Georg Trakl
, ne le
a
Salzbourg
,
Autriche-Hongrie
(aujourd'hui en
Autriche
) ? mort le
a
Cracovie
,
Autriche-Hongrie
[
1
]
(aujourd'hui en
Pologne
), est un
poete
austro-hongrois
. Il est l'un des representants majeurs de l'
expressionnisme
et un des grands poetes du
XX
e
siecle
.
En mettant en scene des personnages indetermines comme l'orpheline, le voyageur, le vieillard, le novice ou des figures nommees comme
Kaspar Hauser
, Elis ou Helian, la poesie de Georg Trakl donne tres souvent l'impression d'etre impersonnelle. Il ecrit a son ami
Erhard Buschbeck
:
≪ Je resterai toujours pour finir un pauvre Kaspar Hauser
[
2
]
. ≫
Le poete angoisse et torture s'identifie de maniere constante a son œuvre. Si elle fait partie de l'
expressionnisme
, celle-ci en depasse le simple cadre artistique.
Georg Trakl nait a
Salzbourg
, au numero 2 de la Waagplatz dans une maison que la famille occupe depuis 1883. La famille est aisee, la maison est spacieuse. Le pere de Trakl, Tobias Trakl, est un quincaillier protestant d'origine hongroise
[
3
]
et sa mere Maria Catherina Trakl nee Halik est catholique. La famille compte sept enfants. Il y a tout d'abord Wilhelm ne le
a
Wiener Neustadt
, il est le fils de Tobias et de sa premiere femme Valentine Gotz. Les autres enfants, tous nes a Salzbourg sont issus du second mariage : Gustav ne le
, Maria nee le
, Hermine nee le
, Georg, ne le
, Friedrich ne le
et enfin Margarethe nee le
qui jouera un grand role dans la vie du poete du fait de la relation incestueuse qu'elle entretiendra avec lui. Maria Catherina Trakl ne montre pas ses sentiments a ses enfants qui lui preferent la gouvernante alsacienne Marie Boring avec qui les enfants parlent francais. Friedrich Trakl dira a propos de leur enfance dans la maison familiale :
≪ Nous tenions beaucoup a la gouvernante francaise et a notre pere. Notre mere s'occupait plus de ses collections d'antiquites que de nous. C'etait une femme froide, reservee ; elle subvenait bien a nos besoins mais elle manquait de chaleur. Elle se sentait incomprise, de son epoux, de ses enfants, du monde entier. Elle n'etait tout a fait heureuse que lorsqu'elle restait seule avec ses collections ? elle s'enfermait des jours dans ses pieces. Nous les enfants, nous etions quelque peu malheureux de cela, car plus sa passion durait, plus certaines pieces nous etaient interdites
[
4
]
. ≫
La mort du pere de Trakl le
ne modifie pas le comportement de sa mere et c'est son frere Wilhelm qui s'occupe desormais de ses freres et sœurs et qui reprend les renes du commerce familial jusqu'en 1913. En 1892, Trakl entre dans une ecole catholique mais assiste au cours de religion d'une ecole protestante ou il fait la connaissance d'
Erhard Buschbeck
. Lorsqu'il entre au
Staatsgymnasium
a l'automne 1897, il retrouve son ami Buschbeck ainsi que Karl von Kalmar avec qui il avait partage les cours a l'ecole protestante et se lie d'amitie avec Karl Minnich, Oskar Vonwiller et Franz Schwab, formant ainsi un cercle ou ils parlent litterature. Apres l’echec de ses etudes, Trakl quitte le lycee le
. Entre 1904 et 1906, il fait partie d'un cercle de poetes appele
Apollo
puis
Minerva
<
[
5
]
. C'est la qu'il ecrit le poeme
Der Heilige
[
6
]
. Il s’interesse aux poetes maudits francais, tels que
Baudelaire
(Trakl ecrira plusieurs poemes intitules
Spleen
ainsi qu'un autre portant le titre du poeme de Baudelaire
A une passante
),
Verlaine
et
Rimbaud
et admire la figure emblematique de
Nietzsche
[
7
]
dont la pensee sur le
nihilisme
marquera son œuvre. C’est cependant au theatre qu’il va pour la premiere fois se manifester en faisant jouer au theatre municipal de Salzbourg deux pieces
Totentag
et
Fata Morgana
.
Totentag
est monte le
et
Fata Morgana
quelques mois apres le
. Le public n'adhere pas a ses pieces ou les personnages parlent le langage code que l'on retrouvera par la suite dans ses poemes
[
8
]
. C'est un echec et Trakl detruit ces textes
[
9
]
.
