Bataille d'Isandhlwana

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Bataille d'Isandhlwana
Description de cette image, également commentée ci-après
Bataille d'Isandhlwana par Charles Edwin Fripp (1885).
Informations generales
Date 22 janvier 1879
Lieu KwaZulu-Natal ( Afrique du Sud )
Issue Victoire des Zoulous
Belligerants
Drapeau de l'Empire britannique Empire britannique Royaume zoulou
Commandants
Colonel Anthony Durnford
Lieutenant-colonel Henry Pulleine   (en)
? Ntshingwayo Khoza
? Mavumengwana kaNdlela Ntuli
Forces en presence
1 700 hommes ~ 23 000 hommes [ 1 ]
Pertes
1 300 morts ~ 1 000 morts
2 000 blesses

Guerre anglo-zouloue

Batailles

Coordonnees 28° 21′ 32″ sud, 30° 39′ 09″ est
Geolocalisation sur la carte : Afrique du Sud
(Voir situation sur carte : Afrique du Sud)
Bataille d'Isandhlwana

La bataille d'Isandhlwana a ete livree le en Afrique du Sud , pendant la guerre anglo-zouloue , et s'est soldee par l'une des plus grandes defaites coloniales britanniques.

L' Isandhlwana (egalement nommee Isandlwana ou Isandula ) est une colline isolee dans la province du KwaZulu-Natal . Isandhlwana veut dire ≪ la colline qui ressemble a un bœuf ≫.

Une armee de plus de 20 000  Zoulous [ 1 ] , commandee par Ntshingwayo Khoza et Mavumengwana kaNdlela Ntuli , balaie six compagnies du 24 e  regiment d'infanterie britannique , un contingent de volontaires du Natal et des auxiliaires Basotho , soit 1 700 hommes environ, sous les ordres du colonel Durnford et du lieutenant-colonel Pulleine   (en) .

Origine du conflit [ modifier | modifier le code ]

Henry Bartle Frere .

La guerre anglo-zouloue de 1879 trouve son origine dans la politique agressive de Sir Henry Bartle Frere , High Commissioner (haut commissaire) des possessions britanniques en Afrique du Sud. Administrateur colonial de grande experience, il est envoye au Cap en 1877 afin de realiser la reunion des colonies britanniques, des republiques boers et des royaumes africains dans une Confederation unique dirigee par le gouvernement du Royaume-Uni , tres interesse par la region depuis la decouverte de diamants a Kimberley en 1868 . Rapidement, Bartle Frere conclut que le royaume zoulou est un obstacle a la mission qui lui est assignee et il est persuade que le roi Cetshwayo kaMpande appuie la vague de mecontentement des populations africaines qui secoue alors l'Afrique du Sud [ 2 ] . En depit des avis contraires de son gouvernement, deja engage dans une guerre difficile en Afghanistan et tres inquiet par la tournure prise par la crise qui oppose a la meme periode la Russie et l' Empire ottoman dans les Balkans , et qui par consequent prone la moderation et la negociation avec les Zoulous pour ne pas multiplier les conflits, Bartle Frere estime que l'epreuve de force est ineluctable et que les troupes dont il dispose sont suffisantes pour y faire face avec succes [ 3 ] . A l'affut d'une occasion pour precipiter les evenements, il profite d'un incident frontalier qui survient en juillet 1878 : deux femmes indigenes fuyant le pays zoulou, sont rattrapees en territoire britannique et executees par leurs poursuivants devant les soldats anglais. Il envoie le un ultimatum a Cetshwayo kaMpande, par lequel il exige outre la livraison des coupables (qui ont deja ete juges selon les lois zouloues) et le paiement d'une importante rancon en tetes de betail, le demantelement et le desarmement partiel de l'armee zouloue, la rectification des frontieres ainsi que la designation d'un resident britannique en pays zoulou, avec voix au grand conseil de la nation zouloue [ 4 ] . Cela signifierait de facto la perte pour le pays zoulou de son independance et son assujettissement a un statut d'Etat-vassal. Bartle Frere donne trente jours a Cetshwayo pour accepter ses exigences etant precise qu'un refus serait un casus belli . Cetshwayo ne repond pas.

Armee zouloue et sa tactique [ modifier | modifier le code ]

Cetshwayo kaMpande en 1875.

Creee par Chaka au debut du XIX e  siecle, l'armee ou impi zouloue est la plus puissante machine de guerre a laquelle vont se confronter les Britanniques en Afrique australe . En 1879, a l'ouverture des hostilites, le roi Cetshwayo dispose d'une armee de 55 000 hommes, enroles par tranche d'age dans 33 regiments ou amabutho (singulier, ibutho). Toutefois, seuls 40 000 hommes sont immediatement operationnels. Les guerriers sont principalement armes de l' iklwa (une sagaie a manche court et large lame) et d'un grand bouclier en cuir, et sont parfaitement prepares au combat a l'arme blanche et au corps a corps. Devant la menace britannique croissante, Cetshwayo avait commence a acheter des armes a feu et l'armee zouloue possede plus de 5 000  mousquets et fusils . cependant il s'agit d'armes de pietre qualite, et leurs utilisateurs sont mal entraines ; parmi eux, nombreux sont ceux qui tiennent leurs fusils a bout de bras pour tirer, afin d'eviter de subir le recul desagreable de l'arme, ce qui reduit fortement leur precision [ 5 ] .

Zoulous du Natal en habit traditionnel.
Schema de la tactique zouloue avec enveloppement de l'adversaire par les ailes.

La tactique de combat de l'armee zouloue a ete portee a son apogee par Chaka, et lui a permis d'imposer son hegemonie dans la region. Aux qualites traditionnelles de courage et de mobilite des armees africaines, il a ajoute l'organisation et l'entrainement, transformant un ost indiscipline en unite de combat particulierement redoutable, reposant sur un systeme regimentaire. Pendant la bataille, l'armee zouloue se presente en arc de cercle face a son adversaire [ 6 ] . Au centre (la poitrine), se tiennent les regiments aguerris, sur les ailes (ou cornes, comme les nomment les Zoulous) sont places les regiments de jeunes guerriers. Ceux-ci ont pour mission de mettre a profit leur vitesse et leur agilite pour deborder l'ennemi en l'attaquant sur les flancs tout en essayant de l'encercler alors que les guerriers de la poitrine l'engagent de face. Derriere la poitrine, et tournant le dos a la bataille afin de garder leur calme, des regiments de veterans (les reins) se tiennent en reserve, n'intervenant que pour faire basculer l'affrontement vers la victoire. Chaque homme connait sa place, les gestes et les manœuvres ayant ete repetes indefiniment, comme dans les armees occidentales, jusqu'a devenir des automatismes [ 5 ] .

L'armee zouloue est loin d'etre invincible, les Boers l'ont ainsi severement etrillee a la bataille de Blood River en 1838 [ 7 ] , mais elle n'est certainement pas a negliger ou sous-estimer. Les Britanniques qui comptent sur leur puissance de feu pour gagner rapidement le conflit vont en faire l'amere experience.

Plan de campagne britannique et la strategie zouloue [ modifier | modifier le code ]

L'armee britannique penetre au Zoulouland.

Le a minuit, l'ultimatum britannique expire ; a l'aube du , les premieres unites de l'armee d'invasion, qui compte environ 13 000 hommes (5 000 reguliers, 2 000 volontaires a cheval, 6 000 auxiliaires indigenes), penetrent en territoire zoulou. Cette armee est placee sous le commandement du general Frederic Thesiger second baron de Chelmsford dont la strategie est simple : attaquer Ulundi , la capitale zouloue (appelee ≪  Kraal Royal ≫) pour tenter a la fois de capturer Cetshwayo et d'aneantir son impi.

Pour mener a bien ces objectifs, Chelmsford decide de lancer son offensive sur trois fronts et divise en consequence son armee en plusieurs colonnes. A l'aile droite, une premiere colonne, confiee au colonel Pearson, doit franchir la Tugela , etablir un camp provisoire, puis lancer des reconnaissances sur la route d'Ulundi. Au centre, la colonne principale qui campe a Rorke's Drift , et commandee par Chelmsford lui-meme et le colonel Glyn, doit se diriger directement sur Ulundi et accrocher le gros des forces zouloues. A gauche, une troisieme colonne (colonel Wood) doit traverser la Blood River (ou Ncome), affluent de la Tulega, et refermer la tenaille. Chacune de ces colonnes est assez forte pour etre en mesure de defaire l'armee zouloue sans avoir besoin du soutien des deux autres [ 8 ] .

