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Gustave Flaubert - LAROUSSE

Gustave Flaubert

Gustave Flaubert
Gustave Flaubert

Romancier francais (Rouen 1821-Croisset, pres de Rouen, 1880).

Pourfendeur de la mediocrite et de la betise, le romancier Gustave Flaubert reste une figure a part de la litterature francaise du xix e ?siecle. Son heroine Madame Bovary a donne son nom au comportement qui consiste a fuir dans le reve l'insatisfaction eprouvee dans la vie?: le bovarysme.
L'ecriture, pour Gustave Flaubert, est le fruit d'une enquete minutieuse et d'un labeur acharne. Maitre malgre lui du mouvement realiste et inspirateur des naturalistes, il suscitera l'admiration de Proust, l'interet de Sartre et influencera jusqu'au nouveau roman .

Naissance

12 decembre 1821 a Rouen.

Famille, amis, amours

Fils d'Achille Cleophas Flaubert, chirurgien-chef a l'hotel-Dieu de Rouen, et d'Anne Justine Caroline Fleuriot, avec laquelle il habitera jusqu'a sa mort (1872). Il a un frere aine, Achille (ne en 1813), et une sœur plus jeune, Josephine Caroline (nee en 1824). Cette derniere aura une fille, Desiree Caroline (nee en 1846), dont Flaubert prendra en charge l'education.

Flaubert est un ami fidele, proche notamment de Louis Bouilhet et de Maxime Du Camp . Apres le succes de Madame Bovary , Flaubert frequente les salons litteraires et se lie avec George Sand, Sainte-Beuve, les freres Goncourt, la princesse Mathilde. Sur la fin de sa vie, il enseigne l'exigence de l'ecriture au jeune Guy de Maupassant , le fils d'une amie d'enfance.

Gustave voue une passion platonique a Elisa Schlesinger, une femme mariee plus agee que lui, rencontree en 1836. De 1846 a 1854, il noue une relation amoureuse et intellectuelle avec Louise Colet .

Tatonnements

Son travail litteraire commence avec la redaction d'une autobiographie, Memoires d'un fou , en 1838. Apres deux annees d'etudes de droit sans conviction a Paris, Flaubert fait ce qui ressemble a une crise d'epilepsie en janvier 1844. Il retourne chez ses parents, et se refugie dans l'ecriture. Entre 1845 et 1851, Flaubert voyage beaucoup?: d'abord en Italie, puis en Bretagne (1847) et en Orient (1849-1851). A son retour, il a l'idee d'ecrire Madame Bovary , qui lui prendra cinq ans.

Romancier

En 1856, c'est le scandale?: Madame Bovary , publie en feuilleton, declenche les foudres de la censure?: Flaubert doit comparaitre en justice pour immoralite. Il est acquitte et le roman connait un franc succes. Des 1857, Flaubert se remet a ecrire?; cinq ans plus tard, c'est Salammbo qui voit le jour. L'Education sentimentale (1869) est peu apprecie de la critique.

Dernieres annees

A partir de 1869, la vie de Flaubert prend un tour tres sombre?: il perd de nombreux amis ainsi que sa mere, et doit de surcroit payer les dettes de sa niece. Il travaille une troisieme fois a son manuscrit de la Tentation de saint Antoine , qui est enfin publie en 1874. Pour subvenir aux besoins de sa niece et de son mari, Flaubert doit ecrire vite. Il se lance dans la conception d'une piece de theatre, le Candidat , en 1872?; une satire politique montee au theatre du Vaudeville en mars 1874?: c'est un cuisant echec. Il ecrit alors et publie en 1877 Trois Contes .

Mort

De plus en plus fatigue par ses crises, il succombe a une attaque nerveuse le 8 mai 1880.

Œuvres principales

Madame Bovary (1857), Salammbo (1862), l'Education sentimentale (1869), Trois Contes (1877), Bouvard et Pecuchet (posthume, 1881).

1. Flaubert ou l'ermite de Croisset

1.1. Une enfance morne

Fils d'un chirurgien-chef qui dirige aussi l'ecole de medecine de Rouen, Gustave Flaubert nait le 12 decembre 1821. Il a un frere plus age de huit ans, Achille, et une sœur plus jeune de trois ans, Josephine-Caroline. Des l'enfance, Gustave connait l'ennui de la province et du college. Il trouve son reconfort dans la litterature, en particulier Chateaubriand et les romantiques.

