Art wisigoth

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Fibule wisigothique du VI e  siecle decouverte dans une sepulture de la necropole de Castiltierra , en Espagne.

L' art wisigoth ou art wisigothique renvoie a l’art developpe du V e  siecle au debut du VIII e  siecle durant l'existence du royaume wisigoth , principalement en Espagne et moins au Portugal ( Hispanie de l’epoque). La periode de fondation lorsque sa capitale etait Tolosa (Toulouse) fut trop breve pour laisser des traces significatives.

Preambule [ modifier | modifier le code ]

C’est dans le royaume wisigoth d’Hispanie que la culture classique jette en Occident son dernier eclat. Le role politique joue par l’episcopat, notamment avec saint Leandre et son frere saint Isidore de Seville , la diffusion de l’education et de l’ecriture (a l’entree de la bibliotheque sevillane, on pouvait lire : ≪  Il est ici bien des œuvres sacrees, bien des œuvres profanes  ≫ ; ce vers trace a lui seul tout un programme), l’importance de la societe urbaine assurent une longue survie a l’heritage de la civilisation romaine , dont le royaume de Tolede est a plus d’un egard un conservatoire.

Il apparait aujourd’hui que la diversite des formes et la variete des influences, heritage romain, traditions byzantine et germanique, font de l’art wisigoth un art de synthese et que le terme meme d'≪ art wisigothique ≫ ne saurait avoir d’autre signification que geographique. Les manifestations artistiques de ce peuple se manifestent pleinement a partir du VII e  siecle, on peut a partir de ce moment parler d'un art wisigoth. Dans le domaine de l’architecture monumentale, la disparition quasi totale des edifices d'epoque wisigothique, en particulier dans les grandes metropoles religieuses et culturelles, est difficilement compensee par les decouvertes archeologiques et par le remploi d’elements sculptes et decoratifs dans des monuments ulterieurs. Il est donc aujourd'hui tres difficile de nous representer l'eclat reel qu'a pu atteindre l'art wisigothique. Seules de tres rares eglises, surtout en Espagne, tres rustiques de campagne sont parvenues jusqu'a nos jours meme si elles sont relativement bien conservees.

Cette periode de l'art iberique est dominee par leur style. L'art wisigoth est generalement considere dans le monde anglo-saxon comme une des souches de l' Art des migrations (car il entretient des ressemblances etroites avec l' art merovingien , l' art anglo-saxon ou encore l' art lombard ), tandis que dans les mondes espagnols et portugais il est generalement classifie en tant que art preroman .

L’art wisigoth comprend :

Architecture [ modifier | modifier le code ]

Eglise San Pedro de la Nave
El Campillo (Zamora) Espagne.

D'inspiration romaine tardive et byzantine , l'architecture wisigothe donne des edifices massifs, trapus avec des murs epais en pierres de taille ouvragees, le plus souvent a caractere religieux. C'est du moins le cas des rares eglises rustiques de campagne qui sont parvenues jusqu'a nos jours. Les grandes eglises urbaines, forcement tres differentes, ont toutes disparu. Mais on sait par les fouilles que ces dernieres etaient assez similaires pour la conception generale de l'espace aux eglises de plan basilical contemporaines qu'on trouve dans l' architecture merovingienne et byzantine , tandis qu'on ne sait que tres peu de choses de leur elevation et de leur decor.

Architecture religieuse [ modifier | modifier le code ]

Certains de ces edifices de l' architecture wisigothe en Espagne sont parvenus jusqu'a nous, a l'instar de l' ermitage de Sainte-Marie de Quintanilla de las Vinas a Burgos, l' eglise de San Pedro de la Nave , l'eglise de Santa Maria de Melque , a San Martin de Montalban , l' eglise Saint-Jean-Baptiste de Banos de Cerrato a Venta de Banos de type basilique latine , les eglises de San Martin et de Santa Comba de Bande , toutes deux de style plus ou moins byzantin en forme de croix grecque , l' eglise de Santa Lucia del Trampal a Alcuescar , la crypte de la cathedrale San Antolin a Palencia , l'eglise de San Cugat del Valles , dans la banlieue de Barcelone , batie au VI e  siecle, et au Portugal, chapelle de Sao Frutuoso de Montelios pres de Braga .