Il se lance dans des etudes de pharmacie le
et passe ses premiers examens en chimie, en physique, chimie et botanique l'annee suivante. Sa jeunesse est fortement marquee par ses attitudes anti-bourgeoises et provocatrices, ainsi que par la drogue, l'alcool, l'
inceste
et la poesie qui resteront les piliers de son existence. On sait qu'il s'adonne a la drogue des 1905 alors qu'il commence un stage dans la
pharmacie
A l'ange blanc
de Carl Hinterhuber
[
10
]
dans la Linzer Gasse a
Salzbourg
. Il ecrit a son ami von Kalmar :
≪ Pour surmonter la fatigue nerveuse a retardement, j'ai helas encore pris la fuite avec du chloroforme. L'effet a ete terrible ≫
[
11
]
. L’amour incestueux de Trakl pour sa sœur va profondement influencer son œuvre. L’image de ≪ La sœur ≫ s’y retrouve de facon obsedante, et c’est cette relation charnelle et amoureuse qui va devenir une source d’angoisse et de culpabilite profonde pour le poete
[
12
]
. Trakl publie son premier poeme en 1908 dans la
Salzburger Volkszeitung
:
Das Morgenlied
[
13
]
. On sait toutefois peu de choses directes sur leur relation, la famille ayant fait disparaitre la correspondance que ces derniers ont echangee
[
14
]
.
Son sejour a
Vienne
de 1908 a 1910 se revele fondamental pour sa vocation poetique. Il fait en effet l’experience de la solitude et du desarroi que peut eprouver un jeune provincial perdu pour la premiere fois dans l’immensite de la capitale. Ce sejour lui donne un profond degout de la societe moderne
[
15
]
. Il parvient neanmoins a nouer quelques relations litteraires comme avec Ludwig Ullmann et avec l’Academie de litterature et de musique. Commence pour lui une periode d’abondante creation, et il compose en
1909
un premier recueil de poemes,
Sammlung 1909
, qui restera inedit de son vivant et ne sera publie qu'en 1939. Lorsque son pere meurt le
, Trakl quitte Vienne et retourne a Salzbourg a la fin du mois de juillet peu apres avoir obtenu le diplome de
magister pharmaciae
le
. Le
, il retourne a
Vienne
pour faire son
service militaire
comme ambulancier. Il revient a Salzbourg et frequente a partir de l'automne
1911
un cercle litteraire intitule
Pan
. Il y rencontre
Karl Hauer
et se lie d'amitie avec lui. Du
au
, Trakl exerce comme preparateur dans la pharmacie
A l'Ange blanc
et comme
pharmacien militaire
[
15
]
. Le poete navigue entre Vienne, Salzbourg et Innsbruck. Il quitte Vienne en
pour
Innsbruck
et ne cessera par la suite de voyager entre ces deux villes.
En
, Trakl retourne a l’armee comme
pharmacien militaire
a l'hopital de garnison
n
o
10
d'
Innsbruck
. Il fait la connaissance de
Ludwig von Ficker
proprietaire de la revue
Der Brenner
. Cette rencontre se revelera decisive pour son avenir
[
16
]
. C'est en effet dans cette revue que Trakl publiera ses poemes regulierement a partir du
en commencant par
Psalm
. De plus, Ludwig von Ficker fera enormement pour Trakl, tant du point de vue materiel que pour la reconnaissance de son œuvre
[
17
]
.
Trakl rencontre egalement
Karl Kraus
, redacteur de la revue
Die Fackel
, qui sera l'un de ses premiers
≪ defenseurs et admirateurs ≫
[
18
]
. Les deux hommes echangeront des poemes : Trakl lui dedie
Psalm
et Kraus lui repond en 1912 par
Georg Trakl zum Dank fur den Psalm
. Georg Trakl quitte l’armee quelque temps apres puis fait un bref sejour dans les bureaux du ministere des Travaux publics. Le
,
Kurt Wolff
, editeur d’avant-garde, accepte de publier dans sa collection
Der jungste Tag
un recueil portant le titre simple de
Gedichte
(Poemes). Il voyage avec Ludwig von Ficker, Karl Kraus,
Adolf Loos
et sa femme Bessie et
Peter Altenberg
a
Venise
, puis il frequente l’atelier de
Kokoschka
, a
Vienne
. En
, il se rend a Berlin au chevet de sa sœur Margarethe, victime d’une fausse couche. Il rencontre alors la poetesse
Else Lasker-Schuler
. Le poete travaille toujours aussi intensement, si bien qu’en
il envoie a Kurt Wolff, qui l’accepte, son recueil
Sebastian im Traum
(
Sebastien en reve
). En
, Trakl est invite au chateau de Hohenburg a
Innsbruck
par le frere de Ludwig von Ficker. Le
,
Ludwig Wittgenstein
autorise von Ficker a donner 20 000 couronnes a Trakl en les prenant de la somme qu'il avait mise a disposition pour soutenir les artistes autrichiens dans le besoin
[
19
]
. Mais Trakl, qui depuis plusieurs mois cherchait vainement un emploi pour assurer son existence materielle, n'aura pas le temps d'en profiter
[
20
]
.
Le cercle des proches de Trakl est restreint. Il se compose de quelques amis d'enfance et de collaborateurs des revues
Der Brenner
et
Die Fackel
. Trakl dedie d'ailleurs plusieurs de ses poemes a ses amis. A Ludwig von Ficker, qu'Otto Basil qualifie de
≪ ami paternel ≫
[
21
]
il dedie
Die junge Magd
qu'il ecrit entre
et
ainsi que
Gesang einer gefangenen Amsel
. A Max von Esterle qui avait realise la fameuse caricature du poete
[
22
]
, il dedie
Winterdammerung
.
