La
Vieille Alliance
, souvent designee en
francais
comme en
anglais
par son nom en
scots
,
Auld Alliance
(ou
Ald Allyance
; en
gaelique ecossais
:
An Seann-Chaidreachas
), est une alliance nouee entre les royaumes de
France
, d’
Ecosse
mais egalement de
Norvege
contre l’
Angleterre
. Bien que le
traite d'Edimbourg
de 1560 ait mis fin de fait a la plupart de ses dispositions, l'alliance et ses prolongements ont marque les relations franco-ecossaises de 1295 jusqu'a l'
epoque contemporaine
.
Cependant, certains points du traite d'Edimbourg de 1543 restent en vigueur. Entre autres, les
Ecossais
residant en
France
et les
Francais
residant en
Ecosse
disposent sans recours de la
double nationalite
jusqu’a la revocation de cette clause par le
gouvernement francais
en 1903
[ref. necessaire]
.
L’
Auld Alliance
est une alliance entre le royaume de France et les royaumes d’Ecosse et de Norvege aux depens de leur ennemi commun, le royaume d’Angleterre. S'il est possible d'en faire remonter l'origine a
1165
, lorsque
Guillaume le Lion
adresse une ambassade a
Louis VII
le Jeune
, sa premiere trace ecrite est le traite signe a Paris le
entre les representants de
Jean Baliol
et
Philippe le Bel
. Ratifie le
, et confirme le
par le
Parlement ecossais
[
1
]
, ce traite prevoit que si l’une des parties subissait une attaque de l’Angleterre, l’autre envahirait le territoire de cette derniere.
En avril
1326
,
Robert Bruce
renouvelle l’alliance par le
traite de Corbeil
[
2
]
. Aux
XIV
e
et
XV
e
siecles, le traite sera invoque a six reprises
[
3
]
.
En
1336
, au debut de la
guerre de Cent Ans
, le roi de France
Philippe VI
fournit une aide militaire au roi d’Ecosse
David
II
, exile en France apres avoir ete depose par
Edouard
III
[
4
]
.
En
1346
, l’Ecosse envahit l’Angleterre pour defendre les interets de la France. L’armee ecossaise est cependant vaincue et David II fait prisonnier a la
bataille de Neville’s Cross
[
5
]
.
En
1385
, une flotte francaise de 180 navires arrive en Ecosse sous les ordres de
Jean de Vienne
. Elle
debarque des troupes pres d'Edimbourg
pour attaquer l'Angleterre. Mais la coordination avec les Ecossais n'est pas facile, troupes et navires vegetent. L'expedition est finalement un echec et les Francais doivent repartir sans avoir rien pu faire d'important
[
6
]
.
En
1421
, lors de la
bataille de Bauge
, les forces franco-ecossaises infligent une severe defaite aux Anglais et les Francais recompensent gracieusement les Ecossais. Toutefois cette victoire est de courte duree car a la
bataille de Verneuil
en 1424, les troupes ecossaises sont aneanties. Malgre cette defaite, l’action des Ecossais apporte un soutien et un renfort precieux aux troupes du roi de France. C'est a la meme epoque (en
1422
) qu'un corps ecossais est constitue pour defendre la personne du roi de France, dont la garde personnelle restera longtemps exclusivement une
garde ecossaise
[
7
]
. En
1429
, des Ecossais assistent
Jeanne d’Arc
pour lever le
siege d’Orleans
.
En
1513
, la
bataille de Flodden Field
, qui oppose l'
Ecosse
a l'
Angleterre
, est une nouvelle occasion d'appliquer les dispositions du traite de 1295
[
3
]
. En 1543, cette alliance est reconduite, comprenant la promesse de mariage entre
Marie
I
re
d'Ecosse
et le futur roi de France,
Francois II
, ainsi que la protection de l'Ecosse par la France. Cette reconduction de l'Alliance est a l'origine, en represailles, des guerres sporadiques et sanglantes de l'Angleterre contre l’Ecosse menees par
Henri VIII
puis par le Lord Protecteur
Edouard Seymour
, appelees le "
Rough Wooing
". En
1558
, le mariage promis sera effectif.
Politiquement et militairement, l'alliance prend fin en
1560
, annee de la mort de la regente
Marie de Lorraine
, membre de la famille des
Guise
, et du revirement politique des Grands d'Ecosse
passes a la Reforme
, eux-memes soutenus par l'Angleterre. Le
, le
traite d'Edimbourg
met officiellement un terme a l'essentiel des dispositions de l’alliance, apres presque 265 ans. Ce
traite d'Edimbourg
impose l'evacuation de toutes les troupes etrangeres du territoire ecossais. C'en est fait de la Vieille Alliance, conclue pour la premiere fois en 1295 entre
Jean Balliol
et Phillipe le Bel
[
8
]
. L'Ecosse devenue protestante s’allie desormais avec l’Angleterre, egalement protestante. En 1562, elle envoie 200 soldats en
Normandie
pour aider les
Huguenots
dans leur lutte face au pouvoir royal catholique. Cependant, par bien des aspects, cette alliance a perdure sous des formes plus officieuses et informelles. D'aucuns affirment qu'elle n'a jamais ete veritablement formellement rompue et des evenements historiques plus contemporains en attestent.
