L'
Empire songhai
, ou
empire des
Songhai
, est un Etat d'
Afrique de l'Ouest
ayant existe entre le
XV
e
et le
XVI
e
siecle.
L'Empire songhai est initialement un petit royaume etendu du
fleuve Niger
autour de l'actuelle ville de
Gao
. Au
VII
e
siecle, c'est le
royaume de Gao
, devenant vassal des empires du Ghana et du Mali
[
2
]
. Il devient l'empire songhai durant le
XV
e
siecle
[
3
]
et, a son apogee, s'etend sur une partie du
Niger
, du
Mali
et une partie du
Nigeria
actuels.
Le royaume de Gao (
VII
e
???
XIII
e
siecle)
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L'Etat songhai est fonde a
Koukia
au
VII
e
siecle, a la suite des metissages qui s'effectuent entre les
Songhais
et les
Berberes
diriges par le chef
Za el-Ayamen
. Ce dernier fuit la conquete arabe de l'Afrique du Nord et du Maghreb. Ce metissage entre les Songhais et les Berberes donne la dynastie des Dia
[
4
]
,
[
5
]
. La capitale est alors a Koukia, en aval de Gao, actuel Mali. Vers 1010, les rois de Koukia s'installent a
Gao
et se convertissent a l'
islam
[
6
]
. Il en reste des steles en marbre parfois encore visibles sur les frontons des batiments administratifs de Gao, le plus souvent extraites de la necropole de Sane, au nord-est de Gao. Le marbre vient d'Espagne, les inscriptions en arabe sont faites en Andalousie dans les alentours d'Almeria. Les steles sont ensuite transportees au travers du Sahara vers la cour des Songhai de Gao. La plus ancienne date de 1014.
Vers l'an 1300, le Songhai passe sous la coupe de l'
empire du Mali
[
7
]
. Il est alors une des composantes de cette constellation de royaumes assujettis qui constituent habituellement les empires d'Afrique de l'Ouest de cette epoque.
La dynastie des Sonni et la naissance de l'Empire songhai (1464-1492)
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]
Il retrouve son independance sous le regne de
Sonni Ali Ber
de la dynastie des Sonni (1464-1492), qui combat les
Peuls
et les
Touaregs
, ainsi que les lettres musulmans de la ville sainte de
Tombouctou
[
8
]
. Sonni Ali tente de preserver la culture non musulmane de son royaume
[
9
]
.
La mort de Sonni Ali Ber ouvre une courte periode (1492-1493) d'instabilite au sein de l'Empire songhai.
Sonni Baro
, pressenti pour lui succeder, refuse de se convertir a l'islam.
Askia Mohammed
, gouverneur regional et neveu de Sonni Ali ber, prend le pouvoir avec l'aide des oulemas de Djenne, de Tombouctou et de Gao. Il fonde une dynastie appelee par la suite
dynastie des Askias
.
Askia Mohammed
(1493-1528) prend le contrepied de la politique religieuse de son oncle Sonni Ali Ber. Il acheve d'islamiser le royaume a travers plusieurs batailles que rapporte le voyageur
Leon l'Africain
[
10
]
. L'Empire songhai, largement islamise, au moins dans les grandes villes, connait son apogee sous la dynastie musulmane des
Askia
[
11
]
.
Le Songhai s'effondre en 1591 a la suite de l'invasion des armees du
sultan
marocain
Ahmed IV el-Mansour
, conduites par le mercenaire iberique
Yuder Pacha
. Vaincus apres la
bataille de Tondibi
, en 1591, les Songhais essayent de negocier avec le sultan marocain, puis devant son refus, organisent une guerilla contre le corps expeditionnaire marocain. Les derniers askias songhais independants sont contraints de faire allegeance aux pachas marocains, avant de se replier en aval du
fleuve Niger
, autour de
Sikieye
, la nouvelle capitale, situee aujourd'hui a l'emplacement de
Niamey
[
12
]
. L'Empire eclate en une douzaine de principautes
[
13
]
. A Tombouctou et au niveau du nord de la
boucle du Niger
, les Marocains forment un
pachalik
qui perdure jusqu'au premier quart du
XIX
e
siecle
.
