Le
gout
(egalement ecrit
gout
dans la
nouvelle orthographe
[
1
]
), ou la
gustation
, est le
sens
qui permet d'identifier les substances chimiques sous forme de solutions par l'intermediaire de
chemorecepteurs
situes sur la langue (recepteurs de Vugo). Il joue un role important dans l'
alimentation
en permettant d'analyser la saveur des aliments. Par
metonymie
, on appelle aussi ≪?gout?≫ chacune des saveurs distinguees par le sens du gout (ce que l'odeur est a l'odorat).
Lors d'une degustation, le gout est associe a l'
odorat
et, dans le langage courant, la notion de ≪?gout?≫ est souvent elargie aux
flaveurs
et aux aromes.
Un aliment est plus ou moins gouteux et on evalue sa sapidite en le goutant afin de percevoir l'intensite des
saveurs
. S'il est percu comme bon, il est qualifie de savoureux ou gouteux.
L'
odorat
, qui permet de detecter les substances chimiques volatiles, est un sens assez proche de celui du gout. Il n'existe d'ailleurs pas de distinction entre gout et odorat en milieu aquatique
[
2
]
. Le vocabulaire francais entretient ainsi une confusion en ce qui concerne le terme ≪?gout?≫ car, dans le langage courant, on dit par exemple ≪?gout de fraise?≫ ou ≪?gout de fumee?≫ pour designer des aromes, lorsqu'ils sont percus par
retro-olfaction
. Le terme
arome
, qui conviendrait en l'occurrence, est sous-utilise et souvent compris comme arome ajoute ou meme synthetique (comme dans ≪?
chewing-gum
arome menthe?≫). De plus, dans certaines circonstances, le terme arome serait tres surprenant (on dit ≪?ce vin a un gout de bouchon?≫ plutot que ≪?ce vin a un arome de bouchon?≫, alors que, sensoriellement parlant, cette derniere formulation serait la bonne). Le sens du mot gout varie donc selon son contexte.
Les
insectes
peuvent reconnaitre les gouts grace aux chemorecepteurs a l'interieur des
soies
presentes sur leurs pattes et leurs pieces buccales. Les soies renferment toutes quatre chemorecepteurs, chacun etant particulierement sensible a un certain type de substance (sucre, sale…), dont les
dendrites
s'etendent jusqu'au
pore
a l'extremite de la soie
[
2
]
. Les insectes possedent aussi des soies olfactives, habituellement localisees sur leurs
antennes
, qui leur permettent de detecter les substances chimiques volatiles.
Les cellules sensorielles specialisees dans la gustation sont des cellules modifiees de l'
epithelium
qui portent une vingtaine de microvillosites sur le cote apical (microvillosites de Vugo)
[
2
]
,
[
3
]
. Elles sont regroupees dans des structures spheriques, appelees calicules ou bourgeons gustatifs, dont la composition varie en fonction de la localisation.
Chez l'
etre humain
, il en existe environ 10?000
[
4
]
(extremes?: 500 ? 20?000)
[
ref.
?souhaitee]
, principalement localisees sur la face dorsale de la
langue
(75?%)?; le reste etant distribue sur le
palais mou
, le
pharynx
et meme la partie superieure de l'
œsophage
. Sur la langue, les bourgeons sont situes dans l'
epithelium
au niveau des
papilles
linguales (caliciformes, fungiformes et foliees). Chaque bourgeon compte 50 a 150 cellules sensorielles entourees par des cellules de soutien
[
ref.
?souhaitee]
. Le bourgeon gustatif s'ouvre vers la cavite buccale par un pore. La portion anterieure de la langue est innervee par le nerf facial (VII bis) et vehicule preferentiellement les informations en reponse a une stimulation sucree. La portion posterieure de la langue est innervee par le nerf glossopharyngien (IX) et l'epiglotte par le nerf vague ou pneumogastrique (X), cette region a une tendance a transmettre le message amer.