Cependant leur style s'est developpe pendant le VII e  siecle suivant, meme si les exemples principaux subsistants, rares, sont ruraux ou en ruines. On peut neanmoins y determiner quelques elements typologiques. Certains elements caracteristiques de leur architecture sont :

  • Preferentiellement de plan basilical ou de croix grecque, et parfois une conjonction des deux dispositions. Espaces tres compartimentes ;
  • Abside rectangulaire a l'exterieur, de chaque cote pouvait exister une enceinte destinee a la sacristie ( protesis y diakonikon ). La chapelle etait separee du reste de l’eglise au moyen d'un chancel ;
  • Arc en fer a cheval generalement sans clef de voute, de travees verticales dans la partie haute, elevation de 1/3, les premiers vousseaux sont de plans horizontaux ;
  • Utilisation des colonnes et piliers comme supports. Chapiteaux corinthiens invertis tres simples ou tronconiques, avec des cimaises lourdes qui ancrent dans les parois ;
  • Les murs sont formes par de grands blocs prismatiques assembles a sec, occasionnellement en alternant avec une brique a la maniere romaine ;
  • Decoration des frises avec des motifs floraux ou animaliers comme des oiseaux picorant des raisins ;
  • Petits porches en facade ou lateraux.

Ce renouveau artistique a pu, aussi, s'etendre au domaine de l'architecture. Si, sur le plan de l'architecture civile, il ne reste que peu de vestiges, par contre certaines eglises wisigothes du nord de la peninsule Iberique sont dans un tres bon etat de conservation qui s'explique par plusieurs facteurs. Tout d'abord, a l'exception de la crypte de San Antolin   (es) situee sous la cathedrale San Antolin de Palencia , elles se situent dans un milieu rural moins sujet a bouleversements que le milieu urbain, ensuite, elles furent construites dans des regions ou l'occupation musulmane fut d'une duree relativement courte, enfin, symboles meme de ce qu'ils avaient a reconquerir, elles beneficierent, certainement, de la protection des artisans de la Reconquista et, en particulier, des souverains asturiens.

Du VI e  siecle, il convient de mentionner la petite eglise du monastere de Sant Cugat del Valles . Bien que tres deterioree, elle montre une nef unique qui se termine par une abside dont le plan se repetera ensuite dans d'autres eglises posterieures appartenant au style mozarabe . Il s'agit d'une chapelle semi-circulaire a l'interieur, et rectangulaire a l'exterieur. Quant au reste, elle suit principalement la tradition paleochretienne dans l'architecture religieuse.

Pour la plupart, les eglises datent de la deuxieme moitie du VII e  siecle. C'est le cas de l' eglise Saint-Jean-Baptiste de Banos de Cerrato , pres de Palencia , de la chapelle de Sao Frutuoso de Montelios , pres de Braga , de l' eglise Santa Comba de Bande , au sud d' Ourense , sur les rives du lac de retenue de las Conchas , sur la riviere Limia , et de l' eglise San Pedro de la Nave , pres de Zamora , erigee sous le roi Egica ( 687 - 700 ) dans les annees 690 .

Eglise Saint-Jean-Baptiste de Banos de Cerrato .
Eglise San Pedro de la Nave .

Quant a l' eglise Sainte-Marie de Lara de Quintanilla de las Vinas , entre Burgos et Santo Domingo de Silos , elle fut construite au debut du VIII e  siecle , quelques annees seulement avant l'invasion islamique.

Ces eglises se caracterisent par leur bel appareil, assemble a sec. Leurs plans sont varies, celui de la chapelle de Sao Frutuoso de Montelios rappelle le plan du mausolee de Galla Placidia a Ravenne .

Eglise Sainte-Marie de Lara , decoree de frises de rinceaux et rosettes .

Le decor sculpte, qui temoigne d'un recul de l'art figuratif au profit de representations plus abstraites, occupe les pilastres et les colonnes, les chapiteaux et les impostes. Les sculpteurs ont travaille en meplat meme sur les chapiteaux qui prennent, a cet effet, la forme d'une pyramide tronquee inversee. Sur ceux de l' eglise San Pedro de la Nave , sont ainsi representes des motifs floraux ou animaliers, comme des oiseaux picorant des raisins, mais aussi des scenes de l' Ancien Testament , comme Daniel dans la fosse aux lions ou le sacrifice d' Abraham , dont le traitement graphique, qui va a l'essentiel, pourrait avoir ete inspire par des miniatures de manuscrits wisigothiques disparus. Les architectes ont eu recours a l' arc outrepasse , generalement au tiers de son rayon pour les exemples qui nous sont parvenus, donc moins referme que certains qui sont employes dans les edifices hispano-arabes, auxquels il est aussi anterieur.

L'arc triomphal outrepasse qui ouvre sur l'abside de l' eglise Sainte-Marie de Lara , repose sur deux impostes soutenues par des colonnes ; sur l'imposte de gauche, un homme est sculpte, surmonte d'un symbole lunaire, et sur celui de gauche, un visage plutot feminin porte une couronne de rayons solaires. Les deux personnages sont encadres par des anges : le premier symboliserait l'Eglise et le second, le Christ. Seuls subsistent de cette eglise, le transept et le chevet , qui, sur leur pourtour exterieur, sont parcourus de frises de motifs inscrits dans des cercles decores ; et ainsi, au pied du mont de Lara, alternent, sur la pierre blonde, pampres, rinceaux a palmettes, paons, coqs, cailles et griffons.

Et en France:


Architecture civile [ modifier | modifier le code ]

On ne saurait etre complet sans mentionner l’architecture civile. Comme d’autres ≪ nations barbares ≫ etablies dans l’ancien Empire romain d’Occident, les Wisigoths furent davantage amenes a utiliser et a transformer les monuments civils romains tardifs existants qu’a en construire de nouveaux. Le roi Leovigild (567-586) s’imposa neanmoins comme batisseur, en edifiant a partir de 568 la ville fortifiee de Reccopolis (Cerro de la Oliva, Province de Guadalajara ), dont les fouilles ont revele les fondations du palais et de l’eglise adjacente (le site ayant ete abandonne au X e  siecle ).

Sculpture [ modifier | modifier le code ]

La sculpture wisigothe est toujours associee a l’architecture. Ce sont les bas-reliefs des chapiteaux des colonnes ou les frises ornant la partie superieure des murs de certaines eglises.

Orfevrerie [ modifier | modifier le code ]

Croix votive.

L' orfevrerie wisigothe se developpa essentiellement au VII e  siecle a Tolede . Elle se compose principalement de couronnes votives, de fibules et de broches. Les ornements de ces pieces sont majoritairement geometriques.

Avant le concile de Tolede de 589 , les Wisigoths avaient une production artistique composee de bijoux et de parures de vetements comme des boucles de ceinture ou des fibules . La presence de bijoux wisigothiques dans les tombes est attestee jusqu’a la fin du VI e  siecle . Ces offrandes funeraires sont les indices d’une assimilation harmonieuse des Wisigoths en Espagne.

Apres la conversion de l' arianisme au catholicisme du roi Recarede I er officialisee lors du III e  concile de Tolede le , la renaissance isidorienne , mais aussi l'etablissement durable de ce peuple dans un espace geographique determine, ont engendre l'eclosion d'un courant artistique qui a continue a se manifester dans le travail d'objets de pierres et metaux precieux. Les couronnes votives du tresor decouvert a Fuente de Guarrazar, a proximite de Tolede , en 1859 en sont un exemple.

Le tresor de Guarrazar [ modifier | modifier le code ]

Couronne votive de Receswinthe (Musee archeologique national de Madrid).
Couronne votive de Swinthila (Reproduction de l'original, derobe en 1921) ( musee national du Moyen Age ) .

Il comprend une douzaine de couronnes enfouies vers 711 , lors de l’arrivee des Maures , et qui devaient etre suspendues jusque-la dans la cathedrale de Tolede. De tels objets etaient en effet offerts a l’occasion d’une fondation pieuse (ils sont alors anonymes) ou par les souverains lors de leur couronnement : c’est le cas de deux des couronnes de Guarrazar qui portent les noms (lettres en pendentifs) de Swinthila ( 621 - 631 ) et de Receswinthe ( 653 - 672 ).

Ce sont de remarquables pieces d’orfevrerie : suspendues par des chainettes simples ou a elements filigranes et ajoures (parfois issus d’une suspension elaboree de type vegetal), les couronnes sont constituees d’un bandeau richement travaille en tole d’or ajouree et filigranee, orne de perles et de cabochons en pierres precieuses ; divers pendentifs en tole d’or et pierres precieuses (alternant avec des lettres d’orfevrerie cloisonnee dans le cas des deux couronnes royales) sont suspendus tout autour du bandeau, avec, dans certains cas, un pendentif central cruciforme, independant de la couronne qu’il traverse.

