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Eugenie Markon

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Evguenia Iaroslavskaia-Markon
Biographie
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Condamnee pour
Condamnation
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Evguenia Iaroslavskaia-Markon (en russe  : Евгения Исааковна Ярославская-Маркон ), de son nom de jeune fille Evguenia Markon , est une anarchiste autobiographe , nee le a Moscou [ 1 ] et fusillee au bagne des iles Solovki le . Avant de mourir, elle ecrit dans sa cellule son autobiographie (parue en francais sous le titre Revoltee en 2017).

Biographie [ modifier | modifier le code ]

Jeunesse [ modifier | modifier le code ]

Eugenie Markon nait rue Bolchaia Polianka [ 2 ] , dans le centre historique de Moscou sur les rives de la Moskova , dans une famille bourgeoise [ 1 ] ashkenaze . Son pere est un philologue hebraisant epris de scientificite et de culture occidentale que ses origines juives contingentent dans un poste de bibliothecaire a l' universite imperiale de Saint-Petersbourg , situation qu'il obtient peu apres la naissance de sa fille. C'est dans la capitale de l' Empire que celle-ci grandit, entouree de ses oncles et tantes maternels, des intellectuels engages dans la revolution de 1905 .

C'est une lyceenne de quatorze ans deja versee en philosophie et fascinee par une liberte qu'elle envie aux misereux quand eclate la Revolution de Fevrier . Elle entend par hasard les appels des prisonniers de droit commun que leurs gardiens ont abandonnes dans la prison du chateau de Lituanie , et va chercher des soldats dans leur caserne pour les faire liberer. L'evenement est pour elle un choc [ 3 ]

Alexandre Vakhrameiev , Incendie du chateau de Lituanie en 1917

Durant des vacances d’ete passees a Moscou , elle adhere au Parti ouvrier social democrate , auquel s'est rallie le Bund vingt ans plus tot et au sein duquel s'expriment deja les dissensions entre futurs mencheviques et bolcheviques . Elle est chargee de distribuer des tracts .

Adolescence en rupture [ modifier | modifier le code ]

En novembre 1917, quand eclate la revolution d'Octobre , Evguenia Markon denonce dans l'enceinte de son gymnase l'autoritarisme des enseignants et l'oppression des eleves. Cela lui vaut l'exclusion de l'institution [ 4 ] . Elle ne rejoint pas le domicile familial, dont elle ne supporte plus l'atmosphere petit bourgeois [ 5 ] , et s'inscrit au studio d’ art dramatique du Proletkoult [ note 1 ] . Tout en preparant un concours d'entree a l'universite, elle s'astreint a s'habituer, a la maniere d'un Dostoievski , a la pauvrete, restreignant deliberement ses rations alimentaires .

A la rentree 1918, a l'age de seize ans, elle est admise sur concours a la troisieme universite d'Etat de Petrograd , un etablissement forme par les anciens Cours Bestoujev et ouvert aux jeunes filles. Son pere y a ete admis comme professeur d' histoire medievale et de litterature allemande . C'est un moment de reconciliation et d'echanges intellectuels familiaux.

En 1920, elle s'inscrit a la faculte de philosophie de la premiere universite d'Etat de Petrograd , ou elle devient une fervente disciple neokantienne du professeur Alexandre Vviediensky   (ru) . Ayant connu la faim, elle apprecie le confort modeste de sa vie etudiante mais ecrit des poemes anti- bolcheviques . En mars 1921, elle monte aux tribunes etudiantes pour soutenir l' insurrection des marins de Kronstadt et appelle a la revolution permanente .

Militantisme [ modifier | modifier le code ]

Diplomee au printemps 1922, Eugenie Markon envisage d'epouser un speculateur, dont elle admire le courage a prendre des risques et a voler l'argent des possedants [ 6 ] . Voler lui procure une veritable jouissance [ 7 ] . Elle ne veut toutefois pas poursuivre des etudes qui l'eloignent de son projet [ note 2 ] , de partager la condition ouvriere en travaillant en usine [ 8 ] . Elle veut devenir une journaliste au sein de cette classe ouvriere.

