Torquato Tasso
, connu en francais sous l'appellation
Le Tasse
(en
italien
,
il Tasso
), est un
poete
italien
, ne le
a
Sorrente
(region de
Campanie
,
Italie
), mort le
a
Rome
, passe a la posterite pour son
epopee
,
La Gerusalemme liberata
(autrefois traduite sous le titre
La Jerusalem delivree
, aujourd'hui
Jerusalem liberee
, 1580), poeme epique ou il depeint, a la maniere des romans de chevalerie, les combats qui opposerent les
chretiens
aux
musulmans
a la fin de la
Premiere croisade
, au cours du
siege de Jerusalem
.
Souffrant depuis ses 30 ans de maladie mentale, il meurt alors que le
pape
allait le couronner ≪ roi des poetes ≫. Jusqu'au debut du
XIX
e
siecle, Le Tasse est l'un des poetes les plus lus en Europe :
Jean-Jacques Rousseau
admire Le Tasse, dont il cite un vers dans
Les Reveries du promeneur solitaire
[
1
]
et dans la lettre XXIII de la premiere partie de la Nouvelle Heloise. Chateaubriand lui consacre de longues pages dans ses
Memoires d’outre-tombe
[
2
]
.
Auguste Comte
en fait le representant de la litterature epique moderne dans son calendrier positiviste, et
Simone Weil
voit dans la ≪ Jerusalem delivree ≫ l'une des plus hautes expressions de l'esperance chretienne.
Sa maison natale a
Sorrente
.
Ne a
Sorrente
, Le Tasse est le fils d’un aristocrate de
Bergame
,
Bernardo Tasso
de la maison
de Taxis
[
3
]
, poete lyrique et epique d’un certain renom, longtemps secretaire au service du dernier
prince de Salerne
,
Ferrante Sanseverino
[
4
]
. Sa mere, Porzia de Rossi
[
5
]
, est une aristocrate de
Toscane
etroitement liee aux plus illustres
familles napolitaines
. Lorsque le prince de Salerne, en conflit ouvert avec le gouverneur espagnol de Naples, est
mis au ban
et depouille de ses terres, Bernardo Tasso suit son maitre en exil et devient des lors proscrit, comme rebelle a la couronne de
Charles Quint
. Leur patrimoine est mis sous sequestre et la
proscription
s'etend a son fils Torquato, alors age de neuf ans. A Naples, jusqu'en 1552, Torquato suit les lecons des
Jesuites
qui viennent d’etablir un college en cette ville. La precocite de l’enfant ? il sait le grec et le latin, ecrit deja en prose et en vers ?, ainsi que sa ferveur religieuse, font l’admiration unanime des Jesuites, lesquels contribuent a sa celebrite naissante
[
6
]
.
Il vit tout d'abord en
France
, ou son pere proscrit a suivi son maitre dechu, puis retourne en
Italie
ou son pere le place chez un ami a
Rome
pour qu'il poursuive ses etudes. En 1556, sa mere Porzia meurt a Naples, dans des circonstances suspectes, sans avoir pu obtenir la dot promise par ses freres, ce qui n'arrange pas les finances de Bernardo, deja bien modestes.
Bernardo Tasso est un courtisan qui s'adonne a la poesie : aussi accueille-t-il avec empressement l'invitation de la
cour d'Urbino
en 1557. Son fils Torquato, revenu de Rome pour le suivre, devient le compagnon de recreation et d'etudes du prince-heritier,
Francois-Marie della Rovere
. Le comte d'Urbino est alors le siege d'une societe d'hommes lettres, qui prisent les arts et les belles-lettres. Torquato grandit ainsi dans une atmosphere a la fois raffinee et quelque peu blasee, qui laisse une empreinte profonde sur le caractere de l'adolescent.