En 1836, alors que le jeune Flaubert est en vacances a Trouville avec sa famille, tout bascule?: il rencontre Maurice Schlesinger, un editeur de musique, et tombe amoureux fou de son epouse, Elisa. Cette passion platonique le suivra toute sa vie ? il ne lui ecrira sa premiere lettre d’amour qu’a la mort de Maurice, trente-cinq ans plus tard.?

Il est renvoye de son college en 1839, apres avoir mene une fronde avec ses meilleurs amis contre le censeur. Il obtient tout de meme son baccalaureat. Il effectue a cette periode son premier voyage dans le sud de la France?: dans les Pyrenees, a Marseille, en Corse. Cette experience ≪?pantheiste?≫, ce sentiment de ne faire qu’un avec la nature et ce monde, le marque profondement.

Il commence des etudes de droit a Paris (1841), sans grande conviction, et les interrompt brusquement deux ans plus tard.?En janvier 1844, dans une voiture avec son frere, Flaubert est victime d'une crise nerveuse (aujourd'hui diagnostiquee comme de l'epilepsie). Ces crises seront frequentes jusqu'en 1849, avant de s'espacer. Il quitte Paris et revient vivre chez ses parents a Croisset.

1.2. En route vers le succes

L'art, une thebaide

Les premiers ecrits de Flaubert sont marques par l'autobiographie et le lyrisme romantique?: les Memoires d'un fou (1838), Novembre (1842) et la premiere version de l'Education sentimentale (1845) preparent la flamboyante Tentation de saint Antoine , dont la premiere version est achevee en 1849. Flaubert et Louis Bouilhet s'attelent a des scenarios de pieces de theatre, qui resteront a l'etat de projets. La Decouverte de la vaccine , pastiche de tragedie classique du au trio Flaubert, Bouilhet, Du Camp, reste inacheve.

≪?Le seul moyen de n'etre pas malheureux, c'est de t'enfermer dans l'art et de compter pour rien tout le reste?≫, ecrit-il a son ami Alfred Le Poittevin, l'un des destinataires des lettres composant sa volumineuse Correspondance. Sa veritable vie d'ecrivain commence donc avec la reclusion qu'il s'impose. L’annee 1846 est difficile pour Flaubert?: son pere meurt, puis sa sœur succombe a une fievre puerperale. Lui et sa mere se chargent de l’education de l’enfant, une fille prenommee Desiree Caroline. Neanmoins, c’est durant cette annee qu’il rencontre une des femmes de sa vie?: Louise Colet , avec laquelle il entretiendra une importante relation epistolaire, temoignage irremplacable sur sa vie d'ecrivain. Leur relation, houleuse, durera jusqu’en 1854.

Il ne quitte sa Normandie natale que pour de courts sejours parisiens, mais aussi quelques voyages. Avec Maxime Du Camp , ils arpentent les routes de Bretagne. Cette experience sera encore tres forte en elans pantheistes pour lui ( Par les champs et par les greves, Voyage en Bretagne , posthume, 1886). Et bientot suit un long sejour en Orient?: ils visitent l’Egypte, le Liban, la Palestine, la Syrie, la Turquie, la Grece et l’Italie, de 1849 a 1851.

Une entree fracassante en litterature

En 1857, Flaubert publie Madame Bovary . Le roman vaut a son auteur un proces pour irreligion et immoralite. Defendu, entre autres, par George Sand , Baudelaire et Sainte-Beuve , l'ecrivain est finalement acquitte, et le succes est aussi grand qu'a pu l'etre le scandale. En 1857, Flaubert entame un projet des plus ambitieux?: ressusciter l'antique Carthage au travers d'un roman. Pour se documenter, il voyage seul en Algerie et en Tunisie durant l'annee 1858. Cinq ans plus tard, en 1862, Flaubert fait paraitre Salammbo .

1.3. Ingrates dernieres annees

En 1869, apres plusieurs ebauches, Flaubert publie enfin l'Education sentimentale . C'est aussi une somme de la philosophie flaubertienne de la vie?: l'echec d'un amour romantique, vecu par l'antiheros Frederic Moreau, est l'image de l'echec d'une jeunesse qui s'est trompee de revolution. Le roman lui-meme ne rencontre pas le succes escompte.

Certains evenements, comme la guerre de 1870 et l'invasion prussienne, puis les nombreux deces dans son entourage (Louis Bouilhet, Sainte-Beuve et Alfred Le Poittevin en 1869, Jules de Goncourt en 1870, Maurice Schlesinger en 1871, sa mere en 1872) l'ont fortement ebranle. L'ecrivain doit alors faire face a d'importants soucis financiers?: sa niece et son mari sont ruines.