Son idee d'engagement, rompant avec la demarche scientifique cherie par son pere et abolissant la distance entre le mot et la chose en une forme de saut d' Empedocle [ note 3 ] , est de partager la vie interlope de ceux dont ses articles veulent temoigner, la petite pegre et les prostituees, en qui elle voit le veritable lumpenproletariat duquel Marx prevoyait de voir surgir la revolution. Elle rejette la mise en place par les commissaires politiques d'une structure d'Etat et denonce la derive policiere .

A l'automne 1922, elle a vingt ans et rencontre a Petrograd le poete futuriste Alexandre Iaroslavski , son aine de six ans, au cours d'une serie de conferences biocosmistes organisees par une association qui preconise la cryogenisation de tout etre vivant pour le faire renaitre dans un monde meilleur. Natif de Vladivostok , celui-ci, apres avoir ete emprisonne un an pendant la guerre civile dans un camp d' Irkoutsk pour activites anarchistes , vient de fonder une revue, Immortalite , que la Tcheka interdit des novembre pour ≪  pornographie  ≫ et ≪ immoralisme ≫. En depit du caractere difficile et extravagant du personnage, constamment a l'ecoute des ondes de l'univers mais doue d'une rare sensibilite au sort d'autrui, elle l'epouse en decembre. En mars 1923, elle tombe sous un train en gare qui lui broie les deux pieds. Elle est amputee et ne marchera plus que sur deux protheses .

Alexandre Iaroslavski [ note 4 ] donne en 1926 des conferences denoncant le regime sovietique a travers toute l' URSS , devenue un ≪ pays capitaliste ordinaire ≫. C'est elle qui les tape a la machine et les redige. Leur ≪ vie d’amour et d’errance ≫ en train, bateau, traineau, passe de Mourmansk a Tachkent et se termine en septembre 1926 dans le Berlin du Docteur Mabuse et de Metropolis [ 9 ] .

Alexandre Iaroslavski est decu par la reception de ses conferences et la recuperation qui en est faite par les exiles reactionnaires. Lui et sa femme trouvent a travailler quelque temps pour une agence de telegraphe . Il publie quelques articles dans un journal berlinois de l'emigration russe, Roul (Le Gouvernail), ou elle est embauchee comme telephoniste .

Fiches par la police de la Republique allemande qui redoute un retour des putschistes de tous bords, ils partent en 1927 pour Paris . Elle a appris le francais a l'ecole, qu'elle maitrise suffisamment tout comme l' allemand , mais ce n'est pas le cas de son mari. La frontiere franchie frauduleusement, ils rencontrent Voline et mangent a la soupe populaire , dorment dans un refuge pour indigents. Eugenie Iaroslavskaia compte pouvoir etudier ainsi la condition des plus demunis, mais son mari decide au bout de deux mois de prendre le risque de rentrer a Leningrad ,

Arrestation et mort [ modifier | modifier le code ]

Alexandre Iaroslavski y est arrete par le Guepeou en mai 1928, condamne le a cinq ans d'internement au SLON (camp a usage special), qui a ete ammenage dans le monastere de Soloviet , sur une ile de la mer Blanche [ 10 ] .

Eugenie Iaroslavskaia-Markon entre alors a Petrograd dans une quasi-clandestinite, vivant a la rue. Elle rejoint sa tante a Moscou et deliberement decide de mettre en œuvre son projet d'etude in vivo des bas-fonds tels que les a decrits Gorki . Protegee par un jeune caid de l' Arbat , elle dort avec les clochards , mange a la soupe populaire . Tout en entreprenant toutes sortes de demarches pour faire liberer son mari, elle survit pendant plus d'un an rue Tverskaia en vendant des journaux ou des fleurs et s'adonne au vol. Exaltee par l' ≪ ethique ≫ de la racaille, elle espere fonder ≪ un comite politique des malfrats ≫ et militer pour la defense des prostituees . Interpellee plusieurs fois pour vols, elle est condamnee en 1930 a l'exil dans les environs de Tcherepovets . Elle s'y fait diseuse de bonne aventure , activite dans laquelle elle rencontre ≪ un succes incroyable ≫ [ 11 ] . C'est la qu'elle est condamnee une seconde fois, pour recidive , a trois ans de relegation en Siberie .