A
Venise
, puis a
Padoue
ou son pere l'emmene, il retrouve le meme climat intellectuel. Mais a Padoue, le jeune homme delaisse les etudes de droit que son pere veut lui imposer, pour la
philosophie
et la poesie. L'annee 1562 n'est pas encore terminee qu'il a deja compose un poeme,
Rinaldo
[
5
]
(≪ Renaud ≫), ou il combine la regularite de l’
epopee
de
Virgile
aux seductions de l’
epopee medievale
[
7
]
. ≪ Rinaldo ≫ apporte une telle originalite qu'on proclame son auteur le poete le plus prometteur du moment. Flatte, son pere autorise l'impression du poeme de son fils qui, apres une nouvelle annee d'etudes a
Bologne
, peut entrer au service du cardinal
Luigi d'Este
a
Ferrare
.
Castello degli Estensi, Ferrare.
Entre la cour de France et celle de Ferrare
[
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]
C’est en 1565 que Le Tasse fait son entree a la cour de
Ferrare
, ou plus tard, il fera l’experience de la plus grande gloire, mais aussi de la misere morale la plus profonde. Apres la publication de
Rinaldo
, il developpe, dans ses
Discours sur l’
Art poetique
, ses principes personnels au sujet du poeme epique. C'est l'occasion pour lui de se demarquer de ses contemporains, ce qui lui vaut une reconnaissance accrue comme critique litteraire, alors qu'il n'a que 18 ans.
Il semble que les annees 1565-1570 soient les plus heureuses de sa vie, malgre le chagrin que lui cause la disparition de son pere, en 1569. Il dedie les deux premiers recueils de ses cinq-cents
odes
a deux dames de la cour,
Lucrezia Bendidio
, qu'il a rencontree a
Padoue
, et
Laura Peverara
, dont il s'est epris a
Mantoue
.
Il accompagne le
cardinal d'Este
a
Paris
en 1570
[
5
]
, ou ce dernier doit s'entretenir avec
Charles IX
au sujet des
calvinistes
[
6
]
. Mais la franchise un peu brutale du Tasse, conjuguee a un manque de tact caracteristique, lui font perdre la faveur de son mecene. Il quitte la
France
l’annee suivante, pour entrer au service du duc
Alphonse II de Ferrare
.
Les princesses
Lucrece d'Este
, future duchesse d'Urbin, et
Leonore d'Este
, toutes deux plus agees que lui d'une dizaine d'annees et sœurs du duc de Ferrare, le prennent sous leur protection et l'admettent dans le cercle de leurs intimes : il sera toute sa vie redevable de leur tendresse indefectible.
Les quatre annees suivantes sont marquees par la publication d’
Aminta
[
5
]
en 1573 et l’achevement de
La Jerusalem delivree
[
5
]
en 1574.
Aminta
est une
pastorale
a la trame tres depouillee, mais d’un charme lyrique exquis
[
5
]
. Sa parution coincide avec le moment ou, sous l'impulsion de
Palestrina
, la musique commence a s'imposer comme le premier des arts en
Italie
. Or
Aminta
, avec sa melodie douce et sa melancolie sensuelle, se trouve parfaitement en resonance avec l’esprit du temps : elle marque de son influence l’
opera
et la
cantate
pour les deux siecles suivants.
La Jerusalem delivree
occupe une place a part dans l’histoire de la
litterature europeenne
. Pourtant, les merites de cette
epopee
? qui revelent au monde la riche personnalite du Tasse et l'elevent au rang d'auteur classique, admire tout autant du peuple que des elites ? ne sont pas sans rapport avec la grace lyrique d’
Aminta
.
A cette epoque, en
Italie
, la poesie epique est tres prisee, et
La Jerusalem delivree
arrive apres l’
Italia liberata
de
Trissino
(1547), l’
Orlando furioso
de
L'Arioste
(1532) ou l’
Orlando inamorato
de
Boiardo
(1483).
Le heros en est
Godefroy de Bouillon
, le chef de la
premiere croisade
, et l'apogee en est la reconquete de la
Ville Sainte
.
Alors que Le Tasse, qui n’a que 31 ans, vient d'achever son manuscrit, la periode faste de son existence atteint son terme : son chef-d’œuvre est accompli.
Il se trouve immediatement en proie aux soucis. Plutot que de suivre son instinct et de publier
La Jerusalem delivree
telle qu'il l'a composee, il est pris de scrupules et redoute la critique ? ce qui constitue l'autre facette de sa personnalite.