Allerseelen
est dedie a
Karl Hauer
,
Winkel am Wald
a Karl Minnich,
Psalm
et
Karl Kraus
a
Karl Kraus
,
Ein Herbstabend
a
Karl Rock
,
Drei Blicke in einen Opal
a Erhard Buschbeck,
Sebastian im Traum
a Adolf Loos,
Kaspar Hauser Lied
a sa femme Bessie Loos,
Untergang
et
Gesang des Abgeschiedenen
a Karl Borromaeus Heinrich puis
Abendland
a
Else Lasker-Schuler
.
Lorsque la
guerre
eclate, Georg Trakl est mobilise dans les services sanitaires. Il quitte Innsbruck pour le front de l'est la nuit du
. Le detachement sanitaire dont il fait partie est stationne en
Galicie
et participe du 6 au
a la bataille de
Grodek
. Trakl a pour mission de prendre en charge, dans une grange et sans assistance medicale, pendant deux jours, les soins d’une centaine de blesses graves
[
23
]
. Il fait quelques jours plus tard, a la suite des horreurs dont il vient d'etre temoin, une tentative de
suicide
au moyen d'une arme a feu
[
24
]
. Il est transfere le
7 octobre
a l’hopital militaire de
Cracovie
. Les 24 et
, Ludwig von Ficker rend une ultime visite au poete dans la cellule de la section psychiatrique. Trakl y exprime toute sa crainte, toute son angoisse. Deja un an auparavant, il avait fait part a von Ficker de sa depression et de sa peur de la folie :
≪ O mon Dieu, quelle sorte de tribunal s'est abattue sur moi. Dites-moi que je dois encore avoir la force de vivre et de faire le vrai. Dites-moi que je ne suis pas fou. Une obscurite de pierre s'est abattue. O mon ami, comme je suis devenu petit et malheureux ≫
[
25
]
. Trakl donne lecture a Ficker de ses derniers poemes,
Klage
(Plainte) et
Grodeck
. Dans une lettre du
, il les lui envoie et fait de sa sœur son unique legataire
[
26
]
. A l’age de 27 ans, dans la nuit du 2 au
Trakl decede d’une overdose de
cocaine
[
24
]
. Les autorites medicales de l’hopital militaire concluent a un suicide mais la chose n'a jamais ete eclaircie
[
27
]
. En effet, Ficker avait peu avant organise une rencontre entre Trakl et Wittgenstein, lequel etait en service sur un bateau qui patrouillait sur la Vistule non loin de Cracovie ; tous deux se rejouissaient de cette rencontre, comme en temoigne une lettre de Trakl du
, amicale et enthousiaste
[
28
]
, rendant l'hypothese du suicide quelque peu douteuse et donnant un certain credit a celle d'une erreur medicale.
≪ Mais qui donc pouvait-il etre ? ≫
[
29
]
se demandera Rilke juste apres la mort de Trakl sans parvenir toutefois a y repondre. Georg Trakl est enterre au Rakoviczer Friedhof de
Cracovie
le
. Son amie Else Lasker-Schuler lui dedie alors un poeme intitule
Georg Trakl
publie en
1917
:
≪ Georg Trakl succomba a la guerre, frappe par sa propre main.
Et ce fut tant de solitude dans le monde. Je l'aimais
[
30
]
. ≫
Karl Kraus
lui rendra hommage a plusieurs reprises dans sa revue
Die Fackel
(≪ Le Flambeau ≫), faisant de lui l'un des plus grands poetes de langue allemande
[
31
]
. Le
, sa depouille est transferee au cimetiere de Muhlau pres d'
Innsbruck
ou son ami Ludwig von Ficker sera enterre quelques annees plus tard.
En
1952
, le
prix Georg-Trakl
est fonde pour recompenser les auteurs et en particulier les poetes salzbourgeois. Il est decerne pour la premiere fois le
a
Maria Zittrauer
puis remis a des ecrivains tels que
Friederike Mayrocker
ou
Ernst Jandl
. Hormis Else Lasker-Schuler, d'autres poetes ont compose sur Georg Trakl comme
Michael Guttenbrunner
(
Georg Trakl
),
Erich Fried
(
Trakl-Haus
,
Salzburg
),
Franti?ek Hrubin
(
Der Leser am Fluß
: ≪ Le lecteur a la riviere ≫),
Hanns Cibulka
(
Georg Trakl
),
Adolf Beiss
(
Georg Trakl zum Gedachtnis
: A la memoire de Georg Trakl)
[
32
]
.
Dans l'œuvre de Trakl predominent l'ambiance et les couleurs de l'automne, les images sombres du soir et de la nuit, du trepas et de la faute. Il definit sa poesie ainsi :
≪ le reflet fidele d'un siecle maudit sans dieu ≫
[
33
]
. Au titre des poemes les plus connus, on peut citer :
Verfall
(≪ Pourriture ≫),
An den Knaben Elis
,
Helian
,
Ein Winterabend
ou encore
Im Winter
. De son vivant, peu de poemes ont ete publies. Ce qu'il laisse a sa mort contient un nombre considerable de poemes non publies, des versions alternatives aux poemes publies, des fragments de
theatre
et des
aphorismes
.