Bien qu’elle soit avant tout militaire et diplomatique, l’alliance a une portee plus large, dont certains aspects ont pu se prolonger au-dela de 1560. C'est notamment le cas des
lettres de naturalite
octroyees dans chacun des deux royaumes a des sujets de l'autre. Ainsi en
, apres la
bataille de Floden
,
Louis XII
accorde la nationalite francaise aux archers ecossais de sa garde. En
1558
, la regente
Marie de Guise
accorde la reciproque, de facon elargie, aux Francais etablis en Ecosse. Ces dispositions sont confirmees du cote francais par
Henri
II
, en juin de la meme annee. Elles seront renouvelees par
Louis XIV
le
[
9
]
.
Au titre de l'alliance ou comme mercenaires, de nombreux Ecossais sont entres au service de la France et beaucoup s'y sont installes. Certains continuent de se considerer comme Ecossais, d'autres s'integrent, comme les
Stuart de Darnley
devenus seigneurs d'
Aubigny
, petite ville du Nord du
Berry
qui restera ≪ ecossaise ≫ jusqu'au
XVIII
e
siecle. Autre exemple : egalement au cours de la
guerre de Cent Ans
,
Thomas de Huston
, un chevalier ecossais
originaire de la region de
Girvan
, vient combattre les Anglais en France dans le cadre de l’Auld Alliance
[ref. necessaire]
. Pour avoir ete le premier
avec
Arthur de Richemont
[ref. necessaire]
a entrer dans la ville de Meaux a l'issue du siege mene contre les Anglais du
20 juillet
au
, il recoit en recompense du roi
Charles
VII
la chatellenie de
Gournay
(
Louis
XI
la lui echangera, le 12 ou
, contre le domaine de
Torcy
, afin de donner Gournay au
comte de Dammartin
)
[
10
]
,
[
11
]
.
Il y demeure jusqu'a sa mort en 1472
[ref. necessaire]
. Au
XVIII
e
siecle
, apres l'
acte d'Union de 1707
des royaumes d'Angleterre et d'Ecosse, certains
Jacobites
, partisans des Stuarts defaits a la
bataille de Culloden
(
1746
), trouvent refuge en France au nom de l'
Auld Alliance
, en particulier a
Saint-Germain-en-Laye
et a
Sancerre
.
En Ecosse, l'alliance influe sur la vie quotidienne dans differents domaines : l’architecture, le droit, la
langue
et la cuisine. Les Ecossais ont pris gout aux meilleurs vins francais. Le
bordeaux
est alors, devant le
whisky
, la ≪ boisson nationale ≫ de l’
Ecosse
et la Reforme ne suffit pas a modifier cet etat de fait
[
12
]
. Ainsi, en
1620
, le port ecossais de
Leith
importe un million de litres de
clairet
, soit un litre par habitant.
L'alliance est un sujet present de longue date dans la litterature des deux pays. Autour de
1360
, le chroniqueur ecossais
Jean de Fordun
la rattache au
mythique roi Achaius
, dont il fait commencer le regne en
787
: il le depeint comme le premier a conclure une alliance avec les Francs, echangeant une ambassade avec
Charlemagne
pour la confirmer
[
13
]
. En
1428
, le poete francais
Alain Chartier
declare que
≪ l'Auld Alliance n'a pas ete ecrite sur un parchemin de peau de brebis mais gravee sur la peau d'homme, tracee non par l'encre mais par le sang ≫
.
Par le ≪ Statute Law Revision (Scotland) Act ≫ du
, le
Parlement britannique
abroge la
lettre de naturalite
de novembre 1558 en faveur des sujets francais residant en Ecosse
[
9
]
. Relevant que cette date, apres l'etablissement en
1904
de l'
Entente cordiale
, marque pour certains la veritable fin de l'
Auld Alliance
, l'historienne britannique Siobhan Talbott souligne qu'on ne trouve cependant aucun texte, du cote francais, abrogeant explicitement les dispositions symetriques. Elle en conclut qu'elles sont restees theoriquement applicables aux residents ecossais en France, du moins a ceux nes avant 1906
[
14
]
.