Le Tasse adresse le manuscrit du poeme a plusieurs erudits ? dont
Scipion de Gonzague
(fils du duc de Mantoue), qu'il avait rencontre a l'
universite de Padoue
? en exprimant le desir de connaitre leur avis. Les hommes de lettres sollicites, tout en manifestant leur admiration pour l'epopee, emettent un certain nombre de reserves.
En consequence, Le Tasse doit non seulement repondre a toutes ces critiques, mais il doit en outre mettre son chef-d'œuvre en conformite avec les principes qu'il a si fierement enonces.
Dans
La Jerusalem delivree
, comme auparavant dans le
Rinaldo
, il cherche a relever le style epique italien en observant une stricte unite d'action et en rehaussant l'expression poetique de la langue
italienne
. Pour cela, il se donne
Virgile
pour modele, adapte les elements de la premiere croisade a son sujet et infuse toute sa ferveur religieuse dans la creation de son heros Godefroy de Bouillon. Toutefois son inclination naturelle le porte a la poesie amoureuse.
En depit du zele et de l’ingeniosite du poete, le theme principal aura, comme dans
Rinaldo
, moins suscite le genie que les scenes d’amour qui le ponctuent. C'est ainsi que Godefroy de Bouillon, melange de piete paienne inspiree d’
Enee
et de
catholicisme tridentin
, n'est pas le veritable heros de la
Jerusalem
. En effet, le farouche et passionne Renaud, le chevalier Roger, l’impulsif et melancolique Tancrede, tout comme les chevaleresques
Sarrasins
avec qui ils rivalisent aux armes et en amour, se disputent l’interet du lecteur et le detournent de
il Goffredo
, dans l'edition partielle de 1580 qui regroupe les quatorze premiers chants.
Le Tasse, depasse par ses ecrits de jeunesse, en proie a l'excitation de la vie de cour et a un travail litteraire surhumain, s'effondre alors devant les difficultes : sa sante devient chancelante. Il se plaint de maux de tete, souffre de
fievres malariennes
, et cherche a s'eloigner de
Ferrare
.
Alphonse II d'Este
, portrait de
Girolamo da Carpi
.
Alphonse II d'Este
, le protecteur du Tasse, redoute que le depart de ce dernier ne fasse des
Medicis
les
dedicataires
de
La Jerusalem liberee
. C'est pourquoi il endure les sautes d'humeur du poete, afin de ne lui fournir aucun pretexte pour quitter la cour de
Ferrare
.
Mais au cours de ces annees 1575-77, la sante du Tasse continue de se deteriorer, et la jalousie pousse les autres courtisans a se moquer de lui et a intriguer a ses depens. Son caractere orgueilleux, susceptible et irritable, ainsi que sa pusillanimite en font une proie facile pour la malveillance. Tout au long des annees 1570, le Tasse developpe une manie de persecution qui fait de lui l'archetype du poete maudit, solitaire et a demi-fou.
Il est a present convaincu que ses domestiques complotent contre lui, qu'ils le denoncent a l’
Inquisition
, et qu'ils cherchent a l'empoisonner. L'actualite politique et litteraire de la cour ajoute a sa detresse mentale.
A l’
, le Tasse s'en prend a un gentilhomme de Ferrare, Maddalo, qui a evoque son
homosexualite
supposee. La meme annee, il reproche a son ami Luca Scalabrino son amour pour un jeune homme de 21 ans, Orazio Ariosto. Un jour de l'
, il menace d'un poignard un domestique sous les yeux de la duchesse d’Urbino,
Lucrece d'Este
. Il est arrete, mais le duc le libere, et l'emmene avec lui dans sa villa en exigeant de lui qu'il se fasse soigner par un medecin.
L'opinion de certains biographes, a propos de cet episode, selon laquelle le Tasse aurait accepte de feindre la folie pour proteger l'honneur de Lucrece d'Este, est sans fondement
[
8
]
.
