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L'insurrection
du Tyrol de 1809
"Lorsque
je pense aux merveilleuses vallees de l'Inn, et les effets qu'elle eurent sur moi, je
suis sur que les portes du paradis sont a l'entree des cascades...". Colonel
Lejeune.
Prologue
(Chronologie)
Les
raisons dune insurrection.
Le traite de Presbourg avait donne le Tyrol
a la Baviere. Ce Tyrol, associe depuis 1363 a la couronne des Habsbourg, et dont les
habitants vont mal vivre le transfert de leurs montagnes et vallees a la souverainete
bavaroise.
Dautant que le gouvernement de Munich,
dans sa volonte dimposer au pays des reformes, ne va rien faire pour se faire
aimer, faisant en fait ce que lAutriche navait jamais ose faire: se meler
des affaires interieures, politiques et militaires dun pays, certes different,
mais toujours loyal.
Si les changements sont, au debut, timides,
ils sintensifient en 1808, au moment de la promulgation dune nouvelle
constitution et de linstitution dune taxe municipale (chose totalement
nouvelle pour les tyroliens), destinee
a financer, en particulier, le stationnement
des troupes bavaroises sur le sol tyrolien ! Et dans sa soif de "modernisation",
le gouvernement bavarois va bientot imposer de multiples changements politiques et
administratifs avec une determination insouciante. Pour aller plus vite, des bavarois
remplacent des natifs du Tyrol aux postes administratifs. On va meme jusqua
changer les noms des anciennes regions administratives, et a enlever laigle rouge
tyrolien de lembleme du gouvernement. Pour le fier Tyrolien, une injure.
Mais ce nest pas tout. La Baviere ne
supporte pas lattachement profond de ses nouveaux "sujets" a la religion,
attachement quelle nest pas loin dassimiler a de la superstition, et
qui, en tous cas, est un obstacle a ses reformes. Alors, des mesures sont prises pour
dissoudre un grand nombre de monasteres et congregations religieuses, interdire les
processions, les pelerinages, autant de mesures qui, rapidement, amenent les tyroliens
a considerer les bavarois comme de veritables paiens. Bientot, on ne sera pas loin
dune veritable guerre de religions.
Comme si tout cela ne suffisait pas, les
nouveaux maitres modifient les regles de la conscription. Certes, celle-ci existait
deja, depuis un decret imperial de 1511, mais le meme decret exemptait le conscrit
de toute participation a un conflit en dehors des frontieres de leur pays. Les Habsbourg
avaient parfaitement respecte cette regle (durant les conflits de 1799, 1802, 1804 et
1805), et meme le gouvernement bavarois, jusquen 1808. Les besoins de Napoleon en
soldats se font alors plus pressants, et, en 1809, la guerre montrant de nouveau le bout
de son nez, les autorites locales tyroliennes sont informees dune levee de 1000
conscrits. Cette nouvelle est accueillie comme un veritable outrage par la population,
qui se dresse contre une telle mesure. Du cote de lAutriche, parviennent des signes
dencouragement a la defection (des unites de deserteurs tyroliens seront
constituees). Des confrontation armees se produisent. En mars, le gouvernement bavarois
doit abandonner, ce qui affaibli dautant plus son autorite, mais, en contrepartie,
raffermi la confiance des tyroliens.
Enfin, si lon peut dire, les
fonctionnaires de Munich ny vont pas avec delicatesse, face a ces tyroliens
quils considerent comme des superstitieux. Leur arrogance ne les fait pas aimer, et
va laisser des traces profondes, dont les evenements ulterieurs vont temoigner.
Les premices.
A Vienne, on regarde avec sympathie un
possible soulevement populaire au Tyrol, comme pouvant contribuer a une victoire sur
Napoleon. On nest pas sans faire un parallele avec les mouvements en Allemagne, en
esperant quun soutien autrichien amenera la Prusse aux cotes de lAutriche.
On considere aussi laspect
strategique: le Tyrol peut devenir un obstacle serieux aux communications entre les
armees ennemies dAllemagne et dItalie, et gener leur eventuelle retraite
(car lon va vaincre !). A la cour de Vienne, larchiduc Jean est la voix des
tyroliens en quete de leur rattachement a lAutriche.