Publiee en 1874 apres quatre ans de labeur, la troisieme version de la Tentation de saint Antoine ne rencontre pas le succes non plus. Flaubert encourage l'eclosion du talent de Guy de Maupassant , le fils d’une amie d’enfance, etablissant avec lui une relation de ≪?tutelle intellectuelle?≫.

Maupassant?: ≪?Pendant sept ans je fis des vers, je fis des contes, je fis des nouvelles, je fis meme un drame detestable. Il n’en est rien reste. Le Maitre lisait tout, puis le dimanche suivant, en dejeunant, developpait ses critiques et enfoncait en moi, peu a peu, deux ou trois principes […]?: “Si on a une originalite, disait-il, il faut avant tout la degager ; si on n’en a pas, il faut en acquerir une.”?≫

(≪?Le Roman?≫, texte en exergue de Pierre et Jean , 1888)

Une piece de theatre, le Candidat , creee en 1874 au theatre du Vaudeville, ne retablit pas ses finances?: c’est un fiasco. Il doit vendre une partie de ses biens, ce qui constitue une epreuve douloureuse. Ses crises nerveuses deviennent de plus en plus frequentes et l'epuisent. Pour subsister, Flaubert doit ecrire vite. En 1877, il publie les Trois Contes . Parallelement, il ne cesse de travailler a son grand œuvre volontairement derisoire, Bouvard et Pecuchet . La redaction de ce roman ≪?philosophique?≫ occupera presque exclusivement les dix dernieres annees de sa vie, depassant de loin en labeur et en souffrance la pourtant difficile gestation de ses romans. Il sera publie inacheve et a titre posthume (1881), car Flaubert a succombe a une attaque le 8 mai 1880.

2. Flaubert le perfectionniste

Continuateur de Stendhal et de Balzac, Flaubert ancre le roman dans la tradition francaise du realisme. A ce titre, il ouvre la voie a plusieurs generations de disciples, qui retiennent son exigence de verite et d’observation a travers la doctrine du naturalisme. Mais l’auteur ne renonce jamais a l’heritage romantique de Chateaubriand, parfois de Hugo, deux ecrivains qui ont determine ses debuts en litterature. Toute son œuvre, jusqu’a sa correspondance intime, porte la marque de tentations contradictoires : celle d’un bourgeois en rupture avec la classe sociale dominante et celle d’un esthete de la rigueur pris dans le vertige de l’imagination. La quete inlassable de l’unite nourrit un culte du style qui est aussi un ideal de la creation artistique. La beaute, selon Flaubert, resulte de l’accord du mot et de l’expression avec la pensee. La figure de l’ecrivain s’efface devant celle d’un ouvrier laborieux, qui inspirera le xx e siecle, de Proust au nouveau roman.

2.1. Grandeur et limites du realisme

Une discipline : le document

Le progres des sciences au xix e , l’exemple de son pere et de son frere, tous deux medecins, incitent Flaubert a une etude rigoureuse et impartiale du monde. Dans la litterature aussi, les faits priment sur les sentiments ou les jugements moraux, car l’emotion resulte de l’exactitude avec laquelle sont restitues les situations et les caracteres. L’ecrivain, et notamment le romancier, elabore ses livres a partir d’une connaissance et, souvent, d’une recherche : c’est l’exigence de la documentation. Des evenements reels forment le socle de plusieurs romans. Un fait divers contemporain sert de trame a Madame Bovary (1856) : l’histoire d’un ancien eleve du pere de Flaubert, medecin comme lui, dont la femme infidele finit par se suicider. Dans l’Education sentimentale (1869), des souvenirs remontant a l’adolescence et a la jeunesse parisienne de l’auteur se retrouvent dans le personnage principal, Frederic Moreau. L’Orient ancien et lointain de Salammbo (1862) puis d’Herodias ( Trois Contes , 1877) s’appuie lui aussi sur un savoir precis, acquis lors de voyages en Egypte et en Tunisie, et approfondi au long de lectures erudites ? aussi a-t-on pu parler de realisme archeologique. Enfin, pour son dernier ouvrage, qu’il laisse inacheve, Flaubert consulte plus de mille volumes divers : sous l’apparente satire, Bouvard et Pecuchet (posthume, 1881) constitue une somme encyclopedique sur la province, les modes et les savoirs de l’epoque.