La suite de ses peregrinations est a l'image de son inconstance. En juin 1577, il quitte la cour de Ferrare pour rejoindre sa sœur Cornelia a
Sorrente
dans le
royaume de Naples
. S'y ennuyant rapidement, il demande au duc de Ferrare la permission de revenir dans sa cour, un an apres l'avoir quittee. Mais son retour ne lui apportant toujours pas de satisfaction, il la quitte une deuxieme fois pour se rendre dans les Etats du
duc d'Urbino
, mari de Lucrece d'Este. Ses inquietudes et ses terreurs imaginaires le reprennent tres vite et il decide d'implorer la protection du
duc de Savoie
a
Turin
[
6
]
. Il recoit chaque fois un accueil digne de sa reputation, mais sa maladie mentale le rattrape constamment jusqu'a son internement.
Revenu a la cour de
Ferrare
en
, ses exces de violence le reprennent, a tel point que le
duc
, convaincu que le poete est devenu fou, juge que l'hospice Sainte-Anne est l'etablissement le plus sur pour lui
[
5
]
.
≪ Le Tasse a l’Hopital Sainte-Anne de Ferrare ≫ par
Eugene Delacroix
. Le Tasse y fut interne entre 1579 et 1586.
Au bout de quelques mois, Le Tasse s'y voit octroyer des appartements spacieux, pour recevoir ses amis, sortir ou bon lui semble, et correspondre librement. C'est ainsi que
Montaigne
lui rend visite en 1581, visite qu'il relatera dans ses
Essais
: ≪ J’eus plus de despit que de compassion de le veoir a Ferrare en si piteux estat survivant a soy mesme, mescognoissant et soy et ses ouvrages, lesquels sans son sceu et toutefois a sa veue on a mis en lumiere incorrigez et informes
[
9
]
. ≫ Les lettres ecrites de l'hospice Sainte-Anne ? adressees aux princes d'Italie, a des admirateurs enthousiastes et aux plus fameux artistes de son temps ? eclairent non seulement sur sa condition, mais aussi sur son caractere en general.
Le Tasse en prison visite par Montaigne
par
Fleury Richard
, Musee des Beaux-Arts, Lyon.
Il occupe ses loisirs forces par de copieuses compositions : l'essentiel de ses dialogues en prose sur des sujets philosophiques et ethiques sont ecrits au cours de ces annees. A l'exception de quelques
odes
ou
sonnets
de circonstance ? au ton tres rhetorique, mais dont quelques-uns sont inspires par une souffrance mentale poignante ?, il s'eloigne de la poesie.
Depuis des annees, ses ecrits sont mis
sous sequestre
. Or un beau jour de l'annee 1580, il apprend que ses amis
Angelo Ingegneri
et Febo Bonna viennent de publier la premiere partie de sa
Jerusalem delivree
[
5
]
, et l'annee suivante, son integralite. En quelques mois, l'ouvrage connait six reeditions. En outre, son rival a la cour de Ferrare,
Giovanni Battista Guarini
, se charge en 1582 d'editer ses autres poesies. C'est ainsi que Le Tasse, depuis l'asile de Saint-Anne, doit se resoudre a voir ses odes, sonnets, pieces lyriques et compliments officiels, compiles en recueil sans son consentement.
Quelques annees plus tard, en 1585, deux erudits de l’
Accademia della Crusca
font circuler des
pamphlets
contre la
Jerusalem delivree
. Malgre la facture mediocre de ces ecrits, le Tasse se sent oblige d'y repondre, et le fait avec une moderation et une courtoisie qui revelent, non seulement son comportement de gentilhomme, mais aussi la pleine possession de ses moyens. Tout au long de son sejour en asile, il cherche a placer ses deux neveux, fils de sa sœur Cornelia, au service d'une cour princiere : l'un d'eux trouve emploi a la cour de
Guillaume de Mantoue
, l'autre a celle du duc de Parme
Octave Farnese
.
Statue du Tasse a Sorrente.
En juillet 1586, apres sept ans et deux mois, Le Tasse sort de l'asile Sainte-Anne sur ordre de
Vincent I
er
de Mantoue
[
5
]
. Le poete suit son jeune liberateur a la ville de
Bergame
, jouissant d'une liberte retrouvee et des plaisirs de la cour. Il y recoit un accueil splendide et retrouve meme l'energie d’achever une tragedie de son pere,
Torrismond
. Cependant, apres quelques mois, son humeur noire reprend le dessus.
