La
sharka
ou
Plum pox
virus
(PPV) est la
maladie
virale la plus devastatrice du genre
Prunus
. La maladie trouve son origine en
Bulgarie
, sous le nom de
sharka
(шарка), qui signifie
variole
en
bulgare
. Decouverte sur des pruniers en 1916 ou 1917 pres de la frontiere bulgaro-yougoslave, cette maladie s'est vite propagee dans les
vergers
des pays voisins. Son origine virale a ete etablie en 1933 par un chercheur bulgare, Dimitar Atanasov.
Le
potyvirus
de la sharka
est responsable d’une
maladie
des vegetaux affectant les especes de fruits a noyau du genre
Prunus
, comme les
pechers
, les
nectariniers
, les
pruniers
, les
abricotiers
, les
amandiers
et certaines varietes ornementales.
Le
Plum pox virus
(ou PPV) ne tue pas les
arbres
et n’affecte ni la sante des humains ni celle des animaux.
Les principaux impacts concernent le rendement et la qualite de la recolte en rendant les fruits impropres a la consommation, par la creation de fruits presentant notamment des difformites, des marques colorees de formes circulaires et d'un gout tres acide.
Il se transmet naturellement par le biais des
pucerons
et peut etre par d'autres insectes piqueurs/suceurs (a confirmer), ainsi que par le
greffage
, le surgreffage et par le transfert de plants infectes.
Plusieurs especes vegetales du genre
Prunus
peuvent servir de reservoir viral pour le virus de la sharka, le type de reservoir et ses effets variant selon la souche de la sharka en cause, et l'espece varietale infectee.
Quelques etudes ont suggere la possibilite de transmission du virus par la
graine
(
semis
de noyaux provenant d'arbres infectes), mais le
consensus scientifique
international actuel s'oriente vers la non transmissibilite du virus par cette voie. En France, l'
Institut national de la recherche agronomique
(INRA) effectue des recherches sur la sharka depuis 1970. Ses travaux ont mis en evidence le role des pucerons vecteurs dans l'acquisition puis la retransmission du virus a partir d'un reservoir viral de la sharka vers d'autres especes vegetales saines.
On observe des symptomes sur
feuilles
, sur
fruits
, sur rameaux de bois et sur les noyaux. Sur feuilles, les taches ou les anneaux diffus chlorotiques sont relativement discrets. Par contre, les fruits peuvent etre tres deformes par le virus, en presentant a leur surface des zones irregulieres, delimitees par des sillons plus ou moins profonds, de teinte bleuatre. La chair de ces fruits, sclerifiee par endroits, est impregnee de
gomme
. Les bois et les noyaux d'abricotiers peuvent aussi presenter ces anneaux de decoloration. Outre la depreciation commerciale de nombreux fruits, les varietes a fruits violets peuvent presenter une chute prematuree des fruits avant la recolte.
Une difficulte que pose cette maladie est que l'exteriorisation des symptomes de la sharka n'est pas immediate. Pour les arbres fruitiers, elle peut avoir lieu 1, 2, 3, 4 ans et plus apres la contamination.
En cas d'infection, la seule solution reconnue comme efficace consiste a arracher et bruler les arbres atteints presentant les symptomes visuels de la sharka en raison du risque tres grave de dissemination de la maladie. En second lieu, il faut creer autour de la zone contaminee un "vide sanitaire" en arrachant les autres especes vegetales servant de reservoir viral a la maladie afin de detruire les reservoirs de la sharka presents mais encore invisibles.
A titre preventif, on peut :
- Reperer les arbres atteints en hiver afin de pouvoir les arracher avant l'arrivee des pucerons vecteurs. Apres verification, il a ete constate que le reperage de symptomes sur rameaux indique bien la presence du virus, quelle que soit la souche (M, D, C ou EA), meme si l'intensite des symptomes differe selon les varietes. Ce reperage sur rameaux, complementaire des autres techniques de prospection, est donc utilisable pour realiser des prospections en hiver, periode interessante en pratique (personnes disponibles, periode de prospection longue).
- Utiliser des
porte-greffes
, varietes ou plants
greffes
, sains. Certains pruniers
OGM
ont ete developpes en
France
et aux
Etats-Unis
mais ne sont pas disponibles dans le commerce. La resistance peut etre transferee par hybridation avec d'autres individus. La plante transgenique ainsi obtenue produit une proteine qui la protege de l'infection ; la plante produit un
acide ribonucleique messager
qui est traite par le systeme de
Post transcriptional gene silencing
[
1
]
(similaire au systeme d'
ARN interferent
).
- Effectuer des traitements aphicides (anti-pucerons) selon les conseils locaux.
- Signaler les cas de maladie aux services phytosanitaires locaux competents et se conformer aux mesures reglementaires en vigueur.
Les symptomes sur fruits de la Sharka peuvent etre confondus avec ceux de la fausse Sharka, due au virus des taches foliaires chlorotiques du
pommier
, rencontre sur certaines varietes de prunier.
