L'
opera Garnier
[
a
]
, ou
palais Garnier
[
a
]
, est un theatre national qui a la vocation d'etre une academie de musique, de choregraphie et de poesie lyrique ; il est un element majeur du patrimoine du
9
e
arrondissement de Paris
et de la capitale. Il est situe
place de l'Opera
, a l'extremite nord de l'
avenue de l'Opera
et au carrefour de nombreuses voies
[
b
]
.
L'edifice s'impose comme un
monument
particulierement representatif de l'
architecture eclectique
et du style historiciste de la seconde moitie du
XIX
e
siecle
. Sur une conception de l’architecte
Charles Garnier
retenue a la suite d’un
concours
, sa construction, decidee par
Napoleon
III
dans le cadre des
transformations de Paris
menees par le
prefet Haussmann
et interrompue par la
guerre de 1870
, fut reprise au debut de la
Troisieme Republique
, apres la destruction par incendie de l’
opera Le Peletier
en
1873
. Le batiment est inaugure le
par
le president Mac Mahon
sous la
III
e
Republique.
Cet opera a ete appele ≪
opera de Paris
≫ jusqu'en
1989
, date a laquelle l'ouverture de l'
opera Bastille
, egalement opera de Paris, a influe sur son appellation. On le designe desormais par le seul nom de son architecte : ≪ opera Garnier ≫ ou ≪ palais Garnier ≫. Les deux
operas
sont aujourd'hui regroupes au sein de l'
etablissement public a caractere industriel et commercial
≪
Opera national de Paris
≫,
institution publique
francaise dont la mission est de mettre en œuvre la representation de spectacles lyriques ou de ballet, de haute qualite artistique.
L'opera Garnier est classe
monument historique
depuis le
. Il est
accessible
par le
metro
(
station Opera
), par le
RER
(
ligne A
,
gare d'Auber
) et par le
reseau de bus RATP
.
Le
,
Napoleon
III
est vise par un
attentat
,
rue Le Peletier
ou se situe la
salle d'opera Le Peletier
. Des
republicains italiens
, diriges par
Felice Orsini
, jettent plusieurs ≪
machines infernales
≫ dans le cortege et la foule qui l'entoure mais le couple imperial est miraculeusement epargne, malgre huit morts et pres de cent quarante-deux blesses. La construction d'une nouvelle salle dans une grande rue moins propice aux attentats est decidee par l'empereur, au lendemain meme du drame, pour la construction d'un nouveau grand theatre digne de Paris. Le projet est declare d'utilite publique par
arrete
imperial du
[
1
]
.
Pour certains
historiens
,
Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
semble a l'origine de l'idee d'un concours, craignant l'attribution du projet et la direction du chantier a
Charles Rohault de Fleury
, architecte ordinaire de l'Opera et donc logiquement destine a realiser cette nouvelle commande. Selon l'avis d'autres specialistes, ce sont
Napoleon
III
et surtout son epouse, l'
imperatrice Eugenie
, qui souhaitent ecarter Rohault de Fleury pour favoriser Viollet-le-Duc
[
2
]
.
Toujours est-il que le
concours
, pour l'edification d'une ≪ Academie imperiale de musique et de danse ≫
[
3
]
attendue depuis cinquante ans, est organise et annonce dans un second
arrete
du
de la meme
annee 1860
. L'usage voulait que l'on fasse appel a un architecte designe. Le prefet de Paris,
Haussmann
, en urbaniste intransigeant, propose une parcelle exigue et mal adaptee a ce projet
[
4
]
.
L'evenement est tel que les Parisiens et la province suivent le deroulement de la competition et attendent impatiemment le resultat.
Charles Garnier
(1825?1898) est
premier grand prix de Rome
en 1848. C'est toutefois un jeune architecte n'ayant pas encore fait veritablement ses preuves sur un projet de grande envergure. Ambitieux et seconde de confreres et nombreux amis de l'Ecole des Beaux-Arts, pour partie d'entre eux qui sont egalement laureats de la meme distinction, il remet un projet innovant dont les chassis portent le numero 38 et une
devise
? les projets devant rester anonymes ? qui resume assez bien le caractere de son auteur :
≪ J'aspire a beaucoup, j'attends peu ≫
.
Le jury
[
6
]
est preside par le
prince Walewski
, fils naturel de
Napoleon
I
er
et de la
comtesse Walewska
. Ce serait Alexandre Colonna Walewski qui serait a l'initiative de ce concours selon Pierre Pinon
[
7
]
. Il est confie a ce groupe d'experts la lourde charge d'examiner, en cinq sessions eliminatoires, les dessins des cent soixante et onze candidats.
Le
, Charles Garnier est proclame vainqueur a l'unanimite : sa proposition esthetique et d'une haute technicite surprend et seduit le plus grand nombre. Il reunit plusieurs
styles
harmonieusement agences qui agrementent aussi bien
elevations
et decors interieurs.
Les principales critiques vont porter d'abord sur l'exterieur et sa succession de volumes distincts qui expriment les emplacements de la salle de spectacle, de la cage de scene et des batiments administratifs qui se devinent aisement et le tout s'enchaine en une composition aussi erudite qu'evidente. Plans, coupes et
facades
sont d'une grande clarte, et le rapport de grandeur inhabituel entre le volume de la salle et celui de la scene et de ses
dispositifs sceniques
etonne. A l'interieur du theatre, les pourfendeurs du projet s'emportent face aux abondantes dorures du grand foyer et de la salle, les jugeant dispendieuses : ≪ Trop d'or ! Trop d'or ! ≫ (il s'agit en fait la plupart du temps de peintures dorees et non d'or pur)
[
8
]
; le restaurant du glacier n'existe pas, le pavillon de l'empereur dechu, ses rampes, ecuries et remises n'ont plus d'usage, la bibliotheque musicale n'est pas aboutie ; les remarques desobligeantes ne manquent pas.
Charles Garnier, architecte et auteur, explique des 1871 les tenants et motivations de son projet dans son livre
Le theatre
[
9
]
. Il publie egalement en 1878 ses conclusions apres l'inauguration et repond aux nombreuses critiques :
Le Nouvel Opera de Paris
1878 (vol.1/2)
[
10
]
puis en 1881
Le Nouvel Opera de Paris
(vol. 2/2)
[
11
]
. Il publie egalement
Le Nouvel Opera de Paris - Estampe
1/2
[
12
]
et
Le Nouvel Opera de Paris - Estampe 2/2
[
13
]
. Quatre autres publications suivent :
La sculpture ornementale
[
14
]
,
Les peintures decoratives
[
15
]
,
Statues decoratives
[
16
]
et
Bronzes
[
17
]
. Precedemment, en 1869, Garnier avait publie
A travers les arts
[
18
]
. Des l'inauguration de l'Opera a paru
Le Nouvel Opera de Paris Le monument - les artistes
[
19
]
. L'
archiviste
en titre,
Charles Nuitter
, a fait paraitre en 1875
Le Nouvel Opera
[
20
]
.
Le jour de l'inauguration du Palais qui porte son nom, Charles Garnier est promu officier de la Legion d'honneur
[
21
]
. L'
Academie des Beaux-Arts
lui rend hommage
[
22
]
en 1899.
Le choix de l'emplacement est propose, pour la competition, par le
prefet Haussmann
; c'est un terrain destine a etre entoure de hauts
immeubles de rapport
. Ses dimensions et sa forme tres particuliere resultent des recents traces voulus par l'
urbaniste
. D'importantes contraintes s'imposent ainsi aux differents concurrents puis a l'architecte laureat.
La difficulte de concevoir un edifice d'une aussi grande envergure sur une surface en
losange
et
dissymetrique
[
23
]
amene Garnier a demander divers amenagements et cela a plusieurs reprises. Mais Haussmann reste intraitable. L'architecte gardera malgre tout l'espoir que les batiments alentour seront remplaces par des
jardins
afin que les Parisiens puissent apprecier une œuvre se suffisant a elle-meme.
Les immeubles voisins font l'objet d'une entorse aux stricts reglements
[
24
]
que le prefet Haussmann a lui-meme fixes et depassent la hauteur autorisee. Les facades de l'opera risquent donc d'apparaitre plus basses que leur
environnement
[
25
]
. En reaction, le maitre d'œuvre decide de modifier ses dessins au dernier moment et de modifier l'etage
attique
pour que le projet et ses elevations conservent l'aspect prestigieux indispensable a l'edifice. L'attentat de l'
opera Le Peletier
incite a imaginer, pour les sorties au spectacle de l'empereur, un itineraire rapide et securise entre le
Louvre
et le nouvel Opera. Le percement de l'
avenue de l'Opera
parachevera ce projet.
Choix des artistes, artisans et entrepreneurs
[
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|
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]
L'architecte Garnier s'entoure de confreres rencontres pendant ses etudes et notamment d'autres grands prix de Rome qui le seconderont dans les dessins du projet definitif (plans, coupes, facades, details de construction et de decoration) et dans l'inspection reguliere du chantier.
C'est
ainsi que
Victor Louvet
,
premier grand Prix de Rome
en 1850, devient son adjoint et bras droit.
Aide de Louvet, le laureat du concours supervise le choix des entreprises et des differents
artistes
[
26
]
et
artisans
:
peintres
,
sculpteurs
,
marbriers
,
staffeurs
,
stucateurs
,
mosaistes
,
parqueteurs
,
ebenistes
,
ferronniers
,
doreurs
,
tapissiers
et autres
ornemanistes
.
Garnier fait construire un batiment provisoire dans la
rue Neuve des Mathurins
, au nord-est du chantier ; ce sera l'agence des travaux
[
27
]
qui comprend un rez-de-chaussee, un
etage
dont l'acces est permis par un escalier et une
coursive
exterieure. Des dizaines de constructions ephemeres sont dressees ; ateliers, hangars, cantines, bureau de controle des materiaux, palissades, et logement des gardiens au portail d'entree.
Le debut des travaux
[
28
]
a lieu en 1861, mais officiellement la pose de la premiere pierre se deroule l'annee suivante, le
. Lors des
fouilles
et des excavations, destinees a la realisation des massifs de
fondations
, les travaux doivent brusquement s'interrompre. Le niveau de la
nappe phreatique
[
29
]
est rapidement atteint et la situation oblige a la mise en place
[
30
]
d'un batardeau
[
31
]
et de pompes a vapeur fonctionnant jour et nuit pendant huit mois, assechant tous les puits des quartiers alentour.
Un cuvelage (ou
radier
) en
beton
[
32
]
de grandes dimensions est cree. Bientot rempli d'eau, ce dernier permet aux
infrastructures
de resister a la
pression
sous-jacente des eaux d'
infiltration
, estimee a 2000 tonnes, et de mieux repartir les charges d'une partie des batiments dans un sous-sol de qualite mediocre. Apres la construction, il sert de reservoir pour les pompiers en cas de sinistre. Cette particularite donne naissance a la legende d'un lac souterrain alimente par un cours d'eau portant le nom de ≪
Grange-Bateliere
≫, exploite et entretenu par le celebre roman de
Gaston Leroux
,
le Fantome de l'Opera
. En realite, la riviere coule plus loin, sous le futur emplacement d'un grand magasin.
La construction s'etend sur pres de quinze annees, de 1861 a 1875. Elle est soigneusement cachee derriere des
echafaudages
recouverts de planches et de
verrieres
qui masquent tout particulierement la facade principale pour que l'effet de surprise soit total, jusqu'a l'inauguration provisoire et partielle de 1867. C'est l'entrepreneur de travaux publics Adolphe Violet
[
33
]
qui a la charge de la maconnerie
[
34
]
. L'atelier des photographes Delmaet et Durandelle
[
35
]
,
[
36
]
est attache au chantier et realise de nombreux cliches durant toutes les phases de la construction
[
37
]
,
[
38
]
.
Charles Marville
[
39
]
, le photographe officiel de la Ville de Paris, photographia sur commande de celle-ci les travaux du percement de l'
avenue de l'Opera
[
40
]
. L'opera Garnier constitue le prototype et la synthese du ≪
style Second Empire
≫ (ou ≪ style
Napoleon
III
≫), qui devient le style ultra-moderne de la periode romantique a la fin du
XIX
e
siecle.
Pendant toute la duree du chantier, les fonds accordes ne cessent d'evoluer
[
41
]
selon les imprevus d'ordre technique, des aleas dus a des choix de politique interieure, mais aussi des relations internationales
[
42
]
.
Ainsi, le Conseil des batiments civils impose, tres tot, une forte reduction budgetaire en restreignant l'enveloppe globale de moitie : quinze millions de
francs-or
sont alloues au lieu des vingt-neuf annonces initialement. Pourtant le chiffre de depart est bientot depasse ; les comptes, remis a jour en 1864, aboutissent a une facture nettement plus elevee atteignant la somme de vingt-quatre millions de francs.
Le chantier est ralenti, voire interrompu a plusieurs reprises. Les credits indispensables sont parfois reaffectes a des projets juges prioritaires ou plus populaires, tels que l'
Hotel-Dieu
a Paris. Pendant la
guerre contre la Prusse
, la construction est completement interrompue. Lors de la
Commune de Paris
, l'Opera (comme d'autres monuments parisiens) subit des destructions et doit faire face a des reparations pour un montant de trois cent mille francs-or
[
42
]
(un
franc
de 1850 est evalue a 3,27
euros
[
43
]
).
A l'avenement de la
Troisieme Republique
, l'argent necessaire a la reprise des travaux est attribue avec parcimonie. Ce n'est qu'a la suite de la destruction de la
salle Le Peletier
, incendiee en octobre 1873, que l'on reunit les sommes indispensables a l'achevement du gros œuvre et de la decoration interieure. L'architecte se voit attribuer une derniere rallonge de six millions neuf cent mille francs, sous condition expresse d'achever l'edifice dans un delai d'un an et demi.
La livraison de l'opera a lieu le
, pour un montant total de trente-six millions de francs-or. Certains lieux restent inacheves comme la rotonde du Glacier et la galerie du Fumoir.
Napoleon
III
demande a Haussmann d'amenager une avenue reliant le
palais des Tuileries
, ou il reside, au batiment de Garnier. Large et dotee d'un acces direct au
pavillon
de l'empereur, cette artere permettrait au souverain de circuler sans risque d'un nouvel attentat. L'architecte de l'Opera, rejoui de voir son œuvre mise en valeur d'une facon aussi spectaculaire, dira que cette entreprise doit avoir l'effet ≪
d'une trompette que l'on souffle dans la chambre d'un malade
≫.
Mais Garnier s'oppose violemment a l'urbaniste sur un point a ses yeux essentiel : la plantation d'arbres. Rien ne doit venir perturber la perspective et dissimuler son œuvre. Haussmann est oblige de ceder. L'
avenue de l'Opera
ne s'inscrit pas, a l'origine, dans le plan d'urbanisme devant remodeler Paris. Elle demeure comme le seul percement du baron Haussmann qui n'ait pas de reelle utilite, sinon de preserver la securite du prince et de permettre la realisation d'
immeubles
de rapport ultra-modernes avec commodites et ≪ gaz a tous les etages ≫.