A l'automne
1587
, il part pour
Rome
via
Bologne
et
Notre-Dame de Lorette
, ou il s'installe chez un vieil ami,
Scipione Gonzaga
, devenu
patriarche de Jerusalem
. L'annee suivante, il repart pour
Naples
, ou il compose un mediocre poeme sur le
mont Oliveto
.
En 1589, il revient a Rome, logeant toujours chez le patriarche de Jerusalem. Mais un jour, les domestiques du prelat le trouvent ≪ hors de lui ≫, et refusent de le laisser entrer. Il tombe malade, et une nouvelle fois est conduit dans un hospice. En 1590, le patriarche l'accueille de nouveau chez lui, mais l'esprit sans repos du Tasse le pousse a partir, encore et encore : tout d'abord
Florence
, puis Rome,
Mantoue
, Florence, Rome,
Naples
, Rome, Naples ? telles sont, entre 1590 et 1594, les etapes de son odyssee dictee par la maladie, l'indigence et le malheur. Il a beau voir s'ouvrir pour lui les palais des princes, des cardinaux, des patriarches, voire du pape : nulle part il ne trouve le repos.
En meme temps que sa sante devient chancelante, son talent s'emousse. En 1592, il donne au public sa version revisee de la
Jerusalem
,
Gerusalemme Conquistata
. Tout ce qui faisait le charme primesautier du poeme original est reecrit en mauvais vers, et les passages importants de l’intrigue sont ponctues de developpements rhetoriques ennuyeux. Toutefois, cette ultime version obtient la faveur de certains critiques
[
5
]
. La meme annee, il publie une composition en
vers blancs
italiens
,
Le Sette Giornate
(≪ Les Sept Journees de la Creation ≫), œuvre qui n'est guere lue de nos jours, et qui s'inspire du premier chapitre de la
Genese
.
L'un des traits singuliers de la destinee du Tasse, c'est que, alors que la maladie mentale, la decheance physique et la perte d'inspiration semblaient devoir le condamner a l'oubli, la roue de la fortune parait tourner a son avantage. Le pape
Clement VIII
, monte sur le trone en 1592, veut organiser le triomphe du poete. Avec son neveu, le cardinal
Aldobrandini
de
San Giorgio
, il l'invite en 1594 a Rome pour qu'il y recoive la
couronne de lauriers
sur le
Capitole
, comme
Petrarque
plus de deux cents ans avant lui.
Epuise par la maladie, Le Tasse n'arrive a Rome qu'au mois de novembre 1594. La ceremonie de son couronnement doit etre reportee a cause de circonstances diverses, mais dans l'intervalle, le pape lui accorde une pension.
Le couvent Sant'Onofrio, ou vint mourir Le Tasse.
En mars 1595, alors qu'il est sur le point de recevoir enfin la couronne de
poete laureat
, ses forces le quittent et il est transporte a l'
eglise de Saint Onuphre sur le Janicule
ou il meurt le 25 avril 1595, a 51 ans
[
10
]
.
Avec sa reputation d’elegiaque et de polemiste, Le Tasse, de par son triste destin, connut un regain de ferveur aupres des
Romantiques
.
- L’
ecrivain allemand
Goethe
a compose en 1790 une piece intitulee
Torquato Tasso
qui s'interesse au combat personnel de l'artiste. Il a aussi compose les paroles d'une cantate,
Rinaldo
, inspiree du seizieme chant de la
Jerusalem delivree
, et que
Brahms
mit plus tard en musique.
- Giacomo Leopardi
ecrivit un
Dialogo di Torquato Tasso e del suo Genio familiare
(
Operette morali
, 1824), œuvre en prose consacree au long sejour de Sainte-Anne. Le theme principal est le parallele entre la souffrance et l'ennui, rendu sous forme d'un dialogue entre Le Tasse et un genie ou esprit cense le visiter au cours de son internement.