La ville de
Tombouctou
devient, lors de l'affaiblissement de l'
empire du Ghana
, au
XI
e
siecle, le point de regroupement des
caravanes
et le centre du
commerce transsaharien
, ce qui en fait non seulement la metropole economique des empires du Mali et songhai, mais aussi le principal centre religieux et intellectuel
[
14
]
. De nombreux monuments en
pise
[
15
]
sont alors eriges, telles les
mosquees
Djingareyber
, construite sous le regne de l'Empereur du Mali
Kankan Moussa
,
Sidi Yaya
et
Sankore
[ref. necessaire]
. L'explorateur francais
Rene Caillie
y penetre bien plus tard, en 1828, et n'y trouve que des restes de sa splendeur medievale
[
16
]
.
Le savoir, les livres et l'enseignement tiennent une grande place dans l'Empire ; c'est un heritage de l'empire du Mali que l'Askia Mohammed va proteger et developper. Les etudiants et les savants viennent d’Egypte, du Maroc, d'Andalousie ou d'
Allada
pour suivre des cours de mathematiques, de grammaire ou de litterature a l'universite Sankore ou d'autres
medersa
[
17
]
.
Les Askias s'entourent de lettres. De nombreux docteurs etrangers viennent s'installer a Gao et Tombouctou, cette derniere etant la capitale culturelle de l'Etat. Ils apportent les traditions academiques de
Chinguetti
,
Djenne
mais aussi
La Mecque
et
Le Caire
dont l'
universite al-Azhar
est, a cette epoque, le plus grand centre d'enseignement des
sciences islamiques
. Des la seconde generation, les savants de Tombouctou developpent leurs propres enseignements et critiquent dans leurs commentaires certains ouvrages des maitres du Caire. La liberte d'enseigner est grande, il suffit d'etre titulaire d'un diplome pour ouvrir une ecole
[
18
]
. Les signes du pouvoir intellectuel se retrouvent dans les habits des enseignants :
boubou
specifique, turban blanc et longue canne a bout pointu
[ref. necessaire]
. Ahmed Baba, lettre de Tombouctou, deporte lors de la conquete marocaine et qui retrouve la liberte a la mort du sultan Ahmed el-Mansour, vers 1605, s'illustre a Marrakech par la profondeur de son savoir.
L'arrivee au pouvoir des Askias entraine cependant un virage rigoriste de la politique religieuse de l'Empire. L'arrivee d'al-Maghili, par exemple, amene la destruction des communautes juives des oasis du Sahara, celles du Touat en particulier. L'islam ne penetre cependant pas le monde rural ; l'Empire songhai reste une civilisation urbaine et les efforts des classes dirigeantes dans l'organisation et l'administration de l'Empire restent focalises sur la societe urbaine commercante. En revanche, la fin de l'Empire entraine un exode des imams dans des ermitages ruraux autour desquels s'organise une seconde islamisation du songhai, l'islamisation des campagnes (
xvii
e
et
XVIII
e
siecles).
L'Empire songhai prospere rapidement grace au
commerce transsaharien
et a ses mines, en expediant vers l'Afrique du Nord du
sel
et de l'
or
mais aussi des
noix de kola
, de l'
ambre gris
, de la
gomme arabique
, des peaux de
leopards
et des
esclaves
. Il exporte egalement des peaux d'hippopotames, decoupees et tannees pour en faire des boucliers, reputes jusqu'au Maroc. L'or, qui fascine autant les Europeens que les souverains marocains, n'est pas produit dans le Songhai mais dans des mines, essentiellement situees en pays
akan
des le
XVI
e
siecle. Comme le Mali, le Songhai sert de plaque tournante a des echanges commerciaux de biens qu'il ne produit pas : l'or vient de la foret et le sel du Sahara.