La position officielle francaise, exprimee en 2001 par la voie du ministre des Affaires europeennes
Hubert Vedrine
[
15
]
, ne laisse pas place a cette theorie : elle affirme en substance que ces textes ne sont plus valides parce que l'union des royaumes d'Ecosse et d'Angleterre au
XVII
e
siecle, en faisant disparaitre la nationalite ecossaise au profit de la nationalite britannique, les a prives d'effet. La loi britannique de 1906 n'a fait que prendre acte de cette situation. De plus, les lettres de naturalite devaient etre renouvelees a chaque changement de chef d'Etat en France : or, elles ne l'ont plus ete apres Louis XIV. Enfin, quand bien meme elles seraient restees valides sous l'
Ancien Regime
, l'entree en vigueur du premier livre du
Code civil
, promulgue le
, aurait suffi a leur faire perdre force de loi
[
9
]
.
Cependant, concernant l'alliance elle-meme, l'absence d'abrogation explicite ? de ses recherches, Siobhan Talbott conclut en 2011 qu'elle n'a jamais ete formellement rompue ?, la poursuite de relations economiques privilegiees au-dela de l'
acte d'Union de 1707
et la vitalite du sentiment national ecossais jusqu'a nos jours alimentent l'idee d'une permanence qui en ferait l'alliance la plus longue de l'Histoire
[
14
]
.
En
1942
, le
general de Gaulle
qualifie l’alliance franco-ecossaise de
≪ plus vieille alliance du monde ≫
[
16
]
. Il s'en justifie pour autoriser des parachutistes francais a etre reunis a une unite britannique (les
SAS
), car dirigee par un Ecossais (
David Stirling
)
[
17
]
.
En
1995
, des celebrations ont lieu dans les deux pays pour le
700
e
anniversaire de l'alliance.
De nos jours, l'
Auld Alliance
est surtout evoquee lors d’evenements folkloriques ou sportifs (
Tournoi des Six Nations
, en particulier). Plus connue des Ecossais que des Francais, elle demeure pour les premiers l'une des marques de leur identite nationale les differenciant profondement des Anglais. En France, elle est particulierement commemoree a
Saint-Germain-en-Laye
et a
Aubigny-sur-Nere
, ou se situe un musee consacre a l'Alliance et ou se deroulent, chaque annee, des Fetes franco-ecossaises.
En
2014
, a l'approche du
referendum sur l'independance de l’Ecosse
, un journaliste de la
BBC
note que les signes de vitalite de ce qui est devenu une ≪ alliance romantique ≫ n'impliquent pas une adhesion entiere des politiques francais au projet d'independance des Ecossais. Une Ecosse independante signifierait en effet la fin de l'espoir de voir le Royaume-Uni engage dans l'Union europeenne et pouvant etre un facteur d'equilibre face a une Allemagne de plus en plus forte
[
18
]
. Bien que le referendum n'ait pas abouti a l'independance ecossaise, le
referendum sur le Brexit de 2016
a, en revanche, annule cet espoir et relance la question d'une possible independance de l'Ecosse, celle-ci ayant vote majoritairement contre le Brexit.
Le 11 fevrier 2018, sur la pelouse du
Murrayfield Stadium
a Edimbourg en Ecosse, s'est deroulee la premiere edition du
Trophee Auld Alliance
entre la France et l'Ecosse dans le cadre du tournoi des Six Nations.
La seconde edition du
Trophee Auld Alliance
s'est jouee au
Stade de France
, le 23 fevrier 2019, et fut egalement l'occasion du lancement du
Auld Alliance Day
dedie a la celebration, en France comme en Ecosse, de la Auld Alliance
[
19
]
.
- ↑
(en)
Geoffrey W S
Barrow
,
Robert Bruce and the community of the realm of Scotland
, Edimbourg,
Edinburgh University Press
,
,
4
e
ed.
, 531
p.
(
ISBN
978-0-7486-2022-7
)
,
p.
85 et 90
.
- ↑
G. W. S. Barrow et Geoffrey W S Barrow 2005
,
p.
503
- ↑
a
et
b
Baudouin-Matuszek, Marie-Noelle, ≪
Henri II et les expeditions francaises en Ecosse
≫,
Bibliotheque de l'Ecole des chartes
, Persee - Portail des revues scientifiques en SHS,
vol.
145,
n
o
2,
,
p.
339?382
(
DOI
10.3406/bec.1987.450474
,
lire en ligne
, consulte le
)
.
- ↑
(en)
Michael
Brown
,
The wars of Scotland, 1214-1371
, Edimbourg,
Edinburgh University Press
,
coll.
≪ New Edinburgh history of Scotland ≫ (
n
o
4),
, 379
p.
(
ISBN
978-0-7486-1238-3
)
,
p.