- Parmi les nombreux operas dans la veine de la
Jerusalem delivree
, on compte, outre l'
Armide
de
Lully
, ceux de
Scarlatti
, de
Vivaldi
, de
Haendel
, de
Haydn
, de
Salieri
, de
Cherubini
, de
Gluck
, de
Rossini
et de
Dvo?ak
. Recemment, Judith Weir en a transpose l'action a l’Irak contemporain.
- Le poeme de
Lord Byron
intitule
Les Lamentations du Tasse
est relatif au sejour du poete a Sainte-Anne.
- La manufacture Dufour & Leroy edite en 1831 un papier peint panoramique intitule
Renaud et Armide ou la Jerusalem delivree
expose au Musee des Arts decoratifs de Paris
- Le compositeur
italien
Gaetano Donizetti
a compose un
opera
intitule
Torquato Tasso
(en)
(1833) et incorpore certains passages de l’œuvre originale dans le
libretto
.
- Franz Liszt
a compose un
poeme symphonique
,
Tasso, Lamento e Trionfo
pour celebrer le centenaire de la piece de Goethe. La premiere partie, au climat sombre, evoque l'anxiete de l'asile, et la seconde partie la reconnaissance et la gloire qui accompagnent son retour a la vie civile.
- Parmi les nombreux artistes inspires a la fois par la
Jerusalem delivree
et
Aminta
, on compte
Le Tintoret
, les
Carracci
,
Guercino
,
Pietro da Cortona
,
Domenichino
,
Cigoli
,
Van Dyck
,
Poussin
,
Claude Lorrain
,
Tiepolo
,
Boucher
,
Fragonard
,
Johann Friedrich Overbeck
,
Hayez
, et
Delacroix
.
- La
rue Le Tasse
, dans le
16
e
arrondissement de Paris
, lui rend hommage.
- Andre Sempoux, universitaire belge specialiste de la litterature italienne a ecrit un roman ou il mele le destin de son narrateur a un recit sensible de la vie du Tasse,
Torquato, l'ami d'un autre temps
(
ed. Luce Wilquin
, Bruxelles, 2002).
- Renaud
, 1562
- Aminta
, 1573, publie par
Jamet Mettayer
traduit par De la Brosse en 1592
- Gerusalemme liberata
(
La Jerusalem delivree
ou
Jerusalem liberee
), 1581, Lire en ligne
en italien
, en francais
Tome 1
et
Tome 2
. Sa version remaniee par l'auteur, la
Gerusalemme conquistata
, ne parut qu'en 1592.
- Rime
(≪ Rimes ≫), est un recueil en neuf livres d'environ 2 000 vers, compose entre 1567 et 1593. On y retrouve l'influence du
Canzoniere
de Petrarque : l'auteur y recherche principalement la musicalite et privilegie la richesse de delicates images et la peinture des sentiments subtils.
- Galealto re di Norvegia
, (1573-4), une tragedie inachevee, fut continuee sous un autre titre :
Le Roi Torrismonde
[
12
]
(
Re Torrismondo
, 1587). Elle est inspiree des tragedies de
Sophocle
et de
Seneque
, et narre l'histoire de la princesse Alvida de
Norvege
, mariee contre son gre au roi des
Goths
Thorismond, alors qu'elle est eprise de
roi de Suede
Germond, son ami d'enfance. En 1647, l'ecrivain
grec
Joannes Andreas Troilos s'inspira du
Roi Torrismonde
pour sa tragedie
Le Roi Rhodolinos
[
13
]
.
- Discours de l’art poetique
(1565-66)
- Les ≪ Dialogues ≫ (
Dialoghi
) ont ete composes entre 1578 et 1594. Ces 28 textes traitent de sujets varies, des plus abstraits (l'amour, la vertu, la noblesse) aux plus profanes (l'art des
masques
, le jeu, l'art de faire sa cour et la beaute). Parfois Le Tasse aborde les grands themes de son epoque : par exemple, le conflit entre religion et
liberte d'opinion
, ou encore la lutte entre la Chretiente et l’Islam a
Lepante
.
- Les
Discours sur le poeme heroique
(
Discorsi del poema eroico
) furent publies en 1594. Ils constituent le principal acces a l’
art poetique
du Tasse. Ils furent probablement rediges au moment des corrections de la
Gerusalemme Liberata
.