La Couronne de Receswinthe se trouve aujourd'hui au Musee archeologique national de Madrid et a ete restauree au Musee national du Moyen Age a Paris en 1928. Elle est en or pur avec des chainettes dans lesquelles sont accrochees des lettres d’or donnant l'inscription (R)ECCESVINTHVS REX OFFERET , ainsi que des cabochons tailles en cristal de roche. Elle possedait a l'origine une croix pectorale byzantine suspendue au milieu. La croix que l’on voit actuellement en suspens au centre de la couronne est en realite une fibule, elle conserve encore le ressort et la fermeture, outre le fait qu'elle est d'un style different a la couronne elle-meme.

La couronne de Swinthila fut derobee dans la nuit du 4 avril 1921 a l'Armurerie du Palais royal de Madrid et n'a jamais pu etre retrouvee [ 1 ] , [ 2 ] .

Fibules hispano-wisigothiques, Tierra de Barros- Espagne. Walters Gallery, Baltimore.


Les fibules aquiliformes (en forme d'aigle) qui ont ete decouvertes dans des necropoles telles que Duraton, Madrona ou Castiltierra (villes de Segovie ), d'une grande importance archeologique, sont un exemple indubitable de la presence wisigothe en Espagne. Ces fibules etaient utilisees individuellement ou par paires comme fermoirs ou epingles pour joindre les vetements. Elles montrent toute la qualite du travail des orfevres de l'Hispanie wisigothe [ 3 ] .

Des boucles de ceinture trouvees en Espagne sont pour des historiens tels que G.G. Koenig a la mode danubienne des V e ??? VI e  siecles [ 3 ] . Pour le professeur francais Michel Kazanski, cette mode s'est developpee au nord de la mer Noire vers l'an 400 et les peuples germaniques l'ont ensuite apporte a l'Ouest [ 4 ] .

Ecriture [ modifier | modifier le code ]

Notes et references [ modifier | modifier le code ]

  1. (es) Sergio Rios, ≪  Robada en el Palacio Real la corona del rey Suintila  ≫, sur MDO-Madrid Diario (consulte le )
  2. (es) ≪  EL TESORO DE GUARRAZAR  ≫, sur Guadamur.net (consulte le )
  3. a et b Paul Bacoup, ≪  Les elements de parure wisigoths en Hispania aux V e et VI e  siecles  ≫, sur archeomigrationsbarbares.wordpress.com (consulte le )
  4. ≪  Michel Kazanski analizo en In Tempore Sueborum su concepto de moda pontico-danubiana  ≫, sur In Tempore Sueborum (consulte le )

Voir aussi [ modifier | modifier le code ]

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Bibliographie [ modifier | modifier le code ]

  • (es) Helmut Schlunk   (es) , ≪ Arte visigodo ≫ , dans Blas Taracena, Pedro Batlle Huguet, Helmut Schlunk, Arte romano - Arte paleocristiano - Arte visigodo - Arte asturiano , Madrid , Editorial Plus·Ultra, coll.  ≪ Ars hiapaniae. Historia universal del arte hispanico ≫ ( n o  2), , p.  225-323 .
  • (es) Jose Pijoan   (es) , ≪ Arte de la epoca de la dominacion visigoda en Espana ≫ , dans Jose Pijoan, Arte barbaro y prerromanico : Desde el siglo IV hasta el ano 1000 , Madrid , Espasa-Calpe   (es) ( grupo Planeta ), coll.  ≪ Summa Artis. Historia general del arte ≫ ( n o  VIII), , 3 e   ed. ( 1 re   ed. 1942), p.  351-428 .
  • (es) Jose Pijoan   (es) , ≪ Arte neovisigodo asturiano. Renacimieno visigodo entre les mozarabes. Supervivencias carolingias en la Marca ≫ , dans Jose Pijoan, Arte barbaro y prerromanico : Desde el siglo IV hasta el ano 1000 , Madrid , Espasa-Calpe   (es) ( grupo Planeta ), coll.  ≪ Summa Artis. Historia general del arte ≫ ( n o  VIII), , 3 e   ed. ( 1 re   ed. 1942), p.  429-544 .
  • (es) Isidro Bango Torviso   (es) , ≪ Arte hispanovisigido. La Espana de los siglos VI al VII ≫ , dans Isidro Bango Torviso, Arte prerromanico hispano : El arte en la Espana cristiana de los siglos VI al XI , Madrid , Espasa-Calpe   (es) ( grupo Planeta ), coll.  ≪ Summa Artis. Historia general del arte ≫ ( n o  VIII-II), ( ISBN   84-239-8732-9 ) , p.  13-173 .

Articles connexes [ modifier | modifier le code ]

Posterite

Liens externes [ modifier | modifier le code ]