Le
baptistere de la Piazza Del Duomo
de
Pise
.
Dans l'
architecture chretienne
, un
baptistere
(en latin
baptisterium
≪ piscine ≫, ≪ bassin pour les bains froids ≫, du grec
βαπτ?ζω
/
baptizo
, ≪ immerger, plonger ≫) est un batiment ? le plus souvent isole et de plan centre ? specifiquement destine a pratiquer le
bapteme
chez les
chretiens
. Comportant une piscine baptismale, creusee a meme le sol pour les
premiers chretiens
qui pratiquent le
bapteme par immersion
, ou une
cuve baptismale
non enterree a partir du
VIII
e
siecle quand l'administration du bapteme n'est plus le seul privilege de l'
eveque
(ces
fonts baptismaux
ayant parfois disparu), il est au contact ou tres proche d'une eglise ou le plus souvent d'une
cathedrale
au sein d'un
groupe cathedral
. Ces edifices sont souvent, comme les fonts baptismaux qu'ils abritaient, de formes ronde ou polygonale.
Baptistere de la
Domus ecclesiae de Doura Europos
.
Vasque baptismale en basalte du
baptistere du Latran
.
Apollonie de Cyrene
, basilique orientale du
V
e
siecle : salle avec cuve baptismale.
Les baptisteres ont ete construits a une epoque ou l’Eglise baptise un grand nombre de
catechumenes
adultes, et ou le
bapteme par immersion
totale ou partielle (il y a debat entre les historiens sur ce domaine car la hauteur de la piscine ne depassait pas un metre, ce qui supposerait que l'eveque plonge la tete du catechumene dans l'eau
[
1
]
) est la regle. Avant que
Constantin
et son
edit en 313
ne donnent un statut officiel au christianisme, ce bapteme par immersion a lieu dans des rivieres, mers ou fontaines (temoins parfois d'un
syncretisme
religieux avec des sources d'eau paiennes sacrees), voire dans des salles de bains de riches particuliers
[
2
]
. Aussi trouve-t-on peu de traces de baptisteres avant cet edit, le plus ancien etant celui de
Doura Europos
qui date de la moitie du
III
e
siecle
[
3
]
: cette salle servant au bapteme possede une cuve (alimentee probablement par des jarres) sous un
ciborium
et plusieurs
fresques
. La fresque de l'
arcosolium
s'organise en deux registres (Christ en ≪ Bon Pasteur ≫ dans le registre superieur, deux hommes nus representant le ≪
peche originel
≫ dans le registre inferieur). Les fresques laterales representent des scenes qu’on interprete a partir de la signification du sacrement :
La Guerison du paralytique
,
Le Christ et Pierre marchant sur l'eau
[
4
]
.
Du
IV
e
siecle jusqu’au debut du
VI
e
siecle, les fonts baptismaux sont disposes sous le
porche
de l’eglise, ou dans l’eglise elle-meme, ils peuvent aussi etre dans des batiments independants, tels les baptisteres episcopaux lies aux cathedrales
[
5
]
.
Au
VI
e
siecle, Rome en compte vingt-cinq, dont
celui du Latran
. Les cent cinquante dioceses de
Gaule
ont probablement chacun leur baptistere, invariablement consacre a saint Jean-Baptiste, pres de leur cathedrale, sans compter ceux edifies par la suite pres de petites eglises, de tombes ou de monasteres
[
1
]
. A partir du
VI
e
siecle, le privilege episcopal de l'administration du bapteme est etendu progressivement a toutes les eglises paroissiales a la suite de dispositions prises (concile d'Auxerre en 577 et concile de Meaux en 845)
[
6
]
.
Les baptisteres sont frequemment de grande taille, si grands que certains
conciles
ou
synodes
se sont tenus dans un baptistere. Cette grande taille etait due a plusieurs causes :
- avant le
VI
e
siecle, seul l’
eveque
avait autorite pour baptiser les catechumenes de son
diocese
[
7
]
(raison pour laquelle les baptisteres sont habituellement rattaches a une cathedrale et non a une eglise paroissiale) ;
- l'administration de baptemes collectifs impliquait la construction d'edifices monumentaux
[
8
]
;
- ce rite ne pouvait se tenir que trois fois par an (principalement Paques ? uniquement lors de cette fete a l'origine ?, mais aussi Pentecote et
Epiphanie
)
[
5
]
.
Quand il ne servait pas, les portes du baptistere etaient scellees du sceau de l’eveque, afin de controler l’orthodoxie de tous les baptemes du diocese, comme le rappellent differents
conciles
qui repetent l'interdiction d'y penetrer, le sacrement du bapteme devant rester un rite initiatique secret
[
9
]
.