- Jerusalem liberee
, trad. et pres. par
Michel Orcel
, Folio classique, Gallimard, 2002
(
ISBN
978-2070409761
et
2070409767
)
- Rimes et plaintes
, trad. et pres. par
Michel Orcel
, Fayard, 2002
(
ISBN
2-213-61240-4
)
- Le Messager
, trad. et pres. de Michel Orcel, ed. Verdier, 2012
- Discours de l'art poetique. Discours du poeme heroique
, trad. et pres. par Francoise Graziani, Aubier, 1997
- Les Fleches d'Armide
, trad. et pres. par
Jacques Audiberti
, ed. par
Jean-Charles Vegliante
, Imprimerie nationale, 1995 (bilingue)
- ↑
Cf. les Notes d'edition par
Samuel Silvestre de Sacy
du Folio 186 publie chez Gallimard, v.
p.
89 et la note 3
p.
259.
- ↑
Francois-Rene de Chateaubriand (edition de Jean-Claude Berchet),
Memoires d’outre-tombe
,
t.
4, Paris, Le Livre de Poche,
,
p.
433-447
- ↑
Jerusalem delivree: poeme par Torquato Tasso
.
- ↑
D'apres
Jo Ann Cavallo,
The Romance Epics Of Boiardo, Ariosto, and Tasso : from Public Duty to Private Pleasure
,
University of Toronto Press
,
coll.
≪ Toronto Italian Studies ≫,
, 300 Pages
(
ISBN
0-8020-8915-1
,
lire en ligne
)
, ≪ XIII - Bernardo Tasso, L'Amadigi (1560) ≫
.
- ↑
a
b
c
d
e
f
g
h
i
et
j
D'apres
Giuseppe Gallavresi,
Catholic Encyclopaedia
, New York, Robert Appleton Co.,
, ≪ Tasso (Torquato) ≫
.
- ↑
a
b
et
c
Jean Baptiste Antoine Suard,
Notice sur la vie et le caractere du Tasse
, Paris, Garnier Freres, en preface d'une traduction en francais de "Jerusalem delivree" par Le Prince Lebrun
- ↑
Appreciation de
Anthony Esolen,
Tasso's Life. Introduction to Torquato Tasso's Jerusalem Delivered
,
Johns Hopkins University Press
,
.
- ↑
La passion du Tasse pour Eleonore d'Este, et le fait que le duc se serait venge de cet adultere en emprisonnant le poete, constitue la trame des
Lamentations du Tasse
de Byron, du
Torquato Tasso
de Goethe, et de l'opera de Donizetti (
cf. infra
) ; elle n'est plus d'aucun credit de nos jours :
(en)
Margaret Drabble,
The Oxford Companion to English Literature
, Oxford/New York,
Oxford University Press
,
, 1172
p.
(
ISBN
0-19-866244-0
)
,
p.
964-965
.
- ↑
Michel de Montaigne
,
Essais
, livre II, chapitre XII.
- ↑
Notice consacree au Tasse par Henri Hauvette dans sa
Litterature italienne,
1921, p.275-298, inseree dans l'edition de
La Jerusalem delivree
de 1932 a lire sur
ebooks-bnr.com
.
- ↑
Dans ses Amoretti (d'apres Margaret Drabble dans
The Oxford Companion to English Literature
, art. Tasso) et surtout
The Faerie Queene
; cf. a ce sujet
M. H. Abrams
,
Norton Anthology of English Literature
,
vol.
1, New York, W.W. Norton & Co.,
,
7
e
ed.
,
p.
623
.
- ↑
Exemplaire numerise en ligne
.
- ↑
Alexandre Embiricos,
La Renaissance cretoise
,
t.
I, Paris, Les Belles Lettres,
coll.
≪ Collection de l'Institut d'Etudes Byzantines et Neohelleniques de l'Universite de Paris ≫,
, 301
p.
,
p.
159-161
.
Sur les autres projets Wikimedia :
- Pierre-Louis
Ginguene
,
Histoire litteraire d'Italie
, Paris, L.G. Michaud,
(
reimpr.
1823,
2
e
ed.), 9 volumes in-8°
.