Enfin, Chelmsford qui ne meconnait pas le risque d'une attaque zouloue en territoire britannique, confie une quatrieme colonne au colonel Durnford avec pour mission de rester en reserve au Natal et d'assurer la surveillance active de la frontiere pour prevenir toute eventualite. Une cinquieme colonne, commandee par le colonel H. Rowlands, s'installe a Luneburg au Transvaal , annexe par le Royaume-Uni depuis 1877 , afin la aussi de prevenir toute offensive zouloue mais aussi de surveiller les eventuels opposants locaux a la domination britannique.

Cetshwayo de son cote ne veut pas la guerre, trop conscient de la superiorite militaire de ses adversaires. Cependant l'invasion de son territoire rendant celle-ci ineluctable, il ordonne a ses guerriers d'aller au-devant de l'ennemi mais leur interdit de penetrer au Natal. Il entend en effet mener une guerre essentiellement defensive afin de prouver son absence d'intention agressive [ 8 ] .

Guerriers zoulous, 1879 ( Charles Edwin Fripp ).

L'effort principal de son armee, dont il donne le commandement au chef Ntshingwayo kaMahole Khoza, porte sur la colonne du centre, consideree a juste titre comme la plus puissante et la plus dangereuse, tandis que la marche des deux autres colonnes doit etre ralentie par des attaques de harcelement menees par les guerriers residant dans les regions qu'elles traversent.

Premices [ modifier | modifier le code ]

L'escarmouche de la vallee de la Batshe, prise du kraal de Sihayo ( ).

Des le , la premiere escarmouche est livree. La route empruntee par la colonne centrale suit la vallee de la Batshe , fief de Sihayo kaXongo, l'un des vassaux de Cetshwayo et dont les hommes sont a l'origine des incidents de frontiere justificatifs de l'ultimatum du . Le village de Sihayo est situe le long des pentes de collines abruptes, en forme de fer-a-cheval, et constitue une excellente position defensive. Sihayo est absent et son domaine est defendu par Mkhumbikazulu, l'un de ses fils, et entre 200 et 300 guerriers. L'attaque britannique est menee par les cavaliers du Natal Native Contingent. Accueillis par une fusillade, ils sont repousses ; Chelmsford fait intervenir l'infanterie dont l'assaut, auquel se joignent les cavaliers, est irresistible. Mkhumbikazulu est tue et ses guerriers disperses [ 9 ] . Une centaine de Zoulous sont tues ou blesses lors des affrontements alors que le Natal Native Contingent perd deux hommes et compte une douzaine de blesses dont deux officiers [ 10 ] .

Le combat conforte les Britanniques dans leur conviction que la victoire sera aisee. Les Zoulous ont combattu bravement mais ils n'ont pas tenu devant la puissance de feu et le professionnalisme de leurs adversaires et cela malgre l'avantage du terrain dont ils disposaient.

L'armee britannique en deplacement en territoire zoulou. L'illustration montre les difficultes de la progression compte tenu des moyens logistiques et de la nature du terrain.

Pour des raisons logistiques, l'avance de la colonne est suspendue jusqu'au et elle retourne a Rorke's Drift. En effet, les pluies de decembre ont detrempe le sol et la route s'avere impraticable pour les lourds chariots et le train d'artillerie. De surcroit, les hommes du genie doivent preparer des passages gueables pour permettre aux troupes de franchir la Batshe ou la Manzymnyama. Le au matin, Chelmsford donne l'ordre du depart et l'armee arrive dans l'apres-midi au pied d'Isandhlwana ou elle fait halte et etablit un camp. Celui-ci est dresse sur une pente douce, face a la direction d'Ulundi, devant la montagne, sur un site decouvert qui offre une excellente visibilite. C'est un vaste champ de tentes depourvu de la moindre fortification. Aucune tranchee n'est creusee, le sol trop rocailleux ne le permet pas. Les chariots sont reunis dans un col a proximite plutot que d'etre installes, a la mode des laager boers, en cercle autour du bivouac pour en assurer la securite [ 11 ] .

Le , des eclaireurs reperent des forces zouloues dans les collines du Nkandhla, a l'est du camp. Tres tot dans la matinee, Chelmsford part avec trois mille hommes a leur rencontre et confie le commandement du camp au lieutenant-colonel Pulleine. Avant son depart, il envoie un message au colonel Durnford pour lui demander de rallier Isandhlwana au plus tot, avec sa colonne. Les ordres qu'il donne a ce dernier sont vagues et il semble qu'il ait surtout desire restreindre son autonomie en integrant ses troupes dans la colonne principale car quelques jours plus tot, Durnford avait entrepris de son propre chef une reconnaissance en terrain ennemi, sans l'aval de Chelmsford [ 12 ] .

