Jules-Edouard Gouin
est un
ingenieur
,
industriel
et
philanthrope
francais, ne le
a
Paris
et mort le
a
Royaumont
.
Fils d'
Ernest Gouin
et petit-fils d'
Edouard Rodrigues-Henriques
, Jules Gouin fait ses etudes au
lycee Bonaparte
puis a l'
Ecole centrale Paris
dont il est diplome en 1869. Apres un stage a l'usine et au bureau d'etude de la
societe
fondee par son pere, ce dernier lui confie l'etude et la realisation de la ligne de chemin de fer de
Pite?ti
-
Craiova
en
Roumanie
. Ce chantier se developpait sur 140
km
de long, il comportait des terrassements importants et de nombreux ouvrages d'arts, parmi lesquelles les
ponts de Slatina
, sur l'
Olt
(375 metres), et
de Balsu
, sur l'Oltezza (120 metres). La ligne est ouverte en
. Ce succes, obtenu dans des conditions difficiles, techniquement et politiquement, vaut a Jules Gouin d'etre admis comme administrateur de la
Societe de construction des Batignolles
en
1872
. Il prend part aux travaux, en tant qu'ingenieur ou dirigeant, de la
ligne de Poitiers-Saumur
, du
chemin de fer de la Seudre
, du reseau entier de
Bone-Guelma
(tant en
Algerie
qu'en
Tunisie
), du canal de
Pierrelatte
, du
chemin de fer de Dakar a Saint-Louis
, de la section du chemin de fer
Souk Ahras
-
Ghardimaou
, des chemins de fer en
Italie
,
Autriche
,
Roumanie
, etc.
Il constitue la Societe d'exploitation du chemin de fer de Bone a Guelma en 1876, en tant que filiale de la
Compagnie des chemins de fer Bone-Guelma
fondee par son pere et dont il assure la vice-presidence.
Apres le deces de son pere en
1885
, il lui succede aux fonctions de president de la
Societe de construction des Batignolles
. Il y renforce l'option
genie civil
et des grands
Travaux publics
prise par l'entreprise depuis le debut des annees
1880
et amplifie la strategie d'exportation a travers le monde inauguree par son pere.
Il realisa les lignes de
Damas a Beyrouth
(1892-1895) et
Le Piree
-
Salonique
(a partir de 1902) ; ou encore la realisation, entre 1883 et 1886, de deux ponts particulierement complexes a
Cernavod?
, servant a raccorder deux lignes existantes dans le
delta du Danube
. Dans le meme temps, la part des grands travaux portuaires prend une importance croissante : l’entreprise des Batignolles se voit confier la construction du port de
Tunis
-
La Goulette
, de celui de
Bourgas
sur la
mer Noire
en
Bulgarie
, et, au
Bresil
, ceux de
Rio Grande do Sul
et surtout
Pernambouc
. Il assure la construction, a partir de 1903, du
chemin de fer de l'Indochine et du Yunnan
au sud de la
Chine
destine a prolonger la ligne qui venait d’etre terminee au
Tonkin
, depuis le port de
H?i Phong
, pour atteindre la riche province du
Sichuan
. La traversee du
Yunnan Fou
, region plutot inhospitaliere et relativement insalubre, posa d’innombrables problemes de main-d’œuvre, de materiaux, de ravitaillement.
La
Societe de construction des Batignolles
obtient, grace a ses contacts politiques, la construction du
pont Troitsky
sur la
Neva
, a
Saint-Petersbourg
. Il repondait a la construction du
pont Alexandre-III
a Paris, dont la premiere pierre est posee par le tsar
Nicolas II
et qui est inaugure en
1900
pour l'
Exposition universelle de Paris
. Le President de la Republique
Felix Faure
, ayant a ses cotes Jules Gouin, en pose la premiere pierre lors d'une somptueuse ceremonie, le
, dans le cadre de festivites marquant l'
Alliance franco-russe
. Il est inaugure par le tsar
Nicolas II
et la
tsarine
, le
, en presence de Jules Gouin.
President de la
Societe de construction des Chemins de fer Indochinois
et de la Societe d'etudes de travaux publics du Maroc (filiale de la
Compagnie marocaine
), vice-president de la
Compagnie des chemins de fer Bone-Guelma
, il est administrateur de la
Regie generale des chemins de fer
, de la Societe d'etude des phosphates de Kalaa-es-Senam, du
Chemin de Fer Moudania Brousse
et de la Societe d'etudes industrielles en Chine, et commissaire de la Societe du domaine de l'Habra et de la Macta. Il est liquidateur de la Societe fonciere de l'Oued-Zargua en 1904.
Jules Gouin est
censeur
(1890-1897) puis
regent
(1897-1908) de la
Banque de France
, inspecteur des
arts et manufactures
,
conseiller du commerce exterieur de la France
, ainsi que vice-president de la
Chambre syndicale des fabricants et constructeurs de materiel pour chemins de fer et tramways
et membre de la
Societe des ingenieurs civils de France
et de la
Societe de geographie
.
Il est decore de la
Legion d'honneur
en 1884.
