Matteo Ricci

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Matteo Ricci
Le pere Matteo Ricci
(portrait par le frere chinois Emmanuel Pereira).
Biographie
Naissance
Deces
(a 57 ans)
Pekin ( Chine )
Sepulture
Surnom
(zh) Li M?dou
Epoque
Formation
Lettres, philosophie et theologie
Activite
Missionnaire, sinologue , ecrivain
Autres informations
Ordre religieux
Etape de canonisation
Fete
Œuvres principales

Matteo Ricci , en chinois simplifie  : 利??  ; chinois traditionnel  : 利瑪竇  ; pinyin  : Li M?dou [ 1 ] , ne le a Macerata et mort le a Pekin , est un pretre jesuite italien et missionnaire en Chine imperiale .

Il inaugura le processus d' inculturation du christianisme en Chine . La cause de sa beatification a ete ouverte en 2010 [ 2 ] . Le 17 decembre 2022, le pape Francois signe le decret le declarant Venerable [ 3 ] .

Presentation [ modifier | modifier le code ]

Matteo Ricci est l’un des premiers jesuites a penetrer en Chine imperiale , et a en etudier la langue et la culture. Acquerant une profonde sympathie pour la civilisation chinoise , il y est reconnu comme un authentique lettre et comme l'un des rares etrangers a etre considere comme pere fondateur de l'histoire chinoise. Au ≪ Millennium Center ≫ de Pekin , le bas-relief consacre a l' histoire de la Chine ne comporte que deux noms etrangers, tous deux italiens : Marco Polo a la cour de Kubilai Khan et Matteo Ricci qui, revetu de l'habit de mandarin confuceen , scrute le ciel.

Ricci dessine des mappemondes qui font connaitre aux Chinois le reste du monde, traduit en chinois des livres de philosophie , de mathematiques et d' astronomie . Inversement, il revele a l'Occident Confucius et sa philosophie, promouvant de la sorte un dialogue culturel tres fructueux avec les lettres et les hommes de culture [ 4 ] .

Il incarne aussi la nouvelle demarche d' inculturation de la religion chretienne en Chine [ 5 ] telle que definie par Valignano . A l'ere de la mondialisation et des echanges interculturels generalises, Matteo Ricci incarne ce que peut etre un passeur et un pont entre la Chine et l' Occident [ 4 ] .

Biographie [ modifier | modifier le code ]

Ne d'un pere pharmacien, dans une famille de treize enfants [ 6 ] , il etudie a Macerata puis a l'ecole jesuite de Rome. Matteo Ricci entre au noviciat des jesuites le malgre l'opposition de son pere. Il est etudiant au College romain ou il suit l'enseignement de Christophorus Clavius [ 6 ] .

Appele a fonder une mission en Chine par le choix des peres jesuites Roger et Pasio, il quitte Rome pour Lisbonne ( ) ou il embarque pour l' Inde portugaise ? c'est-a-dire Goa  ? ou il termine sa formation sacerdotale et est ordonne pretre le .

Ricci arrive a Macao en aout 1582 [ 7 ] . Il apprend diverses langues chinoises, ainsi que la langue ecrite, le mandarin . Doue pour les langues ? il en connait deja plusieurs ? il se met a l'etude du chinois . Au bout de trois mois [ 6 ] il se sent deja a l'aise.

Il entre en Chine en 1583 et s'installe a Zhaoqing , pres de Canton . Il preche dans la province de Canton. Il reste dix-huit ans dans le sud de la Chine, a proximite de Macao . Il ecrit en chinois des ouvrages de geometrie et de morale religieuse, themes demandes. Il traduit egalement d'autres ouvrages.

Matteo Ricci (a gauche) avec son ami mandarin Xu Guangqi (a droite).

Lui et un de ses compagnons jesuites, Michele Ruggieri , s'habillent d'abord en moines bouddhistes, puisqu'ils sont religieux, mais adoptent plus tard le vetement des lettres, ayant appris que les bonzes etaient generalement incultes et mal consideres [ 6 ] . Il prend l'habitude de se presenter comme un religieux qui a quitte son pays natal dans le lointain Occident, a cause de la renommee du gouvernement de la Chine, ou il desire demeurer jusqu'a sa mort, en y servant Dieu, le Seigneur du ciel [ 8 ] . Aupres des lettres, il parle de Dieu , utilisant la sagesse et les ecrits confuceens, soulignant ce qui y est semblable au christianisme [ 6 ] . Il parvient a entrer en contact avec des mandarins , grace a ses grandes connaissances en mathematiques et en astronomie . C'est pourquoi l'habile diplomate peut avec ces soutiens chinois entreprendre le voyage vers Pekin en 1600.

En 1601, il est le premier Europeen a etre invite a la cour imperiale de Pekin aupres de l'empereur Ming Wanli . L'invite est porteur de beaux presents : une epinette , une mappemonde et deux horloges a sonnerie. Sa rencontre avec les proches de l'empereur est a l'origine de l'essor de l'horlogerie moderne en Chine, au debut de la dynastie Qing (1644-1911) [ 9 ] . Matteo Ricci enseigne les sciences au fils prefere de l'empereur [ 6 ] .

Comme l' astronomie , la philosophie et l'horlogerie, la musique est egalement utilisee pour faire passer son message et operer des conversions religieuses tout en gagnant les bonnes graces de l'empereur.

Il chante des airs edifiants, souvent sur des textes traduits en chinois [ 10 ] . Il publie a Pekin en 1608 un recueil de huit airs avec accompagnement (西琴曲意; X?qin q? yi  : ≪ Airs pour cithare europeenne ≫ - litteralement cithare occidentale , il peut s'agir egalement d'un clavecin ou d'un clavicorde ). Le succes est grand : ses reeditions se succederent jusqu'au XIX e  siecle . La musique en semble perdue, mais les paroles en chinois ont ete conservees [ 11 ] .

Matteo Ricci tisse des liens culturels et scientifiques importants avec le lettre Xu Guangqi dont il devient grand ami. Ce dernier se convertit au christianisme et est baptise en 1603 sous le nom de Paul [ 6 ] .

Le portail conduisant a la stele funeraire de Matteo Ricci, a Pekin.
La stele funeraire du premier jesuite a la cour imperiale de Chine.

Ricci est le premier missionnaire chretien des temps modernes, et premier Occidental, a avoir ete aussi proche de l'empereur [ 12 ] .

Ricci est considere comme le fondateur de l' Eglise chinoise. Son travail et ses activites ont toujours eu une perspective d' evangelisation en profondeur, meme s'il n'a pas cherche a baptiser en masse. En 1605, il fit edifier le Nantang , l'eglise du sud (actuel siege de l'eveche de Pekin). On estime a 2 500 [ 6 ] le nombre de chretiens chinois a sa mort. Et 9 des 18 jesuites œuvrant en Chine etaient Chinois [ 13 ] . Mais ses efforts d' evangelisation furent partiellement compromis, plus tard, par la virulente querelle romaine , dite des ≪ rites chinois ≫. Par faveur speciale de l'empereur, un terrain fut accorde a la Mission a proximite de la Cite interdite pour qu'il y fut inhume, comme il le souhaitait. C'est le cimetiere Zhalan d'aujourd'hui.

La ≪ methode Ricci ≫ [ modifier | modifier le code ]

Alessandro Valignano (1539-1606) ? maitre des novices et visiteur jesuite en Asie de l'Est de 1574 a 1606 ? avait defini la ligne de conduite des Jesuites en Chine. Matteo Ricci la met en application de maniere novatrice, si bien que les generations suivantes de missionnaires la designent sous l'appellation de ≪ methode Ricci ≫ [ 4 ] caracterisee par quatre principes directeurs :

  1. Une politique d'ajustement ou d'adaptation a la culture chinoise : Valignano insiste pour que les jesuites presents connaissent la langue et la culture chinoise . Sans doute inspires par l'experience japonaise, les jesuites commencent par adopter la tenue des moines bouddhistes , puis s'adaptent davantage aux modes de vie et aux usages de l'elite confuceenne composee de lettres et de fonctionnaires ;
  2. La propagation de la foi et l' evangelisation par ≪ le haut ≫ : les jesuites s'adressent a l'elite instruite, estimant que si celle-ci, l'empereur et sa cour, se convertissait, l'ensemble du pays se rallierait au christianisme . Ricci etudie les classiques confuceens et, grace a sa memoire prodigieuse, devient un invite fort apprecie des cercles d'echanges philosophiques ;
  3. La propagation indirecte de la foi chretienne : l'expose des sciences et techniques europeennes doit attirer l'attention des Chinois instruits et les persuader du degre d'avancement de la civilisation europeenne. Ricci presente une horloge, des tableaux qui utilisent la technique de la perspective, les ecrits mathematiques d' Euclide , les travaux du mathematicien jesuite Christophorus Clavius (1538-1612), une mappemonde sur laquelle figurent les resultats des dernieres decouvertes ;
  4. L'ouverture aux valeurs chinoises et la tolerance a leur egard : Ricci considere qu'il cotoie une societe aux hautes valeurs morales, pour laquelle il eprouve une profonde admiration. Suivant la tradition humaniste, il estime que Confucius (552-479 av. J.-C. ) est tout a fait comparable a ≪ un autre Seneque  ≫ [ 14 ] , [ 15 ] , [ 16 ] . Il plaide pour un retour au confucianisme initial qu'il considere comme une philosophie fondee sur la loi naturelle et qui contient l'idee de Dieu . Enfin, il adopte une attitude de tolerance envers les rites confuceens tels que le culte des ancetres ou la veneration de Confucius, consideres comme des ≪ rites civils ≫.

