs et recele une critique explicite des tentatives de la
republique de Weimar
de placer des democrates convaincus a des postes importants. Elle permet de legitimer retroactivement les destitutions forcees de fonctionnaires locaux et de structurer ces actions depuis le sommet
[
38
]
.
De maniere plus generale,
Raul Hilberg
insiste sur l'importance de la definition juridique de la notion de Juif, tout en affirmant que le processus de
destruction des Juifs d'Europe
n'a pas correspondu a un plan preetabli :
≪ En comparaison des
sanglantes emeutes de 1938
, la definition du Juif peut faire figure de mesure relativement anodine. En realite, elle etait de beaucoup plus grande portee, car la definition de la victime constituait une condition preliminaire, indispensable a l'action ulterieure
[
39
]
. ≫
- ↑
Pour l'historien francais
Pierre Aycoberry
, Adolf Hitler detestait les bureaucrates, alors que
Wilhelm Frick
et
Hermann Goring
souhaitaient les menager,
La Societe allemande sous le
III
e
Reich
,
p.
125
- ↑
L'article 6 prevoit notamment que
≪ Le droit de decider de la direction et des lois de l'Etat ne peut appartenir qu'a des citoyens. Nous demandons donc que toutes les fonctions officielles, de quelque nature qu'elles soient, aussi bien dans le Reich que dans les Lander et dans les communes, soient exercees uniquement par des citoyens ≫
. L'article 4 du meme programme precise que
≪ Seul peut etre citoyen un frere de race. Seul est frere de race celui qui est de sang allemand, sans consideration de confession. Aucun Juif ne peut donc etre un frere de race ≫
,
R. Hilberg,
La Destruction des Juifs d'Europe
,
p.
66
- ↑
Pour l'historien francais Thierry Feral, Adolf Hitler aurait fait part a
Franz von Papen
de sa volonte d'eliminer les marxistes et les juifs des positions de commande en Allemagne lors d'une entrevue du 4 janvier 1933, soit avant son accession a la chancellerie (
Justice et nazisme
,
p.
45).
- ↑
Soit le meme jour que la deuxieme loi pour la coordination des Lander avec le Reich, autre etape de la
Gleichschaltung
, qui met fin a l'autonome des
Etats
en nommant a leur tete un gouverneur (
Reichsstatthalter
),
cf
I. Kershaw,
Hitler.1889-1936
,
p.
665-666
- ↑
L'exclusion des non-aryens qui sous-entend une notion d'inferiorite, susciste des reactions diplomatiques negatives, notamment au Japon,
cf
R. Hilberg,
La Destruction des Juifs d'Europe
,
p.
121-129
- ↑
Sur le lien entre les violences antisemites plus ou moins spontanees des extremistes nazis et la mise en place de dispositifs juridiques discriminants, voir la notion de ≪ radicalisation cumulative ≫ de
Ian Kershaw
,
Hitler. 1889-1936
,
p.
669
- ↑
a
et
b
A. J. Mayer,
La ≪ solution finale ≫ dans l'histoire
,
p.
161
- ↑
a
et
b
S. Friedlander,
Les annees de persecution
,
p.
34-35
- ↑
S. Friedlander,
Les annees de persecution
,
p.
40-41
- ↑
a
et
b
S. Friedlander,
Les annees de persecution
,
p.
47
- ↑
Richard J. Evans,
L'avenement
,
p.
428-429
- ↑
R. Hilberg,
La Destruction des Juifs d'Europe
,
p.
149
- ↑
a
b
et
c
A. J. Mayer,
La ≪ solution finale ≫ dans l'histoire
,
p.
162
- ↑
a
b
et
c
(de)
Texte des
Reichsgesetzblatt
(texte integral)
- ↑
a
b
c
et
d
S. Friedlander,
Les annees de persecution
,
p.
46
- ↑
a
b
et
c
Stackelberg & Winkle,
The Nazi Germany Sourcebook
,
p.
150-151
- ↑
Th. Feral,
Justice et nazisme
,
p.
45
- ↑
a
et
b
Th. Feral,
Justice et nazisme
,
p.
46
- ↑
a
b
et
c
Stackelberg & Winkle,
The Nazi Germany Sourcebook
,
p.
151-152
- ↑
R. Hilberg,
La Destruction des Juifs d'Europe
,
p.
116-120
- ↑
R. Hilberg,
La Destruction des Juifs d'Europe
,
p.
121-129
- ↑
a
et
b
Historische (anti-)judische Rechtsverordnungen
- ↑
a
et
b
P. Longerich,
Nous ne savions pas
,
p.
82-83
- ↑
P. Longerich,
Nous ne savions pas
,
p.
85
- ↑
a
et
b
Raul Hilberg,
La Destruction des Juifs d'Europe
,
p.
97-98
- ↑
S. Friedlander,
Les annees de persecution
,
p.
52
- ↑
Peter Longerich,
Politik der Vernichtung
,
p.
42?43
- ↑
S. Friedlander,
Les annees de persecution
,
p.
195-196
- ↑
a
et
b
Pierre Aycoberry
,
La Societe allemande sous le
III
e
Reich
, Paris, 1998,
p.
125-126
- ↑
Richard J. Evans,
L'avenement
,
p.
460
- ↑
Raul Hilberg,
La Destruction des Juifs d'Europe
,
p.
154
- ↑
a
et
b
Raul Hilberg,
La Destruction des Juifs d'Europe
,
p.
157-158
- ↑
Hans-Peter de Lorent,
Nazibiographien
, in
Hamburger Lehrerzeitung
, Cahier du 01/02 2007,
p.
48
- ↑
a
et
b
A. J. Mayer,
La ≪ solution finale ≫ dans l'histoire
,
p.
164
- ↑
Richard J. Evans,
Le
III
e
Reich. 1933-1939
,
p.
183
- ↑
Richard J. Evans,
L'avenement
,
p.
521
- ↑
Asher Cohen,
Persecutions et sauvetages
,
p.
49-51
- ↑
Asher Cohen,
Persecutions et sauvetages
,
p.
72
- ↑
Texte integral en allemand
- ↑
(fr)
Texte de la loi fondamentale de 1949
- ↑
(de)
Texte de la Constitution du 7 octobre 1949
- ↑
(de)
Texte de la
NS-Aufhebungsgesetz
sur
Wikisource
- ↑
Uwe Dietrich Adam,
Judenpolitik im Dritten Reich
,
p.
48?49
- ↑
Richard J. Evans,
L'avenement
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p.
459
- ↑
Raul Hilberg,
La Destruction des Juifs d'Europe
,
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101
- (de)
Uwe Dietrich Adam,
Judenpolitik im Dritten Reich.
, Dusseldorf, 2003,
(
ISBN
3-7700-4063-5
)
- Asher
Cohen
(
pref.
Rene Remond),
Persecutions et sauvetages. Juifs et Francais sous l'Occupation et sous Vichy
, Paris, Les editions du cerf,
coll.
≪ Histoire ≫,
, 524
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(
ISBN
978-2-204-04491-2
)
- Richard J.
Evans
(
trad.
de l'anglais),
Le Troisieme Reich. L'avenement
, Paris,
Flammarion
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≪ Au fil de l'histoire ≫,
, 720
p.
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