L’
affaire des Irlandais de Vincennes
est une
affaire politique
majeure du
premier septennat
de
Francois Mitterrand
.
Un climat tendu apres l'attentat de la rue des Rosiers
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]
L’ete 1982 en France est marque par
sept attentats terroristes
, soit anonymes, soit revendiques par
Action directe
ou le groupe
armenien
≪
Orly
≫
[
1
]
. Le
, vers 13 heures, se deroule l’
attentat antisemite de la rue des Rosiers
, non revendique : un homme jette une grenade a l’interieur du restaurant Goldenberg puis un commando de quatre a cinq hommes descend la
rue des Rosiers
a
Paris
en tirant dans la foule. On denombre six morts et vingt-deux blesses
[
2
]
.
La mise en place d'une cellule anti-terroriste a l’Elysee
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]
Pour reagir contre le terrorisme, le
president de la republique
,
Francois Mitterrand
, cree un secretariat d’Etat a la Securite publique confie a
Joseph Franceschi
, et une ≪ mission de coordination, d’information et d’action contre le terrorisme ≫, bientot surnommee ≪ cellule anti-terroriste ≫, rattachee directement a sa personne, et dirigee par le commandant du
GIGN
,
Christian Prouteau
, qui sera ensuite egalement charge de la constitution et de la direction du
GSPR
assurant la protection rapprochee du president Francois Mitterrand, de sa famille ainsi que de sa fille cachee
Mazarine Pingeot
[
3
]
.
Prouteau, promu en dehors des hierarchies officielles, se heurte rapidement aux autres services de securite qui refusent de collaborer avec la cellule elyseenne, laquelle se revele etre un service operationnel sans mediation ni controle
[
4
]
. Il parvient a recruter des amis, dont trois commissaires de police :
Jean Orluc
, commissaire divisionnaire des
Renseignements generaux
,
Pierre-Yves Gilleron
, de la
Direction de la Surveillance du territoire
, et
Charles Pellegrini
, chef de l’
Office central de repression du banditisme
charge de la liaison avec la
DGSE
[
5
]
.
Bernard Jegat, sympathisant des causes
tiers-mondistes
et de la cause irlandaise, heberge a Paris des membres de l’
Irish National Liberation Army
et leur cache des armes. Il croit reconnaitre Michael Plunkett et un autre Irlandais dans les portraits-robots des tueurs diffuses par la presse. Epouvante par cet attentat
judeophobe
, il va se confier a
Jean Daniel
, directeur du
Nouvel Observateur
. Ce dernier avertit le
secretaire general de l’Elysee
,
Jean-Louis Bianco
, et confie le sujet ainsi que son informateur a deux de ses journalistes,
Pierre Blanchet
et
Elisabeth Schemla
. Cette derniere dirige Bernard Jegat vers le capitaine
Paul Barril
, officier en second de la cellule antiterroriste a l’Elysee, qu’elle connait depuis quelques mois
[
6
]
. Bernard Jegat denonce les membres de l'IRA au capitaine Paul Barril et lui remet les armes (notamment des explosifs) ainsi que les documents qui lui avaient ete confies par Plunkett un an auparavant
[
7
]
.
Les Irlandais logent dans un appartement de cinq pieces au 82
rue Diderot
a
Vincennes
ou demeure Michael Plunkett, soupconne, lui et ses compagnons
irlandais
, d’appartenir a l’
IRA
. Le
[
8
]
, a
21
h
30
, les membres ou anciens membres du
GIGN
en civil, emmenes par le capitaine
Paul Barril
, cernent l’appartement. Stephen King, le premier Irlandais, qui descend des escaliers pour aller faire des courses, est interpelle
[
9
]
. Puis quelques heures plus tard les agents arretent Plunkett dans les escaliers alors qu’il revient a l’appartement. La troisieme personne, Mary Reid, petite amie de Plunkett, est egalement interpellee a son retour, un enfant de neuf ans avec elle. Les trois Irlandais sont fiches par
Scotland Yard
comme membres de l’Irish National Liberation Army.