Il existe 10 souches de PPV connues : PPV-D, PPV-M, PPV-Rec, PPV-EA, PPV-C, PPV-W, PPV-T, PPV-An, PPV-CR, PPV-CV
[
2
]
. Ces souches peuvent infecter les especes du genre
Prunus
et notamment les
pechers
, les
pruniers
et
abricotiers
. La differenciation entre les souches D et M a ete faite des 1979
[
3
]
. Si le PPV-D (isolat de reference: Dideron) semble etre plus infeode a l'
abricotier
, en revanche le PPV-M (isolat de reference: Markus) identifie sur
pecher
est generalement d'une plus grande virulence naturelle par rapport a la souche D. Les souches PPV-C, PPV-CR et PPV-CV n'ont ete detectees que sur le cerisier en conditions naturelles. En conditions artificielles (inoculation artificielle), toutes les souches sont capables de se multiplier sur les differentes especes du genre
Prunus
et notamment les
pechers
, les
pruniers
et
abricotiers
.
Trois souches sont presentes en France : la souche PPV-D apparue en 1969, et la souche PPV-M apparue au debut des annees 1980 et la souche PPV-Rec apparue en 2013
[
4
]
.
Etat de la maladie
|
Pays
|
Distribution reduite
|
Albanie
,
Autriche
,
Canada
,
Chypre
,
Tchequie
,
France
,
Italie
,
Luxembourg
,
Moldavie
,
Norvege
,
Portugal
, Sud de la
Russie
,
Slovenie
,
Espagne
,
Syrie
,
Turquie
,
Ukraine
,
Royaume-Uni
,
Etats-Unis
|
Largement present
|
Bulgarie
,
Croatie
,
Allemagne
,
Grece
,
Hongrie
,
Pologne
,
Roumanie
,
Slovaquie
|
Introduit et etabli
|
Acores
,
Bosnie-Herzegovine
,
Egypte
, Ancienne
URSS
,
Asie centrale
,
Inde
,
Lituanie
|
Introduit, en voie d'eradication
|
Belgique
,
Pays-Bas
,
Suisse
|
Statut actuel inconnu
|
Chili
,
Danemark
|
Source : Levy et al. 2000. Plum Pox Potyvirus Disease of Stone Fruits. American Phytopathological Society
[
5
]
|
Depuis sa decouverte en
1916
en
Europe
, la sharka a envahi progressivement la plupart des regions ou croissent des
Prunus
et a commence a s'etendre dans d'autres pays d'Europe, aux Etats-Unis, au Canada, au Chili et en Asie.
Depuis 2008 l'
INRA
coordonne le projet
Sharco ("Sharka containment in view of EU expansion")
finance par le
7
e
programme-cadre europeen de recherche et de developpement, et regroupant 17 partenaires de toute l'Europe.
La souche PPV-D a ete detectee en France pour la premiere fois en
1969
. La souche PPV-M est quant a elle apparue au debut des annees 1980. La souche PPV-M est apparue dans cinq regions de grandes productions fruitieres francaises, les
Bouches-du-Rhone
, les
Pyrenees-Orientales
, la
Drome
, le
Gard
et la
Corse
. Depuis, la maladie s’est developpee regulierement de facon preoccupante, jusqu’a constituer a ce jour une menace grave pour les productions francaises de fruits a noyau issues de plantation d'arbres fruitiers de type
Prunus
. Elle persiste de facon preoccupante dans l’
Ardeche
et l’
Isere
et continue de s'etendre dans la Drome et les
Pyrenees-Orientales
. Dans le departement de la Drome, l'importance de la maladie atteint des proportions telles qu'il apparait impossible desormais de concevoir son eradication.
En l’absence de traitement curatif et en attendant la mise au point de traitement alternatif, la France a decide que la detection precoce et l’arrachage immediat des arbres contamines sont a ce jour le seul mode de lutte efficace contre le virus. C'est ce que l'on appelle en France la lutte collective et obligatoire. D'autres pays ont choisi quant a eux de laisser faire la contamination et d'adapter leur production en selectionnant des especes varietales de type
Prunus
qui developpent peu les symptomes de la sharka et pour lesquelles il n'y a pas de perte de rendement, mais qui restent une source d'inoculum viral. La qualite organoleptique des fruits de ces varietes n'est toutefois pas toujours identique a celle obtenue par les varietes traditionnelles francaises, ni aux attentes liees au renouvellement varietal. La creation de nouvelles varietes resistantes adaptees aux conditions de culture de l'Europe occidentale pourra a terme repondre a cet objectif.