Ce nouvel axe de circulation devait d'ailleurs etre baptise ≪ avenue Napoleon III ≫.
L'inauguration
par le marechal
Patrice de Mac-Mahon
, se deroule le 19 septembre 1877 au milieu d'echafaudages et des immeubles en construction
[
44
]
.
Cette percee oblige a la demolition de tout un quartier, et a l'arasement definitif de la
butte des Moulins
. Les problemes lies aux nombreuses
expropriations
genent considerablement le bon deroulement des travaux et le respect des delais prevus. Ainsi, l'avenue de l'Opera n'est achevee qu'en 1879, bien apres la fin de l'edification du palais Garnier et la chute du Second Empire.
Une premiere inauguration a lieu le
pour la seule facade principale, achevee jusqu'aux
mascarons
,
guirlandes
et
bas-reliefs
les plus delicats de la
frise
de l'
attique
. En effet, a l'occasion de l'
Exposition universelle de 1867
et a la demande de l'empereur, ce morceau de bravoure si attendu est inaugure bien avant que le reste de l'ouvrage ne soit termine. L'
imperatrice Eugenie
commenta : ≪
Qu'est-ce que c'est que ce style-la ? Ce n'est pas un style !... Ce n'est ni du grec, ni du
Louis XV
, pas meme du
Louis XVI
.
≫ et Charles Garnier de repondre : ≪
Non, ces styles-la ont fait leur temps... C'est du
Napoleon
III
! Et vous vous plaignez !
≫
Les travaux sont interrompus en raison de la
guerre franco-allemande de 1870
. Les batiments inacheves sont requisitionnes pour y entreposer des vivres pour les militaires et de la paille pour les chevaux. La
defaite de Sedan
, en 1870, provoque la chute de l'Empire, l'occupation militaire de la capitale et conduit a l'episode de la
Commune de Paris
de 1871. L'avenement du gouvernement provisoire de
Thiers
, puis de la
Troisieme Republique
, ne change rien a la situation. Si, dans un premier temps, les difficultes economiques de la France ne permettent pas de poursuivre les depenses excessives engagees pour le futur opera, c'est ensuite et surtout pour le symbole qu'il represente et l'embarras qu'il cree au sein des nouvelles elites que l'on hesite a prendre la decision d'achever la commande d'un regime discredite. On ne sait que faire, sinon renvoyer Garnier et continuer a utiliser la salle de la rue Le Peletier.
Le
, le vieil
opera de la rue Le Peletier
? qui servait d'opera provisoire a Paris
depuis 1821
? est detruit dans un incendie. L'architecte est rappele pour achever le chantier du nouvel Opera ; mais il peine pour reunir ses collaborateurs disperses, les entreprises et tous les artisans qui viennent de traverser une periode d'incertitude. Des deconvenues surgiront : l'augmentation du cout des matieres premieres, la disparition d'artistes laissant des modeles inacheves, des plans non respectes entrainant des consequences decoratives irreparables.
L'inauguration a lieu le mardi
en presence du
president de la Republique
Mac Mahon
, du
lord-maire
de
Londres
, du
bourgmestre
d'
Amsterdam
, de la
famille royale
d'
Espagne
et de pres de deux mille invites venus de l'
Europe
entiere et d'ailleurs. Le programme comprend :
Charles Garnier aurait ete invite (les sources divergent sur ce point). Il doit payer sa place dans une seconde loge. Cet incident, particulierement regrettable et d'ailleurs raille par la
presse
de l'epoque ? ≪
une administration faisant payer a l’architecte le droit d’assister a l’inauguration de son propre monument !
≫ ?, exprime un rejet des nouveaux gouvernants envers ceux qui, de pres ou de loin, ont servi l'empereur dechu, mort en 1873, et l'habituelle ingratitude des puissants envers les
artistes
.
Le
, c'est le
bal masque et travesti de l'Opera
, evenement annuel du
Carnaval de Paris
, il rassemble huit mille participants
[
45
]
. La derniere edition de ce bal, cree en
1715
, s'y deroulera en
1903
.
En octobre 1896, a l'occasion de leur visite en France, le tsar russe
Nicolas II
et son epouse
Alexandra
se rendent a l'opera, ou ils assistent a une representation en compagnie du president de la Republique
Felix Faure
. A leur sortie
place de l'Opera
, vers minuit quinze, une foule nombreuse acclame le couple imperial
[
46
]
.
De 1875 a 1900
La direction du nouvel Opera est assuree par :
De 1900 a 1945
De 1900 a 1945, le palais Garnier connait trois directeurs. Un statut special leur confere, depuis la creation de l'
Academie royale de musique
par le roi
Louis XIV
en
1669
, une gestion artistique et financiere entierement privee, dite ≪ le privilege ≫. L'Etat n'apporte alors qu'une subvention relativement maigre pour la conservation du monument et non pour son fonctionnement ou sa programmation.
- Pedro Gailhard
[
47
]
, chanteur lyrique repute pour sa tessiture de
basse-chantante
, succeda a
Auguste Vaucorbeil
et fut le premier artiste a exercer cette fonction. Deja aux commandes de l'Opera depuis 1884, avec une breve interruption, il y restera au total durant 21 ans, jusqu'en 1907.
Gailhard
favorisera particulierement les productions et creations lyriques au detriment du
corps de ballet
qu'il negligera.
Claude Debussy
[
48
]
critiquera avec violence
≪ un Opera de Paris stagnant dans la routine ≫
, alors que lui-meme preparait deja des œuvres qui allaient, a l'instar de Garnier evoquant avec enthousiasme le percement de l'avenue de l'Opera,
≪ faire l'effet d'une trompette qu'on souffle dans la chambre d'un malade ≫
. Durant sa direction, une innovation technique majeure est realisee en 1903 : la centrale thermique et ses generateurs
[
49
]
, qui assuraient depuis 1887, l'autonomie de la production d'electricite
[
50
]
en sous-sol, cederent la place au modernisme en recevant la fourniture du reseau parisien (bientot gere par la
Compagnie parisienne de distribution d'electricite
) devenu apte a delivrer toute la puissance necessaire a un theatre si vaste. Ayant quitte l'Opera et l'Europe, Pedro Gailhard se rendra aux Etats-Unis pour assurer la direction du Conservatoire national de musique a New-York
[
51
]
.
- Andre Messager
,
Celebre compositeur et chef d'orchestre, administre l'Opera a partir de 1907. Des son arrivee, il renove
[
52
]
entierement la salle de spectacle, les sols, les fauteuils, les peintures et agrandit la fosse d'orchestre. Il dirige pendant sept ans, jusqu'au debut de la
Premiere Guerre mondiale
en 1914. Durant cette periode, il a pour co-directeur
Leimistin Broussan
. Le journal de regie de
Paul Stuart
, regisseur general et metteur en scene, revele le detail de l'organisation
[
53
]
. Messager nomme
maitre de ballet
le danseur et choregraphe russe
Ivan Clustine
qui renovera le corps de ballet. Messager et Broussan devront gerer les degats materiels de la
crue centennale
de la Seine, l'inondation totale des gigantesques caves du theatre des le
, noyant les nombreux caloriferes, les reseaux electriques et les machineries des dessous de la cage de scene. Durant sa direction,
Leo Staats
sera le maitre de ballet et enseignant (jusqu'en 1939) qui redonnera a la danse masculine une importance perdue dans le romantisme du siecle precedent.
Sous la direction de Messager, l'Opera accueillera les concerts russes de
Serge Diaghilev
des 1907, ce qui n'ira pas sans mal avec les musiciens titulaires de l'orchestre. Messager, epris de modernisme, negocie en 1909 avec Diaghilev une representation extraordinaire des
Ballets russes
; le succes est de grande ampleur. L'annee suivante, c'est toute la deuxieme saison de la troupe du ballet de Diaghilev qui s'est deroulee a l'opera Garnier, ou eurent lieu une dizaine de creations choregraphiques dont
L'Oiseau de feu
en 1910 avec la musique de
Stravinsky
et
Tamara Karsavina
dans le role-titre. La plupart des ballets sont toujours au repertoire de l'opera Garnier. Le succes public phenomenal de la premiere saison des Ballets russes au
theatre du Chatelet
avait apporte un souffle neuf dans les mondes de la choregraphie, la musique, la peinture des decors et les costumes. Le public d'alors etait avide d'art contemporain.
- Jacques Rouche
est nomme le
a la tete de l'Opera qui, ferme pour cause de guerre, ne rouvrira partiellement qu'en decembre. Cela lui donne du temps pour elaborer des projets, des programmes et une modernisation de cette Academie. Il obtient le statut de
MH
[
54
]
pour le Palais Garnier par decision du
de la
Commission superieure des monuments historiques
: l'architecture, les decorations interieures et exterieures sont classees, quarante-huit ans apres l'inauguration du monument de Garnier. Son livre
L'art theatral moderne
[
55
]
,
[
56
]
publie en 1910, reedite en 1924 avec traduction en anglais, contient les propositions qu'il met en œuvre. Rouche est le premier directeur a organiser la retransmission radiophonique en direct des spectacles de l'Opera quand la
radio
apparait en
1924
. Durant son mandat a lieu la creation en 1928 du ballet contemporain
Bolero
compose la meme annee par le compositeur
Maurice Ravel
. Cree par
Ida Rubinstein
, c'est un succes considerable qui sera interprete durant des decennies.
Rouche se lie d'amitie avec Diaghilev ; apres la mort de ce dernier (1929) et la fin des Ballets russes, il retient les talents de
George Balanchine
,
Serge Lifar
et bien d'autres qui apportent a l'Opera, son corps de ballet et son ecole, une notoriete mondiale mais aussi des recettes de billetterie qui triplent lors des creations. Les decorateurs
Leon Bakst
,
Alexandre Benois
et
Natalia Gontcharova
inspirent les generations suivantes. Le directeur est un ardent promoteur de la creation contemporaine, tant lyrique que choregraphique. Il connait une annee 1936 difficile : le 6 mars, le rideau de fer ne peut etre ouvert car sa machinerie est bloquee avant le debut du spectacle, la representation de
Castor et Pollux
est annulee. Le theatre est ferme le 30 juin pour effectuer des travaux de renovation de la salle de spectacle et surtout des modifications structurelles de la cage de scene (installation du gigantesque panorama par l'architecte
Joseph Marrast
). Les representations reprennent le
au
theatre Sarah Bernhardt
(aujourd'hui Theatre de la Ville), mais un incendie se declare dans le palais Garnier le 13 septembre vers minuit dans la cage de scene, toutefois maitrise en deux heures par les pompiers. Les travaux de refection se prolongent et l'Opera se delocalise le 30 novembre au
theatre des Champs-Elysees
, ou il reste jusqu'au
, date de la reouverture du palais avec une representation de
Lohengrin
. En 1938, l'Opera est l'objet de grands travaux souterrains pour l'installation de son raccordement au reseau de chauffage de la
CPCU
. Un nouveau systeme de climatisation est mis en place dans la salle de spectacle.
Dans le domaine lyrique, Jacques Rouche convie une generation de compositeurs francais contemporains
[
57
]
a creer pour l'Opera tout en ouvrant le repertoire aux œuvres etrangeres, avec
160 creations
, dont :
Padmavati
d'
Albert Roussel
,
Le Jardin du Paradis
d'
Alfred Bruneau
,
Le Chevalier a la rose
et
Elektra
de
Richard Strauss
,
Marouf, savetier du Caire
d'
Henri Rabaud
,
Turandot
de
Giacomo Puccini
,
La Tour de feu
de
Vittorio Rieti
,
Œdipe
de
Georges Enesco
,
L'Enfant et les sortileges
de
Maurice Ravel
,
Le Marchand de Venise
de
Reynaldo Hahn
,
Medee
de
Darius Milhaud
[
58
]
. Cela represente egalement la creation de plus de
700 decors
et
5000 costumes
. L'Opera emploie alors plus de mille personnes.
En raison de la faillite de l'
Opera-Comique
en 1932, l'Etat crea la
Reunion des theatres lyriques nationaux
(RTLN) pour assurer la gestion artistique et financiere des deux salles, l'Opera-Comique devenant une succursale de l'Opera. Jacques Rouche en est le president de 1939 a 1944. Apres avoir pris le chemin de l'exode selon les directives gouvernementales, avec une partie de l'orchestre au debut de la
Seconde Guerre mondiale
, Rouche est oblige par le
gouvernement de Vichy
de revenir a Paris pour se soumettre a l'
occupation allemande
et, pousse par le nombreux personnel, a garder la direction de l'Opera. A l'automne 1940, les lois d'exclusion a l'encontre des
Juifs
l'obligent a se separer d'une cinquantaine de personnes, mais il maintient leur remuneration jusqu'en decembre 1942. Bien que la Charte du travail d'octobre 1941 ait dissous les syndicats, Jacques Rouche continue a negocier avec eux des indemnites de vie chere, des secours pour les salaries mobilises, il obtient des cartes de travailleurs de force pour les machinistes afin de leur eviter le
S.T.O.
Enfin, il aide financierement plusieurs artistes juifs a quitter l'Europe, notamment
Darius Milhaud
et
Ernest Klausz
. Rouche doit se plier a certaines exigences artistiques imposees par les autorites allemandes, comme des concerts donnes par l'orchestre philharmonique de
Berlin
, mais le theatre reste en etat de marche, dans des conditions tres difficiles, comme le rapporte la danseuse
Claude Bessy
, jeune ballerine, dans ses Memoires
[
59
]
:
≪ le theatre n'etait pas chauffe en hiver ≫
. En cette periode troublee, le chef-tapissier
Jean Rieussec
s'investit au sein du palais a organiser discretement une section de la
Resistance
qui s'etendra aux
musiciens
de l'orchestre et dans le
9
e
arrondissement.
A la
Liberation
, les
Chambres civiques
, instaurees pour mettre en œuvre l'
epuration voulue par le gouvernement provisoire
, reprochent a Rouche d'avoir entretenu une collaboration avec l'ennemi pendant l'
Occupation
[
60
]
; par consequent, le president de la RTLN et administrateur de l'Opera est alors revoque par l'Etat, bien que les syndicats, tout le personnel et les artistes (avec en tete la danseuse etoile
Yvette Chauvire
) temoignerent en sa faveur. Lave des soupcons de
collaboration
, il est acquitte par la Justice, mais prefere se retirer definitivement de la vie artistique a Paris. Rouche est reste directeur pendant trente ans
[
61
]
en apportant son mecenat personnel qui a ete estime, selon les archives, a
23 millions
de francs-or (environ
12 millions
d'euros).