Grande amoureuse [ 12 ] a la temerite passionnelle , elle s'enfuit aussitot jusqu'aux iles Solovki dans le projet de faire evader son mari du SLON (Camp de Solovki) que dirige l'ex-detenu Naftali Frenkel . Elle y est internee a son tour, sans pouvoir communiquer avec son mari. Celui-ci est condamne a mort pour tentative d'evasion. Il est execute le 10 decembre. Elle-meme est condamnee a trois ans de reclusion. Fin janvier, elle repasse devant une commission qui fait office de proces et est condamnee a mort pour ≪ terrorisme ≫ . Dans les mois qui precedent sa propre execution, elle se fait tatouer sur les seins ≪ mort aux tchekistes  ≫ par des camarades de cellules [ 13 ] , et, ≪  femen  ≫ avant l'heure [ 14 ] , meurt fusillee en crachant au visage de son bourreau.

Œuvre [ modifier | modifier le code ]

Mon autobiographie , un manuscrit d'une trentaine de pages date du , a ete decouvert intact en 1996 dans les archives de la police federale d’ Arkhangelsk par Irina Fligue, la directrice du centre de recherches historiques de l'association Memorial, qui œuvre a Saint-Petersbourg a une revision de l'histoire officielle du stalinisme et sera poursuivie en 2007 pour ≪ extremisme ≫ , c'est-a-dire des publications critiques sur la guerre de Tchetchenie [ 15 ] . Ecrit quatre mois et demi avant une execution qui lui a ete signifiee, c'est une ≪ autonecrologie ≫ [ 16 ] au style sans detours, maniant argot et figures , finesse et brutalite, adressee en forme de bravade a ses geoliers et d'insulte a un systeme qu'elle promet a une subversion prochaine par le Lumpenproletariat des voleurs et des criminels. Journal d'un condamne authentique [ 17 ] et confession absolue, antithese de L'Aveu des futurs proces de Prague [ 12 ] , le texte est, au-dela du temoignage d'une psychologie singuliere dans des circonstances extraordinaires et de l'apologie de la delinquance comme une forme de resistance , un document unique, non romance, sur la realite carcerale vecue par les premiers zeks au SLON , le bagne des Solovkis , precurseur du Goulag [ 18 ] .

Notes [ modifier | modifier le code ]

References [ modifier | modifier le code ]

  1. a et b Revoltee, Evguenia Iaroslavskaia-Markon ( lire en ligne )
  2. Autobiographie p. 18 .
  3. Autobioraphie p.28 .
  4. Autobiographie p.26-27 .
  5. Autobiographie p.20 .
  6. Autobiographie p.41 .
  7. Autobiographie p.91 .
  8. Autobiographie p.21 .
  9. Autobiographie p.45-47 .
  10. (ru) ≪  Sur la colline Sekirna a Solovski (На Секирной горе)  ≫, sur women-in-prison.ru (consulte le ) .
  11. Autobiogrpie p.102 .
  12. a et b O. Rolin , ≪ Avant-propos ≫, in E. Iaroslavskaia-Markon, Revoltee , Seuil , Paris , fevrier 2017 ( ISBN   9782021242829 ) .
  13. Autobiographie p.130 .
  14. E. Chalmel, ≪  La premiere femen. Le recit brulant d’une vie offerte a la liberte.  ≫, in Les Etats et empires de la lune , blog, Nantes , .
  15. M. Jego, ≪  La justice russe reste sourde aux demandes de Memorial de lui restituer ses archives. ≫, in Le Monde , Paris , 20 decembre 2008.
  16. F. Noiville , ≪  Evguenia Iaroslavskaia-Markon, l’insurgee du Goulag.  ≫, in Le Monde des livres , Paris , 8 mars 2017.
  17. J. Y. Potel , ≪  La Revolution mise a nu  ≫, in Mediapart , Paris , 25 mars 2017.
  18. (ru) Upadishev, N. V., ≪  From Solovki to Gulag?: the Rise of the soviet camp system. От Соловков к ГУЛАГу: зарождение советской лагерной системы  ≫, Отечественная История ,‎ , p.  85 - 94

Annexes [ modifier | modifier le code ]

Bibliographie et sources [ modifier | modifier le code ]

Voir aussi [ modifier | modifier le code ]