L'Apparition du Christ au peuple
L'Apparition du Christ au peuple
Artiste
| |
---|
Date
| |
---|
Type
| |
---|
Technique
| |
---|
Dimensions (H × L)
|
540 × 740 cm
|
---|
N
o
d’inventaire
|
8016
|
---|
Localisation
| |
---|
modifier
-
modifier le code
-
modifier Wikidata
L'Apparition du Christ au peuple
ou
L' Apparition du Messie
(en russe : Явление Христа народу) est un tableau du peintre russe
Alexandre Ivanov
. Le sujet du tableau reprend le theme du chapitre 3 de l'
evangile
selon
saint Matthieu
[
1
]
.
L'idee d'une grande toile consacree a l'apparition du Christ au peuple a longtemps occupe l'esprit d'Ivanov. En 1830, grace a une bourse de la
Societe imperiale d'encouragement des beaux-arts
, il part a Rome. Il sentait que cette toile, dont il revait, serait un tableau gigantesque qui lui prendrait des annees. Voulant obtenir une supplement de bourse pour rester plus longtemps en Italie et souhaitant exercer ses forces avec un tableau de moindre dimension, il realise en 1835 le tableau
L'Apparition du Christ a Madeleine apres la Resurrection
. Celui ci ne comporte que deux figures : l'une nue et l'autre drapee. La formulation est academique et elle n'a comme signification que celle d'un prelude
[
2
]
.
Trois ans plus tard, en
1837
, le peintre entreprend la realisation de
L' Apparition du Christ au peuple
. Il ne le terminera qu'en 1857, 20 ans plus tard.
Pour realiser ce tableau Ivanov realisa plus de 600 croquis. C'est la
galerie Tretiakov
qui acquit les esquisses, le prix du tableau lui-meme etant inaccessible. Ivanov le realisa pour l'
Academie russe des beaux-arts
comme travail de stage
[
3
]
.
-
Alexandre Ivanov esquisse
-
Alexandre Ivanov, tete d'homme, esquisse
-
Alexandre Ivanov tete de Jean le Baptiste, esquisse
-
Ivanov Tete de Christ 1824
-
Alexandre Ivanov, esquisses a la galerie Tretiakov
En mai
1858
Ivanov decide de rentrer en Russie a
Saint-Petersbourg
, avec son tableau. Il esperait le faire acheter par le Tsar et payer son voyage en
Palestine
avec le prix obtenu. Son depart de Rome fut pour lui un dechirement. Le Tsar acheta effectivement son tableau mais a peine arrive a Saint-Petersbourg, Ivanov est emporte en trois jours par le cholera
[
4
]
.
Vu la taille de celui-ci, les fonds necessaires au demenagement sont offerts par la Grande-duchesse
Elena Pavlovna
. Une exposition est organisee dans une salle de l'Academie des beaux-arts. Elle comprend toutes les esquisses, croquis preparatoires. Elle fait forte impression sur le public.
Alexandre Ivanov meurt le 3(15)
. Quelques heures apres sa mort le tableau de
L' Apparition du Christ au peuple
est achete par l'empereur
Alexandre II
pour la somme de 15 000 roubles. L'empereur l'offre au
Musee Roumiantsev
qui le deplace de Saint-Petersbourg a Moscou a la
Maison Pachkov
ou est construit un pavillon particulier pour la toile.
En
1925
ce musee est dissous et l'œuvre est transferee a la
galerie Tretiakov
. Mais il n'y avait pas d'espace suffisant pour une toile aussi grande. Des discussions ont lieu pour savoir ou la placer. Un premier projet prevoit de construire une annexe avec une salle particuliere pour les tableaux d'Ivanov. Finalement c'est dans la ruelle Lavrouchinski qu'est construite une annexe pour le tableau. Elle est achevee en 1932 et la toile y est alors exposee. Elle y est encore aujourd'hui.
Le
Musee russe
de Saint-Petersbourg conserve trois esquisses et de nombreuses etudes relatives a ce tableau d'Ivanov
[
5
]
.