Jean Cocteau
dira :
≪ S'il fallait faire la liste des artistes que Jacques Rouche a aides, encourages, propulses sur le devant de la scene, un dictionnaire n'y suffirait pas ≫
[
62
]
. En 1971, la
Mairie de Paris
a decide d'honorer ce directeur par la creation d'une
Place Jacques Rouche
a la croisee des rues
Halevy
,
Gluck
et
Meyerbeer
. Ses deux predecesseurs n'avaient ete honores que par deux salles de repetition portant leur nom.
Depuis 1945
A partir de 1945, une vingtaine de directeurs se succedent a la tete de l'Opera :
Composition architecturale et distribution des batiments
[
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]
Charles Garnier, tout comme ses devanciers
Jacques-Germain Soufflot
(
opera de Lyon
) et
Victor Louis
(
Grand Theatre de Bordeaux
et
salle Richelieu
pour la
Comedie-Francaise
), deploie une
architecture
spectaculaire. Il souhaite eriger un monument d'inspiration
eclectique
, obeissant ainsi a la mode de son temps, les facades de son theatre lyrique devant offrir un spectacle permanent au pieton de Paris. Son œuvre, qui deviendra l'un des exemples les plus celebres du style propre a la periode
Napoleon
III
, revele un temperament aux penchants multiples et une attraction particuliere pour l'art
baroque
. Si l'architecture de Garnier reunit plusieurs styles, c'est pourtant le baroque, tres en vogue dans les constructions
theatrales
, qui prevaut.
En fidele admirateur de
Victor Louis
et tout en reprenant les caracteristiques essentielles de la salle Le Peletier, les sources d'inspiration de l'architecte sont, en dehors du Grand-Theatre de Bordeaux, les palais
italiens
de la
Renaissance tardive
qu'il a eu le loisir de remarquer durant son sejour a la
Villa Medicis
. Sa periode estudiantine et ses voyages
mediterraneens
le portent de maniere evidente vers le respect des regles et des
ordres architecturaux
et autres subtilites de l'
art
du ≪
Siecle de Pericles
≫. Pour
Hugues Gall
, ancien directeur de l'opera Garnier,
≪
Victor Louis est l’architecte a l’origine de toute la conception qu’a developpee Garnier. Le Grand Theatre de Bordeaux l’avait fascine... avec l’idee de grand salon d’entree, celle des loges et des corbeilles...
≫
[
63
]
.
Garnier tient a superviser lui-meme la
conception
des moindres details des batiments. Il dit avoir pense au parti de
Michel-Ange
pour le plan de la
basilique Saint-Pierre
de Rome, concevant et dessinant ses propres plans architecturaux. Le parti obeit a une
symetrie
rigoureuse a laquelle doivent se plier, dans une grande majorite des cas, les grands
programmes
traites par les
praticiens
sortant de l'Ecole des Beaux-Arts de Paris.
L'ensemble possede une emprise au sol de 12 000
m
2
[
64
]
et une surface dans l’œuvre totale de 58 000
m
2
(la plus grande du monde a l'epoque, et ce jusque dans les annees 1970), 172
m
de long, 101
m
de large et 79
m
d'elevation. La vaste salle de spectacle peut recevoir environ 2 000 spectateurs. Une
maquette
en coupe longitudinale, (L 5,78m - H 2,40m - P 1,10m, ci-dessous en haut a droite) exposee au
Musee d'Orsay
a ete realisee en 1986 par
Richard Peduzzi
qui a choisi de reproduire l'Opera selon les plans originaux de Garnier
[
65
]
.
L'architecte surprend par la diversite des materiaux utilises. Il use, en effet, d'une decoration eclectique, parfois chargee, mais toujours fastueuse et elegante. A l'exterieur comme a l'interieur, le jeu de la
pierre d'Euville
aux nuances blondes, des marbres de couleur et des parties recouvertes d'
or
souligne la qualite du dessin et des proportions et offre a l’œil averti une profusion de details architectoniques. Pour expliquer ce choix d'une grande diversite
chromatique
, Garnier pretend qu'il veut aller a l'encontre de ≪ la tristesse de l'
urbanisme haussmannien
≫.
Admirateur des techniques utilisees par son devancier Victor Baltard
[
66
]
, l'architecte utilise le
fer
et la fonte partout ; la partie des
structures
, tels certains
piliers
, tous les
planchers
maconnes et toutes les
charpentes
sont en metal. Les poutres de longue portee sont composees de metal en lames assemblees par
rivetage
, mode de
construction
en plein developpement dans la seconde moitie du
XIX
e
siecle. Les parquets visibles sont assembles sur lambourdes scellees au bitume sur des sols incombustibles. La salle de spectacle, contrairement a ce que laisse paraitre son habillage, est a la base un volume constitue d'un assemblage metallique qui supporte les charges de ses differents niveaux. Si Garnier reconnait les possibilites nouvelles apportees par ce materiau, il n'en goute cependant pas l'aspect et le cache soigneusement sous la pierre, le
platre
, le
stuc
et tout autre procede de decoration appartenant a la tradition classique. Il ne se sert du metal que pour les aspects pratiques qu'il peut lui apporter : facilite et rapidite de mise en œuvre, legerete.
La pose de
cablages
et l'
electrification
integrale du batiment quelques annees plus tard est facilitee par les conduites de gaz qui avaient ete prevues des la construction pour alimenter les eclairages (les grandes torcheres, par exemple).
La grande
facade
, donnant sur la
place de l'Opera
et situee au carrefour de nombreuses percees haussmanniennes, sert de toile de fond a la
perspective
de l'avenue qui sera ouverte un peu plus tard. Elle constitue, en quelque sorte, le
manifeste
de l'artiste. Son trace et ses
proportions
savants comme sa riche polychromie expriment, en une
synthese
habile, l'essence meme de l'architecture eclectique.
Garnier a choisi lui-meme les quatorze
peintres
, les
mosaistes
ainsi que les soixante-treize
sculpteurs
, dont le celebre
Jean-Baptiste Carpeaux
, devant participer a son
ornementation
.
Les quatre groupes principaux en facade sont de gauche a droite :
- La poesie
de
Francois Jouffroy
(avec ses palmes) ;
- La musique instrumentale
d'
Eugene Guillaume
(avec ses instruments de musique) ;
- La Danse
de
Jean-Baptiste Carpeaux
, dont les personnages denudes provoquerent le mecontentement de Parisiens choques (un inconnu alla jusqu'a lancer un encrier sur le chef-d'œuvre de l'artiste dans la nuit du 26 au
) ;
- Le drame lyrique
de
Jean-Joseph Perraud
(avec sa victime agonisante).
Les emmarchements et la
galerie couverte
a
arcades
et
coupoles
plates sur
pendentifs
soutenant la
loggia
forment le point de depart, des l'entree principale sud, d'un cheminement
initiatique
dont l'aboutissement n'est autre que la grande salle et le spectacle qui s'y tient. Garnier a concu la succession des espaces dans le seul but de mettre en condition les futurs spectateurs. Ainsi, les premieres
marches
, situees a l'exterieur du monument, marquent deja la frontiere entre deux mondes ; le premier, celui de la realite et du quotidien, le second, celui du reve et de l'imaginaire. Les differentes statues qui encadrent les entrees sont surplombees de medaillons sculptes par
Charles Gumery
. Ces medaillons representent les compositeurs
Johann Sebastian Bach
,
Domenico Cimarosa
,
Joseph Haydn
et
Giovanni Battista Pergolesi
.
La
loggia
, soulignee par le
portique
du premier
etage
, se presente comme un prolongement du grand foyer donnant sur la
place de l'Opera
. Peu utilise, il est cependant indispensable a l'equilibre du plan comme a celui des elevations frontales et
laterales
. Cette loggia s'inspire directement des maitres de la
Renaissance italienne
tels
Vignole
,
Serlio
ou
Palladio
, de ceux du
classicisme
des
XVII
e
et
XVIII
e
siecles francais comme
Claude Perrault
,
Jules Hardouin-Mansart
ou
Ange-Jacques Gabriel
. Quant au gout prononce pour la polychromie, il est l'expression d'une mode declenchee par des recherches
archeologiques
des
Grands prix de Rome
du
XIX
e
siecle pour leurs ≪ envois ≫, de la
Villa Medicis
, aux membres de l'
Academie des beaux-arts
. La loggia est surplombee de bustes realises par
Louis-Felix Chabaud
qui representent les compositeurs
Daniel-Francois-Esprit Auber
,
Ludwig van Beethoven
,
Giacomo Meyerbeer
,
Wolfgang Amadeus Mozart
,
Gaspare Spontini
,
Philippe Quinault
,
Gioachino Rossini
et
Fromental Halevy
.
Cette elevation est visible depuis les rues
Auber
et
Scribe
ainsi que depuis la
place Charles-Garnier
.
L'entree est indiquee par une suite de
colonnes
de marbre vert dont deux sont surmontees d'un grand
aigle imperial
en bronze,
symbole
miraculeusement preserve apres le Second Empire. L'entree etait destinee au seul
Napoleon
III
et a ses proches. La double
rampe
devait leur assurer une circulation securisee et abritee des intemperies en permettant aux voitures de s'arreter a l'interieur meme du
pavillon
de l'Empereur. Les critiques sont particulierement acerbes au sujet de la forme et de la disposition de cet acces depuis la future
place Charles-Garnier
. On juge que l'architecte fait la œuvre de courtisan et non plus de concepteur rigoureux, il a neanmoins respecte le cahier des charges qui lui avait ete impose. Pour ses detracteurs, le dessin de cette rampe contraste de maniere trop brutale avec les autres composantes du plan general. L'ouvrage constitue une entorse a la rigueur de la composition et au bon gout le plus elementaire.
En raison des evenements de 1870, cette partie flanquant la facade ouest de l'Opera fut longtemps inachevee : plusieurs pierres d'
appareillage
non
epannelees
resterent visibles jusqu'a la renovation de la facade en 2010 ou les elements manquants furent termines . Prevu pour que
Napoleon
III
et sa suite puissent penetrer directement au sein de l'edifice et limiter ainsi les risques d'agression, le pavillon de l'Empereur communique directement avec une loge d'avant-scene du cote jardin. Ce sont finalement les presidents de la Republique qui ont l'usage de cette distribution ingenieuse assurant securite et discretion. Cet element de la composition est aussi denomme ≪ pavillon du Chef de l'Etat ≫.
A la mort de l'architecte Garnier, en 1898, il est decide d'eriger un petit
monument
en son souvenir et a sa gloire, qui est inaugure durant l'
annee 1903
. On l'installe au pied de la rotonde de l'Empereur et en retrait des
grilles
qui en protegent l'acces. On peut ainsi decouvrir un
buste
representant Charles Garnier accompagne, de chaque cote, d'un personnage feminin en pied realise egalement en
bronze
dore. Cet ensemble sculpte est pose sur un socle de pierre supportant un grand
cartouche
de metal rectangulaire dont la
ciselure
represente, en creux et doree a la feuille, le plan du niveau principal de l'opera.
Cette elevation est visible depuis les
rues Halevy
et
Gluck
ainsi que depuis la
place Jacques Rouche
.
L'entree est precedee, comme celle situee a l'ouest, d'une suite de
colonnes
de marbre vert. Seules, plusieurs
figures
feminines en pied, porte-torcheres en bronze, marquent la difference avec l'acces oppose.
Formant le pendant du pavillon de l'Empereur, le pavillon des abonnes est ouvert par sept arcades en plein cintre donnant acces a la descente a couvert, vaste rotonde couverte d'une coupole de 14
m
de diametre. Deux paires d'obelisques marquent les entrees de la rotonde au nord et au sud. Ce volume avait ete concu a l'origine pour permettre un acces privilegie aux voitures attelees de la clientele abonnee qui louait des loges a l'annee, assurant une part tres importante et reguliere du financement de l'Opera. Cet acces conduit directement a la rotonde des
abonnes
. Ils pouvaient ensuite passer devant le Bassin de la Pythie pour rejoindre l'escalier d'honneur, comme le reste du public.
Garnier avait envisage l'installation d'un restaurant a l'etage dans la rotonde du Glacier, mais pour des raisons budgetaires seul un buffet fut amenage. En 1973 puis en 1992, deux autres projets furent envisages dans la rotonde des abonnes et la descente a couvert, mais resterent sans suite. En 2007, le directeur Gerard Mortier entreprend l'installation d'un restaurant au niveau de la ≪ descente a couvert ≫ qui ne servait plus alors que de lieu de stockage pour les travaux de restauration sur le batiment. Ce quatrieme projet de restaurant porte par
Pierre Francois Blanc
voit le jour le
a l'issue de cinq annees de travail
[
67
]
. Ce projet ultra-moderne concu par l'architecte
Odile Decq
, a recu l'avis favorable de la
Commission nationale des monuments historiques
le
. Le Chef etoile
Christophe Aribert
signe la premiere carte de
L'Opera Restaurant
. En mars 2019, le restaurant est rebaptise "Coco".
Une cour pavee, ceinte d'un mur circulaire, integre un portail monumental
[
68
]
au tympan sculpte, ainsi que deux autres portails
[
69
]
et deux portes secondaires realises en ferronnerie. Les entrees de service se trouvent a l'arriere du batiment. L'ensemble
[
70
]
imposant, du cote nord, est constitue de parties aux formes et reliefs divers ainsi que deux autres parties, a l'est et l'ouest, s'articulant en retour sur les cotes de la cage de scene et jusqu'aux deux pavillons lateraux. Cette partie de l'edifice, nommee l'Administration, abrite les bureaux, les loges des artistes, des magasins utilitaires, des ateliers etages sur huit niveaux.
Cette facade d'un style classique sobre
[
70
]
est moins decoree que la spectaculaire facade principale mais l'architecte a dirige l'ornementation sur les toits des cinq blocs dont les deux avant-corps, orientes au nord, qui presentent, symetriquement, une vingtaine de souches de cheminees (totalisant
150 conduits
de fumee) ornementees d'etranges masques allegoriques
[
70
]
autrefois surmontes de couronnements en fonte cuivree (disparus vers 1930). Le fronton de la cage de scene comporte un
membre
principal : une grande arcade (de meme dimension que le cadre de scene) qui est surplombee en clef par une des plus grandes sculptures ornementales du palais, un buste de
Minerve
haut de cinq metres, borde de palmes, qui surmonte une grande baie bordee de piedroits ornes des
masques
de la comedie et de la tragedie. Cette facade nord comprend une rangee d'œils-de-bœuf grilles en fonte cuivree ou revetus d'un decor de lyres en mosaique, au-dessus d'une serie de barbacanes qui sont au niveau des troisieme et quatrieme passerelles de service dans les cintres. L'arriere-corps central comprend, jusqu'au septieme niveau : les locaux etages de la salle de repetition des chœurs, la loge des figurants hommes (autrefois nommes comparses), le Foyer de la danse, le magasin a deux niveaux dit le
central-costumes
[
71
]
(les menuiseries d'origine, en pitchpin, font l'objet d'un classement protege) borde d'ateliers pour les couturieres et les tailleurs. Deux cours interieures sont perpendiculaires au mur arriere de la scene. Dans la cour d'entree, la haute porte des decors ouvre vers un monte-charge d'une capacite de onze tonnes pouvant recevoir des decors longs de douze metres, livres au quatrieme niveau, a l'etage de la scene.
Le grand dome central est
couvert
de cuivre
[
72
]
qui, une fois oxyde, prend une couleur verte. Autrefois, les domes des deux pavillons etaient egalement couverts de meme, aujourd'hui ils sont en zinc, comme les autres toits de l'edifice. Certaines decorations des domes couvrant les deux pavillons lateraux sont en plomb. La lanterne du grand dome est en cuivre repousse, dore. Garnier avait projete de dorer les cotes et nervures de ces trois domes mais cette proposition deja en cours a ete abandonnee a la reprise du chantier en 1870.
La facade est surmontee par les
Renommees
, deux groupes realises par
Charles Gumery
,
l'Harmonie
(a gauche) et
La Poesie
(a droite). Ces statues d'une hauteur de 7,50 metres, ont ete restaurees et leur structure interne, en fer, a ete remplacee par de l'inox. Leur dorure d'origine avait ete realisee par
galvanoplastie
dans les ateliers de l'entreprise d'orfevrerie
Christofle
. L'entablement de l'attique est couronne d'une frise en fonte peinte avec un vernis dore, une suite de masques alternes de guirlandes, œuvre du sculpteur
Jean-Baptiste-Jules Klagmann
. Le fronton de la cage de scene est orne de deux
acroteres
(est et ouest) identiques,
La
Renommee
retenant
Pegase
(par
Eugene-Louis Lequesne
), cependant que le sommet recoit l'ensemble forme par
Apollon couronnant la Poesie et la Musique
, d'
Aime Millet
. Ce groupe, haut de 7,50
m
et d'un poids de treize tonnes, fait office de paratonnerre ; il est en bronze naturel, seule la lyre etant doree ; il a ete sculpte directement sur le chantier
[
73
]
par Millet, puis realise en six mois en 1869 par l'atelier Deniere
[
74
]
, et enfin assemble en deux mois au sommet de l'Opera en 1870.
-
L'Harmonie
par Charles Gumery.
-
Le groupe d'Apollon avec la Musique et la Poesie
par Aime Millet.
-
Dome du Glacier (gauche) sur le studio Chauvire.
-
La Poesie
par Charles Gumery.
-
La Renommee retenant Pegase
(cote ouest) par Eugene Lequesne.
-
Grand dome en construction. Au premier plan, la verriere du grand escalier. A gauche, un groupe de couvreurs debout.
-
Le grand dome devant la cage de scene.
-
Lanterne de ventilation (D.8 m) sur le grand dome.
-
Deux danseurs s'amusant sur le toit de l'opera Garnier a l'ete 1928.
L'exterieur de l'opera est entoure par soixante luminaires varies
[
75
]
, qui fonctionnerent au gaz jusqu'en 1954. L'ensemble comprend : les
lampadaires
, les
cariatides
(du jour et de la nuit, selon leur position sur les facades laterales est et ouest, sculptees par
Louis-Felix Chabaud
), les
candelabres
, les colonnes pyramidales en marbre fleur de pecher, les
colonnes rostrales
et les colonnes imperiales en
marbre bleu turquin
. Certains luminaires n'avaient pas pu etre realises en bronze, comme le souhaitait Charles Garnier, c'est donc simplement une fonte cuivree qui en constitue la matiere.
Depuis 1990, certains elements ont ete etayes en raison des fortes vibrations provenant du sous-sol (metro) et de la circulation automobile, puis des socles de pierre ont ete changes et des balustrades endommagees ont ete entierement restaurees a l'identique, tout comme les colonnes imperiales (dont le marbre provient d'une carriere italienne rouverte pour l'occasion). Cette restauration a ete financee par un large mecenat organise par l'
AROP
[
76
]
et celebree le
.
Distributions, volumes et decors interieurs
[
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|
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]
Les emmarchements et la galerie de l'entree principale menent les spectateurs a un premier
vestibule
voute en berceau. Quatre sculptures en pierre de grandes dimensions attirent immediatement le regard. A l'effigie de grands
compositeurs
des
XVII
e
et
XVIII
e
siecles, elles representent a echelle plus grande que nature et, de gauche a droite,
Rameau
,
Lully
,
Gluck
et
Haendel
en position assise (chacun representant la musique d'un pays : France, Italie, Allemagne et Grande-Bretagne).
L'endroit assure la billetterie pour le public n'appartenant pas au cercle des abonnes. Les
guichets
, encadres de
pilastres
et de
colonnes
engagees a
dosseret
et surmontes chacun d'un
fronton
sculpte, ont ete dessines par Garnier en personne. Le vestibule abrite egalement une petite boutique, de fabrication recente, a la fois
librairie
et lieu de vente de souvenirs.
Cette galerie interieure conduit ensuite, apres avoir franchi quelques
marches
, au
vestibule du Controle
puis au grand escalier.
Espace-tampon entre le grand vestibule et l'escalier d'honneur et separe d'eux grace a de larges degres comprenant seulement quelques marches, il permet le filtrage des entrees avant que les spectateurs, munis de leurs billets, ne puissent acceder a la grande salle et a la representation.
Dans le jargon des theatres, le ou les guichets et comptoirs de ce vestibule se nomment
boites a sel
car c'est la qu'on trouvait les flacons de sel a respirer pour ranimer les spectatrices qui s'evanouissaient. Ces
sels de pamoison
etaient
volatils et constitues principalement de carbonate d'ammonium et autres vinaigres.
L'habillement feminin avec les corsets en usage au
XIX
e
siecle est une des raisons de cet usage dans les lieux publics.
Vestibule circulaire dit Rotonde des abonnes
[
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]
Le nom de Charles Garnier est cache dans l'ornementation au plafond du vestibule circulaire.
Charles Garnier a signe son œuvre dans le medaillon central de la voute formant le plafond de cette salle sous forme d'
arabesques
ou l'on parvient a lire :
≪ JEAN LOUIS CHARLES GARNIER ARCHITECTE 1861-1875 ≫
.
-
Bassin de la Pythie sous l'escalier d'honneur.
-
Medaillon et signature en arabesques.
-
Vestibule et voute de la rotonde des abonnes.
-
Colonnade circulaire en pierre rouge de
Sampans
.
Au meme niveau, au pied du Grand Escalier, on trouve le bassin ou fontaine de La
Pythie
ou un jet d'eau formait, autrefois, un voile brumeux au travers duquel on apercevait la statue de la Pythie, oracle du temple d'Apollon, une œuvre sculptee par ≪
Marcello
≫, nom d'artiste d'Adele d'Affry, duchesse de Castiglione-Colonna. S'y dressent aussi des
cariatides
en marbre polychrome dues au
ciseau
de Jules Thomas.
D'autres espaces destines a l'agrement du public precedent ou accompagnent les
foyers
, telle la ≪ rotonde du Glacier ≫ placee a l'extremite de la
galerie
du
bar
. Au debut du
XX
e
siecle, une sonnette, installee dans toutes les loges de la salle de spectacle, permettait de s'y faire servir directement les boissons commandees. Lieu de distribution de rafraichissements, il se caracterise par sa luminosite et son plafond peint par
Georges Jules-Victor Clairin
, une ronde de
bacchanales
et de
faunes
. Tout autour est disposee, entre les fenetres, une serie de huit tapisseries d'apres des cartons peints par
Alexis Joseph Mazerolle
. Ces œuvres representent les diverses boissons que l'on peut commander : ≪ le
champagne
≫, ≪ le
cafe
≫, ≪ le
the
≫, ≪ l'orangeade ≫ et autres breuvages, mais aussi ≪ la
peche
≫ et ≪ la
chasse
≫. Achevee bien apres l'ouverture de l'Opera, la rotonde s'approche du style propre a la ≪
Belle Epoque
≫ ou aux ≪
annees 1900
≫.
Lieux de deambulation et de rencontre entre les spectateurs avant chaque representation ou au moment des entractes, les
foyers
sont vastes et la riche decoration ne laisse pas le moindre centimetre carre inutilise. La
mosaique
est omnipresente, notamment dans l'avant-foyer (ou ≪ foyer des Mosaiques ≫), espace de
transition
entre le vide du grand escalier et le grand foyer. La
voute en berceau
de l'avant-foyer est couverte de
tesselles
a la mise en œuvre delicate et aux couleurs eclatantes, le tout place sur un fond dore a la feuille. Une vue plongeante sur le grand escalier agremente les lieux.
La conception du grand
foyer
s'inspire des dispositions et de l'inspiration decorative des
galeries
des chateaux de la
Renaissance francaise
du
XVI
e
siecle (
chateau de Fontainebleau
) et du
XVII
e
siecle (
galerie d'Apollon
au
Louvre
,
galerie des Glaces
a
Versailles
). Un savant jeu de
miroirs
et de baies ouvrant sur les
rues
et
facades
environnantes vient encore accentuer ses vastes dimensions. Cet endroit est pense, a l'origine, comme un point de rencontre des spectateurs toutes categories sociales confondues.
Comprenant cinq
travees
, le grand foyer est agremente de part et d'autre d'un
salon
. Du cote de l'avant-foyer, trois larges ouvertures donnent acces aux circulations qui menent aux galeries du grand escalier, puis a la salle. Le foyer s’ouvre sur une loggia exterieure et est flanque de deux salons octogonaux avec des plafonds peints par
Jules-Elie Delaunay
dans le salon de l’Est et
Felix-Joseph Barrias
dans le salon ouest. Les salons octogonaux s’ouvrent au nord dans le Salon de la Lune a l’extremite ouest de l’Avant-Foyer et le Salon du Soleil a son extremite est. De part et d'autre de la porte axiale, de grands
miroirs
, d'une hauteur approchant les six metres, montent a partir du
parquet
et des
lambris
. Sur l'autre face, cinq grandes portes-fenetres en constituent les pendants et indiquent l'acces a la
loggia
.
Sur les
murs
, se trouvent vingt elegantes
statues
, allegories des ≪ Qualites ≫ indispensables aux artistes des arts lyrique et choregraphique. Un plafond a
voussures
, peint par
Paul Baudry
, figure les grandes etapes de l'histoire de la
Musique
, de la
Comedie
et de la
Tragedie
et decline plusieurs aspects de leur thematique propre.
La
lyre
forme, comme en de tres nombreux endroits exterieurs et interieurs de l'edifice dont la salle de spectacle, un element decoratif de predilection ponctuant, de maniere presque systematique, differentes
modenatures
,
chapiteaux
,
grilles
de
chauffage
et poignees de
porte
.
Jusqu'au
XIX
e
siecle et comme le veut la tradition, les foyers des lieux de spectacle sont reserves a l'usage exclusif des representants de la gent masculine. Les dames recoivent pendant ce temps dans leur loge respective. Mais le jour de l'inauguration du palais Garnier, la reine d'Espagne desire admirer la galerie du grand foyer. Le tabou brise, elle est aussitot suivie de son entourage immediat, puis des autres dames de la bonne societe de l'epoque qui ne souhaitent pas demeurer en reste
[
77
]
,
[
78
]
.
A l'insu de Charles Garnier, ses collaborateurs demandent a plusieurs ouvriers de sculpter deux
bustes
dores d'
Apollon
a son image. Ces deux œuvres figurent a hauteur du plafond. Une autre copie de la representation en buste de l'architecte, sculptee par Carpeaux, trone au centre du grand foyer et a proximite d'une
fenetre
donnant sur la perspective de l'avenue de l'Opera.
En 1928, un regrettable incendie prive le grand foyer de ses rideaux et tentures or ; ceux-ci ne sont retablis qu'a l'occasion d'une restauration integrale de la galerie, achevee en 2004.
Placees aux extremites est et ouest de l'avant-foyer, deux rotondes de taille modeste sont peintes par les
decorateurs
Philippe Marie Chaperon et Auguste Alfred Rube, amis de Garnier.
Sur les voutes du Salon de la
Lune
et du Salon du
Soleil
dominent, dans l'un, les
tonalites
froides de l'
argent
, avec des representations d'oiseaux de nuit (
hiboux
et
chauves-souris
) et, dans l'autre, les
tons
chauds de l'
or
, au milieu d'un decor de
salamandres
. Des
miroirs
etames
, les premiers de couleur froide et les seconds a dominante chaude, recouvrent respectivement leurs parois et se refletent a l'infini pour former des ≪
chemins de lumiere
≫.
-
Plafond du salon de la Lune.
-
Plafond du salon du Soleil.
-
Plafond du salon de la Lune.
L'ouvrage est remarquable par son trace, la hauteur et le volume de sa
nef
inedits jusqu'alors, la magnificence de ses facades interieures et la variete des materiaux employes (
marbres
aux couleurs subtiles,
onyx
et
cuivre
des mains-courantes, innombrables
peintures
,
mosaiques
et
dorures
). L'ampleur et l'ingeniosite de ses
distributions
comme de sa decoration ont fait de ce grand escalier l'un des endroits les plus celebres et les plus apprecies du palais Garnier.
Au pied de l'
escalier
, deux
statues-torcheres
en
bronze
de
Albert-Ernest Carrier de Belleuse
(dit Carrier-Belleuse) representent des figures feminines tenant des
eclairages
au
gaz
, puis
electriques
. L'escalier est en marbre blanc et ses
marches
sont reparties en plusieurs degres aux larges et impressionnantes volees elancees aux
courbures
raffinees
. Les marches du grand escalier, qui vont du concave au convexe, sont en marbre blanc de
Seravezza
; seule l’une d’entre elles est droite. Elles epousent ainsi la courbure de la balustrade en onyx, dont le socle est en
marbre vert de Suede
et les
128
balustres
en marbre rouge antique.
La premiere volee de ce grand escalier conduit au degagement conduisant a l'
amphitheatre
, au
parterre
, a l'
orchestre
et aux loges-baignoires. Les volees suivantes donnent acces a d'autres degagements et aux petits balcons etages sur les quatre facades interieures aux colonnes geminees et a trois
travees
d'
arcades
, puis aux differents salons et aux foyers. Sur les deux cotes, on trouve, partant du rez-de-chaussee, de tres vastes escaliers qui aboutissent aux couloirs circulaires menant aux loges de tous les differents niveaux de la salle de spectacle. En leur centre sont des ascenseurs.
Le
plafond
est compose de quatre
voussures
, sur
toile
marouflee
, du peintre
Isidore Alexandre-Auguste Pils
,
Grand Prix de Rome
en 1838 : au nord,
Le Triomphe d’Apollon
, au sud,
Le Charme de la musique
, a l’ouest
La ville de Paris recevant les plans du nouvel Opera
, et enfin a l’est
Minerve combattant la force brutale devant l’Olympe reuni
[
79
]
. Ces œuvres sont eclairees par la
verriere
d'une
lanterne
achevant la composition.
