Causes de la guerre de Succession d'Espagne

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Charles II , dernier representant des Habsbourg d'Espagne , surnomme el Hechizado (≪ l'ensorcele ≫), meurt sans descendance.

Cet article couvre la periode 1680-1701, de la speculation des puissances europeennes pendant le regne de Charles II au debut de la guerre de Succession d'Espagne .

La succession d'Espagne est la grande preoccupation des cours europeennes a la fin du XVII e  siecle et la cause d'une guerre de quatorze annees en Europe : la guerre de Succession d'Espagne .

Les differents pretendants [ modifier | modifier le code ]

Malgre deux mariages successifs, le roi d'Espagne Charles II n'a pas d'heritiers directs. Ne en 1661, il est de sante tres fragile. Deux familles souveraines, apparentees a la monarchie espagnole, pretendent avoir des droits a l'heritage espagnol :

L'heritage espagnol : l’enjeu [ modifier | modifier le code ]

Les domaines de l'Espagne en Europe (en rouge), quoique diminues, restaient assez considerables pour que leur acquisition par l'une des grandes puissances puisse changer l'equilibre europeen.

Les possessions du roi d'Espagne sont considerables, elles comprennent :

La refonte eventuelle de ces suzerainetes, soit dans le royaume de France , soit au sein des possessions hereditaires autrichiennes , aurait bouleverse le fragile equilibre des rapports de force en Europe, tel qu'il avait ete institue en 1648 par les traites de Westphalie .

Les Francais , les Anglais et les Provinces-Unies souhaitent le demembrement de l' empire espagnol . Les Habsbourg veulent le maintien de l'unite. Charles II veut le maintien de l'unite, mais ne veut pas d'un successeur francais ou autrichien. En 1696, il choisit le prince Joseph-Ferdinand de Baviere , age de 4 ans.

De laborieuses tractations [ modifier | modifier le code ]

Le moment de la succession semblant imminent, les grandes puissances europeennes (sauf l'Espagne) entrent en negociations :

Le but des Francais est de pouvoir echanger les terres italiennes contre la Savoie afin de renforcer la France dans les Alpes. Le but de l'Angleterre est d'empecher que la France puisse recuperer les territoires des Pays-Bas, mais le prince de Baviere meurt en 1699.

  • En 1699 ont lieu de nouvelles negociations franco-anglaises, toujours pour un demembrement :

L'empereur Leopold I er exige toute l'Italie pour son fils l'archiduc Charles, les Francais recevant alors l'Amerique. Les Anglais doivent refuser, et l'idee n'arrange pas Louis XIV. C'est l'echec.

  • En 1700, il y a deux nouveaux accords entre la France, l'Angleterre et les Provinces-Unies:
    • L'archiduc Charles recevrait l'Espagne, les colonies et les Pays-Bas espagnols ;
    • Le duc de Lorraine recevrait le Milanais ;
    • Le Grand Dauphin aurait Naples, la Sicile, les places (ou presides) de Toscane, Guipuscoa et la Lorraine.

Les regles de succession [ modifier | modifier le code ]

Les regles de succession en Espagne etaient determinees par les lois II, III et V du titre XV de la Partida II de 1263, les lois XL et XLV du Toro de 1505, la loi VI du titre I du Livre II et les lois IV, V et VIII du titre VII du livre V de la Recopilacion de 1567. En vertu de ces textes, la Couronne des Royaumes d'Espagne et des Indes se transmettait selon la primogeniture, les femmes etant exclues de la succession tant qu'il restait des heritiers males.

Or, Leopold I er etait le cousin, au dixieme degre, de Charles II ; tous deux etaient les arriere-arriere-arriere-petits-fils de Philippe le Beau (fils de Maximilien I er et Marie de Bourgogne) et Jeanne la Folle (fille de Ferdinand II d'Aragon et d'Isabelle de Castille), pere et mere de l'empereur-roi Charles-Quint, frere aine de Ferdinand I er du Saint-Empire (fondateur de la branche cadette des Habsbourg, qui regnaient a Vienne). De ce fait, les pretentions francaises au trone d'Espagne (au travers de l'infante Marie-Therese, epouse du roi Louis XIV) n'etaient pas legitimes, au regard des regles de succession, puisque des heritiers males vivaient encore [ref. necessaire] .