Au Tyrol, des 1807, des reunions sont
tenues, et lon percoit deja le role que les aubergistes vont tenir dans les
evenements a venir. Rien detonnant: chez eux, on peut se reunir sans attirer
lattention, et puis ce sont eux qui, a cote des paysans, ont le plus a souffrir
de la politique economique gouvernemental. Des contacts permanents sont etablis avec
Vienne.
Et lorsque, dans le courant de 1808, une
nouvelle guerre apparait probable, le Tyrol est inclus dans les preparatifs
strategiques, sous la direction de larchiduc Jean et du secretaire a la Cour et
directeur des Archives Nationales, Josef von Hormayr, qui va devenir le porte-parole de ce
Tyrol, de ces "
falaises bleues et ces forets noires, et le ciel bleu clair
au-dessus de lInn, de la Drau et de lEisack, auquel je ne peux penser sans
douleur et soif de vengeance"
Fin janvier 1809 (la Cour dAutriche
sest deja prononcee pour une nouvelle guerre) trois personnalites tyroliennes se
rendent a Vienne, a linvitation de larchiduc Jean: les
aubergistes Andreas Hofer et Peter Huber, et le torrefacteur Nessing (ce dernier depuis
longtemps en contact avec Vienne). Elles reclament une intervention rapide, dautant
que le Tyrol nest pour linstant protege que par 2500 hommes. De retour au
pays, les trois hommes continuent leur travail de sape, et Andreas Hofer se
dessine deja comme le leader inconteste de la rebellion en eveil.
De son cote, Hormayr nest pas inactif,
et profite des deboires de Napoleon en Espagne et de ses demeles avec le pape, pour
developper sa propagande anti-napoleonienne. Il est un fervent partisan de la guerre
populaire et ne voit que des avantages a un conflit dans les montagnes. Toutefois,
larchiduc Charles, de son cote, ne regarde que dun oeil suspect une action de
larmee au cote dinsurges. Lavenir lui donnera en partie raison.
Et la Baviere dans tout cela ? Longtemps il
fut dit que linsurrection fut pour elle une totale surprise. En fait, les signaux
existaient et des responsables de haut rang (dont lambassadeur de Baviere a
Vienne) confirmaient les nouvelles venues du Tyrol.
Et pourtant, au moins du point de vue
militaire, aucune mesure nest prise, sans doute en raison de la dependance du
gouvernement de Munich vis-a-vis de Napoleon. Or celui-ci ne croit pas a une
intervention autrichienne de ce cote et le Tyrol ne fait pas partie de ses plans de
campagne: cest sur le Danube que tout doit se decider et les troupes bavaroises
formeront une partie de larmee dAllemagne dans ce secteur
. "Laissons
les Autrichiens faire ce quils veulent au Tyrol. Je ne veux pas me laisser
entrainer dans une guerre de montagne"
. Seule concession: les positions
frontalieres (en particulier la forteresse de Kufstein) sont renforcees.
Le decor est plante, la tragedie peut
commencer. Les trois coups retentissent le 9 avril, lorsque les troupes autrichiennes
franchissent la frontiere, accueillis avec enthousiasme par la population. Cette
tragedie va avoir trois actes (pour les tyroliens trois
liberations
, pour les
bavarois, trois
offensives
..) et un epilogue:
Acte I (avril-mai): premiere tentative de
liberation du Tyrol et premiers combats pour Innsbruck (11-12 avril), qui reste aux mains
des insurges, pour etre bientot repris par les bavarois (mi-mai)
Acte II (mai-juillet): Napoleon ayant
appele a lui une partie des troupes occupant le Tyrol, les insurges reprennent
Innsbruck (25-29 mai) et menent de nombreuses offensives dans toute cette partie de la
Baviere. Pour la deuxieme fois, le Tyrol est libere.
Acte III (aout-octobre): Napoleon ayant
maintenant les mains libres, peut consacrer plus de forces au probleme tyrolien. Mais ses
troupes echouent de nouveau a Innsbruck (3e combats du Bergisel - 13 aout), et le 18 le
Tyrol est "libre". Pour peu de temps
.
Epilogue: la paix de Schonbrunn etant
signee (14 octobre), Napoleon ordonne den finir. Le 1er novembre, nouvel
affrontement au Bergisel, qui voit cette fois-ci les tyroliens definitivement defaits.
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