Le tableau de
L'Apparition du Christ au peuple
est une œuvre maitresse d'Ivanov, qui resume toute sa vie d'artiste. Par la hauteur de l'ideal qu'il inspire, l'effort qu'il represente, la perfection de sa realisation, il constitue un des monuments les plus imposants de la peinture russe du
XIX
e
siecle
[
6
]
. Le sujet lui parut exprimer a la fois la revelation du
Messie
et l'ideal religieux du peuple russe. En lisant l'evangile de saint Jean, Ivanov decouvre que toute la substance de celui-ci reside dans ce moment ou Jean le Baptiste, voyant venir le Christ vers lui, dit au peuple : " Voici l'agneau de Dieu qui enleve les peches du monde. C'est celui dont je disais : Il vient un homme qui m'est prefere : car il est plus grand que moi. Il faut qu'il croisse et que je diminue ".
Louis Reau
remarque que ce passage de l'evangile est celui qui est transcrit en latin et montre du doigt par Jean le Baptiste sur la
Crucifixion de Colmar
de
Mathias Grunewald
, une des œuvres les plus puissantes de la peinture germanique
[
7
]
.
≪ Illum opportet crescere me autem minui ≫
[
8
]
,
[
9
]
.
Ivanov se considere comme l'apotre de la culture russe et veut prouver a Rome que les artistes de son pays sont capables d'egaler les artistes occidentaux. La peinture de genre ≪ a la francaise ≫ ne suscite que son mepris et il souhaite que son œuvre ouvre la voie a d'autres compositions historiques qui repandront la gloire de la peinture russe a travers le monde. La Russie, ecrit-il en 1837, ne fait que commencer a fleurir et ses artistes n'ont encore presque rien produit
[
10
]
.
Cet ideal a la fois religieux et national, voisin de celui des ≪
slavophiles
≫ explique l'effort qu'il s'est impose pendant 25 ans pour realiser cette toile. Les six cents etudes faites en vue de ce tableau permettent de se representer le travail necessaire.
Ses esquisses se repartissent en deux categories : les etudes de details d'une part et les recherches de compositions d'autre part.
- Etude de details.
Celles de details attestent sa conscience scrupuleuse et son respect de la nature. Il apportait a la preparation du travail un souci de documentation scientifique. Il aurait voulu aller en
Palestine
pour situer exactement ses personnages. En vain. L'Academie de Saint-Petersbourg lui repond que
Raphael
avait fait de grandes choses sans avoir jamais ete en Orient
[
11
]
.
Il dut se contenter de l'
Italie
ou il cherchait dans les
marais Pontins
l'equivalent du desert de Judee, a
Perouse
sur le
lac Trasimene
des baigneurs nus en plein air.
A cote d'etudes tres modernes, peintes d'apres nature, Ivanov reprend d'innombrables copies d'œuvres antiques pour creer par un subtil melange le type ideal de ses reves.
Dans une etude a l'huile il juxtapose a des figures differentes de Christ, les tetes de l'
Apollon du Belvedere
et du
Laocoon
: a Apollon il emprunte l'ovale des yeux et le modele du front, au Laocoon, les muscles contractes des sourcils et des joues
[
12
]
.
- Composition.
Le travail de composition ne fut pas moindre que celui de l'etude des details. Ivanov, tourmente par le desir du mieux, demande des avis de tous cotes aupres d'artistes italiens ou etrangers, ou a son pere reste a Petersbourg. Des avis contradictoires qui laissent des traces dans son œuvre. On lui conseille de diminuer le nombre de nus qui ressemblent plus a des academies d'ecole qu'a des auditeurs reels.
Johann Friedrich Overbeck
, consulte remarque que saint Jean le Baptiste en tournant sa tete vers les spectateurs prend un air d'acteur. Il lui conseille de tourner legerement la tete de profil.
Vincenzo Camuccini
lui conseille de peindre, aux pieds de saint Jean le Baptiste, une croix et une coupe, comme s'il jetait ses attributs au moment ou le Christ apparait.