Le testament de Charles II [ modifier | modifier le code ]

Les pretendants au trone d'Espagne

Charles II n'ayant pas de descendance, sa succession posait probleme : la genealogie designait en effet comme heritier le Dauphin, fils de sa defunte sœur ainee Marie-Therese, epouse du roi de France Louis XIV. Prevoyant l'inquietude que ne manquerait pas de susciter un accroissement de la puissance francaise, dans le contexte d'une deterioration des relations franco-espagnoles au cours des annees 1690, Charles II envisagea d'abord une solution qui ne favoriserait ni la France ni l'Autriche, probables candidates au trone, et designa un heritier plus jeune a sa succession : il s'agissait du duc Joseph-Ferdinand de Baviere (1692-1699), dernier petit-fils de la plus jeune sœur de son defunt pere, l'infante Marguerite ; il fut designe heritier et eleve au rang de Prince des Asturies . Toutefois, Joseph-Ferdinand mourut avant son grand-oncle et sans descendance : la crise de succession devenait inevitable. Charles II s'etait entre-temps range a l'avis que la Couronne devait etre transmise en concordance avec les lois seculaires regissant la succession.

Charles II d'Espagne, dans son Testament du , affirmait :

≪ Considerant, en accord avec les divers avis proferes par Nos Ministres d’Etat et Nos Magistrats jugeant que les Renonciations a leurs droits respectifs sur nos Royaumes, consenties par les Dames Anne et Marie-Therese, toutes deux Reines de France, Notre tante et Notre sœur, n’avaient d’autre motif que leur crainte des consequences pour l’Espagne d’une reunion avec le Royaume de France ; et considerant que bien que cette inquietude n’ait plus de fondement, le droit du collateral le plus proche a succeder au trone demeure en vigueur selon les lois de ces Royaumes ; et considerant que ce droit peut etre revendique a present par le second fils du Dauphin ; par la presente, et en concordance avec ces lois, Nous designons comme Notre successeur (si Dieu devait Nous rappeler a Lui tel que Nous sommes, sans descendance) le duc d’Anjou, second fils du Dauphin, et Nous le nommons heritier de tous nos Royaumes et Domaines sans exception aucune (…). Soucieux de preserver la paix de la Chretiente et de toute l’Europe, soucieux du bien-etre de Nos Royaumes, Notre intention est que cette Couronne qui est Notre et celle de France demeurent a jamais separees, et a cette fin Nous declarons solennellement, en Nous referant aux stipulations susdites, que si le dit duc d’Anjou venait a mourir avant que Nous fussions Nous-memes rappele a Dieu, ou s’il devait acceder au Trone de France et preferer cette Couronne a la Notre, lors ladite Couronne passerait au duc de Berry , Son frere, et troisieme fils dudit Dauphin, et que dans cette eventualite les conditions susdites demeureraient en vigueur. Et que, si le duc de Berry venait a mourir avant que Nous fussions Nous-memes appele, ou s’Il devait acceder au trone de France, Nous declarons que Notre volonte est de voir passer la Couronne a l’ Archiduc , second fils de Notre oncle l’Empereur, par preference, pour les memes raisons que Nous avons donnees plus haut ?et en vertu du meme souci que Nous avons exprime plus haut pour le bien commun? au premier-ne de l’Empereur Notre oncle. Et si l’Archiduc venait a mourir avant que Nous fussions appele a la Vie Eternelle, Nous declarons que Notre volonte est de voir passer la Couronne au Duc de Savoie et a ses heritiers. ≫

Ce testament passait manifestement sous silence les droits evidents de la branche Orleans. Le duc d'Orleans en concut une certaine rancœur : il l’exprima en faisant promulguer le Decret Pragmatique de 1703, au moyen duquel il reaffirmait ses droits.

A la mort de Charles II [ modifier | modifier le code ]

Charles II d'Espagne meurt le . Apres l'ouverture de son testament, le conseil de regence d'Espagne [ note 1 ] notifie a l'ambassadeur de France la nomination du duc d'Anjou sur le trone d'Espagne.