Situee au-dessus de la
voute
du vestibule circulaire (ancienne
rotonde
des abonnes) la salle de spectacle est le cœur meme du palais.
Epousant une forme en
fer a cheval
, avec ses quatre balcons, ses loges et ses stalles sur cinq niveaux, l'endroit est concu suivant le modele du
theatre a l'italienne
ou la visibilite est variable. Ses caracteristiques dimensionnelles sont impressionnantes : pres de trente et un metres de
largeur
, trente-deux metres de
profondeur
sur vingt metres de hauteur. Sa
jauge
s'approche des deux mille places assises, avec un peu plus de mille neuf cents
fauteuils
[
81
]
. Ce lieu est habille dans des
tons
dominants d'ocres, de
rouges
et d'ors.
De vastes corridors couverts de mosaique permettent d'acceder aux cinq niveaux par des portes en acajou dotees d'un hublot.
L'orchestre (autrefois parterre et parquet)
[
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]
Les quatorze rangs des sieges de l'
orchestre
sont situes de part et d'autre d'une allee centrale, les fauteuils sont en bois noir et habilles de
velours
, leur dossier capitonne est revetu d'un elegant chevalet en bronze numerote. A ce niveau sont des loges en rez-de-chaussee, les baignoires.
Sur huit rangs, les fauteuils, identiques aux precedents, sont en net surplomb de ceux de l'orchestre. Ils beneficient non seulement d'une vision tres degagee sur la scene, mais ils se trouvent aussi a l'emplacement ideal ou se situe l'axe principal, le ≪ point de vue ≫, a partir duquel le decorateur trace les plans de coupe et lignes de fuite pour etablir le tableau du decor qu'il etablit. Ensuite, d'autres lignes sont utilisees aux places tres hautes, laterales et le premier rang d'orchestre, selon les differentes regles de la
perspective scenographique
. Les spectateurs privilegies du balcon peuvent voir un decor et une mise en scene tels qu'ils ont ete penses par l'equipe des createurs. Le
point de vue
etait nomme autrefois
l'œil du prince
.
Les loges et arrieres-loges ainsi que leurs sieges et banquettes sont habilles de velours et leurs
cloisonnements
de
damas
et de
tentures
. L'ensemble des matieres d'
ameublement
arbore un jeu subtil de
nuances
cramoisies. La loge la plus celebre et la plus mysterieuse a une porte d'entree ou est (depuis 2011) une plaque de bronze indiquant ≪ Loge du Fantome de l'Opera ≫ ; elle est situee au niveau des premieres loges. Cette fameuse loge porte le
n
o
5. Les loges d'avant-scene surplombent la fosse d'orchestre dans l'arc doubleau formant le cadre de scene.
Depuis des siecles, il etait d'usage d'avoir dix loges directement sur la scene, tant pour les auteurs et les compositeurs que pour les autres intervenants du spectacle. Garnier n'avait pu soustraire de ses plans cette obligation. En 1916, le directeur Jacques Rouche annonca son intention de les supprimer et de reamenager ces emplacements afin d'y installer les regies et postes de commandement, ce qui fut fait en 1917. Aussitot, Louise Garnier, veuve de l’architecte, s'indigna en ecrivant au journal
Le Figaro
: ≪ On ose s’attaquer a la belle œuvre de Charles Garnier, sans crainte de detruire cette admirable acoustique, sans se soucier non plus de l’art avec lequel la salle a ete reliee a la scene par ces loges ≫
[
83
]
. Ces emplacements sont utilises pour conforter l'acces aux projecteurs et herses disposes sur le pont d'eclairage fixe a l'arriere du lambrequin metallique, partie du cadre mobile.
Les quatriemes loges de cote sont des stalles, surmontees a l'arriere par des fauteuils en gradins. De face, c'est l'amphitheatre ou plus familierement le
poulailler
ou paradis.
Les cinquiemes loges, de face et de cote, pour moins de quatre-vingts spectateurs sont des places a visibilite extremement reduite. Autrefois, certaines de ces places dites
aveugles
, etaient surtout destinees a des auditeurs : les
melomanes
, les
compositeurs
, les eleves du
Conservatoire
qui pouvaient suivre la musique et le chant avec ou sans
partition
. Certaines de ces loges sont amenagees pour des
projections cinematographiques
et aussi les
projecteurs
[
84
]
de poursuite qui permettent de suivre precisement un artiste en evolution sur la scene.
La premiere
coupole
du
plafond
de la grande salle est due au pinceau du peintre prefere de
Napoleon
III
,
Jules-Eugene Lenepveu
,
Grand Prix de Rome
en 1847 et directeur de la
Villa Medicis
a Rome. Elle fut restauree deux fois durant la premiere moitie du
XX
e
siecle. Cette peinture originelle comporte 63 figures representant
Les muses et les heures du jour et de la nuit
, realisee sur vingt-quatre panneaux de cuivre, boulonnes a la structure d'acier de l'etage superieur. Cette conception entierement metallique est due autant a la securite qu'a l'acoustique. Jules-Eugene Lenepveu avait pris un soin tres particulier en fabriquant lui-meme les pigments et les bases utilises dans sa peinture afin d'y eviter le plomb, qui causait une forte oxydation des teintes au contact des emanations du gaz d'eclairage. La circonference de cette coupole est de 53,60
m
et 18,80
m
pour la partie centrale qui, autrefois, etait pourvue d'une grille-soleil, faisant bloc avec le luminaire afin de le faire remonter pour l'entretien dans la salle superieure dite ≪ salle du lustre ≫. Cette grille de ventilation a ete supprimee en 1964.
L'œuvre de Lenepveu, toujours existante, est dissimulee depuis 1964 par une structure amovible en polyester ou a ete
maroufle
le decor concu par
Marc Chagall
. Cet amenagement laisse ainsi ouverte la possibilite de revoir ulterieurement cette œuvre. Une maquette definitive, mise au point par Lenepveu avant execution a l'echelle de la salle, est visible dans le musee du palais Garnier, et donne une idee generale du plafond qui ornait la salle de spectacle.
La seconde coupole fut concue par
Marc Chagall
a l'invitation de son ami
Andre Malraux
, alors
ministre des Affaires culturelles
[
c
]
. Le nouveau plafond evoque, en cinq parties aux vives couleurs, les grands jalons et ouvrages representatifs de l'histoire des arts de l'Opera et de la danse ainsi que quatorze
compositeurs
marquants des arts
lyriques
et
choregraphiques
du
repertoire
(
Gluck
,
Orphee et Eurydice
;
Beethoven
,
Fidelio
;
Verdi
, peut-etre
La traviata
;
Bizet
,
Carmen
;
Mozart
,
La Flute enchantee
;
Moussorgski
,
Boris Godounov
;
Adam
,
Giselle
;
Tchaikovski
,
Le Lac des cygnes
;
Stravinsky
,
L'Oiseau de feu
;
Ravel
,
Daphnis et Chloe
;
Debussy
,
Pelleas et Melisande
;
Rameau
, un opera ;
Berlioz
,
Romeo et Juliette
;
Wagner
,
Tristan et Isolde
)
[
86
]
. Composee de douze panneaux lateraux et d'un panneau central circulaire, elle est concue comme une
Olympe
[
87
]
. Le panneau principal est
≪
divise en cinq zones dans lesquelles une couleur dominante unit dans une meme evocation deux œuvres de deux compositeurs differents tandis que les couleurs complementaires permettent des transitions et l'interpenetration des motifs
≫
[
88
]
. La peinture a ete executee par
Roland Bierge
selon la maquette de Chagall.
Chagall execute l'œuvre entre janvier et
, le peintre travaillant d’abord au musee des Gobelins, puis dans son atelier de Meudon. Le nouveau plafond officiel est realise de
a
dans un atelier de la Manufacture des Gobelins. Masquant l'œuvre de
Lenepveu
et juxtaposant aux elements decoratifs d'origine une œuvre anachronique, il suscite la polemique avant meme son inauguration le
. Les critiques reprochent l'incoherence esthetique a placer le plafond aux couleurs trop criardes au milieu des moulures et dorures typiques de l'
architecture neo-classique
et considerent qu'il temoigne du mepris du pouvoir de l'epoque envers l'art du
Second Empire
[
89
]
.
En bronze dore comportant une myriade de cristaux tailles, la cage du lustre est haute de cinq metres, son diametre est de quatre metres. De sa base a l'intrados de la voussure, en incluant les puissants cables d'acier, il s'eleve sur huit metres. Sa masse est de 6,5 tonnes.
Il a ete installe et regle en 1874 avec 340
becs
fonctionnant au
gaz d'eclairage
. Partiellement electrifie des 1881, il porte alors
320 ampoules
electriques nichees pour la plupart dans des globes en opaline. Un
feston
de
pendeloques
l’entoure, releve de place en place par des motifs en forme de lyre. Le dessin est de Charles Garnier et la fonte a ete realisee dans les ateliers de Lacarriere et Delatour. Il a ete restaure en 1989.
Cet element, essentiel a l'
harmonie
et au bon eclairage de la salle, a failli pourtant ne jamais voir le jour. Pendant la longue periode necessaire a son elaboration ? forme, taille, details techniques et decoratifs ? par Garnier, plusieurs voix se font entendre en affirmant que le
lustre
se revele sans interet, qu'il risque de gacher l'
acoustique
et d'empecher la vision depuis de trop nombreux sieges et de loges. La querelle a ete si rude et longue que Garnier a ete jusqu'a faire installer - temporairement - des
girandoles
sur les colonnes, tout comme l'avait fait
Victor Louis
(avec des bougies) dans la salle, sans lustre, du
Grand-Theatre de Bordeaux
, en ajoutant des centaines de chandelles en couronne sur l'entablement soutenant le plafond en coupole. Finalement, Garnier doit faire preuve de tout son pouvoir de persuasion et defend meme l'integrite de son projet qui emporte finalement l'adhesion.
Si la salle de spectacle n'est pas uniquement eclairee par cette immense creation de
cristal
et de
lumiere
, ce lustre participe de facon indeniable a l'ambiance et a la magie des lieux. Apres son electrification, l'usage est rendu plus sur et necessite moins d'entretien et donc de manipulations. La maintenance du lustre s'effectuait depuis son installation et jusqu'en 1957 (Rotonde amenagee en salle de repetition par l'architecte en chef Pierre Bailleau
[
90
]
) en le hissant dans un volumineux cylindre en metal dit
cheminee du lustre
, faisant partie originellement de la ventilation. Apres les travaux de Bailleau cette cheminee a ete supprimee et l'ancien systeme de levage du lustre a ete reamenage.
- ≪ Legende urbaine ≫ sur la chute du lustre
Le soir du
, le lustre aurait chute sur le public lors d'une representation du
Faust
de
Gounod
. Il s'agit en realite de la chute d'un des quatre contrepoids et non pas du lustre lui-meme, ce durant une representation de l'opera
Helle
(et non de
Faust
) d'
Etienne-Joseph Floquet
. Pour comprendre cet accident, il faut savoir que le lustre est retenu par huit gros cables en acier, plusieurs treuils et contrepoids. Un de ces contrepoids de 750
kg
traversa en chute libre le plafond, puis le plancher des cinquiemes loges desertes et chuta sur les
places 11
et 13
des quatriemes loges ou se trouvait une dame tres modeste passionnee d'opera, Claudine Chomeil nee Rispal, morte sur le coup
[
91
]
. Le lustre, lui, n’a pas bouge. On deplora de nombreux blesses par suite du mouvement de panique. Cet evenement exceptionnel inspira
Gaston Leroux
pour un episode du
Fantome de l'Opera
, publie
en 1910
; on le retrouve aussi dans le ballet du meme nom de
Marcel Landowski
cree avec une choregraphie de
Roland Petit
.
L'entablement du plafond de la salle comporte un couronnement de lumieres forme par deux cent cinquante globes en verre depoli,
le collier de perles
, surmontant
la ceinture de diamants
, composee de quatre series de quinze lanternes rondes et quatre lanternes ovales a facettes. Ces trois cent quatorze sources de lumiere purent beneficier, a l'epoque du gaz d'eclairage, d'une ingenieuse evacuation directe et individuelle de la chaleur et des vapeurs produites par cette energie. A l'ouverture du nouvel opera de Paris
en 1875
et comme dans tous les autres theatres en Europe, l'energie du gaz d'eclairage ne permettait pas de faire l'obscurite dans la salle ; elle pouvait seulement etre mise en veilleuse,
au bleu
, pendant toute la representation, puis etre retablie a pleine puissance durant les entractes et a la fin du spectacle.
Elle a recu differentes transformations depuis sa creation. Une partie de son avancee dans la salle a ete reduite quand la cloison de l'avant-scene a ete ouverte, permettant un agrandissement notable de sa surface par la suppression des trois logettes centrales (trou du souffleur, eclairagiste, chef de chant) et de la rampe d'eclairage. Ces modifications portent sa dimension actuelle a environ dix-huit metres de longueur et neuf metres de largeur dont quatre sous l'avant-scene a differents niveaux de hauteur. Les musiciens peuvent s'y produire aisement en grand
orchestre symphonique
. Cette fosse d'orchestre peut, selon les besoins, etre recouverte d'un plancher mobile qui transforme alors l'avant-scene en un vaste
proscenium
utilise pour des recitals et des concerts.
C'est l'avancee visible par le public, en avant du rideau de scene ferme. Sa profondeur est legerement convexe vers la fosse d'orchestre.
Elle avait ete bordee autrefois par une
rampe d'eclairage
, au centre de laquelle etaient situes trois amenagements : un trou pour le
souffleur
et chef de chant, un autre pour le regisseur et celui du chef-eclairagiste qui commandait a son equipe les changements de lumieres au moyen du systeme constitue de plusieurs centaines de robinets a gaz et conduites, nomme
jeu d'orgue d'eclairage
par allusion a l'instrument de musique comportant une foret de tuyaux metalliques. La rampe a gaz, de tres forte puissance, avait ete creee par l'industriel gazier Gustave-Louis Lecoq, a la suite du fatal accident survenu a la danseuse
Emma Livry
; il avait imagine la securisation de chacun des becs en disposant une flamme inversee, un tube de verre, une grille et une forte ventilation par cheminee d'appel en partie inferieure. Cette rampe a ete electrifiee des l'apparition des ampoules a incandescence. Aujourd'hui, la regie de l'eclairage et ses pupitres electroniques se trouvent dans la salle de spectacle a l'arriere des troisiemes loges de face.
Le
cadre de scene
est d'environ seize metres en largeur et quatorze metres en hauteur.
Le
rideau de scene
a ete peint en
trompe-l'œil
en 1874 par
Auguste Rube
et
Philippe Chaperon
, egalement signataires du lambrequin. Il prepare le regard du spectateur a l'illusion de ce qu'est essentiellement toute representation theatrale, son lourd drape de velours rouge agremente de passementeries dorees est surmonte de l'imposant
lambrequin
metallique presentant, en son centre, un
cartouche
. Une
devise
latine, choisie par Garnier lui-meme, y figure (
Musicae Academiam Instituit Ludovicus XIV.