L'œuvre de Trakl peut se decomposer en quatre periodes
[
34
]
. Ses premiers poemes non publies sont caracterises par le symbolisme. Trakl gagne veritablement en notoriete lorsqu'il se met a publier dans la revue de
Ludwig von Ficker
, c'est alors la seconde phase allant de 1909 a 1912. Ses premieres publications comptent cinquante et un poemes dont trente et un sont composes de quatrains rimes, cinq sont des
sonnets
et quatre sont des poemes rimes de longueur inegales. Le poeme
Psalm
(
Psaume
) est celui qui represente une cesure car avec lui commence une production poetique marquee par un rythme libre. D'ailleurs plusieurs grands poemes reprennent certaines caracteristiques du
psaume
comme
De Profundis
ou
Helian
. Les poemes ecrits autour de 1910-1912 sont caracterises par le
Reihungsstil
(≪ le style sequentiel ≫)
expressionniste
que Trakl forge et qu'il qualifie dans une lettre de
a son ami Buschbeck de :
≪ ma maniere imagee qui forge ensemble en quatre vers quatre images en une seule impression ≫
[
35
]
. Le poeme
Musik im Mirabell
date de 1909 donne dans chacune de ses strophes un exemple du
Reihungsstil
qui caracterise l'œuvre trakleenne jusqu'en 1912 :
≪ Un etranger blanc penetre en la demeure.
Un chien bondit par les couloirs vetustes.
La servante souffle une lampe.
L'oreille entend la nuit des accords de sonate
[
36
]
. ≫
Par la suite, la poesie de Trakl est caracterisee dans une troisieme phase (de 1912 au debut de 1914) par une
metrique
changeante
[
37
]
, l'introduction du moi lyrique
[
34
]
. L'uniformite de la forme en strophe disparait egalement. En 1915,
Kurt Wolff
fait paraitre a titre posthume (bien que Trakl ait lui-meme arrange l'ordre des poemes) le cycle
Sebastian im Traum
(Sebastien en reve) qui contient cinquante textes. Alors que les premieres publications contenaient un grand nombre de poemes en rimes,
Sebastian im Traum
en compte tres peu comme
Ein Winterabend
(≪ Un soir d'hiver ≫),
Die Verfluchten
(≪ Les Maudits ≫),
Afra
. Alors que le type de
Psalm
(
Psaume
) s'etait repandu, a partir de 1913 c'est le type du poeme
Elis
qui predomine (tercets non rimes ou melange de distiques et de tercets) comme dans
Untergang
(≪ La Chute ≫),
Die Sonne
(≪ Le Soleil ≫) ou encore
Geistliche Dammerung
(≪ Crepuscule spirituel ≫).
Sebastian im Traum
contient egalement des poemes en prose comme
Verwandlung des Bosen
(≪ Metamorphose du mal ≫) ou
Traum und Umnachtung
(traduit habituellement par : ≪ Reve et Folie ≫
[
38
]
). Dans la derniere phase de son œuvre qui va du debut de 1914 jusqu'a sa mort, Trakl fait place au monumental, la fin du monde et la chute sont tres presents
[
39
]
.
Apres avoir commence a toucher la
peinture
, l'expressionnisme voit ses debuts en litterature vers 1909 a
Berlin
[
40
]
. Trakl en est l'un des premiers representants en Autriche. On retrouve chez lui les themes fondateurs de l'
expressionnisme
comme la desagregation du moi a cause de la societe. L'Allemagne connait en effet un changement radical en entrant dans la modernite industrielle au debut du
XX
e
siecle
[
41
]
. Y sont rattaches des themes comme la grande ville, l'angoisse, la folie, le
suicide
, la
mort
, le declin, la decomposition :
≪ Toutes les routes menent a la putrefaction noire ≫
[
42
]
. L'homme est au centre de ces representations, il n'a qu'un seul avenir : pourrir. La vision
eschatologique
et apocalyptique (avec par exemple la prefiguration de la
guerre
et la mort de
Dieu
qui y est liee), autre theme expressionniste, impregne la poesie de Trakl
[
43
]
. La vie devient alors vide de sens.
Toutefois, certains themes de l'expressionnisme sont absents chez Trakl comme le monde du
travail
ou moins developpes que chez d'autres comme l'experience de la grande
ville
. Seuls quelques poemes comme
An die Verstummten
,
Vorstadt in Fohn
ou
Westliche Dammerung
montrent la ville sous les traits que l'on attend des expressionnistes : une ville sombre et repoussante
[
44
]
.
Westliche Dammerung
represente par exemple la ville sous des traits mythiques, tandis que
Vorstadt in Fohn
la montre tachee de sang.
Salzbourg
quant a elle est representee comme une ville paisible voire figee
[
45
]
. Le theme de l'Homme nouveau qui viendra apres que la societe s'effondrera est inexistant chez Trakl puisqu'il n'y a pas pour lui de possibilite de
resurrection
[
46
]
. Le fait qu'il ne developpe pas ces grands themes montre que Trakl soutient une position particuliere au sein de l'expressionnisme
[
47
]
qui tient en grande partie a ses rapports au monde
[
48
]
et a la mort.