Peu apres le depart de Chelmsford, plusieurs centaines de Zoulous apparaissent a proximite du camp. Ils se contentent d'observer et se retirent tandis que Pulleine met ses hommes en alerte. Durnford arrive vers 10 heures du matin a Isandhlwana. Il s'attendait a trouver sur place des ordres plus explicites mais son attente est decue [ 13 ] . Cependant, plus ancien et plus grade que Pulleine, il se trouve de facto commandant du camp. Considerant que les Zoulous apercus peuvent constituer une menace tant pour le camp que pour les arrieres de la colonne de Chelmsford, il decide d'aller avec ses hommes en reconnaissance. S'il prend acte du refus de Pulleine de renforcer ses effectifs avec des troupes de la garnison, il lui signifie clairement qu'il escompte son soutien en cas d'accrochage serieux avec l'adversaire [ 13 ] . A 11  h  30 , Durnford commence sa reconnaissance. Il a envoye les lieutenants Raw et Roberts avec deux escadrons du Natal Native Horse explorer le sommet d'une crete susceptible d'etre utilisee par les Zoulous car elle est proche du camp et le domine, tandis qu'avec le reste de ses hommes, il progresse dans la plaine en longeant les parois de la crete. Pulleine fait suivre les cavaliers de Raw et Roberts par une compagnie du 24 e  regiment d'infanterie, commandee par le capitaine Cavaye, afin de securiser ces hauteurs. Arrives au sommet, Raw et Roberts debouchent sur un plateau herbeux ou ils constatent la presence de groupes epars de guerriers ennemis et de jeunes garcons qui surveillent des petits troupeaux de bœufs et qui se retirent precipitamment des qu'ils les voient. Poursuivis, les vachers conduisent leurs betes en lisiere du plateau dont ils devalent les pentes. Les cavaliers s'arretent net : au pied du plateau, tranquillement assise, une armee de plus de 20 000 guerriers est la [ 14 ] .

Vue de la colline d'Isandlwana et du champ de bataille.

Deroulement de la bataille [ modifier | modifier le code ]

La bataille d'Isandhlwana, illustration parue dans le Graphic .

L'armee zouloue etait dirigee par les inDunas (chefs de regiment) Ntshingwayo kaMahole Khoza et Mavumengwana kaNdlela Ntuli. L' inDuna prince Dabulamanzi kaMpande , demi-frere de Cetshwayo, dirigea le regiment Undi apres que kaMapitha, le inkhosi regulier, ou commandant, fut blesse [ 15 ] .

Alors que Chelmsford patrouillait les environs a sa recherche, l'armee zouloue le contourna en se placant derriere les forces britanniques avec l'intention d'attaquer le . L'armee zouloue fut decouverte le vers 8 heures du matin par des eclaireurs du lieutenant Charles Raw a la poursuite de petits groupes de Zoulous dans une vallee, decouvrant d'un coup les 20 000 hommes tranquillement stationnes en silence. Une fois decouverts, les Zoulous se preparerent a l'attaque. Les hommes de Raw se livrerent a une retraite defensive vers leur camp contre l'armee qui les chargeait, et un messager fut envoye pour avertir Pulleine. Pulleine observait des Zoulous sur les collines sur la gauche du front, et envoya une missive a Chelmsford, qui fut recue par le general entre 8 heures et 10 heures du matin [ 16 ] .

Anthony Durnford vers 1870.

L'armee zouloue se mit alors en position d'attaque traditionnelle en forme de tete de buffle, dans le but d'encercler les britanniques. De la vision qu'en avait Pulleine depuis sa position, seuls la corne droite et le centre de l'attaque semblaient positionnes. Pulleine envoya alors la premiere, puis l'ensemble des six compagnies du 24 e  regiment d'infanterie se poster pour former une ligne de tir, avec pour but de parer de front a l'attaque zouloue. Les hommes de Durnford, apres confrontation avec l'attaque centrale zouloue, se replierent vers un donga , une ravine assechee, sur le flanc britannique droit ou ils constituerent une ligne de defense. La batterie commandee par Durnford, qui n'avait pas ete positionnee derriere les troupes en position, fut rapidement isolee et battit en retraite. Les deux bataillons de troupes indigenes se trouvaient dans le dispositif de Durnford ; alors que tous les officiers et les sous-officiers disposaient de fusils, seul un indigene sur 10 disposait d'un mousquet et d'une quantite limitee de munitions [ 17 ] , [ 18 ] , et nombre d'entre eux quitterent le champ de bataille des ce moment [ 19 ] .