Prestige du reve

Essentiel, le travail de l’enquete n’en est pas moins incomplet, tant que le romancier n’exprime pas un choix personnel. Les faits ne suffisent pas en eux-memes et Flaubert, s’il admet les lois de la physiologie, a la difference de Zola et des naturalistes, ne soumet pas sa vision a la mecanique deterministe : litterature et science experimentale restent distinctes. A certains egards, le realisme apparait comme une concession au serieux, comme la condition preliminaire des ≪?grands effets?≫ que permet la litterature (Lettre a Louise Colet, 24 avril 1852). Une fois pose le decor de la Carthage antique, Flaubert, dans Salammbo , laisse libre cours a sa fantaisie et a ses elans sensuels. Et, s’il s’impose dans Madame Bovary la chronique minutieuse d’un simple bourg normand, entre un pharmacien vaniteux et un clerc de notaire timide, c’est pour creer le champ ou s’egare Emma Bovary, la femme du medecin, et montrer les ravages du mensonge dans cette societe etriquee.

≪?Madame Bovary, c’est moi?≫

Le personnage d’Emma Bovary, victime tour a tour d’un quotidien morne, puis des erreurs qu’elle commet pour s’affranchir de cette realite indigne de ses esperances, ne peut que rappeler l’auteur lui-meme. ≪?Madame Bovary, c’est moi?≫ : le mot prete a Flaubert est peut-etre apocryphe, mais il exprime un besoin d’adhesion et un sentiment d’identification qui, eux, ne font aucun doute. Suivant la tradition, Flaubert etudie les circonstances du suicide de son heroine, jusqu’a avoir dans la bouche le gout de l’arsenic avec lequel elle s’empoisonne. Plus encore, il exprime a travers elle sa propre deception du monde, ses souffrances profondes et ses contradictions.

2.2. Une technique d’ecriture

La verite supreme, qui prend assise sur le reel patiemment restitue, est dans la forme. Non pas une forme preconcue et figee dans des regles, mais une forme sans cesse reinventee, ajustee a chaque matiere, a chaque nouveau sujet et a chaque nouvelle idee : ce que Flaubert appelle le style.

Un orfevre du style

Flaubert fait ≪?deux parts dans le monde et en lui?≫?: l'element ≪?externe?≫, varie, multicolore, spectaculaire, et l'element ≪?interne?≫, dense et ouvert aux ≪?rayons de l'Esprit?≫ par la ≪?fenetre de l'intelligence?≫. Il fait taire la premiere au profit de la seconde et fonde l'ecriture artisanale. Il pose la litterature en objet, exterieur a son createur et a son modele. Le labeur de l'ecriture ??harassant pour Flaubert, qui se compare a un bœuf de labour?? se lit dans chaque phrase, dont le rythme clos fait un objet fini. Pour atteindre a la perfection, l'ecrivain se fait d'ailleurs une obligation d'eprouver a voix haute dans son ≪?gueuloir?≫ les lourds materiaux que sa phrase, comme l'ecrit Proust dans un article intitule ≪?A propos du “style” de Flaubert?≫, ≪?laisse retomber avec le bruit intermittent d'un excavateur?≫.

Pour Flaubert, ≪?l'Idee n'existe qu'en vertu de sa forme?≫, et cette forme doit approcher une perfection dont il faut fonder les lois a force de reprises minutieuses. L'ecrivain reve d'un style ≪?qui serait rythme comme le vers, precis comme le langage des sciences et avec des ondulations, des ronflements, des aigrettes de feu, un style qui vous entrerait dans l'idee comme un coup de stylet?≫. Le style est ≪?a lui seul une maniere absolue de voir les choses?≫ et ≪?les grands sujets font les œuvres mediocres?≫?: Flaubert, en passant du ≪?debraille?≫ de Saint Antoine au ≪?boutonne?≫ de Madame Bovary, a tente, a partir d'un sujet terre a terre, d'ecrire un ≪?livre sur rien?≫. Le modele, pourtant, reste indispensable et aux epreuves de l'ecriture s'ajoutent celles de la documentation. De la l'abondance des descriptions, la succession des tableaux et le refus des exigences du discours romanesque. Apres s'etre approprie le monde par l'observation et par la lecture, Flaubert n'aura d'autre preoccupation que de le rendre par un texte ≪?qui se [tient] de lui-meme par la force interne du style comme la Terre sans etre soutenue se tient en l'air?≫.

Le ≪?gueuloir?≫

La precision du vocabulaire, l’equilibre de la ponctuation, le controle des assonances et la maitrise du rythme atteignent avec Flaubert a un degre d’harmonie absolu. Dans la solitude de la maison familiale de Croisset, l’auteur corrige ses brouillons, multiplie les versions de ses textes et les soumet a l’epreuve du ≪?gueuloir?≫ ? une piece reservee ou il peut les lire a haute voix, ou meme les crier, pour mesurer l’effet qu’ils produisent. Or ce travail est difficile, rarement heureux. A travers les echecs, les crises et les periodes de doute, il s’apparente a un sacrifice. Sceptique et desabuse devant l’existence et les hommes, Flaubert envisage l’ecriture comme un martyre, guide par la seule foi dans la perfection.