) et la mention ≪
ANNO 1669
≫ rappelle l'annee de la creation de l'Academie royale de musique (l'ancetre de
Opera de Paris
) sous le regne du roi
Louis
XIV
, grand promoteur des arts et lui-meme danseur reconnu et musicien.
Ce rideau peint de 14,50
m
sur 17,50
m
, a ete refait a l'identique sur toile de lin, en 1952, par le peintre-decorateur Emile Bertin et restaure en 1996 par le peintre-decorateur Silvano Mattei
[
92
]
.
C'est la partie d'un theatre qui englobe la scene en tous sens, soit les
dessus
et les
dessous
; elle occupe ici un volume de 50 000
m
3
. Les architectes
Soufflot
,
Gabriel
,
Louis
ou
Davioud
n'avaient pu atteindre un tel aboutissement. Garnier a tente, bien avant le
XX
e
siecle, d'explorer les possibilites scenographiques d'une machinerie hydraulique et de scenes sur ascenseurs, mais il y a renonce face au cout extraordinairement eleve de la conception, de la surveillance et de l'entretien de ce materiel de type industriel. Il a donc perfectionne ce qui avait fait ses preuves : la machinerie dite ≪ a l'italienne ≫. Du plus profond jusqu'au sommet de la
cage de scene
, l'ensemble utile atteint une hauteur de 62,50 m. Ses quatre murs supportent, en complement du plateau, differents
espaces sceniques
, des equipements complexes composes des dessous, des
cintres
et des grils
[
93
]
.
Le plateau,
la scene
, comprend la partie centrale du plancher, visible du public, bordee par les cotes
cour et jardin
. Construit en planches de
chene
, le plateau mesure 26,37
m
de profondeur sur 52,90
m
de largeur, il a une inclinaison de presque 5 cm/m du
lointain
vers la
face
. Il est constitue de parties laterales fixes,
les coulisses
et d'une suite de bandes paralleles formees de panneaux mobiles, les
plans
, numerotes de zero a dix, du mur de face (cote du public) au mur du fond, le
lointain.
Les
plans
sont constitutifs des scenes dites
a l'italienne
avec une terminologie specifique
[
94
]
repertoriee par les scenographes
[
95
]
:
- la
costiere
, une rainure sans fond, large de quelques centimetres entre deux
sablieres
, elle permet d'y faire coulisser lateralement des elements de decor fixes avec des
guindes
sur des
mats
, etroits et hauts poteaux encastres dans des chariots metalliques circulant sur des rails dans le premier dessous. On referme la costiere avec une suite de pieces de bois,
les tringles
de longueur variable. L'Opera comprend trois costieres par plan (voir photo ci-contre)
- la
fausse-rue
, dite aussi petite-rue, est un espace de 35 cm qui s'ouvre a volonte, entre la cour et le jardin. Elle permet l'apparition ou la disparition verticale ou laterale des decors, elle est toujours bordee d'une
costiere
. Les
fermes
(chassis lourds ou de tres grandes dimensions) y sont mises en mouvement vertical, en etant fixees sur des
ames
glissant dans des guides metalliques, les
cassettes
, qui sont operationnelles jusqu'au quatrieme dessous. Une fausse-rue est fermee par une suite de trappillons
- la
rue
,
un espace encore plus large, 110 cm, elle s'etend elle aussi de cour a jardin. Son utilite sert a mouvoir verticalement des batis decoratifs plus ou moins larges pouvant supporter de lourdes charges ou des groupes d'artistes. Elle est fermee par une suite de panneaux, les
trappes
[
96
]
.
Tous ces trappillons, tringles et trappes peuvent etre manœuvres par differents mecanismes automatiques ou manuels selon les besoins. Leur
feuillure
est enduite avec une pate de
graphite
ou de
silicone
pour faciliter leur glissement silencieux. Differents systemes permettent d'ouvrir et de refermer partiellement ou en totalite une ou plusieurs rues ou fausses-rues, elles s'abaissent et glissent
en tiroir
a
la ligne de levee
, sous les parties fixes de la scene. Les trappes a apparition fonctionnent sur le meme principe. A l'opera Garnier, l'espace horizontal entre les lignes de levees (largeur des dessous) est d'environ trente-deux metres. Ces amenagements de surface sont en continuite verticale avec les etages inferieurs ou les trappillons et les trappes sont metalliques, mobiles et a claire-voie. Le plateau
[
97
]
de l'opera Garnier comporte deux fausses-rues par plan. La vaste scene peut recevoir jusqu'a quatre cent cinquante
artistes
,
chanteurs
,
danseurs
et
figurants
.
Au mur du
lointain
, plusieurs portes metalliques sont a la cour et au jardin : cote cour, une tres haute porte permet un acces direct au monte-decor situe dans une cour interieure debouchant, trois niveaux plus bas, au rez-de-chaussee, dans la cour de l'administration. Cote jardin, une meme haute porte s'ouvre vers la cour
Sigurd
. Au centre du
lointain
, un rideau de fer obture l'acces a un large degagement dans lequel un epais rideau de velours le separe au droit de la grande baie d'entree dans le Foyer de la Danse. Deux portes metalliques a double-vantaux pour l'entree des artistes sur la scene. Sur les cotes extremes du plateau sont les
cases a decors
ou
tas
.
A l'
avant-scene
se trouvent : le
manteau
(autrefois
manteau d'Arlequin
) qui est un cadre mobile et metallique qui forme un diaphragme d'ouverture reglable de la baie de scene, les postes des
regisseurs
qui controlent le deroulement des spectacles selon les
conduites de mise en scene
etablies pendant les repetitions. Entre le cadre mobile et le mur de face est l'espace de manœuvre du rideau de fer sur ses rails et des differents rideaux d'avant-scene.
Les dessous
[
98
]
, d'une surface d'environ 800
m
2
, se developpent verticalement sur une hauteur de 15,50
m
et sont etages en cinq parties dont les deux premieres suivent la meme pente que la scene. Ils possedent une fonction pour la machinerie et les effets de
mise en scene
. Une structure entierement metallique regroupe
512 poteaux
et traverses pour une masse de 850 tonnes. Au
lointain
, les dernieres
rues
et
fausses-rues
du dixieme plan donnent acces a une zone de stockage surnommee ≪ la fosse aux toiles ≫ qui descend jusqu'au quatrieme dessous ; plusieurs dizaines de
rideaux
ou
toiles de fond
, enroules sur des perches, peuvent y etre descendus et deposes sur des arceaux echelonnes.
Le premier dessous est affecte aux divers mouvements de chariots metalliques qui coulissent sur rail afin de deplacer les
mats
ou sont
guindes
les chassis des decors a tout endroit sur la scene. Les autres dessous sont equipes pour manœuvrer, verticalement ou horizontalement a l'aplomb des
fausses-rues
, des chassis de forte epaisseur, les
fermes
. A l'aplomb des
rues
, il est possible de faire apparaitre ou disparaitre de gros volumes decoratifs, des
accessoires
ou des groupes d'artistes.
La machinerie dite ≪ a l'italienne ≫ fait appel a une science mecanique de la transmission et de la coordination des manœuvres par des techniques mecaniques eprouvees. Elle utilise des treuils et des cylindres en bois de deux metres de diametre que la terminologie scenographique nomme des
tambours
. L'opera manipule, des son inauguration
en 1875
, une tres grande quantite de decors et effectue de nombreux mouvements sur scene (apparitions, escamotages,
changements a vue
, deplacements sur differents niveaux). Ces tambours axes horizontalement sont l'aboutissement de toute une organisation de
fils
ou
bouts
,
equipes
et contrepoids passant par des
moufles
,
meres de famille
et
poulies de renvoi
vers des elements de decor. Apres la Premiere Guerre mondiale, le systeme de machinerie, jusque-la active manuellement, se met peu a peu a l'electricite, puis les moteurs electriques sont asservis par l'informatique. Il ne reste actuellement qu'une cinquantaine de tambours toujours operationnels dans le troisieme et le cinquieme dessous. Les tambours et les treuils ont ete utilises, non seulement dans les dessous, mais aussi sur les passerelles de service et sur les trois grils de l'opera Garnier, comme dans tout autre theatre europeen ≪ machine a l'italienne ≫.
Ce sont les parties a droite et a gauche du cadre de scene, invisibles pour les spectateurs. Leur nom vient de l'epoque ou les chassis, recouverts de toiles peintes formant les decors lateraux, etaient fixes sur un systeme de poteaux, les mats, eux-memes encastres dans les chariots circulant sous le plancher en y coulissant. A cet endroit de la scene sont les
cases a decors
ou
tas
ou sont entreposes les elements de decor en attente. La machinerie traditionnelle permettait habilement de faire un
changement a vue
ou l'on pouvait en quelques secondes faire apparaitre un autre decor :
chassis de coulisses
geometraux, obliques ou de milieu,
fermes
,
rideaux
et
principales
,
frises
,
gazes
,
filets
,
bandes d'air
,
bandes de terrain
,
praticables
et toutes sortes d'objets pouvaient etre changes en une seule manœuvre en utilisant les mecanismes des
tambours
situes dans les dessous, les cintres et les passerelles de service. Un tambour special, d'une seule piece de la face au lointain, permettait de machiner la combinaison de ce genre d'effet de mise en scene tres prise du public. Les coulisses de l'opera Garnier sont chacune larges de 18 metres. On y trouve plusieurs ascenseurs de service et de hautes tours mobiles pour fixer les appareils d'eclairage. Les artistes y attendent leur entree.
Les coulisses ont un nom : le cote
cour
est a gauche pour l'artiste face au public, le cote jardin est a sa droite. Les
machinistes
sont ici les
plateautiers
, ils sont divises en plusieurs
brigades
selon la zone de leur fonction sur cette tres grande scene : les
couriers
, les
jardiniers
, a la
face
ou au
lointain
, les
trumeautiers
travaillent au centre des coulisses, le
trumeau
. L'organisation de leur travail, pendant les repetitions ou les representations, est decrite par la
conduite
[
99
]
menee par le directeur de scene, les regisseurs, le chef-machiniste et les brigadiers, une hierarchie ou l'improvisation est impossible.
Si l'artiste ≪ rentre ≫, c'est pour aller au centre de la scene ; si le machiniste ≪ rentre ≫, c'est pour aller vers les coulisses.
Les
cintres
(ou le cintre) sont la partie superieure de la cage de scene, au-dessus du cadre de scene, invisible pour les spectateurs et munie de l'equipement necessaire a la manœuvre des decors. Sur les deux cotes, on trouve cinq larges passerelles metalliques, les
services
, entre lesquels circulent verticalement de la face au lointain
83 tubes
metalliques et les
porteuses
, ou les elements de decor et d'eclairage sont fixes. A l'opera Garnier, les porteuses, d'une capacite de plus d'une tonne, atteignent 28
m
de longueur et peuvent recevoir des rideaux de meme dimension sur 17
m
de hauteur. Une passerelle speciale, situee sous les precedentes et reservee a l'eclairage, est dite
le pont
Duboscq
du nom de l'ingenieur-opticien qui a cree, pendant quarante ans a l'Opera de Paris, tous les premiers appareils d'eclairage a l'electricite, les projecteurs et machines a effets speciaux qui seront developpes par la suite et utilises dans le monde entier.
Dans la partie haute de la cage de scene (a l'aplomb du fronton triangulaire surmonte par le groupe d'Apollon) se trouvent superposes trois etages de planchers metalliques a claire-voie, les
grils
, suspendus par une foret d'aiguilles a la charpente formee de seize poutres d'acier hautes de 1,60
m
. Les trois grils sont equipes de centaines de moufles ou passent des kilometres de cables metalliques utilises pour les manœuvres verticales. Le premier gril est a 35,50
m
au-dessus du plancher de scene. A l'origine et comme dans les
dessous
, des
tambours
etaient repartis sur les trois grils, comme on peut le voir sur la coupe transversale en illustration ci-dessus. Aujourd'hui, les tambours et autres equipes contrebalancees avec contrepoids ont ete remplaces par des moteurs et treuils electriques a commande informatisee.
Le directeur Rouche, entreprend, entre 1917 et 1921, une innovation majeure de la machinerie du cintre : les tambours des grils sont remplaces par 102
equipes mecaniques contrebalancees
, installees avec espacement regulier, pour 102
porteuses
et herses d'eclairage
equipees
par sept a dix fils d'acier. A cette epoque une œuvre lyrique ou choregraphique en 10
tableaux
comportait une mise en scene avec 10 decors differents. Par exemple, la
Chevauchee
de
La Walkyrie
de
Richard Wagner
voyait galoper une escouade de cavalieres armees remontant au
Walhalla
dans un ciel forme de nuages, frises, tulles, gazes, fumees, eclairages fantastiques et le support de gigantesques praticables inclines. De tels effets speciaux d'ordre fantastique sont completement delaisses par la mise en scene abstraite ou iconoclaste des operas ou des ballets au
XXI
e
siecle.
Durant le premier quart du
XX
e
siecle, on denombre plus de 800 kilometres de cordage de chanvre et acier confondus.
Des son ouverture l'Opera a ete equipe pour l'
eclairage au gaz
; une
rampe
a l'avant-scene
[
100
]
, des
herses
au-dessus des decors, des
portants
installes verticalement derriere les chassis des decors. Quelques rares projecteurs electriques non modulables, a arc
[
101
]
.
Depuis, le terme "jeu d'orgue", allusion imagee a l'orgue musical et aux centaines de tuyaux metalliques conduisant le gaz, est toujours employe pour le poste de commandement des eclairages sceniques, installe a l'origine sous toute l'avant-scene.
L'opera Garnier a ete le premier theatre entierement electrifie
[
102
]
et autonome quand Garnier a donne son accord aux technologies innovantes
[
103
]
de la
compagnie Edison
et de sa
lampe a incandescence
. Une usine electrique
[
104
]
a ete installee dans les sous-sols du grand vestibule et ceux du vestibule du controle. Plusieurs chaudieres a charbon, assurant la production de vapeur (950 CV) des alternateurs et generateurs, avaient alors ete installees en retour (facade est) sous la Galerie de la Queue jusqu'a la rotonde du Glacier, le seul endroit ou une cour interieure permettait de dissimuler une large cheminee industrielle d'une hauteur de 40
m
afin d'extraire les fumees et vapeurs. Charles Garnier a supervise ces gigantesques installations souterraines et redoutait que les puissantes vibrations des turbines et alternateurs ne destabilisent les marbres precieux du grand escalier.
Vers 1903
, cet equipement industriel a ete demantele et le reseau electrique a ete raccorde au secteur public devenu apte a fournir et transporter convenablement la haute tension necessaire a ce grand theatre qui s'est regulierement adapte aux nouvelles technologies.
L'
incendie
a toujours ete la crainte premiere des administrateurs de theatres en matiere de sinistre. Les puissances des differentes energies utilisees au cours des epoques ont toujours ete un danger. Les cinq hectares de la surface interieure des locaux de l'opera Garnier, de son inauguration a aujourd'hui, necessitent un important poste de commandement pour la securite. Une brigade de vingt pompiers et un commissariat de police sont a demeure dans l'edifice, le jour et la nuit des rondes sont effectuees. Les postes d'arrosages manuels dotes de lances sont presents en tous lieux du theatre (
robinets d'incendie armes
). La gigantesque cage de scene est equipee du ≪ secours ordinaire ≫ et du ≪ grand secours ≫, systemes d'arrosage d'une puissance et d'un debit hors norme grace a des surpresseurs et gicleurs surpuissants, alimentes par des pompes autonomes pouvant puiser sur le reseau d'eau public parisien, mais egalement sur differentes rivieres, des puits, la ≪ cuve ≫ (la plus grande reserve souterraine) ou, par une conduite exclusive, sur un grand reservoir depuis la
colline voisine de Montmartre
. Garnier avait prevu des reservoirs d'eau sous toutes les toitures, differentes reserves en sous-sol et en toutes sortes d'endroits eleves au-dessus de la salle de spectacle et autres salles. Lors de l'unique et bref incendie survenu en 1936 dans les cintres, le "grand-secours" a ete declenche automatiquement, deversant pendant deux heures plus de mille metres cubes d'eau a partir du premier gril, alors que le feu s'etait declare au-dessus de celui-ci.
Si un
incendie
demarrait sur le plateau ou dans les coulisses, la salle et la cage de scene seraient isolees l'une de l'autre pendant le temps necessaire a l'evacuation de tous. Un rideau de fer d'un seul tenant, pesant dix-sept tonnes, peut etre charge (descendu, en jargon scenique) en quelques secondes en occultant hermetiquement l'ouverture de scene, empechant ou retardant toute propagation vers la salle, epargnant en theorie la vie des spectateurs, mais protegeant mal de l'invasion des
fumees
pour les personnes se trouvant sur scene. Ce rideau de fer est une mesure de securite devenue obligatoire dans tous les theatres a la fin du
XIX
e
siecle, a la suite de l'incendie ayant devaste le theatre de l'
Opera-Comique
en 1887. A l'opera Garnier, ce rideau metallique est dote de deux portes permettant une
issue de secours
de la scene vers la salle. Il existe plusieurs commandes de ce dispositif en plusieurs points de l'edifice. Cet equipement est manœuvre reglementairement par les pompiers, a vue du public, avant chaque representation. Sa couleur est claire et unie. Son declenchement d'urgence active l'ouverture de trappes en toiture pour l'evacuation des fumees. Un poste de commandement de securite permanent est situe dans l'enceinte du batiment, rue Scribe.
Ce nom designe une infrastructure massive dont la realisation n'etait pas prevue lors de la conception premiere de l'opera ; elle fut realisee lors des fouilles d'excavation a la suite de la decouverte d'un
sol
sableux et gorge d'eau au debut du chantier. Si la nature du terrain remettait en cause la conception des
fondations
d'une portion de l'edifice, en augmenta le cout et en retarda quelque peu la mise en œuvre, la realisation d'un cuvelage destine a contenir la pression et les infiltrations souterraines constitua un reel avantage pour le palais Garnier. Cette cuve est realisee en differentes couches d'agregats sur 2,20
m
d'epaisseur avec du
ciment Portland
, du beton, de la chaux hydraulique et du bitume. Ensuite, les voutes renversees (radier), les piliers et les voutes ordinaires sont realises en briques de Bourgogne qui forment le sol du cinquieme dessous de la scene.
L'importante quantite d'eau (2 400
m
3
) contenue autour d'une centaine de piliers et son emplacement donnent aux pompiers la possibilite d'y puiser et de circonscrire plus rapidement et plus efficacement un depart d'incendie. Il faut preciser que cette impressionnante masse de construction avec son contenu liquide de 2 400 tonnes, facilite la repartition des descentes de charges de la plus haute et imposante partie du palais, la cage de scene, mais aussi la plus vide. Ce reservoir est situe sous la cage de scene ; on y accede par deux echelles metalliques qui plongent dans ses eaux. On peut y plonger par un large degagement en surplomb qui est le second des dix-huit niveaux a l'arriere de la cage de scene. La surveillance de l'etat des structures de la
cuve
et de ses
voutes
est regulierement effectuee. L'eau contenue est entierement evacuee tous les vingt ans. Une brigade de plongeurs des
sapeurs-pompiers de Paris
vient s'y entrainer tres regulierement. Il y a eu des poissons a une certaine epoque, mais a la suite d'une mise en scene choregraphique contemporaine utilisant d'importants effets speciaux de douche sur des danseuses, un produit desinfectant s'est repandu dans la cuve, occasionnant la fin des poissons rouges, carpes et autres silures ou barbeaux qui etaient nourris par le personnel. La legende d'un lac sous le palais Garnier s'attache a la
Grange-Bateliere
qui coule plus loin, sous le grand magasin des
Galeries Lafayette
.
Cet ouvrage est a l'origine de la fameuse legende relative a l'existence d'un lac souterrain evoque dans le roman de
Gaston Leroux
,
Le Fantome de l'Opera
. Une scene du film
La Grande Vadrouille
y fait allusion, lorsque le chef d'orchestre joue par
Louis de Funes
quitte l'opera en barque
[
106
]
.
L'infrastructure extremement massive de ≪ la cuve ≫ dans l'illustration ci-contre s'etend en coupe longitudinale sur 48,27m pour 37,57m de largeur. Charles Garnier, dans ses livres, rend un hommage appuye a l'entreprise de maconnerie
Adolphe-Andre Violet
qui mena a bien la realisation complexe de ces imposantes fondations necessaires a la stabilite de cette partie de l'edifice qui s'etend sur plus de 1 800
m
2
. Charles Garnier s'est inspire de son illustre devancier l'architecte
Victor Louis
qui a rencontre les memes difficultes au debut de la construction du
Grand-Theatre a Bordeaux
: le mascaret remontant la Garonne et le lit comble d'une ancienne riviere (Cours du Chapeau rouge), il a ete indispensable d'endiguer en creant une sorte de ≪ cuve ≫, toujours existante.
Un jeu de 16 cloches est accessible dans les cintres depuis une passerelle de service
[
107
]
, dont une cloche speciale en dome, qui sonne (avec un maillet) les douze coups de minuit a la fin de
Tosca
de
Puccini
, quand l'heroine se jette des remparts du
Chateau Saint-Ange
.
Il est situe sur la scene, cote cour, contre le mur de face a l'aplomb de la regie, au niveau du pont Duboscq a 12 metres au-dessus de la scene. Il occupe une surface de cinq metres de longueur sur moins de deux metres en largeur pour un poids de six tonnes comprenant plus de 700 tuyaux. Il a ete restaure et modernise en 1925 par la maison-mere avec l'installation d'une soufflerie electrique. Il a malheureusement ete laisse a l'abandon, sans aucun entretien depuis 1974. Pour les partitions lyriques faisant usage de cet instrument, on a remedie a son absence en utilisant la sonorisation electronique d'un synthetiseur avec le clavier dans la fosse d'orchestre. Pour cet orgue lyrique (le dernier a Paris) construit par le celebre facteur
Aristide Cavaille-Coll
, une restauration est semble-t-il envisagee.
Il possede deux claviers de
56 notes
et un pedalier de
30 notes
. Transmissions mecaniques. Dix-huit jeux (
14 reels
)
[
108
]
disposes comme suit :
- Grand-Orgue : Bourdon 16', Flute harmonique 8', Principal 8', Bourdon 8', Prestant 4', Doublette 2'
- Recit expressif : Octave 4', Quinte 2' ⅔, Plein-jeu
III
-
V
rgs, Bombarde 16', Trompette 8', Clairon 4'
- Pedale : Contrebasse 16', Soubasse 16', Basse 8', Bombarde 16', Trompette 8', Clairon 4'
Il est utilise notamment pour
Faust
, de
Charles Gounod
mais aussi
La Juive
de
Fromental Halevy
,
Werther
de
Jules Massenet
et bien d'autres.
C'est un espace de travail pour les artistes du corps de ballet ; son ornementation, presque aussi raffinee que celle des espaces reserves au public, en fait un sanctuaire de la danse. Il est situe a l'arriere de la scene dont il est separe par un degagement de cinq metres de largeur, comme indique sur les plans.
Charles Garnier fait une severe autocritique a l'egard de cette decoration qui n'a pas abouti selon ses directives. En effet, apres une reprise precipitee des travaux et a la suite d'une irreparable erreur du ferraillage de la voussure aux portraits en medaillons, cette derniere s'est retrouvee exagerement agrandie en hauteur et tres epaisse, cachant pratiquement l'arriere-voussure du plafond aux oiseaux, devenue alors presque invisible. Dans son livre
Le Nouvel Opera de Paris
[
109
]
, Garnier deplore sur dix pages l'effet perdu de la legerete prevue : une dimension de voussure haute de trois metres au lieu d'un seul, une voussure empatee de vingt centimetres d'epaisseur au lieu de cinq, des enfants musiciens et des portraits demesures ecrasant tout l'ensemble malgre la grande hauteur centrale du plafond et son caisson bien proportionne.
Les murs lateraux sont rythmes par douze colonnes, cannelees en spirale, au centre desquelles sont deux fenetres en plein cintre et en vis-a-vis. Le mur de face est principalement ouvert par une grande baie qui constitue l'unique acces. Le mur du fond est entierement revetu d'un miroir en trois parties, le verrier
Saint-Gobain
n'ayant pu, a l'epoque, couler une vitre aussi grande d'un seul tenant. Le plancher de 160
m
2
est incline, a l'identique de la scene, vers le mur du fond. Les barres de danse, montees sur d'elegants supports en fonte bronzee, sont sur les trois cotes. Quatre panneaux hauts de trois metres ornent les deux murs, ils ont ete peints par
Gustave Boulanger
et representent, selon les precisions de l'archiviste
[
110
]
Charles Nuitter
:
- La danse guerriere
: trois hommes dansant la
pyrrhique
guerriere ;
- La danse champetre
: trois femmes gracieuses vetues de voiles, dansant une
ronde
;
- La danse bachique
: deux
bacchantes
tres exaltees et un
faune
dansant au
tambour de basque
;
- La danse amoureuse
: deux jeunes femmes dansant avec un homme jouant de la
flute de Pan
.
Au-dessus de ces panneaux sont les noms de quatre celebres anciens maitres de ballet :
Noverre
,
Gardel
,
Mazillier
et
Saint-Leon
. Le motif de la
lyre
est present en plusieurs endroits. Des papillons ornent la face des stylobates.
L'abondante decoration est surmontee par la haute voussure en saillie ou sont les portraits en medaillon a la memoire de vingt danseuses celebres dont les noms et dates sont inscrits,
Marie Taglioni
,
Carlotta Grisi
,
Marie Salle
,
etc.
Cette voussure, bordee par vingt statues dorees d'anges musiciens, œuvres de
Chabaud
, est coiffee d'un plafond celeste, a dix metres du sol, ou s'ebat une multitude d'oiseaux. Cette salle est eclairee par un grand lustre en bronze et cristaux, ainsi que par plusieurs girandoles sur les colonnes accouplees dans les angles. Les cotes sont equipes de banquettes en velours pour les pauses. Un piano est toujours present pour accompagner les exercices ou les repetitions.
Cette salle est sonorisee en direct de la scene pendant les spectacles mais aussi pour l'appel des artistes avant leur entree en scene par le micro des regisseurs.
Le sanctuaire de la danse peut apparaitre aux spectateurs dans ses ors et sa magnificence, au fond de la scene, quand est ouvert un rideau de fer large d'une dizaine de metres, a l'ouverture de la saison choregraphique. Un defile reunit alors les eleves de l'ecole de danse, les membres du corps de ballet et les etoiles, tous marchant majestueusement vers le public dans une perspective qui s'etend sur plus de cinquante metres jusqu'a l'avant-scene. Le lointain miroir du foyer de la danse reflete alors la salle de spectacle en une immense perspective. La choregraphie de ce grand defile a ete reglee par
Serge Lifar
, sur la musique de la
Marche des
Troyens
composee par
Hector Berlioz
.
Dans ce lieu, tout comme le Foyer du chant, au meme etage, ou les artistes lyriques recevaient leurs admirateurs, et comme dans l'ancien Opera, les mœurs d'autrefois permettaient, pendant les entractes, des rencontres entre certains abonnes et certaines danseuses. Le degagement permettant d'y acceder etait controle par deux huissiers et seuls les abonnes ≪ a trois jours par semaine ≫ ou les gens du monde de l'art etaient autorises a venir feliciter et s'entretenir avec les artistes. Dans cette tradition tres ancienne, c'est le foyer des comediens, au theatre de la
Comedie-Francaise
, qui avait ete le plus repute pour les echanges entre les auteurs, penseurs et artistes.
En 1930, par la volonte du
maitre de ballet
Serge Lifar
et du directeur
Jacques Rouche
, les abonnes ≪ a trois jours par semaine ≫ n'eurent plus acces au foyer de la danse.
De chaque cote du Foyer de la danse se trouvent, des l'origine, deux grandes cours interieures s'elevant sur toute la hauteur du batiment. A la suite des differents systemes de monte-charges dans la cour est, certaines fenetres ont ete murees sur sept etages pour des raisons de securite, dont une de celles du Foyer. Plus anecdotique, le premier monte-charge cree par Charles Garnier, mecanise avec treuils et contrepoids, et dont le mouvement d'ascension etait de vingt minutes, etait surnomme le ≪ monte-crottin ≫ en raison des chevaux et voitures attelees qui y penetraient afin d'etre hisses au troisieme niveau pour la livraison des decors directement au niveau du plancher de la scene. En 1924, la societe Edoux-Samain installa un appareil electrique qui a ete utilise jusqu'en 1981, date a laquelle on lui a substitue un ascenseur informatise, de meme dimension (douze metres de long sur trois de largeur) d'une capacite de onze tonnes, accessible par la haute et large porte des decors, d'origine, au rez-de-chaussee, dans la cour ouverte de l'administration. La cour Sigurd (ouest) a ete partiellement reamenagee pour le stockage.
Pour la choregraphie, il existe une dizaine de salles en sus du foyer de la danse : le studio circulaire (160
m
2
)
Zambelli
est installe sous le dome de la Bibliotheque-Musee. Le studio
Chauvire
, identique au precedent, a ete amenage sous le dome de la Rotonde du Glacier en 1975. En 1957, l'architecte en chef Pierre-Henri Bailleau
[
111
]
avait supprime la partie haute de la
cheminee du lustre
, afin d'installer une salle de repetition sous la coupole metallique centrale, surplombant toute la salle de spectacle. Sous l'impulsion du directeur de la danse
Rudolf Noureev
et de l'architecte
Jean-Loup Roubert
, la rotonde Bailleau, haute de 17 metres, a ete scindee en hauteur : au niveau inferieur se trouvent le studio
Lifar
et le studio
Noureev
, d'une surface de 220
m
2
chacun, eclaires par une rangee d'œils-de-bœuf. Le studio
Petipa
(400
m
2
), couvert par les structures metalliques de la grande coupole, est au niveau superieur.
