L'
origine de la
Tchecoslovaquie
s'inscrit dans une longue histoire culminant avec la creation de la
Tchecoslovaquie
en 1918 apres une
longue lutte
des
Tcheques
contre la
germanisation
et leurs
dirigeants autrichiens
et des
Slovaques
contre la
magyarisation
et leurs
dirigeants hongrois
.
L'Autriche-Hongrie en 1914 avec les zones linguistiques selon le recensement de 1890, les frontieres de 1914 (rouge) et celles de 1919 (bleu) tracees par la
Commission Lord
en application des
Quatorze points du president Wilson
, definissant entre autres l'etendue de la Tchecoslovaquie.
De
langues tres proches
, les
ancetres des Tcheques et des Slovaques
ont ete unis dans le
royaume de Samo
pendant environ 30 ans au
VII
e
siecle puis dans la
Grande-Moravie
entre 833 et 907, mais les Tcheques de
Boheme
et de
Silesie
n'ont fait partie de la Grande-Moravie que sept ans environ avant de s'en separer en 895. Ensuite, dans la seconde moitie du
X
e
siecle, les Tcheques ont conquis et controle l'ouest de la Slovaquie (ancienne
principaute de Nitra
,
Nitrianske
knie?atstvo
) pendant environ trente ans. Au
XI
e
siecle, les Magyars ont
conquis la Slovaquie
qu'ils appelerent ≪
Haute-Hongrie
≫ (
Fels?-Magyarorszag
), tandis que les Tcheques ont maintenu leur propre
principaute
que les
P?emyslides
erigerent en
un royaume tcheque
en 1198. Les deux nations furent encore unies d'abord sous le regne de
Matthias Corvin
qui fut roi a la fois
de Hongrie
(incluant la Slovaquie) entre 1458 et 1490 et
de Boheme-Moravie
entre
1469
et
1490
, et ensuite de
1526
a
1918
sous le
regne des Habsbourg
, les Tcheques dans l'orbite autrichienne (couronne de
Boheme-Moravie
jusqu'en
1867
, puis
Cisleithanie
austro-hongroise
de 1867 a
1918
), les Slovaques dans l'orbite hongroise (
Hongrie royale
jusqu'en
1718
,
imperiale
jusqu'en 1867 et
Transleithanie austro-hongroise
jusqu'en 1918)
[
1
]
.
Sous les
Habsbourg
, Tcheques et Slovaques, culturellement et socialement marginalises, sont soumis a des processus de
germanisation
dans l'orbite autrichienne et de
magyarisation
dans l'orbite hongroise, de sorte que leurs langues deviennent progressivement des ≪ idiomes de paysans ≫ ; toutefois, une partie des
nobles
, des
clercs
et des
roturiers
y ont resiste de diverses manieres (voir
Histoire de la Republique tcheque
et
Histoire de la Slovaquie
). Des la fin du
XIV
e
siecle les contacts entre Tcheques et Slovaques se sont renforces autour de l'
Universite de Prague
; au
XV
e
siecle les campagnes des armees tcheques
hussites
en Slovaquie et au
XVII
e
siecle, les
protestants
tcheques refugies en Slovaquie y ont egalement contribue. Entre le
XV
e
siecle et le
XVIII
e
siecle, des lettres tcheques et slovaques mettent leurs langues par ecrit, en parallele avec le
latin
, entretenant chez les deux peuples, qui se comprennent mutuellement, un esprit de resistance culturelle respectivement
tcheque
ou
slovaque
coordonne
[
2
]
.