Le monde de Trakl est marque par le
silence
, comme dans
Landschaft
ou le cri de la biche se fige
[
49
]
, marque a la fois par l'obscurite et par les couleurs vives comme l'or ou l'argent creant ainsi un
clair-obscur
[
50
]
que l'on retrouve par exemple dans le poeme
Landschaft
ou le noir tranche avec le rouge. C'est un monde manicheen partage entre le bien et le mal
[
51
]
, entre la vie et la mort, entre le monde des bergers et le monde des forgerons, un monde ou la
violence
est latente
[
52
]
. Ce qui caracterise egalement le monde trakleen, c'est qu'il met en scene des paysages, des couleurs, des animaux, des personnages qui reviennent sans cesse. On a alors affirme que la poesie de Trakl ne formait qu'un seul poeme
[
51
]
et qu'elle etait hermetique du fait de son haut degre de symbolisation rendant difficile tout essai d'interpretation
[
53
]
.
L'utilisation des couleurs differencie Trakl des autres expressionnistes
[
54
]
. La symbolique des
couleurs
sert a Trakl au debut de son œuvre a decrire des choses reelles et evidentes. Tres vite cependant, les
couleurs
(notamment le marron, le rouge et le noir) deviennent des metaphores a part entiere comme on peut le voir grace aux differentes versions du poeme
Landschaft
. Dans la premiere version du poeme, les visages des
chauves-souris
sont decrits comme fous pour devenir noirs dans la version finale. Les couleurs portent chez Trakl une
symbolique
toute particuliere
[
55
]
. Le blanc est par exemple associe a la mort, le bleu a la purete, le noir a la mort, le brun a la nature calme
[
56
]
.
Les paysages chez Trakl sont
≪ des cauchemars ≫
[
57
]
ou alors des paysages d'
automne
comme dans
Ein verklarter Herbst
ou
Helian
. L'automne est la saison du declin, de la mort lente qui mene au pourrissement. Toutefois, ces paysages sont indetermines a de rares exceptions pres comme les poemes ayant pour theme
Salzbourg
. Les paysages de Trakl sont humanises : le poete projette sur eux les sentiments qui le dechirent comme la
melancolie
ou l'
angoisse
.
La thematique de l'absence ou de la disparition de Dieu est un theme de l'
expressionnisme
[
58
]
que l'on retrouve chez differents poetes comme Else Lasker-Schuler qui ecrit dans le poeme
Weltende
(≪ Fin du monde ≫) :
≪ Il est des larmes dans le monde
Comme si le bon dieu etait mort.
Et l'ombre de plomb qui tombe
Pese du poids du tombeau
[
60
]
. ≫
Cette mort de Dieu, c'est la perte de la
croyance
. Walter Falk ecrit :
≪ La relation entre Dieu et l'homme, quand il ne parle pas du passe, Trakl l'a representee presque sans exception comme une relation malheureuse ≫
[
61
]
. Dans le poeme
De Profundis
,
Dieu
ne se revele pas au moi lyrique :
≪ Le silence de Dieu, / Je l'ai bu a la fontaine du bosquet ≫
[
62
]
, comme dans le poeme
Ein Winterabend
ou l'
eucharistie
est refusee au voyageur solitaire. Il faut ajouter ici le motif du
Hieros Gamos
que l'on retrouve dans des poemes tels que
Die Raben
ou
De Profundis
et qui est traite de maniere particuliere. Dans
De Profundis
, la terre reste par exemple sterile puisqu'il ne tombe du ciel qu'une pluie noire, tout comme le sein de l'orpheline
≪ attend l'epoux celeste
[
63
]
≫
. L'œuvre de Trakl est tissee de references bibliques et chretiennes comme : l'Evangile de
Noel
, les
anges
, le
Buisson ardent
, la
couronne d'epines
, les calvaires, les croix
[
64
]
, etc. Pourtant, ces references perdent leur signification originelle. Dans
De Profundis
, les anges sont reduits a un son, les bergers qui viennent voir l'enfant trouvent le corps de la mere en decomposition dans un buisson. Dans
Winternacht
, c'est un ange qui etrangle un loup rouge.
L'absence de Dieu prend chez Trakl un sens particulier car elle est renforcee par le sentiment de la
culpabilite
de l'inceste
[
51
]
qui ne peut pas etre pardonnee. Pour Trakl, l'homme ne peut rien attendre d'un Dieu que Jean-Michel Palmier qualifie
≪ d'etre divin et inaccessible ≫
[
65
]
et c'est precisement son angoisse. De plus le fait qu'il ne puisse rien attendre de Dieu empeche toute possibilite de resurrection
[
46
]
. L'homme est condamne au declin, a la mort et a la putrefaction. Puisqu'il ne peut pas atteindre la redemption, il ne lui reste que les symboles de cette redemption
[
66
]
, c'est-a-dire les figures qu'il a creees : Elis, la Sœur, ou encore l'etranger.