237
.
- ↑
Michael Brown 2004
,
p.
247
- ↑
(en)
Stephen I.
Boardman
,
The early Stewart kings : Robert II and Robert III, 1371-1406
, Edimbourg, John Donald,
coll.
≪ Stewart dynasty in Scotland ≫,
, 348
p.
(
ISBN
978-1-904607-68-7
)
i
p.
136 & 138-139.
- ↑
Cf.
Quentin Durward
de
Walter Scott
. Les aventures d’un Ecossais servant dans la
garde ecossaise
de
Louis XI
.
- ↑
Christian Civardi,
L’Ecosse depuis 1528
, Paris, OPHRYS,
, 235
p.
(
ISBN
9782708008403
)
,
p.
15
- ↑
a
b
et
c
Assemblee nationale 2001
,
p.
6053.
- ↑
Henri
Sauval
,
Histoire et recherches des antiquites de la ville de Paris
,
vol.
3, Paris, chez Charles Moette & Jacques Chardon,
(
lire en ligne
)
, ≪ Comptes et ordinaires de la Prevote de Paris ≫,
p.
389
.
- ↑
Francisque
Michel
,
Les Ecossais en France, les Francais en Ecosse
,
vol.
1, Londres, Trubner & Company,
, 551
p.
(
lire en ligne
)
,
p.
171
.
- ↑
≪
The Auld Alliance - Scotland and France
≫,
BBC
(consulte le
)
.
- ↑
(en)
John of Fordun
's Chronica genus Scotorum
(Edinburgh, 1871?1872) chapitres XLVIII & XLIX.
- ↑
a
et
b
Macdonell 2011
.
- ↑
Buirette 2021
.
- ↑
(en)
Sean Murphy, ≪
Scottish fact of the day: The Auld Alliance
≫, sur
scotsman.com
,
.
- ↑
Philippe Martinot, ≪
Aubigny-sur-Nere, ce bourg du Berry qui vit a l'heure ecossaise
≫, sur
lefigaro.fr
,
.
- ↑
(en)
Hugh
Schofield
, ≪
Why Paris doesn't want a Scottish Yes
≫,
BBC
,
(
lire en ligne
, consulte le
)
.
- ↑
≪
https://www.ffr.fr/actualites/federation/ecosse-france-le-trophee-auld-alliance-devoile
≫, sur
Federation Francaise de Rugby
(consulte le
)
- Assemblee nationale
, ≪
Double nationalite : accord franco-ecossais, validite
≫,
Journal officiel de la Republique francaise
,
,
p.
5112 (question
n
o
65594 de
Jean-Louis Idiart
) et 6053 (reponse du
ministre des Affaires europeennes
)
(
lire en ligne
)
- Michel
Duchein
,
Histoire de l'Ecosse
, Paris, A. Fayard,
, 593
p.
(
ISBN
978-2-213-60228-8
)
- (en)
Michael
Brown
, ≪
French Alliance or English Peace ? Scotland and the Last Phase of the Hundred Years War, 1415?53
≫,
The Fifteenth Century
, Woodbridge, Boydell Press,
vol.
VII
≪ Conflicts, Consequences and the Crown in the Late Middle Ages ≫
,
,
p.
81?99
(
ISBN
978-1-84383-333-8
)
.
- Eric
Durot
, ≪
Le Crepuscule de l’
Auld Alliance
: la legitimite du pouvoir en question entre France, Angleterre et Ecosse (1558-1561)
≫,
Histoire, Economie & Societe
,
n
o
1,
,
p.
3-46
(
ISBN
978-2-200-92336-5
,
lire en ligne
)
.
- (en)
Pamela E.
Ritchie
,
Mary of Guise in Scotland, 1548-1560. A Political Career
, East Linton, East Lothian, Scotland, Tuckwell Press,
, 260
p.
(
ISBN
978-1-86232-184-7
)
.
- (en)
Siobhan Talbott (entretien avec Steve Murdoch), ≪
The end of the Auld Alliance? Franco-Scottish relations, 1560-1713
≫
[PDF]
, University of St Andrews,
- (en)
Mike Addelman (presentation des travaux de Siobhan Talbott), ≪
Franco-Scottish alliance against England : one of longest in history
≫, The University of Manchester,
- (en)
Hamish
Macdonell
(interview de Siobhan Talbott), ≪
The Auld Alliance may still be in force, academic claims
≫, sur
The Caledonian Mercury
,
- http://www.scottishrugby.org/news/18/02/09/auld-alliance-trophy-unveiled
[archive]
- Leopold Buirette, ≪
Amis pour la vie
≫,
Dynastie
,
n
o
0,
,
p.
69
(
ISSN
0769-7457
,
BNF
34397131
)
.