L'Empire songhai recoit du
Maghreb
, en contrepartie, des produits manufactures tels que des
bijoux
, des armes, des
etoffes
ou des
miroirs
, ainsi que des produits agricoles tels que du
ble
, des dattes ou des
chevaux
[
19
]
. A partir du milieu du
XVI
e
siecle, le Songhai finit par entrer en conflit avec les
Saadiens
pour la possession des mines de sel du desert et, en particulier, la grande mine de sel de
Teghazza
, finalement abandonnee par les Touaregs apres son annexion en 1582 par les sultans saadiens
[
20
]
.
- ↑
Emma Marriott
,
The History of the World in Bite-Sized Chunks
, Michael O'Mara Books, 20/09/2012
- ↑
John Iliffe (
trad.
de l'anglais par Jean-Paul Mourlon),
Les Africains. Histoire d'un continent
[≪
Africans: the History of a Continent
≫], Paris, Flammarion,
coll.
≪ Champs / Histoire ≫ (
n
o
881),
(
reimpr.
1997 et 2009) (
1
re
ed.
1995), 701
p.
(
ISBN
978-2-08-122059-1
)
,
chap.
V (≪ Des societes colonisatrices : l'Afrique occidentale ≫),
p.
146 et sq.
- ↑
Cissoko 2000
,
p.
213. ?
≪ […] les Songhay (ou Songhoy), etablis sur les deux rives du moyen Niger, erigerent au
XV
e
siecle un Etat puissant, unifierent une grande partie du Soudan occidental et permirent ainsi l’epanouissement d’une brillante civilisation en gestation depuis des siecles. ≫
- ↑
Cissoko 2000
,
p.
214.
- ↑
L'
Histoire generale de l'Afrique
, dans son volume IV, chapitre 8, suit explicitement les analyses de Houdas et Delafosse (1912) et de
Boubou Hama
(1968) dans son
Histoire des Songhay
.
- ↑
Bernard Nantet
,
L'invention du desert. Archeologie au Sahara
, Paris, Payot,
coll.
≪ Voyageurs Payot ≫,
, 382 pages
(
ISBN
2-228-89192-4
)
,
chap.
XII (≪ Le Sahara des illusions ≫),
p.
322 et suivantes
.
- ↑
Remi Dewiere,
≪ Les sultanats du Songhay et du Borno ≫
, dans
Francois-Xavier Fauvelle
et Isabelle Surun (dir.),
Atlas historique de l'Afrique
, Autrement,
,
p.
32-33
- ↑
Kati 1913
,
p.
81.
- ↑
Niane 2000
,
p.
219.
- ↑
Hassan al Wassan, dit Leon l'Africain (
trad.
de l'arabe par Houdas),
Description de l'Afrique : tierce partie du monde
, Paris, Hachette,
coll.
≪ Bnf ≫,
(
1
re
ed.
1896), 499
p.
(
ISBN
978-2012536548
)
.
- ↑
Cissoko 2000
,
p.
233 et suivantes. ?
≪ Cet epanouissement fut rendu possible grace a la prosperite generale du Soudan qui attira des le XVe siecle nombre de savants etrangers et, surtout, grace a la politique bienveillante des souverains de Gao […] ≫
.
- ↑
Andre Sakifou
et al.
,
Histoire du Niger : epoques precoloniale et coloniale
, Paris, Nathan,
(
1
re
ed.
1985), 317
p.
(
ISBN
978-2-09-882499-7
)
.
- ↑
Abitbol 2011
,
p.
351. ?
≪ Revenant progressivement a la religion traditionnelle africaine, les Songhay du Dendi se morcelerent en plusieurs royaumes, bien que jusqu’au milieu du
XVII
e
siecle, ils soient parvenus a preserver leur unite. ≫
- ↑
Catherine Coquery-Vidrovitch,
Histoire des villes d'Afrique noire : des origines a la colonisation
, Paris, Albin Michel,
coll.