Ecrits [ modifier | modifier le code ]

Beatification [ modifier | modifier le code ]

La cause de sa beatification a ete ouverte, au niveau diocesain, le . Elle fut close le . Le dossier est maintenant etudie a Rome par la Congregation pour la Cause des Saints . Il est donc considere par l' Eglise catholique comme Serviteur de Dieu . Depuis 2011 la cause en beatification de son disciple et ami chinois Paul Xu Guangqi lui est associee avec le soutien de responsables jesuites, comme Anton Witwer, postulateur general de la Compagnie de Jesus avec l'aide du vice-postulateur en Chine, Benoit Vermander [ 17 ] . Le 17 decembre 2022, le pape Francois signe le decret le declarant Venerable [ 3 ] .

Hommage et heritage [ modifier | modifier le code ]

Mappemonde de Matteo Ricci [ modifier | modifier le code ]

Matteo Ricci est a l'origine de la denomination actuelle de nombreux pays. Il profite de sa presence en Chine pour affiner la cartographie de cette region du monde et hesite longtemps avant de presenter a l'empereur une carte dont la Chine n'est pas le centre [ 18 ] .

Mappemonde de Matteo Ricci et contour des cotes des terres australes.
Carte de Matteo Ricci.

Annee Ricci [ modifier | modifier le code ]

En 2010 est celebree, en Italie (Macerata et Rome), en Chine et en France, le 400 e  anniversaire du ≪ jesuite du XVI e  siecle qui nous a ouvert les portes de la Chine  ≫.

En France, le douzieme colloque international de sinologie a eu lieu les 27 et sur le theme ≪ L’echange des savoirs entre la Chine et l’Europe ≫ [ 19 ] .

Notes et references [ modifier | modifier le code ]

  1. Son nom chinois se conformant a la maniere chinoise d'annoncer le nom puis le prenom : Li represente Ricci, M?dou est l'homophone de Matteo.
  2. Depuis 2011 la cause de son ami mandarin Xu Guangqi , converti au christianisme, lui est associee.
  3. a et b ≪  Matteo Ricci, de la Chine imperiale au statut du Venerable  ≫, sur vaticannews.va , .
  4. a b et c La Documentation Catholique , 5 decembre 1910, n o  2457, p.  1057.
  5. Message du pape Benoit XVI, 6 mai 2009 , agence catholique Zenit.
  6. a b c d e f g h et i Philippe Oswald, Ce jesuite qui ouvrit les portes de la Chine, Famille chretienne n o  1686, 8-14 mai 2010.
  7. Paul Pelliot , ≪  La peinture et la gravure europeennes en Chine au temps de Mathieu Ricci  ≫, T'oung Pao , vol.  XX,‎ , p.  1?18 ( lire en ligne ) .
  8. Philip Caraman, L'empire perdu , Paris, Desclee de Brouwer, 1988, p.  20.
  9. L'horloge Guang-zhong, (zhong signifiant cloche, sonnerie, gong) dans la ville de Guangzhou, de la province de Guandong, suivie de la pendule de Nanjing ou Nanjing-zhong, puis, dans la province de Jiangsu, de la Su-zhong ou Ben-zhong, ben signifiant domestique).
  10. Rhapsody in red: how western classical music became Chinese Sheila Melvin, Jindong Cai, Algora publishing, 2004 (Google Books).
  11. Silkin : Paroles en chinois et anglais pour ≪ Eight Songs for Western Keyboard ≫ .
  12. Les nestoriens (au IX e  siecle et les Franciscains au XIII e  siecle , avec Jean de Montecorvino , ont eu des missions en Chine.
  13. Philip Caraman, Tibet; the Jesuit century , Saint Louis (USA), Institute of Jesuit sources, 1997, p.  135.
  14. Lettere, P 185 (Shaozhou, 10 decembre 1593).
  15. Un altro Seneca, P 100 (Zhaoqing, 20 octobre 1585).
  16. Paul Rule, K'ung-tzu or Confucius ?, The Jesuit Interpretation of confucianism, Sydney, Allen & Unwin, 1986, p.  28-29.
  17. Jin Lu ecrit dans le numero de juin de la revue Esprit consacre au pape Francois , l'article suivant : La mystique et l'institution : les ressources de la spiritualite jesuite (p. 29-40). Elle y relate ≪ Une idee brillante, soutenue par Anton Witwer, postulateur general de la Compagnie de Jesus et des Jesuites en Chine, comme par Benoit Vermander, suggere de beatifier Matteo Ricci et Xu Guangxi en meme temps. ≫
  18. a et b ≪  Matteo Ricci messager des sciences entre la Chine et l’Europe au XVII e  siecle  ≫, France Culture.com La marche des sciences par Aurelie Luneau (consulte le ) .
  19. Colloque de Sinologie 2010 - Celebration nationale 400 e  anniversaire de la mort de Matteo Ricci.

Voir aussi [ modifier | modifier le code ]

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Articles connexes [ modifier | modifier le code ]

Bibliographie [ modifier | modifier le code ]

Ouvrages anciens [ modifier | modifier le code ]

Dictionnaire portugais chinois de Ricci et Ruggieri.
  • Histoire de l'expedition chrestienne au royaume de la Chine redigee par Nicolas Trigault a l'aide des papiers laisses par Matteo Ricci, en latin [ lire en ligne ] , traduction en francais imprimee a Lyon en 1616, [ lire en ligne ] (bibliotheque de Lausanne), reedite des 1617 [ lire en ligne ] (universite de Tours) ; Edition moderne, Joseph Shih, Georges Bessiere, Joseph Dehergne , Desclee de Brouwer, Paris, 1978.
  • The Diary of Matthew Ricci , in Matthew Ricci, China in the Sixteenth Century , trans Louis Gallagher, (New York: Random House, 1942, 1970), as excerpted in Mark A. Kishlansky, Sources of World History, Vol. 1 (New York: HarperCollins, 1995), le journal de Matteo Ricci.
  • Ricci, le P. Matthieu dans Biographie universelle ancienne et moderne de Michaud , 2 e  edition 1843 tome 35 page 555, en ligne sur Wikisource.

Ouvrages modernes [ modifier | modifier le code ]

  • Pierre-Jacques Charliat , Le temps des grands voiliers , tome III de Histoire Universelle des Explorations publiee sous la direction de L.-H. Parias, Paris, Nouvelle Librairie de France, 1957, p.  41
  • Jonathan D. Spence, Le palais de memoire de Matteo Ricci , Payot, 1986
  • Rene Etiemble , L'Europe chinoise - I De l'Empire romain a Leibniz , Gallimard, 1988
  • Rene Etiemble, L'Europe chinoise - II De la sinophilie a la sinophobie , Gallimard, 1989
  • Li Mateou, l'horloge et le maitre du ciel , biographie dans Jesuites de Jean Lacouture , volume 1 page 244, Le Seuil, 1991, ( ISBN   2-02-012213-8 ) .
  • Etienne Ducornet, Matteo Ricci, le lettre d'Occident , Ouvrage publie avec le concours du Conseil de l'Universite de Fribourg, Collection ≪ Petits Cerf Histoire  ≫ 1992.
  • Jonathan D. Spence, La Chine imaginaire - Les Chinois vus par les Occidentaux de Marco Polo a nos jours , Presses de l'Universite de Montreal, 2000.
  • Vito Avarello, L'œuvre italienne de Matteo Ricci : anatomie d'une rencontre chinoise , Paris, Classiques Garnier, 2014, 738  p. ( ISBN   978-2-8124-3107-4 )
  • Le Cerf/Institut Ricci : Liang Shuming, Les idees maitresses de la culture chinoise , Trad. Michel Masson
  • Jacques Besineau, Matteo Ricci ? Serviteur du Maitre du Ciel , Desclee de Brouwer, 2003
  • Paul Dreyfus , Matto Ricci : le jesuite qui voulait convertir la Chine . Paris  : Editions du Jubile -Asie, 2004 . 274 p. ( ISBN   2-86679-380-3 ) .
  • Matteo Ricci et Confucius , Jean Charbonnier .- Missions Etrangeres de Paris , n o  450, , pages 51?58
  • Jean Sevillia , ≪ Un jesuite chez l'empereur de Chine ≫, Le Figaro Magazine ,
  • Vincent Cronin, Le sage venu de l'Occident , Editions Albin Michel, 1957 et 2010
  • Michela Fontana, Matteo Ricci, Un jesuite a la cour des Ming , Editions Salvator , 2010 (Grand Prix de la Biographie politique en 2010).
  • An Huo, Lettres a Matteo Ricci , Bayard, 2010 (publie avec la caution scientifique et historique de l' Institut Ricci )
  • Michel Masson, Matteo Ricci, un jesuite en Chine ? Les savoirs en partage au XVIIe siecle , Editions Facultes jesuites de Paris, 2010
  • Matteo Ricci (1552-1610) une porte toujours ouverte entre Occident et Orient , Histoire et missions chretiennes 2011/2 (n°18)

Cartographie [ modifier | modifier le code ]

Liens externes [ modifier | modifier le code ]