Pulleine ne fit qu'un changement de dispositif, apres environ vingt minutes d'echange de tirs, en rapprochant quelque peu la ligne de tir du camp. Pendant quelques heures [ 20 ] jusqu'a midi, le dispositif britannique discipline infligea des pertes significatives a l'attaque centrale zouloue, qui fut bloquee. Le moral restait haut dans les rangs britanniques. Le fusil Martini-Henry etait une arme puissante, et les hommes savaient le manier. De plus, les tirs d'artillerie forcerent certains regiments zoulous a se proteger derriere une colline. Cependant, la corne gauche de l'armee zouloue progressait pour deborder et encercler le flanc droit britannique [ 21 ] , [ 22 ] .

Les hommes de Durnford, qui se battaient depuis le plus longtemps, commencerent a se replier et leur capacite de tir diminua. La retraite de Durnford exposa le flanc britannique droit qui, avec la menace generale de l'encerclement zoulou, incita egalement Pulleine a replier ses troupes vers le camp. Le retrait des soldats britanniques se fit avec ordre et discipline, et les hommes du 24 e revinrent au camp en combattant. La retraite de Durnford cependant exposa le flanc de la compagnie G, 2 e / 24 e , qui fut rapidement emportee [ 23 ] .

Au meme moment, les munitions commencerent a manquer aux compagnies du centre, l'intensite du feu occasionnant une consommation de cartouches a un rythme plus eleve que le reapprovisionnement depuis les chariots de munitions, positionnes assez en arriere de la ligne de feu. Le feu faiblissant, les Zoulous qui leur faisaient face et s'etaient plaques au sol pour s'en proteger bondirent sur leurs pieds et chargerent en poussant leur cri de guerre. Devant cette vision terrifiante, une compagnie d'infanterie indigene se debanda, creant ainsi une breche dans la ligne anglaise. Les Zoulous s'y engouffrerent, prenant a revers les compagnies regulieres qui tiraient encore. Surprises (certaines n'eurent meme pas le temps de mettre baionnette au canon), celles-ci furent aneanties en quelques minutes dans de furieux combats au corps a corps.

Une eclipse solaire intervient sur le champ de bataille a 14 heures environ et met un terme au combat [ 24 ] . Un officier des forces de Chelmsford, qui observait le combat de tres loin, donna ce temoignage du deroulement final de la bataille, vers 15 heures :

≪ En quelques secondes, nous vimes distinctement les fusils tirer de nouveau les uns apres les autres. Ce qui se reproduisit a plusieurs reprises ? une pause, puis un flash ? flash ! Le soleil eclairait le camp, puis le camp parut s'assombrir, comme si une ombre l'enveloppait. Les fusils ne tirerent plus apres cela, et les tentes disparurent en quelques minutes. ≫

Colenso 1880 , p.  292.

A peu pres au meme moment, dans le temoignage d'un guerrier zoulou :

≪ Le ciel s'assombrit au milieu de la bataille ; nous pouvions toujours voir le soleil sur nous, ou sinon nous aurions cru avoir combattu jusqu'au soir. Puis nous penetrames dans le camp, envahi par la fumee et les tirs. Apres cela, le soleil reapparut. ≫

Mitford 1883 , p.  95.

Le nom zoulou de la bataille se traduit ainsi par ≪ le jour de la lune morte ≫ [ 25 ] .

La presence d'un grand nombre de corps britanniques regroupes suggere que la resistance se prolongea apres l'aneantissement des compagnies du centre, avec plusieurs derniers carres qui semblent avoir ete organises. Divers elements indiquent que de nombreux corps, de nos jours indiques par des cairns , furent trouves en grandes concentrations dans le camp, dont la plus grande etait de 150 hommes . Un temoignage zoulou evoque un groupe du 24 e  formant un ≪ carre ≫ au col d'Isandlwana [ 26 ] . La cavalerie, les NMP et les carabiniers, qui ont pu se replier plus aisement avec leurs chevaux, moururent en defendant Durnford dans un ≪ carre ≫, alors que les chevaux furent tues a proximite [ 27 ] . Ce qui est certain c'est que le massacre fut total entre la zone du camp et Fugitive's Drift (a mi-chemin avec Rorke's Drift, a 28° 22′ 59″ S, 30° 34′ 59″ E ) sur la route de retour au Natal. Le combat se deroula en corps-a-corps et sans pitie pour les soldats britanniques. Les Zoulous avaient recu instruction de s'attaquer en priorite aux soldats, decrits comme portant des tuniques rouges , ce qui explique que des civils, mais aussi quelques officiers portant des uniformes noirs ou bleu fonce ( blue patrol jacket ) furent peu vises et s'echapperent [ 28 ] .