D'autres studios sont installes dans les anciennes classes de l'Ecole de Danse. Pour l'art lyrique, une vaste salle de repetition avec colonnes et six fenetres, pour les artistes du chœur, est a l'aplomb inferieur du Foyer de la Danse au cœur de la partie arriere du theatre, au rez-de-chaussee. Le Foyer du Chant, ou studio Messager, en boiseries et sobrement decore de portraits d'artistes lyriques, est une grande salle a l'etage de la scene, ses fenetres ouvrent sur la
rue Scribe
et la
place Diaghilev
. Le studio Pedro Gailhard est situe au premier niveau, cote jardin. La salle de musique nommee
Pierre Chereau
[
112
]
, en hommage au directeur et metteur en scene de 1922 a 1948, est situee dans le Pavillon du Glacier, sous le studio
Chauvire
; ce local circulaire avait ete, a l'origine, un projet de Charles Garnier pour l'amenagement d'une grande bibliotheque musicale.
Il y a environ
80 loges
individuelles et des loges collectives de toutes tailles, pouvant accueillir jusqu'a cinq cents artistes. Elles sont reparties sur plusieurs etages, leurs fenetres ouvrant sur des cours interieures, sur la place Diaghilev et en retour sur les rues Scribe et Gluck, jusqu'aux deux pavillons abritant la bibliotheque et la rotonde du Glacier. La loge des chœurs/dames et celle des chœurs/hommes mesurent toutes deux plus de 290
m
2
et sont toutes deux situees du cote de la rue Gluck. Il existe un ensemble de grandes loges individuelles pour les etoiles ou les vedettes, comme celle de la cantatrice soprano
Fanny Heldy
, decoree en style Empire et qui porte le
n
o
45, pres de la scene. Situee cote jardin, elle est actuellement devolue aux chefs d'orchestre. La figuration masculine est logee au deuxieme entresol, sous le foyer de la Danse ; la figuration feminine est au troisieme etage ; des vestiaires a l'entresol sont pour les musiciens. A noter qu'au palais Garnier, le rez-de-chaussee etant surmonte par deux entresols, le quatrieme niveau est celui du premier etage. Les loges et vestiaires des musiciens de l'orchestre sont situes au second entresol qui est le niveau de la fosse d'orchestre.
Dans cette prestigieuse ecole de renommee internationale, plusieurs generations ont ete enseignees. Des l'inauguration de l'edifice, l'ecole a ete installee dans les locaux qui surplombent les grands escaliers secondaires. Trois classes pour les filles, deux classes pour les garcons. En venant de l'Administration, les eleves empruntaient le
Couloir des cent metres
pour rejoindre cet etage eleve nomme
le Patinage
, en rappel de la suite de danse (
valse
, pas de la
redowa
,
quadrille
et
galop
) du ballet des patineurs sur l'etang glace dans l'opera de
Giacomo Meyerbeer
et
Eugene Scribe
,
Le Prophete
, (
1
er
tableau du
3
e
acte) pour lequel les danseuses et danseurs s'entrainaient sur patins a roulettes dans les vastes corridors qui entourent la coupole du Grand escalier.
Par la suite, sous la direction de la danseuse etoile
Claude Bessy
, l'
Ecole de danse
demenage en 1987 dans un immeuble edifie a
Nanterre
par l'architecte
Christian de Portzamparc
. A l'Opera, les anciens locaux des classes de danse ont ete reamenages et modernises pour les repetitions et les cours quotidiens des artistes du corps de ballet. L'ancienne classe A de l'ecole de danse est devenue la salle ou studio Raymond
Franchetti
.
Depuis 2004,
Elisabeth Platel
, danseuse et professeure, dirige cette ecole.
Situes hors de l'edifice proprement dit, mais concus par le meme architecte assiste de l'ingenieur
Gustave Eiffel
, les
ateliers
de montage des
decors
ainsi que des magasins et reserves sont situes
boulevard Berthier
, dans le
17
e
arrondissement
de Paris, ils sont nommes
Ateliers Berthier
.
Le lieu sert, en partie, a la representation de spectacles du
theatre de l'Odeon
.
Les salons du pavillon de l'empereur, inutilises, ont ete choisis pour accueillir la
bibliotheque-musee de l'Opera
(BMO) abritant aujourd'hui de nombreux ouvrages et objets.
La bibliotheque conserve pres de 600 000 documents (livres, partitions, programmes etc.) avec de prestigieuses partitions manuscrites autographes.
Une collection faisant musee rassemble quant a elle 8 500 objets divers.
- Surface du terrain : 15 000
m
2
- Emprise au sol : 12 000
m
2
- Surface hors œuvre totale : 66 640
m
2
- Surface dans œuvre totale : 57 946
m
2
- Longueur totale : 155 a 173 m
[
113
]
;
- Largeur maximale : 101 a 125 m ;
- Hauteur du sol de la Place de l'Opera a la terrasse superieure du comble de la scene : 55,97m
[
114
]
;
- Hauteur de la facade principale : 32,12m
[
114
]
;
- Hauteur du fond de la cuve a la lyre d'Apollon et son paratonnerre : 73,60 m ;
- Hauteur du grand escalier : 30 m ;
- Dimensions du grand foyer : 18 m de hauteur, 54 m de longueur et 13 m de largeur ;
- Dimensions de la salle : 20 m de hauteur, 32 m de profondeur, 31 m de largeur maximale ;
- Poids du lustre : 6,5 tonnes ;
- Principales caracteristiques de la cage de scene : 62,50 m de hauteur, dont 45 m de cintres et 15,50 m de dessous, le plateau ou scene s'etend sur 26 m de profondeur et 53 m de largeur. L'ouverture maximale du cadre de scene est de 15,60 m de largeur sur 10 m de hauteur.
- Des 1882, des essais d'eclairage electrique sont faits dans le grand foyer, puis dans la salle de spectacle par la
compagnie Edison
.
- En 1887, la compagnie Edison equipe tout le batiment. L'energie electrique est produite sur place, les 10 000 becs de gaz sont adaptes.
- En 1896, le systeme d'incendie du ≪ grand-secours ≫ est ameliore et le rideau de fer
maille
est remplace par un rideau de fer plein dans la cage de scene.
- En 1920, l'
Aga Khan III
, souffrant d'obesite, fait construire un ascenseur reliant le rez-de-chaussee a la rotonde des Abonnes au deuxieme etage
[
115
]
. Apres plus de quarante annees de fermeture, cet ascenseur est restaure en 2009 et remis en service en 2010
[
116
]
.
- En 1936, un incendie
[
117
]
(maitrise en trois heures par les pompiers et l'equipement du
grand-secours
) se declare de nuit dans les cintres pendant les travaux de modernisation de la cage de scene avec l'installation du
panorama
. L'Opera reste ferme pendant plusieurs mois, en trouvant asile dans differents theatres (Champs-Elysees, Sarah-Bernhardt). La toiture metallique devastee est entierement refaite.
- Au debut des
annees 1950
sont installes a l'arriere de la scene plusieurs
ascenseurs
pour faciliter les deplacements des employes, des artistes, des techniciens et machinistes.
- En 1952, le rideau d'avant-scene, de 14,50
m
sur 17,50
m
, peint en 1874 par Emile Rube et Philippe Chaperon, egalement signataires du lambrequin, est refait a l'identique sur toile de lin par Emile Bertin.
- En 1957, l'architecte Bailleau amenage une grande salle de repetition dans la grande coupole.
- En 1964, le ministre de la culture
Andre Malraux
confie a
Marc Chagall
la refection du plafond de la coupole.
- En 1970, creation de deux coursives vitrees (invisibles depuis la rue) facilitant l'acces a la Rotonde Bailleau.
- En 1971, le plancher de scene, use, est entierement refait a l'identique.
- En 1975, le studio de repetition
Chauvire
est cree dans le dome au-dessus de la Rotonde du Glacier. Dans la cage de scene, c'est aussi la titanesque depose du
panorama
de 22 tonnes, installe en 1935 par l'architecte Joseph Marrast. Ce dispositif trapezoidal
[
118
]
d'une hauteur de 25
m
pour un developpe de 44
m
, permettait par ses retours lateraux et sa hauteur de creer l'illusion de ciels infinis entourant les decors en plein air. Il etait constitue d'une ossature en aluminium revetu d'amiante-mica et d'une toile unie marouflee. Cette volumineuse structure permanente encombrait les cintres ou la visibilite etait reduite et genait les manœuvres. Apres son demantelement, les premier et deuxieme grils en metal sont retablis a l'identique. Les cintres retrouvent leur fonctionnalite.
- En 1980, sous l'impulsion du directeur de la Danse, Rudolf Noureev, la Rotonde Bailleau est reamenagee en trois studios de repetition pour le corps de ballet.
- En 2014, durant l'ete, tous les planchers des studios ou le corps de ballet travaille sont modifies a l'initiative de
Brigitte Lefevre
[
119
]
.
- En 2015, au mois d'aout, un dispositif de surtitrage, en francais et anglais, est amenage dans la salle pour faciliter la comprehension des ouvrages representes. Neanmoins, la configuration historique de la salle ne permet pas de rendre ce service visible a l'integralite des spectateurs.
- En 2016, des travaux sont effectues au premier etage des loges consistant a remplacer les anciennes parois capitonnees par des panneaux amovibles montes sur rails, lesquels, une fois retractes, permettent de gagner environ trente sieges. Cette initiative, percue comme motivee par le souhait de la direction de l'opera de gagner 650 000 euros par an est critiquee par les milieux artistiques et les medias, autant par son aspect patrimonial sur le rendu de la nouvelle perspective (la suppression de ces parois mettant a nu des poteaux porteurs en fonte que Garnier avait prefere dissimuler) que par son aspect pecuniaire
[
120
]
.
L'Opera de Paris a entame, depuis l'annee 1990, une grande campagne de restauration du palais Garnier. Les importants travaux realises sur la scene, la salle et la facade principale ainsi que la restauration du grand foyer et de ses salons attenants se poursuivent suivant un phasage pluriannuel et trouvent aujourd'hui leur prolongement dans une operation de remise aux
normes
des reseaux
electriques
de l'edifice.
En 2000, le ravalement suivi d'une
restauration
approfondie et scientifique de la facade principale de l'opera entraine le public a reconsiderer cette elevation noircie et abimee par le temps et a une redecouverte complete de son decor dans sa polychromie originelle, ses dorures et la variete des
materiaux
qui la composent, ces derniers venus pour certains de contrees lointaines. Les initiales dorees de Napoleon et Eugenie figurant sur les medaillons surmontant la facade, enlevees apres la chute du
Second Empire
, sont retablies a cette occasion.
En
, les prestigieux decors imagines par l'architecte pour le grand foyer et inaugures pour la premiere fois le
retrouvent leur eclat perdu. Le tapissier francais
Charles Jouffre
s’est vu confier la restauration des grands rideaux et tentures de ce chantier prestigieux dont le grand foyer etait prive depuis soixante-dix ans, apres un malheureux incendie survenu en
1928
: ≪ (...)
et j’etais impatient de voir deja ses longs rideaux d’or, moires de veines legeres, se draper dans leurs plis somptueux et communiquer au foyer une splendeur de bon aloi
.(...) ≫ (Charles Garnier).
En 2004, c'est au tour de l'ensemble des reseaux electriques et a leurs integrations architecturales d'etre remis en etat. En 2006, dans la lignee de la restauration de la facade principale, on lance des travaux sur le parvis de la face sud, en y ajoutant un acces pour personnes a mobilite reduite. A la suite d'une periode de restrictions budgetaires au Ministere de la Culture, le plan de relance 2010 a permis d'entreprendre la restauration de la facade ouest du palais. Cela permet petit a petit de retirer les
filets
de protection sur certaines parties du batiment.
Les phases de travaux sont d'abord executees sous la direction de
Jean-Loup Roubert
, second grand-
prix de Rome
en 1962 et architecte des batiments civils et palais nationaux, puis, assez rapidement, sous celle d'Alain-Charles Perrot, architecte en chef et inspecteur general des
monuments historiques
. En
, Pascal Prunet devient l'architecte en chef responsable du batiment.
Une liste complete des œuvres choregraphiques est consultable sur le site l'Association de l'Art Lyrique Francais
[
122
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- Le premier est emis, en
septembre 1998
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Charles Garnier
; il s'agit d'une composition de Claude Andreotto regroupant des elements rappelant les activites artistiques de l'opera Garnier : le profil d'une danseuse, un violon et un rideau rouge ;
- Le deuxieme, dessine et grave par
Martin Morck
, est emis en
juin 2006
et represente, en
taille-douce
, la facade principale.
- 1966 :
L'Age heureux
, de
Philippe Agostini
, feuilleton televise de huit episodes de vingt-six minutes, pour l'
ORTF
, d'apres le roman
Cote jardin, Memoires d'un rat
d'
Odette Joyeux
;
- 1975 :
L'Age en fleur
, de Philippe Agostini, feuilleton televise de seize episodes de vingt-six minutes, d'apres le roman d'Odette Joyeux.
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|
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conventions typographiques concernant les monuments et batiments publics
, issues pour l’essentiel d’ouvrages specialises en la matiere, comme
p. ex.
le
Lexique
.
- ↑
Boulevard des Italiens
, du
boulevard des Capucines
, de la
rue Auber
, de la
rue Halevy
, de la
rue de la Paix
et de la
rue du Quatre-Septembre
,
etc.
- ↑
Selon la tradition, Andre Malraux lui commande un nouveau plafond le
, lors d'un gala de prestige a l'Opera ou se joue
Daphnis et Chloe
, le ballet dont Chagall a realise les decors et costumes. L’histoire veut que le ministre, peu interesse par la musique, leve les yeux vers le plafond qu'il juge trop academique et que personne ne regarde. Chagall, qui se mefie des commandes, realise plusieurs etudes (esquisses et maquettes) avant d’accepter finalement ce defi benevolement, a la fois par amitie pour Malraux et pour rendre hommage aux grands compositeurs qui font vivre la scene de l’opera Garnier
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Le roi d'Ys, mise en scene de Pierre Chereau, Paris, Palais Garnier, aout 1950
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Sur les autres projets Wikimedia :
- L'Opera de Paris
, huile sur toile de
Frank Myers Boggs
(1855-1926), conservee dans une collection particuliere reproduite dans l'ouvrage de Francoise Ravelle,
Paris impressionniste, 100 tableaux de legende
, editions Parigramme, 2016,
p.
57.
- Annie Cornee,
La Saga en visite a l'opera Garnier
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p.
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, dans
Saga Information
,
n
o
335, mars 2014
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.
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