Quelques baptisteres ont deux bassins, ou certaines eglises ont deux baptisteres (
cathedrale Saint-Pierre de Geneve
, d'
Aoste
, de
Nantes
), peut-etre un pour chaque sexe ou comme a
Ravenne
, un pour les orthodoxes, un pour les
Ariens
[
10
]
. Une cheminee est souvent presente pour rechauffer les
neophytes
apres l’immersion.
Bien que le
concile d'Auxerre
(
578
) interdise qu’on enterre dans les baptisteres, ils sont souvent utilises comme tombe. Ainsi, l’
antipape
florentin
Jean XXIII
est enseveli dans le baptistere de
Florence
, tout comme de nombreux
archeveques de Cantorbery
.
Cuve baptismale du
baptistere
de l'eglise Saint-Etienne de
Cadenet
taille dans la moitie d'un sarcophage gallo-romain comportant des scenes bachiques.
A la fin du
VIII
e
siecle,
Pierre Chaunu
explique le declin du
bapteme par immersion
par la diffusion du ≪
pedobaptisme
(le bapteme des enfants) dans les pays au climat rude, car on ne peut plonger un nouveau-ne dans de l’eau froide
[
11
]
≫. En
789
, l'empereur
Charlemagne
enterine une adaptation du
bapteme catholique
, desormais delivre des l'enfance, par un
capitulaire
qui ordonne une simple aspersion des enfants des la premiere annee par des pretres dans les paroisses et non plus seulement par des eveques. Cette ordonnance ne s'impose que progressivement et le baptistere tombe progressivement en desuetude. L'archeologie montre alors un retrecissement des piscines et leur adduction en eau qui disparait. Le baptistere est reemploye pour des offices liturgiques, faisant office de chapelle, d'
oratoire
par l'installation d'
autels
puis est remplace progressivement par de simples fonts baptismaux dans l'eglise
[
12
]
.
Apres le
IX
e
siecle, peu de baptisteres sont construits, certains restent utilises, leur piscine baptismale etant couverte et surmontee d'une cuve mobiliere. Alors que le bapteme par affusion devient la regle generale au
X
e
siecle
[
13
]
, l'utilisation du baptistere est abandonnee au cours du
XII
e
siecle a l'exception du sud de la Loire de la France et de l'Italie comme l'attestent le
baptistere de Pise
ou le
baptistere Saint-Jean
,
basilica minor
italienne
[
14
]
.
Le bapteme par immersion, recommande par la
liturgie catholique
moderne, connait actuellement un renouveau. On remet en eau des piscines baptismales, on construit des cuves baptismales plus grandes ou des baptisteres pour le bapteme des adultes en
Russie
, en
Italie
ou en
Allemagne
lors des programmes architecturaux des nouvelles eglises
[
15
]
. Le
V
e
Colloque liturgique international portant sur ce theme au
monastere de Bose
en 2007 confirme ce renouveau
[
16
]
.
Dans le
catholicisme
, il s'agit d'un edifice ou d'une chapelle ou se trouvent les fonts baptismaux pour
le bapteme par immersion
[
17
]
.
Le bapteme est un
rite de passage
, ce qui explique que le baptistere soit presque toujours une salle independante, souvent meme un monument distinct, de plan centre, qui peut comporter des annexes specialisees. L’ampleur prise par la ceremonie sacramentelle et la splendeur du batiment refletent l’importance du
sacrement
pour les
chretiens
de la fin du
Moyen Age
et de la
Renaissance
.
Baptistere dans l’eglise pentecotiste de
Vasteras
, en 2018, en
Suede
.
Cuve baptismale de la
cathedrale Sainte-Marie-Majeure
, avec margelle et
ciborium
.
Mosaique d’abside du
V
e
siecle du baptistere
paleo-chretien
d'
Albenga
.
Cuve baptismale dans le
baptistere Saint-Jean
de
Poitiers
.
Piscine baptismale du baptistere de la
cathedrale Saint-Leonce de Frejus
.
Dans le
christianisme evangelique
, un baptistere correspond a une piscine d’eau sur la scene de l’auditorium (aussi appele ≪ sanctuaire ≫) ou dans une salle distincte, pour le
bapteme par immersion
[
18
]
,
[
19
]
.