L'Etat francais a mis en œuvre en 1993, soit 10 ans apres que l'INRA et la protection des vegetaux aient eu connaissance de la presence de la sharka dans les vergers de l'INRA, une politique de lutte collective et obligatoire qui repose sur deux volets. En premier lieu, on prend des mesures de confinement du virus ; en second lieu, l'
Institut national de la recherche agronomique
(INRA) met au point des varietes resistantes au virus. Afin de confiner la maladie, une prospection des symptomes visuels de la sharka est organisee chez les producteurs et les pepinieristes. En cas de decouverte d'un faible taux de plants contamines, ceux-ci sont arraches et detruits. Si un
verger
presente un taux important de contamination (5 %) le verger entier est arrache et detruit. Cette politique continue a s'appliquer actuellement, avec quelques adaptations. Notamment, la protection d’une region de culture repose desormais sur une prospection attentive des pepinieres, des arboriculteurs et de tout transfert de plants ou de greffons depuis les zones infectees vers d'autres parties du territoire. Tout transfert de materiel vegetal non controle et ne beneficiant pas d'un
passeport phytosanitaire europeen
est par ailleurs strictement interdit.
Quelques etudes ont suggere la possibilite de transmission du virus par la
graine
(
semis
de noyaux provenant d'arbres infectes), mais le
consensus scientifique
international actuel s'oriente vers la non transmissibilite du virus par cette voie. Des travaux de l'
Institut national de la recherche agronomique
(INRA) ont aussi mis en evidence le role des pucerons vecteurs dans l'acquisition puis la retransmission du virus a partir d'un reservoir viral de la sharka vers d'autres especes vegetales saines. Ainsi, les fruits infectes pourraient aussi contribuer a transporter la sharka.
Depuis 1997, pres d'une centaine de recours ont ete introduits devant les tribunaux administratifs par des arboriculteurs afin d’engager la responsabilite de l’
Institut national de la recherche agronomique
dans l'introduction et la diffusion du virus de la sharka dans le sud de la France et celle du
ministere de l'Agriculture
, en raison d'un defaut dans les mesures de lutte mises en œuvre. Finalement, par deux arrets du
, le
Conseil d’Etat
a juge que la responsabilite de l'INRA "ne saurait etre engagee" et que la faute de l'Etat n'etait pas prouvee. Le ministere de l'Agriculture n'a pas commis de faute en deployant une strategie de lutte en 1991 seulement, dans la region de Salon-de-Provence, puis dans le Gard en 1992. Ces decisions de 2008 ont ete confirmees par le Conseil d'Etat par 17 arrets du
. Par ailleurs, le Conseil d'Etat vient d'etre saisi de la question responsabilite de l'Etat dans la Drome, ou la strategie de lutte n'a ete mise en œuvre que plus tardivement.
En 2007, une
charte
de lutte et de prevention contre la sharka a ete elaboree par le Ministere de l’Agriculture et l’INRA et transmise aux federations agricoles professionnelles concernees. Cette Charte vise a coordonner les efforts de tous dans la prevention et la lutte contre ce virus par la detection et l’arrachage precoce des arbres contamines, ≪ a la seule fin de rompre le cycle epidemique de la maladie ≫. Si les federations agricoles professionnelles concernees ont reconnu l'utilite des principes de cette Charte, certaines ont refuse d'y apposer leur signature, considerant que le contenu de cette Charte constitue pour l'essentiel un desengagement financier de l'Etat Francais.
Le Centre Technique Interprofessionnel pour les Fruits et Legumes (CTIFL) travaille depuis 2000 sur des varietes d’
abricotiers
presentant des caracteristiques de resistance interessantes, en collaboration avec l'INRA. Ces travaux conduits en milieu protege et en zone fortement contaminee (Grece) ont confirme cette resistance et permis de tester ces varietes en situation de production dans la region nord de Valence. L’une de ces varietes a ete presentee au public par l'INRA comme equivalente au Bergeron, mais son interet economique n'est pas demontre car elle est a priori trop precoce pour avoir un grand avenir commercial.
Le virus de la sharka a ete detecte pour la premiere fois en
Ontario
au printemps 2000. Depuis 2001,
Agricorp
et l'
Agence canadienne d'inspection des aliments
ont uni leurs efforts pour tenter d’eradiquer le virus de la sharka en Ontario. Selon un comite independant de specialistes etrangers du virus de la sharka ayant analyse les resultats des tests realises en 2005, les occurrences sont a la baisse et son eradication est possible.
- ↑
(en)
J. M. Hily.
et al
. 2004. Stability of gene silencing-based resistance to Plum pox virus in transgenic plum (
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L.) under field conditions.
Transgenic Research
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- ↑
(en)
Bernardo Rodamilans, ≪
Molecular Plant-Plum Pox Virus Interactions
≫,
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lire en ligne
)
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Differenciation biologique et serologique de souches du virus de la sharka
≫,
Annales de Phytopathologie
,
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lire en ligne
)
- ↑
(en)
L. Svanella-Dumas, ≪
First Report of the Presence of Plum pox virus Rec Strain in France
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,
(
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)
- ↑
Levy et al. 2000.
Plum Pox Potyvirus Disease of Stone Fruits
. American Phytopathological Society
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