≪ Je ne suis que moitie ne ! ≫
[
67
]
: c'est ainsi que se definit Trakl.
Kaspar Hauser
qui tombe sous les coups de son assassin, est decrit dans le poeme
Kaspar Hauser Lied
comme non-ne :
≪ D'argent sombra la tete du non-ne ≫
[
68
]
. Il est represente sous les traits d'un
Orphee
dont le chant attire les animaux et les buissons. S'esquisse alors ce que l'on retrouve dans de nombreux poemes : l'identification du poete avec les figures qu'il met en scene. Ce sont des figures historiques pour certaines comme le
Christ
ou Kaspar Hauser, fictives comme Elis, Sebastian, Helian ou mythiques comme
Hyacinthe
. Dans leurs destins tragiques, Trakl croit retrouver son propre destin, celui du poete maudit, celui de l'enfant frappe par le sort - dans le cas de Trakl par la culpabilite morale due a l'inceste. Elis et les autres sont des figures idealisees
[
69
]
de l'enfance fauchee. Meme si le destin de chacune de ces figures est unique, Trakl parvient a creer une relation entre elles. Kaspar Hauser se rapproche par exemple de la figure du Christ car il veille (≪ La nuit il resta seul avec son etoile; ≫)
[
70
]
, comme le Christ a veille sur le
Mont des Oliviers
pendant que les apotres se sont endormis
[
71
]
. Il en va de meme pour Elis et Helian dont l'etymologie est a rapprocher de
Helios
, le dieu du soleil symbolisant le passage du jour a la nuit, et de
Heiland
, le Sauveur
[
72
]
. Trakl se represente egalement parfois comme l'etranger, le moine, le voyageur
[
73
]
, c'est-a-dire sous les traits de personnes ecartees de la societe involontairement ou volontairement. Ces figures sont pour Trakl des figures de redemption.
≪ Seul celui qui meprise le bonheur aura la connaissance ≫
[
74
]
. L'exclusion et la douleur sont pour Trakl des moyens d'arriver a la verite. C'est un theme recurrent dans le monde trakleen que l'on retrouve par exemple dans le poeme
Nachtergebung
ou le moi lyrique demande a la nuit symbolisee par une nonne de l'envelopper dans son obscurite. Une premiere version de ce poeme intitulee
Im Schnee
commence ainsi :
≪ Reflechir sur la verite - / Que de douleur ! ≫
[
75
]
. Si le mal-etre engendre par la societe en mouvement entraine une douleur, cette derniere qui confine parfois a la
folie
est plutot l'expression d'une douleur morale que Trakl veut expier : celle de la
culpabilite
due a l'inceste.
L'inceste entre Georg Trakl et sa sœur Margarethe impregne une grande partie de l'œuvre du poete. Otto Basil ecrit dans sa renommee monographie que Margarethe est
≪ actrice principale sur la scene de sa vie et dans son imagination
[
76
]
≫
. Meme s'il n'y a pas de temoignages directs de l'inceste, Trakl devoile toutefois quelques bribes de cette relation comme dans le poeme en prose date de 1914
Traum und Umnachtung
(
Reve et demence
) ou l'on peut lire :
≪ Malheur cette indicible faute que ce cœur nous revele. Mais lorsque, plonge en des songes brulants, il descendait le long du fleuve automnal sous les arbres denudes, lui apparut dans un manteau de crin, demon de flamme, la sœur. Lorsqu'ils se reveillerent, a leur chevet s'eteignaient les etoiles. O la race maudite. Quand en des pieces maculees chaque destin est accompli, la mort entre a pas putrescents dans la demeure [...] O enfants d'une race obscure. Argentees, les fleurs mauvaises du sang luisent sur la tempe de celui-la, la froide lune en ses yeux brises. O les nocturnes, o les maudits
[
77
]
. ≫
La
sœur
devient une figure a part entiere dans le monde trakleen. Elle est evoquee dans plusieurs poemes, comme
An die Schwester
ou
Schwesters Garten
. La sœur est mythifiee
[
78
]
. Elle devient blanche : la relation qu'elle entretient avec son frere lui a fait perdre sa substance comme dans
Fruhling der Seele
ou encore dans le poeme
Sonja
ou Margarethe prend les traits du personnage de
Dostoievski
, une prostituee
[
79
]
. Trakl est conscient de la faute qu'il commet envers sa sœur et envers Dieu et c'est precisement cette faute qui le desespere. Les themes de l'enfance et de l'innocence deviennent recurrents et sont souvent traites au moyen de la
plainte elegiaque
. La nouvelle du mariage de sa sœur avec Arthur Langen en 1912 n'arrange rien, elle est un choc pour lui. Dans le poeme
Traum und Umnachtung
, il ecrit :
≪ [...] et les sœurs s'enfuirent dans des jardins obscurs rejoindre des vieillards osseux
[
80
]
. Arthur Langen a en effet trente-quatre ans de plus que sa femme. Trakl se refugie alors dans le travail et dans la drogue
[
81
]
≫
. Et lorsqu'il apprend que sa sœur a fait une fausse couche en
a
Berlin
, il est bouleverse
[
82
]
car il ne fait aucun doute qu'il est le pere de l'enfant
[
83
]
. Il fait allusion a ce drame notamment dans le poeme
Abendland
dedie a
Else Lasker-Schuler
dont il a fait la connaissance lors de son voyage aupres de sa sœur :
≪ [...]comme si un mort/Sortait d'une caverne bleue
[
84
]
≫
. Trakl ne peut pas devoiler le tabou de l'inceste. Il distille la culpabilite qu'il ressent a travers ses poemes en n'arrivant pourtant jamais a s'en defaire comme dans le poeme
Blutschuld
(litteralement
Inceste
) ou le moi lyrique prie la Vierge pour qu'elle pardonne aux amants incestueux.