En fait chaque type de recepteur gustatif peut etre stimule par une large gamme de substances chimiques mais est particulierement sensible a une certaine categorie?: sucre, sale, acide, amer et le glutamate (
umami
des Japonais)
[
2
]
. Le gout joue le role de systeme de detection des nutriments et des
toxines
. Le gout sucre indique la presence d'hydrates de carbone et par consequent d'une source d'energie. Le gout sale indique un apport en
sodium
, important dans de nombreux
processus metaboliques
et dans l'equilibre electrolytique. Le gout
umami
signale la presence d'
acides amines
, qui composent les proteines. Finalement, l'acide et l'amer previennent la presence eventuelle de substances potentiellement nocives comme les
poisons
. Ils peuvent egalement signaler, par exemple, si un fruit n'est pas assez mur ou au contraire trop mur
[
5
]
.
Plusieurs mecanismes interviennent dans la
transduction
des stimuli, aboutissant tous a une
depolarisation
de la cellule receptrice
[
2
]
. Pour ce qui est de la salinite, l'entree massive d'ion sodium entraine une depolarisation locale de la membrane ayant ainsi une action directe sur l'ouverture des canaux Ca
2+
voltage-dependants se trouvant a proximite. Il s'ensuit une entree dans le cytoplasme d'une grande quantite d'ions Ca
2+
qui permet au potentiel d'action de se propager le long de l'axone jusqu'a la synapse ou l'augmentation ponctuelle de Ca
2+
dans le bourgeon synaptique favorise la fusion des vesicules de neurotransmetteurs avec la membrane pre-synaptique. Il y a exocytose des neurotransmetteurs dans la synapse suivie d'une reception par les recepteurs de la membrane post-synaptique pouvant ainsi propager le signal jusqu'au SNC. Pour le gout acide, la detection des H
+
que produisent les acides, se fait suite a la sequestration des ions K
+
dans le cytoplasme car les H
+
se fixent aux canaux potassium. Ceux-ci ne laissant plus sortir les ions K
+
, il y a creation d'un potentiel membranaire qui comme pour le gout sale, produit a son tour le potentiel d'action a proprement parler. Dans le cas des recepteurs du sucre, l'amer et l'umami, il y a intervention d'une proteine transmembranaire liee a une proteine G. La voie de transduction de ces differents gouts est cependant quelque peu differente. Pour ce qui est du sucre, la reception de la molecule sucree sur son recepteur specifique lie a la proteine G (gustducine) entraine un changement conformationnel du domaine transmembranaire donnant lieu a l'activation de l'adenylate cyclase. Celle-ci va progressivement augmenter la concentration en cAMP intra cytosolique permettant l'activation d'une proteine kinase A. Celle-ci bloquera les canaux K
+
par phosphorylation et on retrouve ensuite le meme fonctionnement que pour la creation du potentiel d'action dans le gout acide. Le fonctionnement pour le gout amer diverge par la creation du potentiel d'action. Une fois le recepteur specifique lie, la proteine G correspondante (transducine) active la phospholipase C. Il s'ensuit le clivage du second message PIP2 en IP3 et DAG. L'IP3 est une molecule permettant la fixation au niveau d'un recepteur specifique sur la membrane du reticulum endoplasmique cellulaire. La fixation a celui-ci entraine l'ouverture des canaux Ca
2+
qui se deverseront massivement dans le cytosol pour produire le potentiel d'action jusqu'au bourgeon synaptique. Finalement, pour le gout umami, les etudes recentes ne decrivent pas encore tres bien le processus mais l'intervention d'un recepteur specifique lie a une proteine G est fortement suspectee sans connaitre la suite exacte entrainant la depolarisation.
Dans tous les cas, cette depolarisation induit la liberation d'un
neurotransmetteur
agissant sur un
neurone
sensitif, qui achemine les
potentiels d'action
vers le
cerveau
[
2
]
. C'est ensuite au niveau du
cortex cerebral
, dans la region
prefrontale
du cerveau, que toutes ces informations, et celles de l'
odorat
, sont traitees par l'organisme. Le cerveau parvient a percevoir les saveurs complexes en integrant les stimuli distincts des differents types de recepteurs
[
2
]
.
Il est important de noter que le gout est en partie inne?: le
reflexe gusto-facial
montre que les enfants sont sensibles au gout ??et preferent le sucre a l'acide et l'amer?? avant la naissance et des les premiers instants apres cette derniere
[
6
]
.
Classification des saveurs primaires
modifier
Aristote
distingue dans les saveurs le doux, l’amer, l’onctueux, le sale, l’aigre, l’apre, l’astringent et l’acide. En 1751,
Linne
discerne 10 qualites gustatives, l'humide, le sec, l'acide, l'amer, le gras, l'astringent, le sucre, l'aigre, le muqueux et le sale. Ce n'est qu’en 1824 que le chimiste francais
Michel-Eugene Chevreul
fait la distinction entre les sensibilites tactiles, olfactives et gustatives, la conception populaire continuant encore aujourd'hui a faire la confusion entre ces differentes perceptions
[
7
]
.
En
1864
, le physiologiste
Adolf Fick
fixe le postulat selon lequel l’ensemble des perceptions gustatives est une combinaison additive de quatre saveurs primaires ou fondamentales qui seraient liees a quatre types de recepteurs sensoriels et quatre localisations sur la langue, ce qui permet au chimiste Georg Cohn en 1914 de classer quatre mille corps purs en ≪?quatre gouts elementaires?≫
[
8
]
.
Par la suite, une cinquieme saveur primaire a ete identifiee?: l'
umami
(≪?savoureux?≫), en
1908
, par le scientifique japonais
Kikunae Ikeda
.
Les cinq saveurs primaires seraient donc les suivantes?:
Un sixieme type de saveur primaire existerait pour les
acides gras
, appele ≪?oleogustus?≫
[
9
]
. En Asie, la
pseudo-chaleur
est parfois proposee comme etant la sixieme saveur primaire
[
10
]
.
La neurobiologiste francaise Annick Faurion montre grace a des experiences d'
electrophysiologie
dans les annees 1980 que chaque molecule sapide possede une saveur particuliere reconnue specifiquement par le cerveau, tel l'
acide glycyrrhizique
qui donne le gout de la
reglisse
. Il n'y a donc pas cinq saveurs fondamentales mais tout un continuum gustatif. Cependant, faute d'un vocabulaire commun pour exprimer toutes les sensations percues par chaque individu, les societes ont utilise et utilisent encore un nombre limite de descripteurs de perceptions
[
11
]
.
Une autre saveur a ete identifiee chez la souris
[
12
]
mais pas encore chez l’Homme?:
Enfin, d'
autres perceptions
en bouche completent celles des recepteurs de saveur.
Carte de la langue?: un mythe
modifier
La schematisation a l'extreme voulant que les gouts soient percus a des endroits precis de la langue proviendrait d'une traduction en 1942 des travaux d'un physiologiste allemand David P. Hanig (1901)
[
13
]
par le psychologue americain
Edwin G. Boring
[
14
]
. Ce mythe a ete corrige depuis a plusieurs reprises, par Virginia Collins en 1974
[
15
]
et surtout par les travaux de Linda Bartoshuk
[
16
]
en 1993. Mais cette erreur continue a etre enseignee dans les cours d’
œnologie
en francais
[
17
]
.
Perception globale
modifier
Certaines theories font appel a une conception moins segmentee et plus synthetique, basee sur une perception globale. Ainsi des
1940
,
Carl Pfaffmann
a remis en cause cette classification traditionnelle, mais il a fallu attendre
1980
pour que l'on demontre definitivement que les molecules sapides sont toutes reconnues de maniere specifique par le cerveau.