La perquisition qui suit l’interpellation est menee par le commandant de la brigade de gendarmerie de Vincennes,
Jean-Michel Beau
. Les gendarmes font une prise d’explosifs et d’armes de gros calibre, mais cette perquisition, qui a lieu en l'absence des interpelles, est entachee de nombreuses irregularites (pas de releve d’empreinte, des armes a feu non repertoriees, des photos floues, perquisition menee sans la presence d'un
officier de police judiciaire
, versions contradictoires des membres du GIGN sur l’emplacement exact des explosifs trouves, signature des proces-verbaux par le major Jose Windels qui n'a pourtant pas assiste au debut de la perquisition menee par les hommes de Barril)
[
10
]
.
Au cours de l'instruction judiciaire menee par le magistrat Alain Verleene, Pierre Caudan, le gendarme de la brigade de Vincennes ayant participe a la perquisition, revele avoir recu des ordres ≪ afin de dissimuler un certain nombre de points ≫ et accable Barril. Bernard Jegat affirme que Barril s'est empare de ses explosifs pour les placer dans l'appartement de Vincennes
[
11
]
. Les enquetes judiciaire et journalistique
[
12
]
mettent en evidence que, sur fond d'
antagonisme entre la police et la gendarmerie
, les gendarmes ont apporte eux-memes des explosifs dans l'appartement de Vincennes et ont tente de maquiller les failles de leur scenario. Apres neuf mois de detention sur les motifs d'inculpation de ≪ detention illegale d'armes, de munitions et d'explosifs, recel et usage de faux documents administratifs ≫, ainsi que d'≪ association de malfaiteurs ≫, les ≪ Irlandais de Vincennes ≫ sont finalement liberes le
. Ils beneficient par la suite d'un
non-lieu
et recoivent 1
franc
de dommages et interets
[
13
]
.
Le proces des gendarmes inculpes dans cette affaire s'ouvre le
devant la
17
e
chambre du
tribunal correctionnel
de Paris. Le
, le lieutenant-colonel Jean-Michel Beau et Christian Prouteau sont condamnes en premiere instance a la meme peine : quinze mois de prison avec
sursis
, le premier pour ≪
subornation de temoins
≫, le second pour complicite du meme delit, tandis que Jegat est condamne a quinze mois de prison avec sursis pour ≪ detention d'armes, de munitions et d'armes explosives ≫. Le
, Prouteau est finalement relaxe en
appel
(la
cour
estimant que le commandement effectif de l'operation etait assure par le capitaine Barril et non par le commandant du GIGN, Prouteau) alors que Jean-Michel Beau, le denonciateur des manipulations
[pas clair]
, est condamne a un an de prison avec sursis et 6 000 francs d'amende
[
14
]
. Le
, la cour d’appel de Paris dispense de peine Jegat
[
15
]
. Le
, quelques jours avant la
prescription
de l'instruction,
M
e
Antoine Comte, l’avocat de Plunkett et de Mary Reid, depose plainte contre X pour attentat a la liberte et
faux en ecritures publiques
, mettant en cause Barril. Le juge Yves Madre de Versailles mene l'instruction pendant plusieurs annees et
met en examen
Barril le
pour ≪ atteinte a la liberte individuelle ≫. Le
, la chambre d'instruction de la cour d'appel de Versailles annule l'ensemble de la procedure, en raison d'un paiement de caution hors delai, estimant par consequent que la plainte de 1992 est irrecevable ; Paul Barril echappe ainsi a toute poursuite
[
16
]
.
Cette affaire fait grand bruit au debut du premier mandat de
Francois Mitterrand
, notamment du fait que le President nouvellement elu avait fait appel aux gendarmes du GIGN pour composer sa Garde presidentielle, contrairement a ses predecesseurs, qui employaient des policiers. L'affaire des ≪ Irlandais de Vincennes ≫ est donc devenue celle des ≪ gendarmes de l'Elysee ≫.
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