Soucieux de lutter contre la pauvrete, Jules Gouin et son epouse s'engage dans les œuvres catholiques, les œuvres patronales et au sein de la
Societe philanthropique
[
1
]
,
[
2
]
. Il met ainsi en place en
1886
un
fonds de pension et secours
afin de venir en aide aux anciens ouvriers et a leurs familles. Il cree la
Fondation Jules-Gouin
et, en
1893
, il entreprend ce qui restera sa grande œuvre, la construction a
Clichy
d’un
hopital dispensaire
et d’immeubles d’habitation economique, situees au
n
os
23-25 de la rue d'Alsace, destines aux employes de la
Societe de construction des Batignolles
et a la population clichoise. Il fait don a la
Societe philanthropique
des terrains et des sommes necessaires a l’edification des batiments et la charge de mener a bien ces deux projets puis d’en assurer la gestion, pour une somme totale de 1 200 000
francs-or
[
3
]
. L'
Hopital Gouin
ouvrira en
1897
, sous la direction des
Sœurs de Saint-Joseph de Cluny
comme le souhaitait Jules Gouin.
Les Gouin font egalement construire un immeuble collectif moderne en 1907, au
n
o
75
rue Pouchet
, pour les employes de la Societe de construction des Batignolles
[
4
]
, et financent (avec leurs parents les
Roland-Gosselin
) la construction voisine de l'
eglise Saint-Joseph-des-Epinettes
.
Jules Gouin etait par ailleurs
administrateur delegue
et tresorier de l'
Œuvre de Saint-Nicolas
[
5
]
, fondee par l'abbe
Martin de Bervanger
et le comte Victor de Noailles, et membre de la Societe francaise des habitations a bon marche.
-
-
Les immeubles d'habitation economique,
n
os
23-25 de la rue d'Alsace a
Clichy
.
-
-
Jules Gouin epouse a
Paris
, le
, Marie-Therese Singer (1856-1909), fille de l'avocat Henry Singer et de Marianne Lablache (elle-meme fille de
Luigi Lablache
). Le pere de Marie-Therese Singer (qui se remariera avec la veuve de
Leon Vaudoyer
et petite-fille de
Joseph Mira-Brunet
) etait le fils de l'industriel et philanthrope
David Singer
, qui donnera son nom a la
rue Singer
(
Paris
), et le beau-frere de
Flore Singer
. Remarquable cantatrice,
M
me
Gouin realise de nombreux concerts de charite, notamment dans leur
hotel particulier
du
n
o
4 de l'
avenue Velasquez
a
Paris
. Elle decede de maniere tragique, le
, agressee et defenestree par deux militaires en permission, au cours d’un voyage en train (voir l'
Affaire du wagon sanglant
). Ce sinistre evenement constitua un veritable feuilleton qui tint en haleine de longs mois les lecteurs des journaux populaires et mondains.
Ils eurent six enfants, dont trois lui succederont a la tete des Batignolles :
Jules Gouin rachete le
Palais abbatial de Royaumont
(alors dit le
chateau
) et son domaine de
258
hectares en 1898. Les batiments monastiques forment une enclave au sein de la propriete, occupee par des religieuses qui, menacees par la
loi Combes sur les Congregations
, cherchent bientot a vendre. Afin d’eviter une eventuelle reconversion des batiments en tannerie ou en asile d’alienes, Jules Gouin s’entend avec la superieure du couvent, la mere Marie-Emmanuel, et la societe civile qui represente les religieuses, et achete l’
abbaye de Royaumont
le
, avec l’intention de la leur rendre si les circonstances leur permettaient d’y revenir.
Il acquiert egalement la
villa Desmarest
, petit chateau construit en
1857
, au
n
o
10 de la berge de la prairie a
Croissy-sur-Seine
.
A son deces, sa fortune est d'environ vingt millions de francs.
- ↑
[Interview] Christian Topalov : ≪ Les philanthropes de 1900 avaient une vision de l’avenir ≫
,
Royaumont
- ↑
Christian Topalov
,
Philanthropes en 1900 : Londres, New York, Paris, Geneve
, Creaphis, 2019
- ↑
Marc Gaillard,
Les belles heures de Clichy : de Dagobert a aujourd'hui
, Martelle editions, 1992
- ↑
≪ Grands projets : reamenagement du mail Brechet ≫
,
www.mairie17.paris.fr
.
- ↑
100 ans de l'Ecole centrale
- Yves Lemoine
et Cedric-William Plont,
La dynastie Gouin et l'abbaye de Royaumont
, editions Michel de Maule, 2014 ;
- Anne Burnel,
La Societe de construction des Batignolles de 1914-1939 : histoire d'un declin
, Librairie Droz, 1995 ;
- Anne Burnel,
Les Gouin, une dynastie d'entrepreneurs, histoire des dirigeants de la Societe de Constructions des Batignolles de 1846 a 1968
, 1996 ;
- Denis Laborde,
Le Cas Royaumont
,
editions Creaphis
, 2014 ;
- Alain Jacquet,
Les Gouin, une famille tourangelle de renom
, Memoires de la Societe archeologique de Touraine, volume LXXII,
, 90
p.
(
ISBN
978-2-36536-048-7
)
- Rang-Ri Park-Barjot,
La Societe de construction des Batignolles: Des origines a la Premiere Guerre mondiale (1846-1914)
, Presses Paris Sorbonne, 2005 ;
- Jean-Francois Belhoste,
Royaumont au
XIX
e
siecle, Jules et Ernest Gouin (1859-1901)
- Rang-Ri Park-Barjot, ≪ Jules Gouin (1846-1908) : dirigeant de la societe de construction des Batignolles ≫, in:
Paris et ile-de-France. Tome 51
, 2000,
p.
287-296
- Jean Ganiage
,
Les origines du protectorat francais en tunisie (1861-1881)
, Maison tunisienne de l'edition, 1959
- Mohamed Lazhar Gharbi,
Imperialisme et reformisme au Maghreb: histoire d'un chemin de fer algero-tunisien
, Ceres Editions, 1994 ;
- Ressource relative a la vie publique
: