L’opposition de gauche emmenee par le travailliste Jonas Gahr Stoere a remporte, lundi 13 septembre en Norvege des legislatives dominees par le sort des activites petrolieres du pays.
≪ Nous avons attendu, nous avons espere et nous avons travaille si dur, et maintenant nous pouvons enfin le dire : nous l’avons fait ! ≫
, a declare M. Stoere, probable prochain premier ministre, apres huit ans de regne de la droite.
Les cinq partis d’opposition devraient decrocher 100 des 169 sieges que compte le Storting, le Parlement monocameral norvegien, suffisamment pour deloger la coalition de la conservatrice Erna Solberg, selon des projections. Avec 89 mandats pour le moment, les travaillistes semblent meme en passe de decrocher une majorite absolue avec leurs allies de predilection, le Parti du centre et le Parti socialiste, sans avoir besoin des deux autres forces d’opposition, les ecologistes du Parti de l’environnement et des Verts (MDG, pour
Miljopartiet De Gronne
) et les communistes de Rodt, avec lesquelles M. Stoere s’est tout de meme dit determine a discuter.
La premiere ministre reconnait sa defaite
≪ La Norvege a envoye un message clair : les elections montrent que le peuple norvegien souhaite une societe plus equitable ≫
, a dit ce millionnaire de 61 ans qui a fait campagne contre les inegalites sociales.
Les cinq pays nordiques ? Danemark, Finlande, Islande, Norvege, Suede ?, bastions de la social-democratie, devraient ainsi bientot tous etre diriges par la gauche.
≪ Le travail du Parti conservateur au gouvernement est fini pour cette fois-ci ≫
, a admis M
me
Solberg aux manettes depuis 2013, un record pour la droite.
≪ Je tiens a feliciter Jonas Gahr Stoere qui, a cette heure, semble avoir une nette majorite pour changer le gouvernement ≫
, a ajoute la dirigeante de 60 ans, victime d’une usure du pouvoir apres avoir conduit le pays a travers de multiples crises (migrants, chute du cours du baril,
Covid-19
…).
Si elle se confirme, cette majorite absolue a trois facilitera les negociations en vue de former un gouvernement de coalition, lesquelles promettent tout de meme d’etre longues et delicates. MDG avait conditionne son soutien a l’arret immediat de l’exploration petroliere dans le pays, plus gros exportateur d’hydrocarbures d’Europe de l’Ouest, un ultimatum rejete par M. Stoere. Ce dernier preconise, ? comme ses adversaires conservateurs ?, une sortie douce et progressive de l’economie petroliere.
Le secteur petrolier represente 14 % du produit interieur brut
L’
≪ alerte rouge pour l’humanite ≫
lancee au debut d’aout par les experts des Nations unies sur le climat (GIEC)
a place la question du rechauffement au cœur de la campagne electorale et force le royaume a une reflexion sur le sort des activites petrolieres qui l’ont rendu immensement riche. Le rapport a galvanise ceux qui, a gauche et, dans une moindre mesure, a droite, veulent en finir avec le petrole.
Le secteur petrolier represente 14 % du produit interieur brut (PIB) norvegien, plus de 40 % des exportations et 160 000 emplois directs. L’or noir a aussi permis au royaume de 5,4 millions d’habitants d’amasser le plus gros fonds souverain au monde avec pres de 12 000 milliards de couronnes d’actifs (1 175 milliards d’euros).
Diplome de Sciences Po Paris et ministre de Jens Stoltenberg entre 2005 et 2013, M. Stoere va maintenant devoir se livrer a d’epineuses tractations avec le Parti du centre, qui defend principalement les interets du monde rural, et le Parti socialiste, plus soucieux des questions environnementales.
Ces allies, qui ont deja gouverne ensemble sous M. Stoltenberg, ont des positions souvent opposees, notamment sur l’urgence a sortir de l’age petrolier, et les centristes de Trygve Slagsvold Vedum ont dit pendant la campagne ne pas vouloir sieger avec le Parti socialiste d’Audun Lysbakken.