Fin du
XIX
e
siecle et debut du
XX
e
siecle
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]
A la fin du
XIX
e
siecle, les renaissances tcheque et slovaque en etaient a des stades de developpement differents en raison des disparites economiques et sociales de l'
Autriche-Hongrie
: la
partie autrichienne
a population tcheque etait beaucoup plus industrialisee et les classes moyennes y avaient pris de l'importance, alors que la
partie hongroise
a population slovaque etait encore tres rurale avec un regime
aristocratique hongrois
herite directement du
Moyen Age
. Ainsi :
- en
Boheme-Moravie
, une
revolution industrielle
vigoureuse a transforme une nation paysanne en une societe differenciee qui comprenait des travailleurs dans l'industrie, une classe moyenne et des intellectuels. Sous l'influence des
Lumieres
et du
romantisme
, le
renouveau culturel tcheque
a conduit a la creation du
Musee national
en
1818
et du
Theatre national
en
1881
. De plus, certains Tcheques formulaient des
revendications politiques
qui incluaient la reconstitution d'un royaume autonome de Boheme. Les succes culturels et politiques tcheques ont ete vigoureusement combattus par les Allemands de Boheme, qui craignaient de perdre leur position privilegiee. A la veille de la Premiere Guerre mondiale, le leader tcheque
Toma? Masaryk
a commence a propager l'idee tchecoslovaque, a savoir la reunion des Tcheques et des Slovaques en une seule entite politique.
- les Slovaques, en revanche, n'avaient pas de forum d'expression politique en Hongrie et leur
renouveau national
etait moins marque. La Slovaquie n'a ete industrialisee qu'a la fin du
XIX
e
siecle, ce qui signifie que les Slovaques sont restes principalement des ruraux diriges par un petit groupe d'intellectuels. Apres la creation de la double monarchie austro-hongroise en 1867, une forte affirmation nationale magyare a commence en Hongrie, reprimant severement celle du peuple slovaque. A la veille de la Premiere Guerre mondiale, les Slovaques avaient du mal a preserver leur identite.
Vers le debut du
XX
e
siecle, l'idee d'une entite ≪ tcheco-slovaque ≫ a commence a etre defendue par certains dirigeants tcheques et slovaques. Dans les annees
1890
, les contacts entre intellectuels tcheques et slovaques s'intensifient. Le dirigeant slovaque
Toma? Masaryk
etait un ardent defenseur de la cooperation tcheco-slovaque. Certains de ses etudiants ont forme l'Union tchecoslovaque et, en
1898
, ont publie la revue
Hlas
(≪ La Voix ≫). En Slovaquie, de jeunes intellectuels slovaques ont commence a trouver le
Parti national slovaque
trop timore, et a revendiquer une autonomie non seulement culturelle, mais aussi territoriale. Mais bien que les mouvements nationaux tcheque et slovaque aient commence a se rapprocher, jusqu'a la Premiere Guerre mondiale ils n'etaient pas separatistes et revendiquaient seulement l'autonomie en Autriche et en Hongrie respectivement. Ce n'est que
pendant la guerre
que l'idee d'une Tcheco-Slovaquie independante est apparue
[
3
]
.
Les armoiries des
legions tchecoslovaques
presentent l'ecu de la
Boheme
surmonte de la croix slovaque des
Tatras
et flanque par les ecus de la
Moravie
et de la
Silesie tcheque
.
Au debut de la Premiere Guerre mondiale, les Tcheques et les Slovaques se sont montres peu enthousiastes a l'idee de combattre pour leurs ≪ maitres ≫ respectifs, les Allemands et les Hongrois d'
Autriche-Hongrie
, contre leurs ≪ cousins ≫
slaves
, russes et serbes. Un grand nombre de soldats et officiers austro-hongrois d'origine tcheque et slovaque se sont
rendus aux Russes
et ont forme les
legions tchecoslovaques
, organisees par
Milan Rastislav ?tefanik
(un astronome slovaque devenu general de l'armee francaise). Pendant ce temps Masaryk plaidait aupres des
Allies
en faveur de l'idee, figurant dans le dixieme des ≪
14 points
≫ du president americain
Woodrow Wilson
, que l'Empire austro-hongrois devrait etre demantele au nom du ≪
droit des peuples a disposer d'eux-memes
≫, et remplace par des
Etats
-
nations
dont la
Tchecoslovaquie
. En 1916, avec
Edvard Bene?
et
Milan Rastislav ?tefanik
, Masaryk cree le ≪ Conseil national tchecoslovaque ≫. Masaryk aux
Etats-Unis
, ?tefanik en France, Bene? en France et en
Grande-Bretagne
œuvrent pour obtenir la reconnaissance de leur projet. Lorsque les contacts secrets entre les Allies et l'
empereur austro
-
hongrois
Charles
I
er
echouent, les Allies reconnaissent le ≪ Conseil national tchecoslovaque ≫ a l'ete 1918 comme l'organe supreme d'un futur gouvernement tchecoslovaque
[
4
]
.
