La
bataille d’Arcis-sur-Aube
a lieu les
20
et
, entre une armee francaise commandee par
Napoleon
I
er
et une armee autrichienne commandee par
Schwarzenberg
.
Apres la
campagne d'Allemagne
, Napoleon est force de repasser le
Rhin
: il refait ses troupes (
voir les
Marie-Louise
). Les armees coalisees affluent de toutes parts vers la France : les Anglo-Espagnols franchissent les
Pyrenees
, des armees autrichiennes franchissent les Alpes, des armees
russes
,
prussiennes
et
autrichiennes
le Rhin.
L’armee francaise est pour sa plus grosse part dispersee dans les places des
Pays-Bas
, d’Allemagne, de Belgique. Ses corps de manœuvre sont de taille reduite, et peuvent a tout moment etre submerges par des forces tres superieures en nombre. Ces differentes colonnes convergent vers
Paris
, qui est l’enjeu de la campagne de France.
Contre toute attente, Napoleon remporte victoire sur victoire pendant l’hiver 1814. Son plan est de battre separement les corps des
coalises
, en attendant que les troupes francaises d’Allemagne, sous la conduite de
Davout
, rejoignent la France.
Le
,
Schwarzenberg
a affronte, sans les detruire, les troupes des marechaux
Oudinot
et
Macdonald
dans le secteur de
Provins
(bataille de
Lechelle
-
Cormeron
). Le
17 mars
, il s’est empare du passage de la
Seine
a
Nogent
, de telle sorte que ses avant-gardes se trouvent a moins de cent kilometres de Paris. Il stoppe sa marche vers la capitale et dirige l'essentiel de son armee, a la rencontre de celle de Napoleon, vers
Arcis-sur-Aube
.
Pour eviter que l’armee de Boheme arrive sous les murs de la capitale dans les quatre jours, Napoleon decide de l’assaillir au plus vite. L’Empereur opte pour l’audacieuse solution d’accourir de
Reims
sur Troyes par
Arcis-sur-Aube
, de facon a tomber sur les arrieres de l’ennemi une cinquantaine de kilometres en deca de ses tetes de colonne. Il laisse a
Fismes
et a Reims
Mortier
et
Marmont
face a
Blucher
, et met lui-meme le cap vers le sud. Le 19 mars, apprenant que les Autrichiens occupent Arcis, il passe l’
Aube
a
Plancy
et marche sur
Mery
, s’imaginant deboucher en ce point en plein dans le dos de l’adversaire. Mais son arrivee si foudroyante quelle soit, n’est pas restee inapercue ; les chefs de l’armee de Boheme, aussitot informes, ont retrograde en toute hate. L’ensemble de leurs forces se replie methodiquement vers Troyes et, dans les aleas d’un recul aussi massif, elles ne laissent aux mains des coureurs francais que quelques voitures…
Ce nouveau coup d’audace imperiale a sauve Paris une fois de plus. Mais la disproportion des forces rend une victoire inenvisageable. L’Empereur engage une nouvelle manœuvre sur les arrieres de l’armee de Boheme. Il lui suffit de passer au nord de cette derniere, en rejoignant
Saint-Dizier
par Arcis-sur-Aube, puis de descendre sur
Joinville
ou
Doulevant-le-Chateau
pour se retrouver dans le dos de Schwarzenberg, avec de plus la communication directe assuree avec les garnisons des
places
de l’Est, voire avec
Augereau
et ses divisions lyonnaises.
Le 20 mars, apres avoir rappele a lui Oudinot et Macdonald, Napoleon se dirige vers Arcis-sur-Aube. En ce point, a 14 heures, sa cavalerie se heurte a l’avant-garde de l’armee de Boheme, dont le chef, le decouvrant aventure le long de l’
Aube
, vient de decider une offensive generale propre a en finir avec lui en le culbutant dans la riviere.
Napoleon voit les obus exploser devant un bataillon de jeunes recrues, qui se replient. Il se precipite, se place a leur tete, et quand un obus tombe au pied de son cheval, il ne bouge pas.
L'obus explose, le cheval est eventre, mais Napoleon se releve au milieu de la fumee. Les soldats l'acclament, partent a l'assaut et prennent Torcy.