≪ Tu te reveilles et ressens l'amertume du monde ; la est ta faute irredimee ; ton poeme, une imparfaite expiation
[
85
]
≫
. La faute qu'il a commise, Trakl ne parvient pas a la reparer a travers sa poesie
[
51
]
.
On peut citer trois auteurs qui ont eu une grande influence sur Trakl : Novalis, Holderlin et Rimbaud. On retrouve de nombreuses references a Holderlin, le ≪ frere ≫, dans l'œuvre de Trakl, par exemple la reference a l'
elegie
Patmos
et a la formule qu'elle contient :
≪
Dem folgt deutscher Gesang
≫
et que l'on retrouve variee dans plusieurs poemes comme
Helian
:
≪
Ehe dem Schweigen des Winters folgt
≫
. Si pour Holderlin il y a l'espoir que
≪ S’ensuit le chant allemand ≫
, laissant ainsi l'espoir d'un renouveau, chez Trakl, seul le silence de l'
hiver
suit, c'est-a-dire la mort. Trakl dedie un poeme a
Novalis
dans lequel il le qualifie d'
≪ etranger saint
[
86
]
≫
.
Novalis
et
Holderlin
representent la figure du poete a laquelle Trakl s'identifie
[
87
]
. L'
intertextualite
joue un role primordial chez Trakl. Elle lui permet au sein de la langue expressionniste de maintenir
≪ la fonction orphique et elegiaque de la poesie
[
88
]
≫
, c'est-a-dire d'assurer le
lyrisme
, c'est-a-dire la primaute de l'
ame
. L'intertextualite lui permet aussi de s'inscrire dans une tradition. Malgre la decomposition du langage, l'intertextualite permet a Trakl de structurer son œuvre.
Si les deux poetes connaissent une vie tres courte ?
Arthur Rimbaud
meurt a l'age de trente-sept ans ? Trakl et Rimbaud sont proches par les similitudes de leurs vies. Le germaniste Herbert Cysarz appellera d'ailleurs Trakl
≪ le Rimbaud autrichien
[
89
]
≫
. Abhorrant la bonne societe de
Charleville
d'ou il cherche a s'enfuir des qu'il le peut, Rimbaud est la figure du rebelle sur le plan moral, politique et sexuel
[
90
]
. Il ecrit a son ami
Georges Izambard
:
≪ Maintenant, je m'encrapule le plus possible. Pourquoi ? Je veux etre poete, et je travaille a me rendre
voyant
[
91
]
. ≫
. Trakl essaie de faire de meme en se droguant et en s'enivrant, et cela n'est pas sans rappeler
Baudelaire
. La relation que Rimbaud entretient avec Verlaine est egalement a rapprocher de celle que Trakl entretient avec sa sœur
[
92
]
: une relation interdite.
La poesie reunit egalement les deux poetes. La technique de collage employee par Rimbaud est reprise par Trakl
[
93
]
. On retrouve chez Trakl des motifs empruntes entre autres a Rimbaud comme la reprise du personnage d'
Ophelie
dans
Landschaft
ou encore la reprise du motif des etoiles tombees dans
De Profundis
ou
Untergang
. Rimbaud comme Mallarme ont cree une nouvelle langue pour chercher l'inconnu, Trakl fait de meme en creant sa langue expressionniste. L'apparente impersonnalite de sa poesie sert a se concentrer sur le style qui devient alors subjectif
[
88
]
. Remy Colombat parle de
≪ besoin imperieux d'expression et d'universalite
[
88
]
≫
.
On note la place accordee a Trakl dans les textes que le philosophe
Martin Heidegger
consacre a la parole poetique, notamment dans
Acheminement vers la parole
, ou figure une etude du poeme
Un soir d'hiver
[
94
]
.
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, Kurt Wolff Verlag, Leipzig, 1913
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, Kurt Wolff Verlag, Leipzig, 1915
- Die Dichtungen. Erste Gesamtausgabe. Anordnung und Uberwachung der Drucklegung durch Karl Rock.