L’art sans artiste

L’ambition ultime de Flaubert voit l’effacement de sa personne au benefice de son œuvre. ≪?L’artiste doit s’arranger a faire croire a la posterite qu’il n’a pas vecu. […] Je ne peux rien me figurer sur la personne d’Homere, de Rabelais, et quand je pense a Michel-Ange, je vois, de dos seulement, un vieillard de stature colossale, sculptant la nuit aux flambeaux?≫ (Lettre a Louise Colet, 27 mars 1852). Cette conception confirme son desir de simplement temoigner dans ses livres, sans jamais juger ses personnages, sans jamais les approuver ou les critiquer. En cela, la froideur impersonnelle recherchee dans le style amplifie le sentiment partage par de nombreux lecteurs a la parution de Madame Bovary , d’etre en presence d’un roman subversif. Lors du proces qui suit, les reproches adresses a l’auteur ne visent pas tant l’inconvenance de l’adultere et le naufrage de l’heroine que l’enchainement des faits, presente comme inexorable et denue de tout jugement moral.

2.3. Correspondance

Qui est Gustave Flaubert ? Derriere la beaute glacee, presque abstraite, du style, la question subsiste, et c’est celle que pose l’avocat imperial Ernest Pinard, charge de requerir lors du proces de Madame Bovary ?: ≪?Je ne sais pas ce que pense la conscience de l'auteur.?≫

Un temoignage a la lettre

La question de l’identite de l’ecrivain trouve un eclairage decisif dans sa Correspondance , dont plusieurs editions se succedent des les annees qui suivent sa mort (Paris, Charpentier, 1887 - 1893 ; Paris, Gallimard Pleiade [edition definitive], 1973-2007). Cette Correspondance se compose de plus de trois mille lettres, parfois de simples billets mais aussi de tres longues missives, permettant de suivre cinquante annees d’une vie, depuis l’enfance jusqu’a l’age adulte et la maturite, et d’apprehender tous les aspects d’une vocation et d’une carriere.

Jeu de roles

L’homme apparait ici sous des identites diverses et successives. Il est tour a tour le fils et le frere, l’amant, le lecteur, l’artiste et l’amateur d’art, l’observateur politique ou religieux de son temps. Mieux encore, il est l’observateur de lui-meme et de ses propres contradictions : dans le domaine social, ou sa haine du bourgeois ne lui laisse pas ignorer sa propre condition bourgeoise, mais aussi dans le domaine artistique, ou il identifie le conflit entre les grands poles de son temperament et livre les premiers elements d’une critique de son œuvre.

Les ≪?deux bonshommes?≫

≪?Il y a en moi, litterairement parlant, deux bonshommes distincts : un qui est epris de gueulardes, de lyrisme, de grands vols d'aigles, de toutes les sonorites de la phrase et des sommets de l'idee ; un autre qui fouille et creuse le vrai tant qu'il peut, qui aime a accuser le petit fait aussi puissamment que le grand, qui voudrait vous faire sentir presque materiellement les choses qu'il reproduit ; celui-la aime a rire et se plait dans les animalites de l'homme?≫ (Lettre a Louise Colet, 16 janvier 1852).

Élisa Schlésinger
Élisa Schlésinger
Gustave Flaubert
Gustave Flaubert
Gustave Flaubert, Bouvard et Pécuchet
Gustave Flaubert, Bouvard et Pécuchet
Gustave Flaubert, frontispice de Madame Bovary
Gustave Flaubert, frontispice de Madame Bovary
Gustave Flaubert, la Tentation de saint Antoine : le diable
Gustave Flaubert, la Tentation de saint Antoine : le diable
Gustave Flaubert, Madame Bovary
Gustave Flaubert, Madame Bovary
Gustave Flaubert, Madame Bovary
Gustave Flaubert, Madame Bovary
Gustave Flaubert, manuscrit de Madame Bovary
Gustave Flaubert, manuscrit de Madame Bovary
Gustave Flaubert, Un cœur simple
Gustave Flaubert, Un cœur simple
  • 1857 Madame Bovary, roman de G. Flaubert.
  • 1869 L'Education sentimentale, roman de G. Flaubert.
  • 1881 Bouvard et Pecuchet, roman inacheve de G. Flaubert.