Les derniers soldats britanniques se battirent avec les baionnettes et les crosses de fusils quand les munitions furent epuisees [ 29 ] , [ 30 ] . Un temoignage zoulou relate le combat a une seule main du garde de la tente de Chelmsford, un grand Irlandais du 24 e qui repoussa les zoulous avec sa baionnette jusqu'a ce qu'il fut transperce de sagaies et le drapeau du general capture [ 27 ] . Les Couleurs du 2 e  bataillon du 24 e  regiment furent perdues, alors que les Couleurs de la Reine du 1 er  bataillon furent emportees a cheval hors du champ de bataille par les lieutenants Melvill et Coghill, sur ordre du colonel Pulleine, mais perdues lorsqu’ils passerent la riviere. Melvill et Coghill recurent de facon posthume la Victoria Cross en 1907 alors que leur legende se faisait plus epique [ 31 ] . Sir Garnet Wolseley , qui remplaca Chelmsford, pensait autrement a l'epoque et declara : ≪ Je n'aime pas l'idee que des officiers s'echappent a cheval alors que leurs hommes a pied se font tuer ≫ [ 32 ] .

Des quelque 1 700 hommes de l'armee britannique (reguliers, milices coloniales et auxiliaires indigenes), environ 1 300 furent tues, la plupart des Europeens, dont les colonels Pulleine et Durnford. Seuls cinq officiers imperiaux survecurent, grace a leur uniforme sombre. Parmi les morts, le chirurgien Peter Shepherd [ 33 ] . Le Natal Native Contingent perdit 140 hommes , 240 hommes sur 249 furent perdus parmi l' amaChunu African auxiliaries [ 34 ] . Le dernier a mourir fut sans doute Gabangaye, le chef du amaChunu Natal Native Contingent , a qui il fut offert de mourir par les udibi . Les prisonniers du Natal Native Contingent etaient consideres comme des traitres par les Zoulous et furent executes [ 35 ] .

Quelque 1 000 fusils Martini-Henry, deux canons, environ 400 000 cartouches, trois drapeaux, la plupart des 2 000 animaux de trait et 130 chariots [ 36 ] , du ravitaillement en boites de conserve, des biscuits, de la biere, des vestes et des tentes furent emportes par les Zoulous ou abandonnes sur le terrain. Parmi les survivants, la plupart etaient des auxiliaires indigenes, beaucoup ayant quitte leurs uniformes pour se fondre dans la masse des assaillants. Les Zoulous perdirent environ 1 000 hommes et un nombre inconnu de blesses [ 37 ] .

Consequences [ modifier | modifier le code ]

Emplacement d'ossuaires britanniques a Isandlwana.

Isandhlwana fut un succes tactique pour les Zoulous et, dans l'esprit de Cetshwayo, cette victoire devait clore la guerre. L'effet fut inverse : dans le public et l'armee britannique cette defaite humiliante fit naitre un desir de revanche, alors que la victoire britannique a la bataille de Rorke's Drift , livree l'apres-midi meme par une compagnie du 24 e que Lord Chelmsford avait laissee en arriere pour garder un depot de vivres et de munitions a quelques kilometres de la, permettait de sauver quelque peu la face et preserver le sentiment de superiorite. C'est avec des troupes fraiches et plus nombreuses, plus d'artillerie, plus de moyens logistiques, mais surtout un esprit nouveau que Lord Chelmsford repartit a la conquete du Zoulouland. Cette fois les Britanniques prirent toutes les precautions necessaires, et finirent par ecraser definitivement le royaume zoulou a la bataille d'Ulundi le .

Posterite [ modifier | modifier le code ]

La bataille est reconstituee a chaque date anniversaire en hommage aux soldats [ 24 ] .