≪ Bibliotheque de l'evolution de l'Humanite ≫,
, 416
p.
(
ISBN
978-2-226-06330-4
)
.
- ↑
Le pise est un melange de terre et de paille, appele banco en Afrique occidentale, appele egalement
adobe
en architecture.
- ↑
Bernard Nantet
,
Le Sahara. Histoire, guerres et conquetes
, Paris, Tallandier,
, 398
p.
(
ISBN
979-10-210-0239-5
)
,
chap.
3 (≪ Les explorateurs du Sahara ≫),
p.
112
.
- ↑
Djian 2012
,
p.
107.
- ↑
Cissoko 1996
,
p.
204.
- ↑
Cissoko 2000
,
p.
229 et suivantes. ?
≪ A l’exportation, le Soudan envoyait de l’or, des esclaves, de l’ivoire, des epices, de la cola, des cotonnades, etc. L’or en poudre ? le tibr ? ou en pepites venait des mines du Bambuk, du Bure, des pays mosi et surtout du pays asante, le Bitu. Il etait le pivot du commerce transsaharien et alimenta l’Europe ≫
.
- ↑
Abitbol 2011
,
p.
341 et sq. ?
≪ En 1582, al-Man??r passa a l’attaque en s’emparant des oasis de Touat et de Gourara ; officiellement presentee comme une operation visant a retablir l’ordre dans une contree ayant ≪ secoue le joug royal ≫, le reel objectif de cette attaque etait la conquete du Soudan et la constitution d’un vaste empire ≫
.
- Sekene Mody
Cissoko
,
Tombouctou et l'Empire songhay : epanouissement du Soudan nigerien aux
XV
e
???
XVI
e
siecles
, Paris/Montreal,
L'Harmattan
,
, 243
p.
(
ISBN
2-7384-4384-2
,
lire en ligne
)
.
- Jean
Jolly
,
Histoire du continent africain : De la prehistoire a 1600
,
t.
1/3, Paris,
L’Harmattan
,
, 221
p.
(
ISBN
2-7384-4688-4
,
lire en ligne
)
.
- Jean-Michel
Djian
,
Les Manuscrits de Tombouctou : Secrets, mythes et realites
, Paris,
Editions Jean-Claude Lattes
,
, 183
p.
(
ISBN
978-2-7096-3954-5
)
.
- Mahmud
Kati
(
trad.
Octave Houdas, Maurice Delafosse),
Tarikh el-fettach
, Paris, Ernest Leroux,
, XX-363
p.
(
lire en ligne
)
.
- Abderrahmane
Es Sa'di
(
trad.
Octave Houdas),
Tarikh es-Soudan
,
t.
2, Paris, E. Leroux,
, 540
p.
(
lire en ligne
)
.
- Djibril Tamsir
Niane
(dir.),
Histoire generale de l'Afrique
,
vol.
4 :
L’Afrique du
XII
e
au
XVI
e
siecle
, UNESCO,
.
- Sekene Mody
Cissoko
,
≪ Chap. 8. Les Songhay du
XII
e
au
XVI
e
siecle ≫
, dans
Djibril Tamsir Niane
(dir.),
Histoire generale de l'Afrique. Volume 4 : L’Afrique du
XII
e
au
XVI
e
siecle
, UNESCO,
.
- B. A. Ogot (dir.),
Histoire generale de l'Afrique
,
vol.
5 :
L’Afrique du
XVI
e
au
XVIII
e
siecle
, UNESCO,
.
- Michel Abitbol,
≪ La fin de l'Empire songhay ≫
, dans B. A. Ogot (dir.),
Histoire generale de l'Afrique
. Volume 5. L’Afrique du
XVI
e
au
XVIII
e
siecle
, UNESCO,
.
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