Bertel Thorvaldsen
est d'avis de placer une croix dans la main de Jean le Baptiste.
Ivanov suit une partie des conseils et remanie completement son tableau en y introduisant le personnage nu, grelottant, portant en main un vetement a cote de son fils et celui du vieillard nu, de dos avec son esclave vetu de bleu. Au second plan le peintre ajoute des figures de
Pharisiens
et de soldats a cheval. Ivanov ecrit a son pere les changements qui apparaissent dans sa deuxieme esquisse et s'en explique. Jean Baptiste tient une croix pour qu'on le reconnaisse du premier coup d’œil
[
13
]
.
Il porte un manteau pour lui donner plus d'importance. Derriere Jean Baptiste saint Jean l'apotre avec des cheveux roux. Son visage de Juif hellenise est d'une grace presque feminine. Ivanov s'efforce, ecrit-il, de leur donner les traits inventes pour
La Cene
de
Leonard de Vinci
. Derriere saint Jean,
Andre
et
Nathanael
[
14
]
.
Au centre, un garcon habille de bleu fonce aide son pere a se relever pour voir le Messie. Dans une deuxieme lettre a son pere datee de
, Ivanov explique les changements qu'il apporte au fond de paysage. Il remplace des roches escarpees et les murailles de
Jerusalem
par une plaine d'oliviers toute embuee de vapeurs. La figure du Christ se detache mieux ainsi et le tableau gagne en profondeur. Au second plan apparait un groupe plus dense de
Pharisiens
, de
levites
incredules, de soldats.
Le Sauveur apparait au sommet de la colline. Sa silhouette va peu a peu grandir.
Louis Reau considere cette composition trop etudiee. La fraicheur des etudes semble s'etre evaporee dans l'assemblage des differentes parties ce qui lui fait perdre l'accord des tons. Il la compare aux œuvres d'
Albert Durer
, a ses grands tableaux religieux qui sont des mosaiques juxtaposees, ecrit-il, ingenieusement assemblees, mais ou le charme des couleurs disparait. Reau remarque que la lenteur d'execution a nui a l'unite de cette œuvre grandiose. Il remarque egalement que, un quart de siecle apres le debut de son execution, le tableau est devenu ≪ inactuel ≫ et le public de
Saint-Petersbourg
quand il lui fut presente en 1857, se contenta de saluer froidement ce ≪ revenant devenu vieux ≫
[
15
]
.
- ↑
≪
Chapitre 3
≫, sur
catholique.org
(consulte le
)
.
- ↑
Louis Reau
, L'art russe, Tome 3, Marabout universite, Gerard et C°, Verviers, 1968
p.
97
- ↑
Смолев, Дмитрий Алексеевич|Дмитрий Смолев.
Явление художника народу
- ↑
Louis Reau
, L'art russe, Tome 3, Marabout universite, Gerard et C°, Verviers, 1968
p.
106
- ↑
Источник:
Государственный Русский Музей. Выставки.
- ↑
Louis Reau, L'art russe, Tome 3 Op. Cit
p.
97
- ↑
Louis Reau
, Mathias Grunewald et le retable de Colmar, Paris 1920
- ↑
Evangile selon Saint-Jean, Chapitre I, verset 30
- ↑
http://bible.catholique.org/evangile-selon-saint-jean/3264-chapitre-1
verset 29 et 30
- ↑
Louis Reau
L'art russe, Tome 3 , Marabout universite, Gerard et C° Verviers, 1968
p.
98
- ↑
Louis Reau, L'art russe, Tome 3, opus cit.
p.
99
- ↑
Louis Reau, L'art russe, Tome 3, opus cit.
p.
100
- ↑
Louis Reau, L'art russe, Tome 3, opus cit.
p.
101
- ↑
Louis Reau, L'art russe, Tome 3, opus cit.
p.
102
- ↑
Louis Reau, L'art russe, Tome 3, opus cit.
p.
103