Ordre de bataille [ modifier | modifier le code ]

Armee britannique [ modifier | modifier le code ]

  • Cinq compagnies du 1 er  bataillon du 24th foot Regiment (South Wales Borderers)
  • Une compagnie du 2 e  bataillon du 24th foot Regiment (South Wales Borderers)
  • Soixante-dix hommes et deux canons de sept livres de la 3 e  brigade de la Royal Artillery
  • Natal Native Horse (principalement des cavaliers basutos)
  • des elements des Newcastle Mounted Rifles, des Buffalo Border Guards et des Natal Carbineers

Armee zouloue [ 38 ] , [ 39 ] [ modifier | modifier le code ]

Monument dedie a l' impi zoulou.

NB : La repartition citee ci-dessous est en contradiction avec celle mentionnee en §38.

  • Corne gauche (6 000 hommes environ)
    • Regiment uVe
    • Regiment iNgobamakhosi : regiment ≪  dompteurs de rois  ≫
  • Poitrine (8 000 hommes environ)
    • Regiment uNokhenke : regiment ≪  Trotteurs  ≫
    • Regiment uKhandempemvu ou uMcijo : regiment de veterans ≪  Ceux a la coiffe blanche  ≫
  • Corne droite (4 000 hommes environ)
    • Regiment udududu : regiment ≪  Roulement de tonnerre  ≫
    • Regiment iMbube : regiment " Lion "
    • Regiment iSangqu : regiment de veterans ≪  Immuables  ≫
  • Reserve (3 000 hommes)
    • Regiment iNdluyengwe : regiment de novices ≪  Fils du leopard  ≫
    • Regiment uThulwana : Regiment ≪  Couverts de poussiere  ≫
    • Regiment uDloko : Regiment ≪  Sauvages  ≫
    • Regiment iNdlondlo regiment ≪  Viperes  ≫

Heritage [ modifier | modifier le code ]

Regiment zoulou progressant vers l'ennemi a Isandhlwana ( Charles Edwin Fripp )

Cinema [ modifier | modifier le code ]

Chanson [ modifier | modifier le code ]

  • La chanson ≪ Impi ≫, de Johnny Clegg raconte cet evenement.

Bande dessinee [ modifier | modifier le code ]

Documentaires televises [ modifier | modifier le code ]

  • Debut du 4 e  episode : Tel est pris qui croyait prendre , de la serie : Les grandes erreurs militaires , sur Planete+ .

Notes et references [ modifier | modifier le code ]

  1. a et b Isandlwana 1879 pages 49 .
  2. Zulu War 1879 , p.  8.
  3. Isandlwana 1879 , p.  11.
  4. La guerre des Zoulous , p.  25.
  5. a et b Battle in Africa , p.  34.
  6. La guerre des Zoulous , p.  24.
  7. Great Zulu battles , p.   35-50 .
  8. a et b Zulu War 1879 , p.  11.
  9. Isandlwana 1879 , p.  35.
  10. Zulu , p.  84 et 85.
  11. Isandlwana, 1879 , p.  37 et 38.
  12. Isandlwana 1879 , p.  44.
  13. a et b Isandlwana 1879 , p.  46.
  14. Great Zulu battles , p.  111.
  15. Morris 1998 .
  16. Colenso 1880 , p.  287 et 288.
  17. Smith-Dorrien, chap.  1B .
  18. Thompson 2006 , p.  17 et 22.
  19. Morris 1998 , p.  371.
  20. Smith-Dorrien, Chapter 1B gives a start time for the battle of around 8:00am with the Zulus falling back behind the hills until noon and the final Zulu advance beginning at 1:00pm.
  21. Morris 1998 , p.  373.
  22. Colenso 1880 , p.  285.
  23. Morris 1998 , p.  373?374.
  24. a et b (en) Christine Dolan, ≪  Zulus, British re-enact 1879 battle  ≫, The Washington Times ,‎ ( lire en ligne , consulte le ) .
  25. David Rattray   (en) , The Day of the Dead Moon (The Story of the Anglo-Zulu War 1879) , CD audio, 1997.
  26. Colenso, p.  413.
  27. a et b Lock et Quantrill 2002 , p.  219.
  28. Smith-Dorrien, chap.  1C .
  29. Knight 2002 , p.  49.
  30. Morris 1998 , p.  375 a 377.
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Voir aussi [ modifier | modifier le code ]

Bibliographie [ modifier | modifier le code ]

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Liens externes [ modifier | modifier le code ]