Louis XIV est prevenu le par son secretaire d'Etat a la Guerre, le marquis de Barbezieux . Des le lendemain, il tient une reunion avec ses proches conseillers, le marquis de Torcy , le duc de Beauvilliers , le chancelier de Pontchartrain et madame de Maintenon , en vue d'accepter ou non ce testament [ 1 ] .

Le Conseil d'en haut , consulte, est partage :

Finalement, le , Louis XIV annonce a la cour, en presence du marquis Castel dos Rios, ambassadeur espagnol, qu'il accepte le testament et proclame son petit-fils, le duc Philippe d'Anjou, roi d'Espagne :

≪ Messieurs, voici le roi d'Espagne. La naissance l'appelait a cette couronne, le feu roi aussi par son testament ; toute la nation l'a souhaite et me l'a demande avec instance ; c'etait l'ordre du ciel, je l'ai accorde avec plaisir… ≫

≪ Soyez bon Espagnol, c'est maintenant votre premier devoir, mais souvenez-vous que vous etes ne Francais, pour entretenir l'union des deux nations; c'est le moyen de les rendre heureuses et de conserver la paix de l'Europe. ≫

Louis XIV , [ 2 ]

Torcy , ministre des Affaires etrangeres, fait immediatement parvenir aux ambassadeurs des Pays-Bas et d'Angleterre une note stipulant que, si le roi approuvait le testament, les monarchies de France et d'Espagne demeureront distinctes.

L'empereur Leopold I er de Habsbourg refuse de reconnaitre le testament du roi Charles II

Le , l'empereur Leopold I er de Habsbourg apprend la mort de son beau-frere, le roi Charles II, par un courrier du Comte de Sinzendorff . Des le lendemain, il reunit son conseil, le president de guerre, ses feld-marechaux, le comte Caprara et les princes Eugene de Savoie et de Commercy pour preparer la succession. Mais, le , il apprend le nom du successeur : le duc Philippe d'Anjou. L'Empereur n'accepte pas de perdre l'empire espagnol des Habsbourg et celui-ci doit revenir a son fils, l'archiduc Charles d'Autriche. C'est pourquoi il refuse de reconnaitre le nouveau roi d'Espagne et decide l'envoi immediat de troupes en Italie et sur le Rhin [ 3 ] .

Dans un premier temps, la plupart des chefs d'Etat (Guillaume III d'Angleterre et les etats-generaux des Provinces-Unies ainsi que le prince de Vaudemont , gouverneur du Milanais, les vice-rois de Naples, de Sicile et de Sardaigne, Maximilien-Emmanuel de Baviere , gouverneur des Pays-Bas, l' electeur de Cologne ) acceptent le testament du roi d'Espagne.

Mais le , le Parlement de Paris conserve les droits a la couronne de France de Philippe V, ce qui inquiete les Anglais et les Autrichiens. Debut fevrier, Louis XIV fait occuper par l'armee francaise des places fortes des provinces catholiques des Pays-Bas [ note 2 ] ce qui rend furieux les Hollandais.

Notes et references [ modifier | modifier le code ]

Notes [ modifier | modifier le code ]

  1. Charles II a etabli par son testament une junte ou conseil de regence, preside par la reine douairiere et compose du cardinal Portocarrero , de Don Manuel Arias, de l'eveque Inquisiteur General, de Don Rodrigue Manuel Manrrique de Lara et du comte de Benavent.
  2. Correspondant approximativement aux actuels Belgique et Luxembourg.

References [ modifier | modifier le code ]

Voir aussi [ modifier | modifier le code ]

Bibliographie [ modifier | modifier le code ]

Les sources sont classees par date de parution

  • Testament et codicille de Charles II, roi d'Espagne, fait le 2 octobre 1700. , Frederic Leonard (Paris), , 78  p. ( lire en ligne ) .
  • Guillaume de Lamberty , Memoires pour servir a l'histoire du XVIII e  siecle , vol.  1, Arkstee & Merkus (Amsterdam), , 694  p. ( lire en ligne ) .
  • Jules d'Argis , Etude sur la guerre de la succession d'Espagne : Conferences de Verdun , Ch. Laurent (Verdun), , 333  p. ( lire en ligne ) .
  • Francois Bluche: Louis XIV Librairie Artheme Fayard, 1986

Articles connexes [ modifier | modifier le code ]