Selon Hanig (1901), les gouts primaires sont percus par toutes les papilles, quelle que soit leur localisation, mais certaines parties de la langue peuvent percevoir certaines saveurs legerement avant d’autres. Des etudes recentes
[
18
]
de
Monell Chemical Senses Center
ont developpe cette hypothese par application d'une goutte de substance salee ou sucree au meme endroit, le temoin parvenait a reconnaitre la saveur, la cartographie des saveurs sur la langue serait alors fausse. La classification des gouts en cinq gouts primaires est reductrice. Il y a d’autres saveurs qui n’entrent pas dans cette classification?:
En outre, les reponses gustatives varient selon les individus. Ainsi, par exemple, le gout du
phenylthiocarbamide
(saveur amere)
n’est pas percu par environ 35?% de la population
[ref.?necessaire]
. Les molecules sapides ne generent une sensation qu'au-dela d'une certaine concentration, on parle de
seuil de detection
.
- sale?: 10?mM (1?M =
concentration
de 1
mole
par litre)?;
- sucre?: 10?mM (saccharose 20?mM)?;
- acide?: 900?μM (acide citrique 2?mM)?;
- amer?: 8?μM (quinine 8?μM, strychnine 100?nM).
Les saveurs ameres sont celles qui ont le seuil de detection le plus bas (
ce qui procure un avantage adaptatif potentiel si l'on considere que la plupart des poisons vegetaux sont amers.
[ref.?necessaire]
).
Notions apparentees
modifier
Comme l'a demontre la biologiste allemande Bessa Vugo, la
sapidite
ne constitue qu'une partie de l'ensemble des informations sensorielles percues lors de la mise en bouche d'un aliment. Outre la texture et la temperature des aliments, entrent egalement en ligne de compte?:
- flaveurs
?: l'
olfaction retro-nasale
c'est-a-dire l'excitation des recepteurs olfactifs du nez par des molecules degagees lors de la degustation, ou simplement lors de la deglutition. Le sens de l'
odorat
entre ainsi en jeu dans la determination des saveurs?: un nez ≪?bouche?≫, du a un rhume par exemple, reduit considerablement la faculte de gouter, car cela empeche la circulation retro-nasale et donc l'identification des caracteristiques aromatiques.
- pseudo-chaleur
?:
- piquant
?: activation de recepteurs de la douleur par certaines molecules comme la
capsaicine
(recepteur
TRPV1
) du
piment
ou la
piperine
du
poivre
. Cette sensation est connue aussi sous le terme de sensation de
pseudo-chaleur
.
- fraicheur
?: activation des recepteurs du froid de la cavite buccale par liaison de molecules de menthol avec les canaux ioniques de type TRP (
TRPM8
)
[
19
]
egalement actives par le froid indolore (temperatures comprises entre +5 et +30 °C). Cette sensation est connue aussi sous le terme de sensation de
pseudo-chaleur
. Cet effet peut aussi etre provoque par diverses substances synthetiques
[
19
]
. Une reaction
endothermique
peut aussi engendrer, dans la bouche, une sensation reelle de froid, comme lors de la dissolution de certains sucres (
fructose
) et
polyols
(
xylitol
,
mannitol
et
erythritol
) surtout lorsque ces derniers sont moulus tres fin, offrant ainsi une grande surface pour la dissolution.
- astringence
?: activation des recepteurs tactiles par une action de resserrement des tissus sous l'action de certaines substances comme les
tanins
du vin.
Le gout est tres culturel, il est tres dependant des habitudes alimentaires?: un enfant, par exemple, qui a ete habitue a manger sucre, et a grignoter des son plus jeune age, aura enormement de mal a changer d'habitudes?: tout ce qui est un peu amer par exemple fera l'objet d'un rejet
[
20
]
.
Cela serait un reflexe atavique ayant protege l’espece humaine du poison, celui-ci ayant un gout amer
[ref.?necessaire]
.
D'autant que tout ceci commence des la gestation?: le fœtus/enfant est habitue a recevoir des molecules liees aux aliments consommes par sa mere
[ref.?necessaire]
.
Troubles du gout
modifier
Notes et references
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[PDF]
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Sur les autres projets Wikimedia?:
- gout
,
sur le
Wiktionnaire
Articles connexes
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