Une
bulle pontificale
(ou ≪
bulle papale
≫ ou ≪
bulle apostolique
≫) est un document scelle (du
latin
bulla
, ≪
sceau
≫) par lequel le
pape
pose un acte juridique important tel que l’
indiction
d’une
annee sainte
, une nomination
episcopale
, une
definition dogmatique
, la convocation d’un
concile
ou une
canonisation
. Le document releve habituellement du gouvernement pastoral de l'
Eglise catholique
, et s'adresse a l’ensemble des fideles ou parfois aux
paiens
. Il est ordinairement designe par son
incipit
. Sa promulgation s'appelle une
≪
fulmination
≫
.
Par son universalite, la bulle se distingue de la
decretale
qui concerne en general l'administration ecclesiale et s'adresse surtout au
clerge
, une decretale pouvant devenir une bulle lorsque son sujet prend de l'importance.
A l'origine, le terme designe le
sceau
de
metal
, en
plomb
ou en
or
, attache a un document pour l'authentifier. Adoptant une pratique en cours a
Byzance
[
1
]
, la chancellerie papale commence au
VI
e
siecle
a authentifier ses documents d’un sceau de
plomb
(la
bulla
) pour les documents ordinaires, d’une
bulla
d’or ou d’argent pour d’autres plus importants.
Des cordelettes de
soie
ou chanvre inserees dans le sceau tenaient le document ferme. Sur le sceau (au
XII
e
siecle
) etaient frappes, d’un cote, les visages des apotres
Pierre
et
Paul
, sur l’autre, le nom du pape regnant.
Les bulles les plus anciennes qui soient parvenues jusqu'a nous sont celles de
Leon
I
er
, pape de 440 a 461
[
2
]
.
A partir du
XIII
e
siecle
, les documents qui portaient ce sceau furent eux-memes appeles bulles. Depuis le
XV
e
siecle
environ, le terme est reserve aux lettres apostoliques fermees par le sceau de plomb.
La
papaute
pretendant longtemps a un pouvoir temporel et a une juridiction universelle, la reception et la publication de certaines bulles ont plus d'une fois ete l'occasion de conflits entre les Etats, catholiques ou autres, et l’
Eglise
. Les deux pouvoirs s’affrontaient : les gouvernements revendiquaient le droit d'examiner les bulles avant de leur accorder l'
exequatur
, et le
Saint-Siege
refusait d'admettre cette revendication.
En France, apres le
Concordat
de 1801, les bulles ne furent executoires qu'apres enregistrement par le
Conseil d'Etat
. Cependant les
articles organiques
(ajoutes au
concordat
sans l’accord de
Pie VIII
) soumettaient les bulles au controle du pouvoir civil. Les actes pontificaux n'ont plus ete a partir du
XIX
e
siecle l'objet d'un controle, qui a formellement ete abroge par la loi de separation de l'Eglise et de l'Etat.
Les bulles sont aujourd'hui conservees dans les
Archives secretes du Vatican
, que seuls quelques universitaires sont autorises a compulser. Cependant, d'une maniere tout a fait exceptionnelle, le Vatican a decide d'exposer publiquement du
au
quelques bulles de convocation des jubiles ordinaires dans une exposition
[
3
]
.
En 1878,
Leon XIII
modernisa le style en eliminant l'ecriture gothique utilisee depuis le
XII
e
siecle et la remplacant par un latin moderne plus comprehensible. Les sceaux de plomb furent abandonnes meme si les documents continuerent a s'appeler ≪ bulles ≫.
Jusqu'en 1903, les bulles etaient datees de l'annee de l'
Incarnation
du
Christ
, qui commencait le 25 mars. Le pape
Pie X
a modifie cette coutume (dans sa
constitution apostolique
Sapienti Consilio
du
), et prescrit d'utiliser le calendrier civil usuel commencant le
.
Les bulles modernes commencent en latin de la maniere suivante :
- [Nom du pape]
episcopus
,
- servus servorum Dei
- [aux destinataires]
- salutem et benedictionem apostolicam
soit traduit en francais :
- (
[Nom du pape]
eveque,
- serviteur des serviteurs de Dieu,
- a
[destinataires]
,
- salut et benediction apostolique)
Elles ont aussi un titre. ex:
Incarnationis Mysterium
(
)
Traditionnellement, la chancellerie pontificale distingue plusieurs types de bulles :
- grande bulle, employee seulement pour les grandes occasions, de fait peu utilisee, qui se caracterise entre autres par l'ajout de
in perpetuam memoriam
(parfois abrege en
in. pp. m.
) avant la
benediction
liminaire, et celui de la
rota
(empreinte de forme ronde comprenant le nom du pape) ;
- petite bulle, d'emploi courant ;
- bulla dimidiata
(≪ demi-bulle ≫), bulle emise par un
pape
nouvellement
elu
, et non encore consacre, le sceau ne comporte alors pas le nom du pape.
Le
sceau
de
plomb
utilise pour sceller les bulles est un sceau personnel, le nom du
pape
y est grave. Il comporte egalement les effigies de
saint Pierre
(a droite) et
saint Paul
(a gauche). On y lit au revers le nom du pape regnant (avec son numero d'ordre). La bulle peut etre egalement scellee avec un cachet de cire et l'empreinte de l'
anneau du pecheur
, symbole de
saint Pierre
. Durant le regne du souverain pontife, le sceau et l'anneau sont tous deux conserves, depuis 1973 (
motu proprio
Quo aptius
de
Paul VI
) par la Secretairerie d'Etat, anciennement par la
Chancellerie apostolique
. Lorsque le pape vient a mourir ou a
renoncer a sa charge
, le sceau et l'anneau qui portaient son nom sont detruits. Le nouvel elu ne fait graver son nom sur le sceau que lorsqu'il a ete sacre.
Depuis un
motu proprio
de
Leon XIII
(
), la forme de la bulle est reservee a :
Pour le reste, la bulle a ete remplacee soit par l'
encyclique
, soit par des actes mineurs (
brefs
ou
rescrits
).
De fait, l'appellation
bulle
depend souvent du choix du pape, et est souvent donne aux documents scelles (et donc d'importance) qui n'ont pas d'appellation plus precise (
encyclique
,
rescrit
, etc.). On peut observer que dans le texte latin originel des bulles, le document est souvent designe simplement sous le nom de ≪
litteræ apostolicæ
≫ (≪ lettre apostolique ≫), parfois accompagne de la mention ≪
sub plumbo datæ
≫ (≪ donnee sous le sceau de plomb ≫).
L'appellation peut aussi etre traditionnelle : c'est le cas des lettres touchant les
jubiles
, par exemple les bulles d'indiction emises par
Jean-Paul II
,
Incarnationis Mysterium
(
) pour celui de l'an
2000
, et
Aperite Portas Redemptori
(
) pour l'annee sainte de 1983.
Les differentes autres formes que prennent les actes du pape :