Le
, des representants tcheques et slovaques aux Etats-Unis ont signe les
accords de Pittsburgh
(en)
[
5
]
approuvant un plan pour creer un Etat tcheco-slovaco-ruthene unifie dans lequel la
Boheme-Moravie
-
Silesie
(entite tcheque), la Slovaquie et la
Ruthenie
auraient chacune sa propre assemblee, les trois parlements formant l'assemblee tchecoslovaque. Debut
, l'Allemagne et l'Autriche proposent des pourparlers de paix. Le
, alors qu'il est aux Etats-Unis, Masaryk publie la declaration d'independance tchecoslovaque et, face aux revendications des
germanophones
qui reclament d'etre integres soit a une
republique d'Autriche allemande
, soit a une
nation allemande unie
, insiste pour que le nouvel Etat tchecoslovaque comprenne le royaume de Boheme historique, contenant la minorite allemande dont il promet de garantir les droits. La majorite des deputes germanophones de Boheme proclament le
leur refus de devenir citoyens tchecoslovaques, mais a la suite de l'abdication de
Charles
I
er
le
, les troupes tcheques prennent le controle des regions germanophones.
La
republique democratique hongroise
presidee par le comte
Mihaly Karolyi
, retiree de l'empire des Habsbourg depuis le
, tente de conserver la Slovaquie mais, avec l'approbation des Allies, les Tchecoslovaques occupent la Slovaquie tandis que les
Ruthenes
, a l'est, proclament une
Republique houtsoule
: les
troupes hongroises
sont contraintes de se retirer de ces regions. En 1919, la
republique des conseils de Hongrie
tente cependant de les reprendre, ce qui provoque une
coalition anti-hongroise des Tchecoslovaques, des Roumains, des Serbes
et des
Francais
finalement victorieux. Les Allies donnent alors leur accord pour que le
Danube
, l'
Ipe?
et en partie la
Tisza
servent de
frontiere entre la Hongrie et la Tchecoslovaquie
ce qui inclut dans le nouvel Etat l'importante
minorite hongroise
de la plaine fertile du
Danube
[
6
]
.
- ↑
Leon Rousset, article
Autriche-Hongrie
dans l'≪ Atlas de geographie moderne ≫ de Fr. Schrader, F. Prudent, E. Anthoine, Hachette 1892, chap. 28, ASIN B004R0AYZK.
- ↑
Eva Frimmova, ≪ Renaissance et Humanisme en Slovaquie ≫ in :
Renaissance et Reforme
, vol. 34, n° 2, nouvelle serie vol. 22, n° 2, 1998,
[1]
- lire en ligne
[2]
.
- ↑
Henri Bogdan, ≪ L'Autriche-Hongrie et la question nationale ≫,
Confluences mediterraneennes
vol. 2, n° 73, 2010.
- ↑
Vratislav Preclik,
(cs)
≪
Masaryk a legie
≫ (≪ Masaryk et les legions ≫), in :
Vaz. kniha, 219 str., vydalo nakladatelstvi
, 73401 Karvina, (Rep. Tcheque) in :
Masarykovym demokratickym hnutim
(≪ Mouvement democratique de Masaryk ≫), Prague 2019,
(
ISBN
978-80-87173-47-3
)
, pp. 17-25, 33-45, 70?96, 100-140, 159?184, 187-199.
- ↑
Masaryk a signe le
- ↑
Aliaksandr Piahanau,
Czechoslovak-Hungarian Border Conflict
[Conflit frontalier tchecoslovaque-hongrois]
, in :
1914-1918-online. International Encyclopedia of the First World War
, ed. par Ute Daniel, Peter Gatrell, Oliver Janz, Heather Jones,
Jennifer Keene
, Alan Kramer et Bill Nasson, publie par la
Freie Universitat Berlin
,
. DOI: 10. 15463 / ie1418. 11274.
- Olivier Lowczyk,
La fabrique de la paix : du Comite d'etudes a la Conference de la paix, l'elaboration par la France des traites de la Premiere Guerre mondiale
, Economica, coll. ≪ Bibliotheque strategique ≫, Paris 2010, 533 p.