A 16 heures, la bataille fait rage ; le soutien de l’infanterie de
Ney
n’a pas permis aux cavaliers francais de progresser plus avant. Le ≪ brave des braves ≫ s’accroche au hameau de
Torcy-le-Grand
, tenant tete aux
Bavarois
de
De Wrede
, tandis que la position meme d’Arcis, aprement disputee contre les Autrichiens avec l’assistance vigoureuse de la division de la
Vieille Garde
conduite par
Friant
. La nuit d’hiver ne ralentit pas le combat ; Torcy-le-Grand n’est plus qu’un amas de decombres devores par l’incendie, quand a minuit la fusillade decline pour devenir sporadique. 16 500 Francais fanatises viennent de tenir tete a 30 000 allies pendant plus de huit heures de corps a corps.
A l’aube du 21 mars, Schwarzenberg, trompe par l’etonnante resistance de ses adversaires, surestime l’importance de leurs effectifs et perd toute la matinee a attendre l’arrivee de ses reserves pour reformer sa
ligne de bataille
. Face a lui, les renforts affluent egalement : le corps de Macdonald n’est plus loin et l’entree en ligne de celui d’Oudinot porte les forces napoleoniennes a 28 000 baionnettes et 6 000 sabres.
Si le prince autrichien a commis une faute en surestimant son adversaire, Napoleon, trompe par ce calme debut de matinee du 21 mars, sous-estime le sien en s’imaginant que son inactivite correspond a une retraite. Aussi, vers 10 heures, les Francais recoivent-ils l’ordre d’attaquer ; mais bientot, force leur est de se rendre compte qu’ils donnent au cœur d’une armee de 100 000 combattants dont les differents elements dessinent un arc de cercle autour d’Arcis, avec d’ouest en est,
Wurtembergeois
, Russes et Bavarois et Autrichiens formant la reserve. 370 canons appuient cet ensemble imposant. Aucune autre solution pour Napoleon que de faire retraite en repliant tout son monde sur la rive droite de l’Aube, par l’unique petit pont d’Arcis.
Heureusement pour lui, Schwarzenberg ne commence son attaque qu’a 16 h 30. Oudinot lui tient tete dans le bourg sous une pluie d’obus et reussit vers 21 h a ne detruire le passage qu’apres avoir retire sa derniere brigade.
Il arrive a Saint-Dizier, le mercredi 23 mars 1814 a 14 heures.
Les fantassins sont couches a meme le sol contre les facades des maisons.
Apres des jours et des jours de marche et de combats les soldats sont epuises et leur uniforme sont souilles. Quand il entre dans la maison du maire, les marechaux sont deja la.
Berthier et Ney lui disent que la bataille d'Arcis-sur-Aube a ete couteuse et que l'ennemi dispose d'au moins 100 000 hommes et de plusieurs centaines de pieces de canons.
Napoleon commence a ecrire :
≪ Mon amie,
J'ai ete tous ces jours-ci a cheval. Le 20, j'ai pris Arcis-sur-Aube. L'ennemi m'y a attaque a six heures du soir, le meme jour je l'ai battu et je lui ai fait quatre mille morts. Je lui ai pris deux pieces de canons, il m'en a pris deux, cela fait quitte. Le 21, l'armee ennemie s'est mise en bataille pour proteger la marche de ses convois sur Brienne et Bar-sur-Aube. J'ai pris parti de me porter sur la Marne et sur ses communications afin de le pousser plus loin de Paris et me rapprocher de mes places. Je suis ce soir a Saint-Dizier.
Adieu, mon amie. Un baiser a mon fils.
Napoleon ≫
Par manque d’audace et d’esprit d’initiative, l’etat-major de l’armee de Boheme vient de perdre une magnifique occasion de faire de l’Aube le tombeau de la
Grande Armee
.
Pourtant, dans le
Wurtemberg
, en
Baviere
et en
Russie
, la bataille fut commemoree comme une victoire des allies sur Napoleon. En temoignent le nom de la rue
Arcisstraße
a
Munich
, et d’
Arcis
, une colonie de
peuplement allemand
en Russie (aujourd’hui en
Ukraine
, dans la
region d’Odessa
), ainsi qu’un village
cosaque
du Sud de l'
Oural
(
Арсинский/Arcinski
(ru)
). A Munich, le Conservatoire a son siege dans l’Arcisstraße, et de temps en temps des ensembles de musique choisissent ce nom bien sonnant (Arcis-Quintett, Arcis-Vokalisten), sans trop se soucier de son histoire belliqueuse.