La forme du baptistere a originellement evolue a partir de petites constructions romaines circulaires utilisees a des fins religieuses (par exemple le temple de Venus a
Baalbek
au Liban et le mausolee de
Diocletien
dans
son palais
a Split en
Croatie
a la fin du
III
e
siecle) ou a des fins de soins (
thermes
)
[
20
]
, ces batiments paiens recevant une
Interpretatio christiana
(en)
. N'ayant pas de cahier des charges fixant leur architecture, ils prennent des formes variees (carree, rectangulaire, circulaire, cruciforme
[
21
]
, hexagonale, octogonale
[
22
]
, avec ou sans
abside
, avec ou sans
deambulatoire
) mais restent toujours au contact ou tres proches (quelques dizaines de metres tout au plus) d'une eglise ou d'une
cathedrale
et apres l'
edit de Milan
de
Constantin
en
313
, ils deviennent plus importants et ont une architecture plus elaboree
[
23
]
, tel le
premier baptistere de Marseille
au
V
e
siecle, le plus grand des baptisteres de Gaule avec une surface au sol de plus de 600
m
2
[
24
]
. Ils peuvent comporter des annexes specialisees :
catechumeneum
, salle ou le catechumene recoit sa formation ;
vestiarium
ou il se deshabille avant l'immersion (le baptise devant etre nu, sans bijou, les cheveux defaits) ;
consignatorium
ou l’eveque administre l'onction ; chapelle avec un autel conservant la reserve
eucharistique
pour le neophyte
[
25
]
.
Le bapteme etant realise a cette epoque uniquement lors de trois fetes chretiennes (Paques, Pentecote et Epiphanie), les edifices romains doivent etre agrandis pour accueillir le nombre croissant de
convertis
, restant cependant toujours de plan centre
[
13
]
.
Le plan octogonal du
baptistere du Latran
, premiere construction expressement dediee a cette fonction, devient alors assez largement suivi, avec des variantes (plan a douze cotes ou rond, comme a
Pise
). Il figure les sept jours de la semaine (et de la Creation du monde) plus le jour de la Resurrection et de la Vie eternelle (arithmologie mystique de la Resurrection dont le bapteme est le symbole anticipe). Le nombre huit symbolise egalement le passage d'un degre de realite a un autre. Le plan dodecagonal symbolise lui les douze
Apotres
, le plan circulaire la perfection et la
Sainte-Trinite
. Dans un baptistere ou un
narthex
contenant les
fonts baptismaux
, les
catechumenes
recoivent l’instruction chretienne et font leur
profession de foi
avant le bapteme
[
14
]
.
L'eau avait differentes origines : eau vive, eau de citerne, eau bouillonnante ou en pluie (orifice au centre de la cuve faisant jaillir l'eau, eau coulant d'en haut d'un bec de colombe, d'une gueule de lion ou de biche)
[
26
]
.
L’espace interieur est organise autour des
fonts baptismaux
, dans lequel le bapteme se fait selon un nombre d’immersions qui varie de un a trois au cours des siecles : simple (symbole de la Resurrection du Christ et de l’unite de la nature divine) selon la preconisation de
Gregoire le Grand
, triple (symbole de la
sainte Trinite
) selon
Tertullien
[
27
]
. Trois marches ou plus ordinairement sept, descendent au fond du bassin qui est en pierre le plus souvent (prescription du pape
Leon IV
, pierre doublee interieurement de plaques de marbre, de feuilles de plomb ou de cuivre si son etancheite n'est pas garantie) bien que tardivement, certains ont ete en metal
[
28
]
. Au-dessus est suspendue une
colombe
representant le
Saint-Esprit
, en or ou en argent. A sa sortie de l'eau, le nouveau baptise recoit l'onction de l'≪ huile des catechumenes ≫ sur le torse et les epaules, recoit quelques grains de sel sur la langue et un
signe de croix
sur le cœur et le front comme le prescrit
Bede le Venerable
au
VIII
e
siecle
[
29
]
.
Les
fresques
ou les
mosaiques
murales representent frequemment des scenes de la vie de
saint Jean-Baptiste
et participaient au symbolisme du rite initiatique. Ainsi, le
neophyte
devait, en sortant de la piscine du baptistere d'
Albenga
, etre emerveille par cette voute avec la nuit celeste de Paques et le
chrisme
diffracte trois fois
[
30
]
.
Les fonts baptismaux etaient frequemment alimentes par une source naturelle (comme au baptistere du Latran), ou dans d’autres lieux ou la christianisation d’une source paienne presentait un interet naturel. Ainsi egalement,
Gregoire de Tours
ou l’
eveque de Turin
Maximus
(mort vers 466) ont converti de telles sources miraculeuses en baptisteres.
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Baptisteries and Fonts Past and Present : a lecture, with diagrams
, T. Harrison Myres,
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