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- Aus goldenem Kelch. Die Jugenddichtungen
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- Œuvres completes
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- Vingt-quatre poemes
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, Paris, La Delirante, 1978
- Et des soleils eternellement recommences nous accomplissent
, anthologie bilingue allemand/francais, traduction : Eric Hupel & Jutta von Ochsenstein-Nick, encres de Alexandre Yterce,
Voix d'encre
, 2017
- Poemes en prose - Metamorphose du mal
, traduction d'
Edmond Dune
, couverture Jean Vodaine, editeur Vodaine, DIRE N° 6, Nouvelle serie, Basse-Yutz, 1968
- Poemes
, traduction de
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, edition bilingue, Paris, Obsidiane, 1986
- Poemes I
, traduction de Jacques Legrand, edition bilingue, Paris, GF-Flammarion, 2001
- Poemes II
, traduction de Jacques Legrand, edition bilingue, Paris, GF-Flammarion, 2001 (premiere edition Aubier, 1993)
- Crepuscule et declin suivi de Sebastien en reve et autres poemes
, traduction de Marc Petit et Jean-Claude Schneider, Paris, 1990
- Reve et folie et autres poemes
, traduction de Henri Stierlin, Paris, 1956
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Marc Petit
, traduction de Marc petit et
Jean-Claude Schneider
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- Les Chants de l'Entenebre
, poemes choisis et traduits de l'allemand et presentes par
Michele Finck
, Arfuyen, 2021
- Claude Balif
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,
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15 (1956), pour soprano & piano, poemes de Georg Trakl (1. Musik im Mirabel ; 2. Der Schlaf ; 3. Zu Abend mein Herz ; 4. Nahe des Todes ; 5. In ein altes Stammbuch ; 6. Sommer]
- Le groupe de
Dark wave
Liechtensteinois
,
Erben der Schopfung
mettra en musique son poeme
An den Knaben Elis
sous le nom d'Elis en 2001
- A la suite du depart d'Olivier Falk d'
Erben der Schopfung
le groupe se separe et se reforme sous le nom d'
Elis
en lien avec le single de 2001 d'Erben der Schopfung tire du poeme
An den Knaben Elis
. Dans leur EP de 2007,
Show me the Way,
le groupe met en musique le poeme In
Einem Verlassenen Zimmer
de Georg Trakl.
- ↑
Voir
Grand-duche de Cracovie
- ↑
(de)
≪
Ich werde endlich doch immer ein armer Kaspar Hauser bleiben.
≫
Traduit dans :
Rovini 1971
,
p.
58.
- ↑
Rovini 1971
,
p.
56.
- ↑
(de)
≪
Wir hingen sehr an der franzosischen Gouvernante und an unserem Vater. Die Mutter kummerte sich mehr um ihre Antiquitatensammlungen als um uns. Sie war eine kuhle, reservierte Frau; sie sorgte wohl fur uns, aber es fehlte die Warme. Sie fuhlte sich unverstanden, von ihrem Mann, von ihren Kindern, von der ganzen Welt. Ganz glucklich war sie nur, wenn sie allein mit ihren Sammlungen blieb - sie schloß sich dann tagelang in ihre Zimmer ein. Wir Kinder waren etwas unglucklich daruber, denn je langer ihre Leidenschaft dauerte, desto mehr Zimmer wurden fur uns tabu.
≫
Cite dans :
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≪
Das Verhaltnis zwischen Gott und Mensch hat Trakl, wenn er nicht von vergangenen Zeiten sprach, fast ausnahmslos als ein ungluckliches dargestellt.
≫
dans
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Dans : Georg Trakl,
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≫
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Silbern sank des Ungebornen Haupt hin.
≫
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≫
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Der Wahrheit nachsinnen - / Viel Schmerz!
≫
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Sie ist Hauptakteurin auf der Buhne seines Lebens und in seiner Phantasie [...]
≫
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Dans : Georg Trakl,
Poemes
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≪
Weh, der unsaglichen Schuld, die jenes kundtut. Aber da er Gluhendes sinnend den herbstlichen Fluß hinabging unter kahlen Baumen hin, erschien in harenem Mantel ihm, ein flammender Damon, de Schwester. Beim Erwachen erlorschen zu ihren Hauptern die Sterne. O des verfluchten Geschlechts. Wenn in befleckten Zimmern jegliches Schicksal vollendet ist, tritt mit modernden Schritten der Tod in das Haus. [...] O die Wollust des Todes. O ihr Kinder eines dunklen Geschlechts. Silbern schimmern die bosen Blumen des Bluts an jenes Schlafe, der kalte Mond in seinen zerbrochenen Augen. O, der Nachtlichen; o, der Verfluchten.
≫
dans : Georg Trakl,
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Dans : Georg Trakl,
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Deutsche Literatur des Expressionismus
≫,
Langs Germanistische Lehrbuch Sammlung
,
vol.
40,
.
- Lionel Richard,
Expressionnistes allemands. Panorama bilingue d'une generation
, Complexe,
(
ISBN
2-87027-869-1
)
.
- Robert
Rovini
,
Georg Trakl
, Paris, Seghers,
coll.
≪ Poetes d'aujourd'hui ≫,
, 191
p.
.
- Robert
Rovini
,
La fonction poetique de l'image dans l'œuvre de Georg Trakl
, Paris,
coll.
≪ ≫,
- (fr)
Gerard Vincent (auteur)
,
Sous le soleil noir du temps - Trackl, Mandesltam, Celan
, Paris, 1991
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